CHAPITRE VI - DISPOSITIONS DIVERSES RELATIVES À LA PROFESSION DE NOTAIRE
Dans le texte qu'elle a adopté, votre commission a supprimé le qualificatif « diverses » de cet intitulé.
Article 17 (art. 1er quater nouveau de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat) - Obligation de formation continue
Cet article érige la formation continue des notaires en obligation déontologique, entérinant ainsi notamment la pratique de la Chambre interdépartementale des notaires de Paris.
Cette obligation serait prévue par un nouvel article 1 er quater de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat.
Les dispositions proposées constituent le décalque de celles de l'article 13 de la proposition de loi pour la formation continue des huissiers de justice (article 3 bis nouveau de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers), qui s'inspirent elles-mêmes largement de la rédaction de l'article 14-2 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, applicable à la profession d'avocat.
Pour les raisons exposées dans l'examen de l'article 13, votre commission a décidé de confier au Conseil supérieur du notariat le soin de déterminer les modalités selon lesquelles l'obligation de formation continue des huissiers de justice s'accomplit .
Elle a adopté l'article 17 de la proposition de loi ainsi modifié , qui devient l' article 19 du texte de ses conclusions .
Article 18 - (art. 5 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat) - Instituts des métiers du notariat
Cet article modifie l'article 5 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat, qui concerne les attributions du conseil régional des notaires, afin de tirer la conséquence de la transformation des écoles de notariat en instituts des métiers du notariat, opérée par le décret n° 2007-1232 du 20 août 2007 modifiant le décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire.
Il y est actuellement indiqué que le conseil régional , siégeant en comité mixte, règle toutes questions concernant le fonctionnement des écoles de notariat existant dans le ressort, les institutions et oeuvres sociales intéressant le personnel des études.
Le conseil régional des notaires, établissement d'utilité publique, représente l'ensemble des notaires du ressort de la cour d'appel en ce qui touche à leurs droits et intérêts communs. Ses autres attributions consistent à :
- prévenir ou concilier tous différends d'ordre professionnel entre les chambres des notaires du ressort de la cour d'appel ou entre les notaires du ressort n'exerçant pas dans le même département et trancher, en cas de non-conciliation, ces litiges par des décisions qui sont immédiatement exécutoires ;
- donner son avis sur les règlements établis par les chambres des notaires du ressort de la cour d'appel ;
- désigner cinq notaires pour faire partie de la commission chargée, au chef-lieu de la cour d'appel, de faire subir l'examen professionnel de notaire à tous les aspirants du ressort, les membres composant le conseil d'administration de la caisse régionale de garantie, ainsi que le délégué appelé à faire partie du conseil supérieur ;
- remplir les fonctions réservées à la commission de contrôle de la comptabilité des notaires ;
- assurer dans le ressort l'exécution des décisions prises par le conseil supérieur.
Il convient en réalité, comme l'ont suggéré les représentants du Conseil supérieur du notariat à votre rapporteur, de supprimer purement et simplement la compétence du conseil régional pour régler les questions concernant le fonctionnement des instituts des métiers de notariat car , depuis le décret précité du 20 août 2007, ces établissements d'utilité publique sont placés sous l'autorité du Centre national de l'enseignement professionnel notarial et sous le contrôle du garde des sceaux, ministre de la justice 72 ( * ) .
Les 17 instituts des métiers du notariat 73 ( * ) ont pour missions principales d'assurer l'enseignement à plein temps dispensé en deux années préparant au brevet de technicien supérieur « notariat », d'apporter un concours, dans le cadre de conventions passées avec les universités, à la formation sanctionnée par la licence professionnelle « métiers du notariat », d'assurer une formation d'une année sanctionnée par le diplôme de l'institut des métiers du notariat.
Votre commission a adopté l'article 18 de la proposition de loi ainsi modifié , qui devient l' article 20 du texte de ses conclusions .
Article 19 (art. 6 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat) - Négociation collective
Cet article institue une compétence concurrente, en matière de négociation collective, entre le Conseil supérieur du notariat et les syndicats professionnels ou groupements d'employeurs représentatifs.
L'article 6 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat dispose actuellement que le Conseil supérieur du notariat 74 ( * ) , siégeant en comité mixte 75 ( * ) , règle les questions d'ordre général concernant le recrutement, la formation des clercs et employés, la discipline, l'admission au stage des aspirants au notariat, l'organisation des écoles de notariat, la création, le fonctionnement et le budget des oeuvres sociales intéressant le personnel des études, les conditions de travail dans les études et, sous réserves de dispositions législatives ou réglementaires particulières, les salaires et les accessoires du salaire . »
A l'instar de la Chambre nationale des huissiers de justice, il détient une compétence exclusive en matière de négociation collective, contraire tant au Préambule de la Constitution de 1946 qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à la convention n° 87 de l'organisation internationale du travail, et a signé avec les organisations représentatives des salariés des notaires une convention collective nationale du notariat du 8 juin 2001, étendue par un arrêté du 25 février 2002.
Les modifications proposées consistent :
- à prévoir que le Conseil supérieur du notariat et les syndicats professionnels ou groupements d'employeurs représentatifs négocient les conventions et accords collectifs de travail ;
- à modifier en conséquence les attributions du Conseil supérieur du notariat lorsqu'il siège en comité mixte afin qu'il donne désormais un simple avis sur les questions relevant de la négociation collective ;
- à opérer une coordination avec la transformation des écoles de notariat en instituts des métiers du notariat.
Pour les raisons indiquées lors de l'examen de l'article 15 de la proposition de loi, relatif aux attributions de la Chambre nationale des huissiers de justice, et comme les représentants du Conseil supérieur du notariat l'ont fait valoir à votre rapporteur lors de leur audition, il convient de prévoir que la compétence du Conseil supérieur du notariat, siégeant en comité mixte, se limite désormais au règlement des questions d'ordre général concernant la création, le fonctionnement et le budget des oeuvres sociales intéressant le personnel des études .
Votre commission a adopté l'article 19 de la proposition de loi ainsi modifié , qui devient l' article 21 du texte de ses conclusions .
Article 20 (art. 7 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat) - Associations de la loi de 1901 et syndicats professionnels
Cet article réécrit l'article 7 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat afin de prévoir que les notaires peuvent former entre eux non seulement des associations sous le régime de la loi du 1 er juillet 1901 mais également des syndicats professionnels au sens de l'article L. 2131-1 du code du travail.
Les dispositions proposées constituent le décalque de celles prévues par l'article 16 de la proposition de loi pour les huissiers de justice. Elles appellent les mêmes observations, étant précisé qu'il existe déjà actuellement deux syndicats de notaires : le syndicat des notaires de France et le syndicat national des notaires.
Sous le bénéfice de ces observations, votre commission a adopté l'article 20 de la proposition de loi sans modification , qui devient l' article 22 du texte de ses conclusions .
Article 21 (art. 311-20 du code civil et art. L. 2141-10 du code de la santé publique) - Recueil du consentement des membres d'un couple désirant bénéficier d'une procréation médicalement assistée avec recours aux gamètes d'un tiers
Suivant la recommandation n° 38 de la commission sur la répartition des contentieux présidée par le recteur Serge Guinchard, cet article confère au notaire une compétence exclusive pour le recueil du consentement des membres d'un couple désirant bénéficier d'une procréation médicalement assistée avec recours aux gamètes d'un tiers .
Aux termes des articles 311-20 du code civil et L. 2141-10 du code de la santé publique, ce consentement peut actuellement être recueilli, soit par le président du tribunal de grande instance ou son délégué, soit par un notaire.
Le rôle du magistrat ou du notaire se borne à vérifier le consentement éclairé des deux membres du couple -il ne peut porter aucune appréciation sur les conditions de fond requises par les textes- et à les informer des conséquences de leur acte au regard de la filiation et de l'impossibilité de mettre en cause la responsabilité du donneur.
Selon l'exposé des motifs de la proposition de loi : « Il ne s'agit donc pas d'une mission mettant en jeu des attributions juridictionnelles. Dès lors, les notaires apparaissent particulièrement qualifiés pour l'exercer seuls, leurs écrits constituant un moyen de preuve particulièrement fiable. Comme le fait observer la commission sur la répartition des contentieux, le montant de leur tarif, actuellement fixé à 73 euros , « n'apparaît pas de nature à constituer une entrave à l'accès à la procréation médicalement assistée » même si, « en tant que de besoin, une prise en charge totale ou partielle des frais par l'État pourrait être envisagée. » »
On recense plus de 120.00 tentatives de procréation médicalement assistée chaque année.
Lors de leur audition par votre rapporteur, les représentants de l'Union syndicale des magistrats se sont opposés aux dispositions proposées pour trois raisons principales :
- le droit de la filiation n'est pas le domaine naturel d'intervention des notaires ;
- l'intervention du juge est gratuite ;
- enfin et surtout, cette intervention du juge s'inscrit dans un domaine plus large de compétences concernant le don d'organes ou de moelle osseuse 76 ( * ) (article L. 1231-1 du code de la santé publique) ou l'autorisation de l'accueil d'un embryon 77 ( * ) (article L. 2141-6 du code de la santé publique).
Selon eux : « Toutes ces autorisations prises en application du code de la santé publique forment un groupe de compétence qu'il paraît inutile de scinder, certains relevant de l'activité des notaires, les autres restant de la compétence judiciaire et ce d'autant plus que l'intervention des notaires, au choix des parties, est aujourd'hui possible même si rare dans la pratique. Pourquoi imposer aux candidats à la P.M.A. une procédure dont ils ne veulent pas actuellement ? »
Les représentantes du Syndicat de la magistrature ont quant à elles fait valoir, outre le coût que cette réforme induirait pour les usagers du service public de la justice, que le consentement à la procréation médicalement assistée constituait un événement solennel, justifiant aux yeux des intéressés qu'il soit recueilli au palais de justice par un magistrat.
Sensible à ces arguments, votre commission a décidé de supprimer l'article 21 de la proposition de loi.
Article 22 (art. 348-3, 345 et 361 du code civil) - Recueil du consentement à l'adoption
Suivant la recommandation n° 37 de la commission sur la répartition des contentieux , le 1° de cet article modifie l'article 348-3 du code civil afin de décharger les greffiers en chef des tribunaux d'instance de leur tâche de recueil du consentement à l'adoption , qu'ils partagent actuellement avec les notaires, les agents diplomatiques ou consulaires français et le service de l'aide sociale à l'enfance lorsque l'enfant lui a été remis.
En effet, comme le souligne l'exposé des motifs de la proposition de loi : « leur rôle se limite à vérifier le consentement éclairé des personnes qui se présentent devant eux -ils ne peuvent porter aucune appréciation sur les conditions de fond requises par les textes. À l'avenir, les intéressés résidant en France devraient donc exclusivement s'adresser à un notaire, le tarif actuel étant de 25,55 euros . »
Aux termes de ce même article 348-3 du code civil, le consentement des père et mère de l'enfant -à défaut, du conseil de famille- à l'adoption peut être rétracté pendant deux mois. Si à l'expiration du délai de deux mois, le consentement n'a pas été rétracté, les parents peuvent encore demander la restitution de l'enfant à condition que celui-ci n'ait pas été placé en vue de l'adoption. Si la personne qui l'a recueilli refuse de le rendre, les parents peuvent saisir le tribunal qui apprécie, compte tenu de l'intérêt de l'enfant, s'il y a lieu d'en ordonner la restitution. La restitution rend caduc le consentement à l'adoption.
En outre, les 2° et 3° de cet article prévoient de spécifier à l'article 345 et à l'article 361 du code civil, d'une part, que le consentement personnel de l'adopté de plus de treize ans est requis , en cas d'adoption simple comme en cas d'adoption plénière, d'autre part, que ce consentement peut être rétracté jusqu'au prononcé de l'adoption .
Rappelons que, prononcée par le tribunal de grande instance, l'adoption permet la création d'un lien de filiation entre l'adopté et une ou plusieurs personnes qui ne sont pas ses parents par le sang. Elle ne constitue donc pas un mode d'établissement mais opère un transfert de la filiation.
Ouverte soit aux époux non séparés de corps, mariés depuis plus de deux ans ou âgés l'un et l'autre de plus de vingt-huit ans 78 ( * ) , soit à une personne seule âgée de plus de vingt-huit ans 79 ( * ) , elle peut revêtir deux formes.
L'adoption plénière, qui ne peut en principe concerner qu'un mineur de quinze ans 80 ( * ) et devient irrévocable, rompt tous les liens de filiation avec la famille d'origine et donne lieu à établissement d'un nouvel acte de naissance après annulation de l'acte initial. L'adopté prend le nom que lui donnent ses parents adoptifs et peut également changer de prénom. S'il est étranger, il acquiert de plein droit la nationalité française.
L'adoption simple, permise quel que soit l'âge de l'adopté et révocable, crée un lien avec le ou les adoptants tout en laissant subsister ceux qui existent entre l'adopté et sa famille d'origine -l'adopté peut ainsi hériter dans les deux familles et ajoute à son nom celui de l'adoptant 81 ( * ) . Elle ne confère pas de plein droit la nationalité française à l'adopté étranger mais lui permet de l'acquérir par simple déclaration devant le juge d'instance durant sa minorité.
Les adoptions d'enfants nationaux, environ 800 par an, sont aujourd'hui dans la proportion de 1 pour 5 adoptions internationales, alors que les premières étaient sensiblement égales aux secondes en 1985 (1.700 adoptions nationales et internationales). Depuis quelques années on observe en effet une diminution à la fois du nombre des pupilles de l'Etat, passé de 7 693 à 2 504 entre 1987 et 2005, et du nombre des pupilles de l'Etat présentés à l'adoption, passé de 1 424 à 841 au cours de cette période 82 ( * ) .
Sous le bénéfice de ces observations, votre commission a adopté l'article 22 de la proposition de loi sans modification , qui devient l' article 23 du texte de ses conclusions .
* 72 Article 86-6 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire.
* 73 Article 86-7 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 : « Sur proposition du Conseil supérieur du notariat et après avis du Centre national de l'enseignement professionnel notarial, le garde des sceaux, ministre de la justice, fixe le nombre, le siège et le ressort des instituts des métiers du notariat. »
* 74 Etablissement d'utilité publique, le Conseil supérieur du notariat représente l'ensemble de la profession auprès des pouvoirs publics. Il prévient ou concilie tous différends d'ordre professionnel entre les chambres des notaires ou entre les notaires ne relevant pas du même conseil régional. Il tranche, en cas de non-conciliation, ces litiges par des décisions qui sont exécutoires immédiatement. Il organise et règle le budget de toutes les oeuvres sociales intéressant les notaires. Il établit son budget et en répartit les charges entre les conseils régionaux. Il donne son avis chaque fois qu'il en est requis par le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les questions professionnelles entrant dans ses attributions.
* 75 Article 2 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 : « Chaque chambre des notaires, chaque conseil régional, et le conseil supérieur, en adjoignant à leur bureau un nombre égal de clerc ou d'employés, siège en comité mixte. »
* 76 Le donneur, préalablement informé par un comité d'experts des risques qu'il encourt et des conséquences éventuelles du prélèvement, doit exprimer son consentement devant le président du tribunal de grande instance ou le magistrat désigné par lui (en cas d'urgence, le procureur de la République), qui s'assure au préalable que le consentement est libre et éclairé et que le don est conforme aux conditions légales.
* 77 L'accueil d'un embryon par un couple, qui déroge au principe de l'interdiction du double don de gamètes, est subordonné à une décision de l'autorité judiciaire après réception du consentement écrit du couple demandeur : le juge doit s'assurer que le couple remplit toutes les conditions légales et fait procéder à une enquête permettant d'apprécier les conditions d'accueil de l'enfant sur les plans familial, éducatif et psychologique. Cette procédure s'inspire de l'enquête qui conditionne la délivrance de l'agrément pour l'adoption.
* 78 Article 343 du code civil.
* 79 Article 344 du code civil.
* 80 Article 345 du code civil. L'expression signifie que l'adopté doit être âgé de moins de seize ans.
* 81 Le tribunal peut décider, sur demande de l'adoptant, que l'adopté ne portera que le nom de l'adoptant.
* 82 Ce sont essentiellement l'âge des pupilles, leur état de santé ou leur handicap, ou encore leur situation en fratrie qui expliquent aujourd'hui leur non-placement en vue de l'adoption.