LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL À PROPOS DE LA RATIONALISATION DES MOYENS DES DEUX FORCES
- La police et la gendarmerie nationales ont accompli des progrès très substantiels sur la voie de la coopération , de l'échange d'information et de la mutualisation des moyens, au cours des dernières années, notamment sous l'effet bénéfique de la LOLF et de la création de la mission commune « Sécurité ». - L'objectif consiste désormais à dépasser définitivement l'écueil inhérent au dualisme « policier » : le risque de doublons , de non-interopérabilité et de concurrence exacerbée. - La poursuite les ajustements territoriaux entre les forces de police et les unités de gendarmerie est incontournable. Ces ajustements doivent, notamment, passer par le transfert en zone police de communes au caractère urbain avéré (aussi bien en termes de population que de type de délinquance) et, corrélativement, par le transfert en zone gendarmerie des zones isolées à plus faibles populations. - La stratégie d'achats groupés et les efforts de mutualisation ont, d'ores et déjà, permis de dégager des économies substantielles au sein de la mission « Sécurité ». - Un nombre croissant d'actions de formation initiale et continue doivent être menées en commun entre la police et la gendarmerie. - L'émergence d'un pôle unique de compétence « immobilier » au sein du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales est souhaitable. - De même, des économies d'échelle pourraient être obtenues en réunissant l'ensemble des structures de police et de gendarmerie scientifique au sein d'un même pôle . - Le mouvement de rationalisation du renseignement , engagé avec la création de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), doit pouvoir se poursuivre par une unification véritablement aboutie de cette fonction, actuellement partagée entre la police et la gendarmerie nationales. - Il est possible de s'interroger sur la nécessité de conserver deux forces d'intervention distinctes mais aux missions quasi identiques. L'optimisation des crédits budgétaires et des moyens humains consentis n'imposerait-elle pas un rapprochement plus complet du RAID et du GIGN ? - Votre rapporteur spécial estime nécessaire de poursuivre la réflexion autour d'un principe de spécialisation des deux forces en fonction de périmètres de compétences distincts. Seul ce scénario lui paraît, en effet, susceptible de dégager des gains d'efficacité substantiels, ainsi que des économies d'emplois supplémentaires. |
III. LA RATIONALISATION DES MOYENS DES DEUX FORCES : DONNER LA PRIORITÉ À LA DISPARITION DES DOUBLONS
Sur la voie de la coopération, de l'échange d'information et de la mutualisation des moyens, la police et la gendarmerie nationales ont accompli des progrès très substantiels au cours des dernières années, notamment sous l'effet bénéfique de la LOLF et de la création de la mission commune « Sécurité ». Votre rapporteur spécial tient à saluer ce rapprochement , dont les effets se font sentir tous les jours sur le terrain et qui se révèle particulièrement fructueux en termes d'efficacité accrue et d'économies de moyens.
Le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, depuis le 1 er janvier 2009, marque une nouvelle étape dans ce processus. Il emporte un certains nombre de conséquences, dont il s'agit de prendre toute la mesure.
Il convient en effet de tirer désormais profit de toutes les nouvelles possibilités de mutualisations qu'il offre, toujours dans le but d'une plus grande efficacité du service rendu et de la réalisation d'économies de moyens.
L'objectif consiste à dépasser l'écueil inhérent au dualisme « policier » : le risque de doublons, de non interopérabilité et de concurrence exacerbée .
A. PARVENIR À UNE PLUS GRANDE COHÉRENCE DANS LA DISTRIBUTION DES FORCES DE SÉCURITÉ SUR LE TERRITOIRE
L'efficacité des forces de sécurité est largement conditionnée par leur répartition sur le terrain. A cet égard, on ne peut contester d'indéniables évolutions en faveur d'une plus grande rationalité dans la distribution des forces sur le territoire, mais des progrès peuvent et doivent encore être accomplis .
1. Revoir les contours des zones de police et de gendarmerie
La recherche d'une performance accrue en sécurité intérieure passe par la définition de secteurs géographiques homogènes confiés à la police et à la gendarmerie. Si des opérations de redéploiement entre les deux forces ont déjà été réalisées entre 2003 et 2006, ces redéploiements doivent se poursuivre.
a) Une réponse coordonnée aux sollicitations de la population
Le décret n° 96-828 du 19 septembre 1996 relatif à la répartition des attributions et à l'organisation de la coopération entre la police nationale et la gendarmerie nationale fixe les secteurs de responsabilité des deux forces en matière de sécurité publique et détermine les conditions de coordination de l'emploi des forces mobiles.
Dans ce schéma, il revient aux préfets la responsabilité de la coordination des actions de la police et de la gendarmerie en matière de paix et de sécurité publiques. L'essentiel de la réponse aux sollicitations de la population et la garantie du maintien de l'autorité de l'Etat sont donc répartis ou coordonnés de manière globale.
b) Les redéploiements opérés dans le cadre de la LOPSI 1
Les redéploiements décidés dans le cadre de la LOPSI 1 15 ( * ) ont eu pour objectifs d'établir une plus grande cohérence entre les dispositifs de la police et de la gendarmerie.
Au total, les opérations menées de 2003 à 2006 se sont traduites pour la gendarmerie par la reprise de 41 circonscriptions de sécurité publique (CSP) et de 2 postes de police. Ces transferts ont concerné 106 communes et 630.192 habitants.
Parallèlement, le transfert de 218 communes , représentant 847.555 habitants, a été conduit vers la zone police (soit un transfert net de 217.363 habitants en zone police).
Pour mener à bien cette réorganisation des forces de sécurité sur le territoire, 2.486 postes supplémentaires ont été affectés en zone police , 1.544 postes ayant été dégagés des anciennes zones police et 942 nouveaux postes ayant été créés par la LOPSI 1.
c) La nécessité de poursuivre ce mouvement d'adaptation
Les évolutions sociologiques et économiques des territoires appellent aujourd'hui la mise en oeuvre de nouvelles étapes de redéploiement pour continuer l'adaptation des secteurs de responsabilité de chaque force aux réalités des bassins de vie.
Il s'agit notamment de parvenir, au sein de chaque force, à ce que le premier niveau de commandement territorial atteigne une taille critique permettant une manoeuvre opérationnelle garantissant la qualité de la réponse apportée aux attentes de la population.
Ainsi, la police nationale a-t-elle vocation à s'inscrire dans une logique de police territoriale d'agglomération , tandis que la gendarmerie nationale doit faire porter ses efforts en vue d'un meilleur contrôle des flux sur les territoires placés sous son autorité.
La création d'une « police d'agglomération » à l'échelle de Paris et de sa petite couronne illustre cette logique . Mais de nouvelles opérations de redéploiement pourraient être conduites, en garantissant dans les zones concernées une qualité de l'offre de sécurité au moins équivalente, selon le mode d'organisation et de fonctionnement propre à chacune des deux forces.
En outre, par delà l'échange de territoires, la réflexion doit s'étendre à la mise en cohérence opérationnelle de la responsabilité de certaines infrastructures : axes autoroutiers, ports, aéroports, établissements pénitentiaires...
Votre rapporteur spécial estime incontournable de poursuivre les ajustements territoriaux entre les forces de police et les unités de gendarmerie. Ces ajustements doivent notamment passer par le transfert en zone police de communes au caractère urbain avéré (aussi bien en termes de population que de type de délinquance) et, corrélativement, par le transfert en zone gendarmerie des zones isolées à plus faibles populations . En effet, d'ici à 2012, la zone gendarmerie devrait, à périmètre constant, connaître une augmentation de 1,27 million d'habitants, tandis que la population en zone police devrait demeurer stable.
2. Les avancées prévues par la RGPP
Le Conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP) du 12 décembre 2007 a non seulement retenu le principe de placer la gendarmerie sous l'autorité organique et fonctionnelle du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, mais aussi de poursuivre le processus de redéploiement police / gendarmerie.
A partir du constat que « l'utilisation et la répartition (des forces de sécurité) sur le territoire ne sont pas optimales », il est ainsi prévu d'adapter, à l'horizon 2012, les zones respectives d'intervention de la police et de la gendarmerie. L'idée directrice consiste à permettre à la police d'exercer ses compétences sur des ensembles urbains plus vastes et cohérents, et de réserver les autres espaces à la gendarmerie. Ainsi, un groupe de travail conjoint police / gendarmerie a-t-il été constitué et travaille-t-il sur des ajustements territoriaux.
Alors que les précédents redéploiements avaient été principalement guidés par l'ambition de mettre un terme à des « anachronismes territoriaux », il s'agit désormais d'obtenir une plus grande convergence entre la police et la gendarmerie . Dans cette optique, la priorité doit être donnée à l'intégration en zone police des communes formant le prolongement naturel d'agglomérations plus importantes et appartenant à un même bassin urbain. A l'inverse, dès lors que cette condition n'est plus remplie et que la typologie de la délinquance ne correspond plus aux modes d'organisation et de fonctionnement de la police nationale, la question du transfert de certains territoires en zone gendarmerie doit être posée.
L'objectif est de parvenir à une homogénéisation accrue des zones de compétence respectives. Cette homogénéisation représente le meilleur gage de gains de mutualisation futurs, via la prise en charge d'une population et d'une criminalité globalement plus importantes à moyens constants , conformément à la dynamique proposée par la RGPP en matière de rationalisation et d'optimisation du potentiel opérationnel des forces de sécurité.
Dans cette perspective, votre rapporteur spécial rappelle que ces nouveaux ajustements territoriaux devront, naturellement, tenir compte des contraintes liées à la réaffectation des personnels et au parc immobilier existant .
* 15 Loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI).