B. LA MISE EN OEUVRE DE LA CONVENTION FISCALE DE 1964
Aux termes de l'article 11.2.c de la convention modifiée, est éligible au régime des travailleurs frontaliers la personne « résident d'un Etat contractant qui exerce son activité dans la zone frontalière de l'autre Etat contractant et qui a son foyer d'habitation permanent dans la zone frontalière du premier Etat. » Aucune exception ou dérogation à la règle n'est prévue par la convention.
Alors que l'exercice d'une partie des activités professionnelles hors de la zone frontalière faisait perdre le bénéfice du régime puisque que la convention ne prévoyait pas d'exception, aucune définition de la notion de « sortie de zone » n'était donnée.
Les autorités belges ont pour leur part, de 1998 à 2004, prévu la possibilité pour un frontalier de sortir jusqu'à quarante-cinq jours par an de la zone, dans le cadre de son activité professionnelle, sans perdre le bénéfice du régime.
Puis en 2004, une nouvelle interprétation des autorités belges s'est progressivement affirmée, aux termes de trois circulaires 2 ( * ) . La première a spécifié que l'activité devait être exercée de manière exclusive dans la zone frontalière de façon à interdire toute sortie. En conséquence, la qualité de travailleur frontalier est perdue dès lors que celui-ci quitte la zone frontalière, ne serait-ce que quelques instants, dans le cadre de son activité professionnelle. La seconde a confirmé la suppression de la règle des quarante-cinq et admet par tolérance quelques sorties exceptionnelles destinées notamment au besoin de formation sur deux journées.
Cette nouvelle approche s'est accompagnée de nombreux contrôles fiscaux ainsi que de l'entrée en vigueur depuis le 1 er septembre 2006 d'une obligation déclarative incombant aux employeurs de salariés bénéficiant du régime de travailleur frontalier. Les contrôles et cette nouvelle obligation ont conduit de nombreux employeurs à appliquer systématiquement à leurs employés français la retenue à la source sur salaire, de l'ordre de 25 %, prévue par le droit belge.
Ce prélèvement systématique d'une retenue a entraîné une baisse brutale des salaires nets perçus par certains frontaliers . Les redressements subis ont créé de fortes tensions au sein de la communauté des travailleurs frontaliers. Celle-ci a mobilisé les élus, tandis que la Fédération des entreprises belges a fait part au Ministre belge de ses préoccupations.
Cette interprétation par les autorités belges de l'article précité visait non seulement à lutter contre les domiciliations abusives mais également à inciter la partie française à accepter un cycle de négociations tendant à revoir les modalités du régime.
En effet, le régime présente pour les autorités belges un coût budgétaire important lié à la fiscalisation des salaires des travailleurs concernés en France . En outre, l'écart d'imposition entre la Belgique et la France permet aux travailleurs frontaliers résidant en France d'accepter des salaires bruts moins élevés. Enfin, les autorités belges tendent à lutter contre une fraude importante. De nombreux salariés belges se domicilient fictivement en France ou sortent à dessein de la zone frontalière française où ils exercent leur activité, afin d'échapper à l'impôt belge sur le revenu.
C'est pourquoi, la Belgique a obtenu la renégociation des régimes frontaliers similaires avec les Pays-Bas et le Luxembourg.
Dès 2006, confrontée à la détérioration de la situation des travailleurs frontaliers résidant en France, l'administration fiscale française a sollicité l'ouverture de discussions afin de définir d'un commun accord des modalités pratiques raisonnables de nature à permettre aux travailleurs frontaliers, de part et d'autre, de bénéficier effectivement des dispositions de la convention.
Un premier projet a été signé le 13 décembre 2007 . Répondant à la mobilisation des entreprises flamandes, principaux employeurs des frontaliers français, pour le maintien du régime des travailleurs, la partie belge a exprimé, en avril 2008, le souhait de modifier l'avenant afin de repousser au 31 décembre 2011 la suppression du régime des travailleurs frontaliers pour de nouveaux entrants, au lieu du 31 décembre 2008.
Le nouvel avenant a ainsi pu être signé le 12 décembre 2008.
* 2 Circulaire de 14 janvier 2004, 25 mai 2005 et 11 août 2006.