c) Titre III - Manipulations de marché
Les manipulations de marché comprennent les manipulations de cours et la diffusion d'une fausse information. Le titre III précise également les modalités des « safe harbours » qui font bénéficier certaines pratiques de marché d'une présomption de légitimité, ainsi qu'il a été précédemment indiqué.
(1) Les manipulations de cours
L'article 631-1 pose un principe général d'abstention de procéder à des manipulations de cours . Celles-ci sont définies dans les mêmes termes que le point 2 de l'article premier de la directive-cadre du 28 janvier 2003. Deux principaux types d'opérations sont susceptibles de constituer une manipulation de cours :
« 1° Le fait d'effectuer des opérations ou d'émettre des ordres :
« a) Qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur l'offre, la demande ou le cours d'instruments financiers ou ;
« b) Qui fixent, par l'action d'une ou de plusieurs personnes agissant de manière concertée, le cours d'un ou plusieurs instruments financiers à un niveau anormal ou artificiel , à moins que la personne ayant effectué les opérations ou émis les ordres établisse la légitimité des raisons de ces opérations ou de ces ordres et leur conformité aux pratiques de marché admises sur le marché réglementé concerné ».
Il convient ici de relever que le champ du régime administratif de la manipulation de cours ne concerne que les seules cotation et négociation sur un marché réglementé , et n'envisage donc pas les autres modes d'exécution reconnus par la directive 2004/39/CE relative aux marchés d'instruments financiers (cf. infra IV. C.) ;
« 2° Le fait d'effectuer des opérations ou d'émettre des ordres qui recourent à des procédés donnant une image fictive de l'état du marché ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice .
« En particulier, constituent des manipulations de cours :
« a) Le fait, pour une personne ou pour plusieurs personnes agissant de manière concertée, de s'assurer une position dominante sur le marché d'un instrument financier, avec pour effet la fixation directe ou indirecte des prix d'achat ou des prix de vente ou la création d'autres conditions de transaction inéquitables ;
« b) Le fait d'émettre au moment de l'ouverture ou de la clôture, ou le cas échéant lors du fixage, des ordres d'achat ou de vente d'instruments financiers du marché ayant pour objet d'entraver l'établissement du prix sur ce marché ou pour effet d'induire en erreur les investisseurs agissant sur la base des cours concernés ».
L'article 631-3 complète les critères d'analyse par l'AMF de ces pratiques de marché potentiellement trompeuses par deux indices , qui ne sont pas en eux-mêmes constitutifs d'une manipulation de cours et ont trait à la diffusion, avant ou après les opérations en cause, d'informations, de travaux de recherche ou de recommandations faux ou biaisés.
L'article 631-2 du règlement général reprend in extenso la liste des critères de marché de l'article 3 de la directive d'application 2003/124/CE du 22 décembre 2003 qui sont analysés par l'AMF pour apprécier la présence d'une manipulation de cours, sans pour autant que ces éléments constituent en eux-mêmes une telle manipulation. Ces sept indices sont les suivants :
« 1° L'importance de la part du volume quotidien des transactions représentée par les ordres émis ou les opérations effectuées sur l'instrument financier concerné, en particulier lorsque ces interventions entraînent une variation sensible du cours de cet instrument ou de l'instrument sous-jacent ;
« 2° L'importance de la variation du cours de cet instrument ou de l'instrument sous-jacent ou dérivé correspondant admis à la négociation sur un marché réglementé, résultant des ordres émis ou des opérations effectuées par des personnes détenant une position vendeuse ou acheteuse significative sur un instrument financier ;
« 3° La réalisation d'opérations n'entraînant aucun changement de propriétaire bénéficiaire d'un instrument financier admis à la négociation sur un marché réglementé ;
« 4° Les renversements de positions sur une courte période résultant des ordres émis ou des opérations effectuées sur le marché réglementé de l'instrument financier concerné, associés éventuellement à des variations sensibles du cours d'un instrument financier admis à la négociation sur un marché réglementé ;
« 5° La concentration des ordres émis ou des opérations effectuées sur un bref laps de temps durant la séance de négociation entraînant une variation de cours qui est ensuite inversée ;
« 6° L'effet des ordres qui sont émis sur les meilleurs prix affichés à l'offre et à la demande de l'instrument financier, ou plus généralement de la représentation du carnet d'ordres auquel ont accès les participants au marché et qui sont annulés avant leur exécution ;
« 7° Les variations de cours résultant des ordres émis ou des opérations effectuées au moment précis ou à un moment proche de celui où sont calculés les cours de référence, les cours de compensation et les évaluations » .
(2) Les « safe harbours » et le nouveau régime des opérations des émetteurs sur leurs propres titres
Les programmes de rachat par les émetteurs de leurs propres titres (généralement des actions), qui connaissent un certain développement depuis 2000, ainsi que l'a rappelé un bilan statistique de l'AMF établi en novembre 2004 29 ( * ) , mais dont l'impact potentiel sur les cours requiert un encadrement précis, bénéficient dans certaines conditions d'une présomption de légitimité au regard de la définition des manipulations de marché. Ils ont fait l'objet du règlement européen n° 2273/2003 du 22 décembre 2003, précité, pris en application de la directive-cadre du 28 janvier 2003, et qui concerne également les stabilisations d'instruments financiers.
La mise en oeuvre du règlement européen n'entraîne pas un bouleversement complet du régime français des rachats d'actions . La majorité des conditions prévues par le règlement existaient en effet déjà, si ce n'est avec les mêmes modalités, au moins dans leur principe, dans le précédent régime de rachat d'actions défini par les règlements COB n° 90-04 et n° 98 02, notamment en ce qui concerne la publicité préalable à la mise en oeuvre du programme, l'encadrement du prix et des volumes et les périodes d'abstention (cf. encadré ci-après).
Ainsi qu'il a été souligné, la principale modification provient de la limitation à deux du nombre d'objectifs légitimes des programmes de rachat alors que, dans la pratique française, les objectifs invoqués par les émetteurs s'étaient multipliés au cours des dernières années. L'AMF a ainsi constaté que les sociétés mettant en oeuvre des programmes de rachat pouvaient afficher jusqu'à six objectifs différents par programme , les plus fréquemment invoqués étant l'attribution d'actions ou d'options d'achat aux salariés et/ou aux dirigeants, l'annulation des titres achetés, la remise d'actions dans le cadre d'opérations de croissance externe, la régularisation de cours et l'intervention en fonction des situations de marché.
Rappelons qu'en application de l'article L. 225-209 du code de commerce, les sociétés dont les titres sont cotés sur un marché réglementé sont autorisées à acheter leurs propres actions dans la limite de 10 % de leur capital . L'assemblée générale des actionnaires doit alors autoriser le conseil d'administration (ou le directoire) à procéder au rachat des actions et fixer les finalités, les modalités et le plafond de ces rachats. Une note d'information doit être établie par la société, soumise au visa de l'AMF et rendue publique avant la tenue de l'assemblée générale devant autoriser le programme de rachat.
Le règlement communautaire du 22 décembre 2003, dont les principales dispositions ont été exposées supra , étant d'application directe dans les législations nationales, l'article 631-5 du règlement général de l'AMF prévoit que les opérations réalisées dans le cadre de programmes de rachat de titres ne sont pas constitutives de manipulations de marché dès lors qu'elles sont effectuées conformément aux modalités d'acquisition prévues par ce règlement européen.
De même, l'article 631-6, conformément à l'article 6 du règlement précité, définit la double « fenêtre d'abstention » ou « fenêtre négative », exprimée en jours calendaires, durant laquelle un émetteur ne doit pas intervenir sur ses propres titres. Cette définition reprend celle donnée auparavant dans l'article 8 de l'ancien règlement COB n° 90-04, tout en précisant que les comptes intermédiaires sont compris dans le champ de l'interdiction. Il s'agit de :
- la période comprise entre la date à laquelle la société a connaissance d'une information privilégiée et la date à laquelle cette information est rendue publique ;
- et de la période de quinze jours précédant les dates auxquelles ses comptes consolidés ou sociaux annuels, ainsi que ses comptes intermédiaires (c'est-à-dire semestriels, et le cas échéant trimestriels, conformément aux dispositions de la directive « transparence » du 15 décembre 2004), sont rendus publics.
L'application de ces dispositions peut néanmoins être écartée lors de la mise en oeuvre d'une pratique de marché admise , si la décision d'acceptation de cette pratique le permet expressément. Par deux décisions du 22 mars 2005, l'AMF a ainsi admis, en tant que pratiques de marché constitutives d'une présomption simple de légitimité (cf. infra ), l'acquisition d'actions propres aux fins de conservation et de remise ultérieure en paiement ou en échange dans le cadre d'opérations de croissance externe, ainsi que les rachats opérés dans le cadre d'un contrat de liquidité conclu avec un prestataire de services d'investissement .
Depuis le 13 octobre 2004, date d'entrée en vigueur directe du règlement européen n° 2273/2003 précité, un certain nombre de règles prévues par l'autorité boursière en matière de rachats d'actions ont été rendues caduques , en particulier :
- le règlement COB n° 90-04 modifié par les règlements n° 92-03, n° 98-03, n° 2000-06 et n° 2002-02 relatif à l'établissement des cours ;
- le règlement COB n°98-02 modifié par le règlement n° 2000-06 de la COB relatif à l'information à diffuser à l'occasion de programmes de rachats de titres de capital admis aux négociations sur un marché réglementé ;
- l'instruction COB d'octobre 2003 prise en application du règlement n° 98-02 relatif à l'information à diffuser à l'occasion de programmes de rachats de titres de capital admis aux négociations sur un marché réglementé ;
- l'instruction COB du 10 avril 2001 prise en application du règlement n° 90-04 relatif à l'établissement des cours ;
- diverses recommandations et précisions techniques sur la mise en oeuvre des programmes de rachat.
L'application du règlement européen a induit l'adoption par l'AMF d'un nouveau régime global du rachat d'actions propres , qui ne se traduit pas uniquement par les dispositions intégrées dans le titre VI du règlement général relatif à l'abus de marché, et dont les principales modalités sont exposées dans l'encadré ci-après.
Il apparaît qu'au-delà du double objectif qui constitue la présomption irréfragable de légitimité, les pratiques consistant à mettre en place un programme de rachat planifié , c'est-à-dire dont le calendrier précis est fixé au moment de sa publication, ou à confier l'exécution du programme à un prestataire de services d'investissement (PSI) dans le cadre d'un contrat de liquidité, sont de nature à sécuriser, tant sur le plan technique que juridique, la mise en oeuvre de tels programmes, et ce faisant, à atténuer les soupçons de manipulation de marché susceptibles de peser sur ces rachats.
La nouvelle réglementation applicable à la mise en oeuvre des programmes de rachat d'actions
1 - La prévention de l'abus de marché, pierre angulaire du nouveau régime
Le règlement européen n° 2273/2003 fixe les conditions que doivent respecter les émetteurs procédant au rachat de leurs propres titres afin de pouvoir bénéficier de la présomption irréfragable de légitimité, et qui peuvent être classées en quatre catégories : les deux objectifs légitimes, l'information du marché, les conditions d'intervention et les restrictions imposées pendant la durée du programme, et les périodes spécifiques qualifiées de « fenêtres négatives ». La réglementation de l'AMF prévoit également des conditions afférentes à des instruments ou modalités spécifiques d'intervention sur les marchés (transactions par blocs, instruments dérivés et recours aux PSI) lors de la mise en oeuvre de programmes de rachat d'actions.
2 - Les objectifs des programmes de rachat au regard de la présomption de légitimité
Au-delà des deux objectifs constitutifs de la présomption irréfragable, le dispositif communautaire sur l'abus de marché permet aux régulateurs nationaux d'attribuer une présomption simple à certaines pratiques de marché admises et conformes à une liste de critères. L'AMF a ainsi très récemment accepté deux pratiques de marché complémentaires , qui ont fait l'objet de deux décisions de l'Autorité prises le 22 mars 2005.
a) Le rachat pour conservation et remise dans le cadre d'opérations de croissance externe
Par une décision du 22 mars 2005, l'AMF a ainsi admis, comme pratique de marché, « l'acquisition d'actions propres aux fins de conservation et de remise ultérieure en paiement ou en échange dans le cadre d'opérations de croissance externe ». Se fondant sur les dispositions communautaires relatives à l'abus de marché, cette décision rappelle les sept critères pris en compte pour déterminer l'acceptabilité d'une pratique de marché 30 ( * ) et en précise l'interprétation au regard des opérations de croissance externe. Elle détaille également les modalités de mise en oeuvre de ladite pratique, dans les termes suivants :
« a) Modalités d'intervention
« (...) Les acquisitions peuvent être réalisées par voie de blocs. Les interventions réalisées dans le cadre de cette pratique ne doivent à aucun moment conduire l'émetteur à détenir plus de 10% de son capital.
« b) Affectation à d'autres objectifs et cession des titres acquis
« Lorsque la conservation des titres acquis dans le cadre de cette pratique n'est plus nécessaire, l'émetteur peut décider, soit de réaffecter ces titres à l'un des objectifs mentionnés à l'article 3 du règlement précité ou à une autre pratique de marché, soit de les céder . L'émetteur informe le marché et ses actionnaires de cette décision au plus tard lors de l'assemblée générale suivant la date à laquelle cette décision a été prise.
« Si l'émetteur a mis en oeuvre un programme de rachat d'actions, les opérations de cession sont réalisées par l'intermédiaire d'un prestataire de services d'investissement agissant de manière indépendante ou par voie de blocs.
« c) Présomption de légitimité quant à l'utilisation ultérieure des titres
« Lorsque les titres remis en paiement dans le cadre d'une opération de croissance externe par un émetteur représentent un pourcentage supérieur à 1 % de son capital , l'utilisation de ces titres est présumée légitime si, préalablement à la réalisation de l'opération, l'émetteur a nommé un expert indépendant en vue de vérifier la valeur des titres, la valeur des biens achetés ainsi que l'équité du rapport d'échange ».
b) Le rachat dans le cadre d'un contrat de liquidité
Dans sa décision du 22 mars 2005, l'AMF décrit en premier lieu cette pratique de marché, et précise que toute société cotée sur un marché réglementé peut conclure un contrat de liquidité avec un PSI. Ce contrat définit les conditions dans lesquelles le PSI intervient pour le compte de l'émetteur à l'achat ou à la vente, pour favoriser la liquidité des transactions et la régularité des cotations des titres de l'émetteur ou éviter des décalages de cours non justifiés par la tendance du marché . Le contrat de liquidité doit respecter les principes énoncés dans la charte de déontologie de l'Association française des entreprises d'investissement (AFEI), annexée à la décision. Pour chaque catégorie différente de titres, l'émetteur ne peut avoir recours qu'à un seul prestataire de services d'investissement pour assurer l'animation du marché du titre concerné.
La décision de l'AMF, a l'instar de celle prise pour les opérations de croissance externe, détaille également les incidences pratiques des critères communautaires de détermination de l'acceptabilité de la pratique de marché, et les modalités de mise en oeuvre , en particulier au regard de l'information du marché, de la pratique de rachat dans le cadre d'un contrat de liquidité :
« a) Modalités d'intervention
« Les conditions de prix et de volume mentionnées à l'article 5 du règlement du 22 décembre 2003 et les restrictions mentionnées à l'article 6 dudit règlement ne s'appliquent pas aux opérations réalisées par un prestataire de services d'investissement dans le cadre d'un contrat de liquidité conforme à la pratique décrite dans la présente décision et aux principes énoncés dans la charte de déontologie établie par l'AFEI.
« Les opérations réalisées par un prestataire de services d'investissement dans le cadre d'un tel contrat ne doivent pas avoir pour effet de provoquer d'écart de cours artificiel par rapport à la tendance constatée sur le marché. Elles peuvent être réalisées par voie de blocs mais ne doivent à aucun moment conduire l'émetteur à détenir plus de 10 % de son capital.
« b) Modalités de publicité
« (...) L'émetteur informe le marché par voie de communiqué :
« - préalablement à sa mise en oeuvre , de la signature du contrat de liquidité en indiquant l'identité du prestataire de services d'investissement, le titre visé, le ou les marchés concernés ainsi que les moyens qui sont affectés au contrat ;
« - chaque semestre et lorsqu'il est mis fin au contrat , du bilan de sa mise en oeuvre en précisant les moyens en titres et en espèces disponibles à la date du bilan et à la signature du contrat ;
« - de toute modification des informations mentionnées au premier tiret.
` Le communiqué est mis en ligne sur le site de l'AMF ainsi que sur celui de l'émetteur lorsque celui-ci dispose d'un tel site.
« Les obligations d'information de l'émetteur sont réputées satisfaites lorsque les informations mentionnées ci-dessus sont rendues publiques préalablement à la mise en oeuvre d'un programme de rachat d'actions dans un communiqué ou une note d'information.
En revanche, l'AMF considère que les interventions réalisées directement par un émetteur en vue de régulariser le cours de bourse ou en fonction des situations de marché , telles qu'elles ont été définies par la COB en juin 2002, ne pourront plus être mises en oeuvre . Ces opérations conduisent en effet les émetteurs à intervenir à l'achat et à la vente au cours d'un même programme de rachat et sont interdites par le règlement européen, compte tenu du risque de manipulation de cours qu'elles représentent. En conséquence, toute activité visant à assurer la liquidité ou à animer le marché du titre devra désormais être confiée à un PSI agissant de manière indépendante, dans le cadre d'un contrat de liquidité.
3 - L'information du marché
L'émetteur doit désormais rendre public le détail de ses opérations au plus tard à la fin de la septième journée boursière suivant leur date d'exécution , par la mise en ligne sur le site Internet de l'AMF d'une déclaration et selon des modalités définies par l'instruction de l'AMF n° 2005-06 du 22 février 2005. Si celle-ci ne présente pas le même détail d'information que la déclaration mensuelle à l'AMF, requise jusqu'alors, cette dernière devra toujours lui être adressée, dans le format défini par l'instruction précitée. Néanmoins, si un émetteur décide d'informer le marché au plus tard sept jours après l'exécution des opérations en publiant le même degré d'information que celui exigé pour la déclaration mensuelle, il est dispensé de cette dernière obligation.
L'obligation d'informer le marché des opérations de rachat peut ne pas s'appliquer à une pratique de marché acceptée par l'AMF lorsque la décision d'acceptation de cette pratique le mentionne expressément. Il est ainsi prévu que cette obligation ne s'applique pas aux opérations réalisées dans le cadre d'un contrat de liquidité.
4 - Les conditions d'intervention
Ces conditions, fixées par l'article 5 du règlement du 22 décembre 2004, ont trait aux prix d'achat des titres et au volume maximal de transaction.
a) Les conditions relatives au prix
Le premier paragraphe de l'article 5 du règlement dispose qu'en « ce qui concerne les prix, l'émetteur s'abstient, lorsqu'il effectue des opérations dans le cadre d'un programme de rachat, d'acheter des actions à un prix supérieur à celui de la dernière opération indépendante ou, s'il est plus élevé, de l'offre indépendante actuelle la plus élevée sur la place où l'achat est effectué ». L'AMF interprète la notion de « dernière opération indépendante » comme le dernier cours coté résultant de l'exécution d'une transaction à laquelle l'émetteur n'a pas été partie prenante, ce qui inclut les opérations réalisées par un PSI dans le cadre d'un contrat de liquidité, et la notion d'« offre indépendante actuelle » comme le meilleur prix proposé à l'achat, par référence à la version anglaise du règlement européen, qui fait état de la notion de « highest current independant bid ».
Le règlement européen impose donc un prix plafond à l'émetteur, qui est équivalent au prix le plus haut entre le dernier cours coté et la meilleure limite à l'achat affichée dans le carnet d'ordres au moment de l'exécution du rachat.
S'agissant de l'utilisation - fréquente - d'instruments dérivés, la contrainte de prix implique désormais que seuls certains types de produits dérivés pourront bénéficier de la protection du règlement européen : si l'émetteur acquiert une option d'achat ( call ), celle-ci devra être « à la monnaie » lors de sa souscription, le prix d'exercice de l'option ne pouvant être supérieur au prix le plus élevé entre le dernier cours coté du sous-jacent et la meilleure limite actuelle à l'achat.
b) Les conditions relatives au volume échangé
S'agissant du volume, l'article 5 du règlement européen, précité, reprend le plafond de 25 % du volume quotidien moyen des actions négociées sur le marché réglementé concerné, qui figurait déjà dans l'ancien règlement COB n°90-04 . La période de calcul des 25 % est toutefois sensiblement modifiée et peut faire l'objet de deux méthodes .
Ce volume quotidien moyen est calculé, pour les programmes de rachat planifiés, sur la base du volume quotidien moyen des opérations réalisées au cours du mois précédant celui au cours duquel le programme de rachat est rendu public, et reste fixé sur cette base pour la durée autorisée du programme. Le règlement européen précise cependant que, dans le cas où le programme de rachat ne fait pas référence à la méthode précitée, le volume quotidien moyen est alors calculé, de manière glissante, sur la base du volume quotidien moyen des actions négociées au cours des vingt jours de négociation précédant le jour de l'achat. En conséquence, si dans la note d'information ou le communiqué publié préalablement à la mise en oeuvre du programme de rachat, il n'est pas expressément mentionné que le volume maximal sera calculé selon la première formule, c'est la seconde qui s'appliquera par défaut pendant toute la durée de mise en oeuvre du programme.
Le règlement européen permet enfin aux émetteurs de déroger à la règle des 25 % « en cas de liquidité extrêmement faible du marché en cause », à condition :
- d'informer préalablement l'autorité compétente du marché en cause de son intention de dépasser ce plafond ;
- d'informer d'une manière adéquate le public de cette possibilité de dépassement du plafond ;
- et de ne pas dépasser 50 % du volume quotidien moyen.
Compte tenu de la difficulté à définir la notion de « liquidité extrêmement faible » de façon générique, l'AMF n'a pas fixé de seuil en pourcentage ou en chiffre absolu pour l'ensemble des émetteurs cotés . En conséquence, les émetteurs qui estimeront se trouver dans une situation de liquidité extrêmement faible devront prendre contact avec les services compétents de l'AMF qui examineront les situations au cas par cas. Si à l'issue de cet examen, il est constaté qu'une souplesse est nécessaire pour s'adapter aux conditions particulières des marchés concernés, ces émetteurs devront publier un communiqué, mis en ligne sur leur site et sur celui de l'AMF, avant de pouvoir dépasser le plafond de 25 %. L'AMF réalisera un bilan à l'issue d'une année d'expérience , et appréciera la nécessité ou non de préciser les critères à prendre en compte pour apprécier la liquidité d'un titre.
5 - Les restrictions d'intervention
Ces restrictions ont trait à la vente d'actions propres et aux périodes d'abstention.
a) Les conditions relatives à la cession d'actions propres
En application du règlement européen précité, un émetteur qui vendrait ses propres actions au cours d'un programme de rachat (dont les bornes temporelles sont précisées par le règlement européen), quelle que soit la date d'acquisition ou l'origine de ces actions, ne bénéficierait plus de la présomption de légitimité pour la totalité des actions qui auraient été ou seraient achetées dans le cadre de ce même programme, sauf si ces cessions sont réalisées par voie de blocs et ne concourant pas à la formation du prix dans le carnet d'ordres.
L'émetteur peut cependant déroger à cette restriction s'il a mis en place un programme de rachat planifié , ou si l'exécution du programme de rachat est confiée à un PSI agissant de manière indépendante et dont les décisions d'ordres ne sont aucunement influencées par l'émetteur.
Ces dispositions ont une incidence importante sur la gestion du « stock » d'actions acquises avant le 13 octobre 2004 (date d'entrée en vigueur du règlement européen), dont les conditions ont été précisées dans l'instruction de l'AMF n° 2005-07 du 22 février 2005.
Un émetteur qui n'a pas mis en oeuvre le programme de rachat approuvé lors de sa dernière assemblée générale peut ainsi céder directement les titres acquis avant le 13 octobre 2004, et doit respecter les formalités de publicité.
Lorsque l'émetteur a mis en oeuvre un programme de rachat d'actions 31 ( * ) , ne peut bénéficier d'aucune des dérogations sus-mentionnées et qu'il souhaite conserver le bénéfice de la présomption, il peut céder les titres acquis avant le 13 octobre 2004 s'il confie cette cession à un intermédiaire agissant de manière indépendante , dans le cadre d'un mandat de cession qui doit mentionner expressément certaines informations, prévues par l'instruction précitée. Le mandat de cession est communiqué à l'AMF à sa demande, et les opérations réalisées dans le cadre d'un tel contrat doivent également faire l'objet d'une publicité au plus tard le septième jour de négociation suivant leur date d'exécution .
Naturellement, l'émetteur peut aussi décider de mettre un terme au programme de rachat en cours , et retrouve alors la possibilité de céder librement ses actions, sous réserve d'une publicité de sa décision.
Les mêmes règles s'appliquent pour la cession des titres acquis depuis le 13 octobre 2004 . Si l'émetteur a un programme de rachat en cours de réalisation, les actions acquises ne peuvent être cédées directement que par voie de blocs ou dans le cadre d'un mandat de cession conclu avec un PSI agissant de manière indépendante.
b) Les conditions afférentes à la période d'abstention
Ainsi qu'il a été précisé, l'article 631-6 du règlement général de l'AMF définit la double « fenêtre négative » pendant laquelle l'émetteur doit s'abstenir d'intervenir sur ses propres titres, dans la mesure où le règlement européen renvoie au droit national des Etats membres sur ce point. Cette restriction ne s'applique pas lorsque l'émetteur met en oeuvre un programme de rachat planifié ou lorsque le programme est exécuté par un PSI intervenant de manière indépendante.
6 - La réaffectation des titres acquis
Dans un communiqué du 13 octobre 2004, l'AMF a indiqué qu'un émetteur souhaitant bénéficier de la présomption irréfragable de légitimité devait immédiatement affecter les titres rachetés à un compte distinct réservé à l'un des objectifs prévus par le règlement , étant précisé que les actions ainsi acquises ne pourront pas être réaffectées ultérieurement à d'autres objectifs. L'émetteur a donc l'obligation d'assurer une parfaite traçabilité des ordres d'achat et de vente. Dans tous les cas, il doit informer la prochaine assemblée générale annuelle des affectations précises des actions rachetées.
Un émetteur qui aura affecté des actions à l'objectif d'annulation doit dès lors procéder à l'annulation effective de ses titres au plus tard le 31 décembre 2005 si ces actions ont été acquises avant le 13 octobre 2004, ou dans un délai de 9 mois suivant leur acquisition, si ces actions ont été acquises après le 13 octobre 2004. Si les actions ont été affectées à la couverture de plans d'options, l'émetteur peut alors réaffecter ces titres à l'objectif d'annulation ou les céder dans les conditions mentionnées ci-dessus. Ces actions ne peuvent pas être affectées à une pratique de marché admise.
A l'inverse, les actions acquises dans le cadre d'une pratique de marché admise par l'AMF, notamment dans le cadre d'un contrat de liquidité, pourront être affectées à l'annulation ou à la couverture . En ce qui concerne les titres acquis et conservés en vue d'une opération de croissance externe, l'émetteur peut décider de les réaffecter à un autre objectif en cas de changement de stratégie. Il peut également décider de céder ces actions dans les conditions prévues par la définition de la pratique de marché admise.
7 - Les opérations réalisées par voie de blocs d'actions
Le règlement européen du 22 décembre 2003 permet à un émetteur d'acquérir ses titres par blocs, mais soumet le bénéfice de la présomption aux conditions suivantes :
- s'agissant du prix , le règlement européen dispose que lorsque la place où l'achat est effectué n'est pas un marché réglementé, le prix de la dernière opération indépendante ou de l'offre indépendante actuelle la plus élevée pris comme référence est celui du marché réglementé de l'État membre où l'achat est effectué (cours de clôture ou dernière cotation au moment de la transaction hors marché) ;
- s'agissant du volume maximal , les transactions réalisées par voie de blocs et les applications ne concourant pas à la formation des cours, car exécutées en dehors du carnet d'ordres, doivent être exclues du calcul du volume. En effet, cette limitation du volume a pour objectif d'empêcher un émetteur d'influer, par des interventions massives, sur la formation du cours au sein du carnet d'ordres central.
8 - La limitation du nombre d'intermédiaires
Le règlement européen ne prévoit aucune limitation du nombre d'intermédiaires, alors que l'article 7 du règlement COB n° 90-04 le limitait à un seul, voire deux, lorsque l'émetteur réalisait partiellement son programme de rachat par l'utilisation de produits dérivés.
Compte tenu de la possibilité pour un émetteur de procéder à des rachats via un PSI tout en bénéficiant de la présomption, l'AMF accepte désormais que deux intermédiaires puissent intervenir au cours de la même séance pour deux objectifs différents , à condition qu'ils interviennent tous les deux dans le cadre de contrats qui garantissent leur indépendance vis-à-vis de l'émetteur.
9 - L'utilisation des produits dérivés dans le cadre de programmes de rachat
A la suite de la réforme du régime des rachats d'actions par la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, la COB avait fixé les règles minimales à suivre qui permettent à un émetteur de céder des options de vente sur son propre titre. La COB avait ensuite lancé en mai 2003 une consultation publique sur l'utilisation de produits dérivés dans le cadre de programmes de rachat d'actions. L'article 5 du règlement européen du 22 décembre 2003 dispose quant à lui que « dans le cas où l'émetteur procède à l'achat d'actions propres au moyen d'instruments financiers dérivés, le prix d'exercice de ceux-ci n'est pas supérieur à celui de la dernière opération [indépendante] ou, s'il est plus élevé, de l'offre indépendante actuelle la plus élevée ». Cette contrainte a pour objectif d'empêcher toute possibilité de manipulation par un émetteur du cours de son propre titre lorsqu'il utilise des produits dérivés. L'encadrement du prix d'exercice implique désormais que les émetteurs, afin de bénéficier de la présomption, soient limités à un champ plus restreint de produits dérivés.
L'AMF considère désormais que les émetteurs peuvent utiliser des produits dérivés dans le cadre d'un programme de rachat d'actions, et plus spécifiquement acheter des options d'achat , sous réserve que ces opérations correspondent à la logique de l'objectif poursuivi et de respecter les conditions suivantes :
- les produits dérivés sont utilisés afin de couvrir des positions optionnelles prises, par ailleurs, par l'émetteur (options d'achat ou de souscription accordées aux salariés du groupe, titres de créance donnant accès au capital de l'émetteur) ;
- ces interventions ne concourent pas à la formation du cours , ni à l'ouverture ni à la clôture de la séance de bourse notamment, et elles n'ont pas pour objectif d'influer sur le cours de compensation d'un instrument financier dérivé du titre du capital ;
- une mention explicite , permettant à la société de procéder au rachat de ses propres titres au moyen de produits dérivés, doit être intégrée dans la résolution relative à l'autorisation d'achat d'actions votée par l'assemblée générale ;
- l'échéance minimale des produits dérivés ne peut être inférieure à trois mois , que ces produits soient cotés ou non ;
- le nombre d'actions propres de l'émetteur sur lequel portent les produits dérivés, défini comme la taille notionnelle, doit être pris en compte pour apprécier le seuil de détention maximal de 10 % prévu par l'article L. 225-209 du code de commerce ;
- lorsque la mise en place de produits dérivés par un émetteur occasionne des opérations de couverture par la contrepartie sous forme, par exemple, de la constitution d'un delta en titres sous-jacents, le volume de ces opérations doit être pris en compte pour le calcul de la limite maximale de 25 % des volumes quotidiens moyens prévue par le règlement européen.
Ces conditions s'appliquent à toutes les interventions, qu'elles soient réalisées dans le cadre des objectifs prévus par le règlement européen ou de pratiques de marché, étant entendu que l'utilisation des produits dérivés n'est pas admise dans le cadre des contrats de liquidité .
Enfin, s'agissant de la vente d'options de vente par un émetteur dans le cadre d'un programme de rachat, l'AMF considère que la cession de « puts » ne constitue pas une opération de couverture, et qu'en outre une telle opération consiste en une spéculation sur la volatilité anticipée du titre. Un tel comportement, de la part d'un émetteur, représente pour l'Autorité un risque qui ne semble pas correspondre aux objectifs d'un programme de rachat.
Il en résulte qu'un émetteur mettant en oeuvre un programme de rachat d'actions ne pourra pas recourir à ce type de produit dérivé.
Source : bulletin Jolynews des Editions Joly et publications de l'AMF (17 mars et 22 mars 2005)
Votre rapporteur général considère que l'encadrement, par l'AMF, de la pratique de marché afférente aux rachats d'actions aux fins de conservation et de remise dans le cadre d'opérations de rachat de sociétés, se montre insuffisant, en particulier au regard du délai d'utilisation des titres pour ce type d'objectif et du plafond de rachat susceptible de lui être affecté.
Votre rapporteur général estime, en effet, que certains abus et ambiguïtés constatés au cours des années récentes, les objectifs du nouveau dispositif communautaire de prévention de l'abus de marché, et l'esprit des recommandations formulées dans le rapport de M. Bernard Esambert et approuvées par le collège de la COB le 6 janvier 1998, ne sauraient conduire l'AMF à adopter une réglementation trop souple s'apparentant à un « blanc seing » pour des pratiques déjà existantes sur les marchés.
(3) Les exemptions prévues pour la stabilisation d'un instrument financier
L'article 631-7 du règlement général de l'AMF exempte les opérations réalisées par des prestataires de services d'investissement dans le cadre de la stabilisation d'un instrument financier, des règles relatives à la manipulation de cours, à condition que ces opérations soient réalisées dans le respect des dispositions du règlement n° 2273/2003 du 22 décembre 2003, précité, qui ont été évoquées supra .
Les articles 631-8 à 631-10 précisent les obligations d'information du public imposées à l'émetteur ou le cédant, selon le cas, ou à l'entité procédant aux opérations de stabilisation , qu'elle agisse ou non pour le compte de ces personnes. Ils doivent ainsi, en premier lieu, porter à la connaissance du public les informations mentionnées au point 1 de l'article 9 du règlement précité avant le début de la période d'offre sur le marché des instruments financiers. Ces informations, qui doivent être mises en ligne sur le site Internet de l'AMF et, le cas échéant, sur celui de l'émetteur, sont les suivantes selon les termes du règlement :
« a) le fait qu'une stabilisation peut être entreprise, qu'il n'est pas garanti qu'elle le soit effectivement et qu'il peut y être mis fin à tout moment ;
« b) le fait que les opérations de stabilisation visent à soutenir le prix des valeurs concernées sur le marché ;
« c) le début et la fin de la période durant laquelle une stabilisation peut avoir lieu ;
« d) l'identité du gestionnaire de la stabilisation, à moins qu'elle ne soit pas connue au moment de la publication, auquel cas elle est divulguée au public avant le début des opérations de stabilisation ;
« e) l'existence éventuelle et la taille maximale de toute facilité de surallocation ou option de couverture correspondante, la période d'exercice d'une telle option et les modalités éventuelles du recours à cette facilité ou de l'exercice de cette option.
En second lieu, l'émetteur, le cédant ou le prestataire doit également, aux termes de l'article 631-9, notifier à l'AMF, au plus tard le septième jour de négociation suivant la date d'exécution, les détails de toutes les opérations de stabilisation qui ont été réalisées , comme c'est également le cas pour les programmes de rachat de titres (cf. encadré précédent). L'article 631-10 prévoit enfin que les informations exigées par le point 3 de l'article 9 du règlement européen précité soient mises en ligne dans la semaine qui suit la fin de la période de stabilisation.
Aux termes du règlement européen, les informations qui doivent être publiées sont : le fait qu'une stabilisation a été effectuée ou non, la date de début de la stabilisation, la date à laquelle la dernière opération de stabilisation a été effectuée, et la fourchette de prix à l'intérieur de laquelle la stabilisation a eu lieu, pour chaque date à laquelle des opérations de stabilisation ont été effectuées.
(4) La diffusion d'une fausse information
La diffusion d'une fausse information est un comportement constitutif d'une manipulation de marché . Conformément au c) du point 2 de l'article premier de la directive-cadre du 28 janvier 2003, l'article 632-1 du règlement général prévoit un principe général d'interdiction de communication ou de diffusion d'une information trompeuse, imprécise ou inexacte sur un instrument financier émis par voie d'appel public à l'épargne (donc au-delà de la simple admission aux négociations sur un marché réglementé, cf infra IV. C.), quel que soit le support utilisé et y compris en répandant des rumeurs.
En application des dispositions de la directive précitée, le second alinéa de cet article complète la définition de la diffusion d'une fausse information, qui est également constituée par « le fait d'émettre, sur quelque support que ce soit, un avis sur un instrument financier ou indirectement sur l'émetteur de celui-ci, après avoir pris des positions sur cet instrument financier et de tirer profit de la situation qui en résulte, sans avoir simultanément rendu public, de manière appropriée et efficace, le conflit d'intérêts existant ». Ce type de comportement concerne essentiellement l'activité de recherche et d'analyse financières, qui doit s'exercer dans le respect des « murailles de Chine » , lesquelles ont pour objet de prévenir la circulation indue d'informations confidentielles grâce au cloisonnement des activités de recherche et de placement de titres au sein d'un établissement financier.
Le troisième et dernier alinéa de cet article traite la situation spécifique des journalistes , dont le non-respect de l'interdiction de diffusion d'informations fausses ou trompeuses doit être apprécié en tenant compte de la réglementation applicable à cette profession . L'insertion des journalistes dans la liste des professions concernées par le dispositif de répression de l'abus de marché a en effet suscité des controverses , au motif qu'elle était susceptible de porter atteinte à l'indépendance et à la déontologie des journalistes.
Le règlement général de l'AMF, conformément à l'esprit et à la lettre du vingt-deuxième considérant 32 ( * ) et de l'article premier de la directive-cadre précitée 33 ( * ) , qui accordent une certaine latitude aux Etats membres, entend donc préserver un équilibre délicat entre les exigences propres à cette activité et le caractère transversal du régime de l'abus de marché. Le règlement général comme la directive font toutefois prévaloir les principales exigences de la répression de l'abus de marché , puisqu'il est précisé que le non-respect de l'interdiction précitée « est susceptible de constituer par lui-même un manquement dès lors que les intéressés retirent, directement ou indirectement, un avantage ou des profits de la diffusion de telles informations ».
* 29 En 2004, la moitié des sociétés constituant l'indice CAC 40 d'Euronext Paris (les deux tiers en 2003) ont procédé à des rachats nets d'actions, pour un montant d'environ 9 milliards d'euros, soit 1,2 % de leur capitalisation boursière moyenne . Les sociétés Total, BNP Paribas et Société Générale ont représenté 63 % des rachats, et BNP Paribas a racheté l'équivalent de 3,6 % de sa capitalisation boursière (au 31 décembre 2004).
* 30 Ces critères, exposés supra , sont les suivants :
- le degré de transparence de la pratique concernée au regard de l'ensemble du marché ;
- le besoin de sauvegarder le libre jeu du marché et l'interaction de l'offre et de la demande ;
- l'importance des effets de la pratique de marché concernée sur la liquidité et l'efficience du marché ;
- la mesure dans laquelle la pratique concernée prend en compte les mécanismes de négociation du marché concerné et permet aux participants à ce marché de réagir de manière adéquate et rapide à la nouvelle situation de marché qu'elle a créée ;
- le risque que représente la pratique concernée pour l'intégrité des marchés qui s'y rattachent directement ou indirectement, sur lesquels se négocie le même instrument financier dans la Communauté européenne, qu'ils soient ou non réglementés ;
- les conclusions de tout contrôle ou de toute enquête sur la pratique de marché concernée réalisé par l'AMF, par toute autre autorité ou entreprise de marché avec laquelle l'AMF collabore, par tout autre autorité ou entreprise de marché qui agit par délégation de l'AMF, sous la responsabilité de celle-ci ou par les autorités judiciaires agissant sur saisine de l'AMF, en particulier lorsque la pratique concernée a enfreint des règles ou dispositions destinées à prévenir les abus de marché ou des codes de conduite, que ce soit sur le marché concerné ou sur des marchés directement ou indirectement liés au sein de la Communauté européenne ;
- les caractéristiques structurelles du marché concerné, en particulier son caractère réglementé ou non, les types d'instruments financiers négociés et les types de participants à ce marché, notamment l'importance relative de la participation des investisseurs non professionnels.
* 31 Selon les termes de l'instruction n° 2005-07 de l'AMF, « un programme de rachat est réputé être mis en oeuvre lorsque l'émetteur, conformément à l'autorisation donnée par l'assemblée générale, a débuté ses opérations de rachat et aussi longtemps qu'il n'a pas déclaré dans un communiqué rendu public qu'il n'a pas mis fin à ses opérations de rachat jusqu'à la prochaine assemblée générale ordinaire ».
* 32 Ce considérant, qui concerne tant les analystes que les journalistes financiers, dispose en effet :
« Les Etats membres devraient être en mesure de choisir la manière la plus appropriée d'établir une réglementation pour les personnes qui réalisent ou diffusent des travaux de recherche concernant des instruments financiers ou des émetteurs d'instruments financiers ou pour les personnes qui produisent ou diffusent d'autres informations recommandant ou suggérant une stratégie d'investissement, y compris des mécanismes appropriés d'auto-régulation , qui devraient être notifiés à la Commission ».
* 33 Dont le c) du point 2 de l'article premier précise que « dans le cas de journalistes agissant dans le cadre de leur profession, cette diffusion d'informations doit être évaluée (...) en tenant compte de la réglementation applicable à leur profession, à moins que ces personnes ne retirent, directement ou indirectement, un avantage ou des profits de la diffusion des informations en question ».