III. L'ÉVOLUTION DU PAYSAGE AUDIOVISUEL

Votre rapporteur spécial a évoqué dans sa présentation générale un certain nombre d'éléments qui affectent la politique de l'audiovisuel public. En complément de ses observations, il voudrait fournir des informations sur un certain nombre de dossiers d'actualité, à partir notamment des informations contenues dans les réponses aux questionnaires budgétaires.

A. LA MISE EN oeUVRE DU NUMÉRIQUE TERRESTRE

Le remplacement de la télévision analogique par la télévision numérique s'inscrit dans la perspective d'une amélioration technologique et d'une offre élargie de chaînes.

La loi n° 2000-719 du 1 er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication a fixé les principales dispositions législatives relatives au déploiement de la télévision numérique de terre (TNT). Le législateur a ainsi chargé le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) de procéder à la planification des fréquences nécessaires à la diffusion de la TNT. Il a, par ailleurs, fixé les régimes juridiques applicables aux services de télévision, selon qu'ils relèvent du secteur public ou du secteur privé.

M. Michel Boyon, ancien président de Radio France, avait été chargé d'examiner plusieurs questions préalables relevant de la compétence du gouvernement : le financement des opérations de réaménagement des fréquences analogiques existantes, le périmètre des chaînes du service public sur la TNT et les conditions de développement des télévisions locales. Il a remis un premier rapport en octobre 2002 puis un rapport complémentaire en février 2003.

L'ancien président de Radio France avait attiré l'attention du gouvernement sur les lacunes du processus de commercialisation de l'offre numérique terrestre prévu par la loi du 1 er août 2000 : « En posant le principe d'une attribution des autorisations chaîne par chaîne à des éditeurs, et non pour tout un multiplex, à des distributeurs commerciaux, le législateur a été contraint de créer une catégorie supplémentaire d'opérateurs chargés de l'assemblage du signal sur les multiplex et des relations avec le diffuseur technique ». L'ancien président de Radio France rejoignait la position du Sénat qui a considéré lors de la discussion de la loi du 1 er août 2000 précité qu'il était irréaliste d'attribuer les autorisations chaîne par chaîne et qu'il aurait mieux valu y procéder multiplex par multiplex.

Compte tenu de l'avancement des travaux de mise en oeuvre de la TNT, M. Michel Boyon avait été chargé en juin 2003 d'une nouvelle mission relative non plus à la mise en place de la TNT, mais à l'accompagnement de ce processus.

Le CSA s'est engagé dans la préparation du lancement de la TNT, notamment par la publication le 24 juillet 2001 de l'appel à candidatures pour l'édition de services de télévision à vocation nationale diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique. Il a fait connaître la sélection des candidats retenus fin octobre 2002 et l'autorisation officielle est intervenue le 10 juin 2003.

Une commission technique d'experts se réunit régulièrement depuis octobre 2002 en vue d'approfondir les aspects techniques de la TNT. Elle implique tous les acteurs de l'audiovisuel : opérateurs techniques, industriels, éditeurs et distributeurs de services, régulateurs et ministères concernés (industrie, culture, logement).

Cette mise en oeuvre progressive traduit les attentes de votre rapporteur spécial qui considère que, plutôt que de s'épuiser financièrement à couvrir la totalité du territoire national, il conviendrait dès maintenant d'envisager une couverture satellite pour toutes les zones trop difficiles à desservir.

1. La définition de l'offre de services et l'organisation des multiplex

Le 23 octobre 2002, le CSA a procédé à la sélection des candidats en retenant vingt-trois services, dont deux sur un canal en temps partagé. Le CSA a d'abord retenu TF1, M6 et Canal+, services en faveur desquels la loi a prévu un droit de reprise intégrale et simultanée sur le numérique hertzien. Le troisième alinéa du III de l'article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée a accordé aux éditeurs de ces services le bénéfice d'une autorisation supplémentaire pour la diffusion d'un service de télévision. La sélection d'I-télévision a été opérée après un examen comparé avec l'ensemble des autres candidatures.

Les autres dossiers ont été sélectionnés à partir des critères fixés par l'article 30-1 précité, en veillant à l'équilibre économique entre la télévision gratuite et la télévision payante. Outre TF1, M6 et M6 Music, ce dernier service étant retenu au titre du canal supplémentaire, le CSA a sélectionné 5 services gratuits : Direct 8, i-MCM, NRJ TV, NT1 et TMC.

Après la sélection de Canal+ et de LCI, service présenté par TF1 au titre du canal supplémentaire, la préférence a ainsi été donnée aux candidatures suivantes : AB1, Canal J, Ciné Cinéma Premier, Comédie, Cuisine.TV, Eurosport France, I-télévision, Match TV, Paris Première, Planète, Sport+, TF6 et TPS Star.

Le CSA a ensuite engagé la négociation des conventions avec chacun des éditeurs sélectionnés . Après plusieurs réunions de concertation, un accord a été conclu début mai 2003 et 23 conventions ont été signées par chacun des éditeurs concernés. L'adoption définitive des conventions par le CSA est intervenue le 10 juin 2003.

A côté des vingt-deux canaux pour l'exploitation de services privés à vocation nationale, huit canaux avaient, à l'origine, été réservés pour les besoins du secteur public . En effet, les services relevant de cette catégorie bénéficient d'un droit d'accès prioritaire à la ressource radioélectrique, en application des dispositions de l'article 26 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée.

Les canaux ainsi réservés sont destinés tout d'abord à France 2, France 3, France 5, Arte et La Chaîne parlementaire (en partage entre l'Assemblée nationale et le Sénat). Les droits d'usage de la ressource radioélectrique ont été accordés à ces différents services du secteur public le 10 juin 2003, soit le même jour que les autorisations pour les services privés.

Trois canaux restaient alors à la disposition du gouvernement qui, en effet, avait fait jouer son droit de préemption, sans indiquer, cependant, en faveur de quels services ce droit serait exercé. Le 17 décembre 2003, le ministre de la culture et de la communication a informé le Conseil supérieur de l'audiovisuel qu'un seul des trois canaux était en définitive conservé et que le gouvernement levait son droit de préemption pour les deux autres canaux qui, dans ces conditions, étaient remis à la disposition du Conseil.

Le canal ainsi réservé pour le compte de France Télévisions a depuis été affecté à la chaîne Festival dont la totalité du capital doit être détenu par l'Etat. Afin de bénéficier du droit d'accès prioritaire à la ressource radioélectrique, Festival devra être dotée d'un cahier des charges, conformément aux dispositions de l'avant-dernier alinéa du III de l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée.

Le CSA a ensuite arrêté la composition des multiplex . Cette opération a marqué le point de départ de la procédure visant à la désignation des opérateurs de multiplex.

Outre les autorisations délivrées aux éditeurs de services, le CSA a procédé, le 10 juin 2003, à l'affectation des réseaux de fréquences aux six multiplex et à la répartition des services au sein de ces six multiplex . Cette composition a été arrêtée après concertation avec les opérateurs publics et privés en tenant compte des divers arguments présentés.

C'est ainsi que, par rapport au schéma initial élaboré en octobre 2002, le CSA a décidé de regrouper les chaînes du groupe Pathé (TMC, Cuisine.TV/Comédie) et celles du groupe Lagardère (i-MCM, Canal J et Match TV) sur un même multiplex, en raison de la concordance d'analyse de ces deux groupes sur le fonctionnement d'un multiplex commun.

La composition des multiplex arrêtée par le CSA a été la suivante :

- premier réseau (R1) : France 2 - France 3 - France 5 - (chaîne à préciser sur les canaux préemptés par France Télévisions) ;

- R2 : i-MCM - Canal J - Match TV - Direct 8 - TMC - Cuisine.TV / Comédie ;

- R3 : Canal+ - I-télévision - Sport+ - Ciné Cinéma Premier - Planète ;

- R4 : M6 - M6 Music - TF6 - Paris Première - NT1 - AB1 ;

- R5 : Arte - La Chaîne parlementaire - (chaîne à préciser sur les canaux préemptés par France Télévisions) ;

- R6 : TF1 - LCI - Eurosport France - TPS Star - NRJ TV.

Dès lors que les différentes autorisations ont été accordées par le CSA le 10 juin 2003, les éditeurs devaient avoir procédé à la désignation des opérateurs de multiplex avant le 11 août 2003.

Les éditeurs autorisés à la suite de l'appel aux candidatures du 24 juillet 2001 ont procédé à la désignation des opérateurs de multiplex conformément à la procédure prévue par la loi, permettant au CSA de délivrer leur autorisation aux quatre opérateurs de multiplex concernés le 22 octobre 2003 , à savoir les sociétés suivantes :

- pour le réseau R2, Nouvelles télévisions numériques ;

- pour le réseau R3, Compagnie du numérique hertzien ;

- pour le réseau R4, Société opératrice du multiplex R4 ;

- pour le réseau R6, SMR6.

Concernant le multiplex réservé au secteur public , votre rapporteur spécial rappelle que, à l'origine, les services du secteur public avaient été répartis sur les multiplex R1 et R5, en raison notamment du fait que trois canaux avaient été réservés au profit de France Télévisions pour la création de nouvelles chaînes numériques.

Cependant, le 17 décembre 2003, le ministre de la culture et de la communication , en même temps qu'il informait le Conseil supérieur de l'audiovisuel du maintien de la préemption pour un seul des trois canaux, demandait que l'ensemble des chaînes de service public soient regroupées sur un multiplex unique , pour des raisons de cohérence et de facilité techniques.

Des discussions ont alors été menées avec les éditeurs du secteur public et ont conduit le CSA à décider, le 27 janvier 2004, de regrouper les six chaînes publiques (France 2, France 3, France 5, Festival, Arte et La Chaîne parlementaire) sur le multiplex R1 . Cette décision doit être suivie de la mise en place de l'opérateur de multiplex que les chaînes publiques préparent parallèlement au choix de leurs diffuseurs techniques.

2. Des travaux techniques marqués par la question des normes de diffusion

Les travaux techniques conduits par la CSA ont porté notamment sur la planification des fréquences nécessaires à la diffusion en numérique, le réaménagement des fréquences analogiques et le débat sur les normes de diffusion.

a) La planification des fréquences

Lors du lancement de l'appel aux candidatures le 24 juillet 2001, le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait publié une première liste de fréquences concernant 29 des 110 zones destinées à recevoir à terme la télévision numérique de terre. Puis, au cours de l'année 2002, la poursuite de la planification avait permis la publication d'une deuxième liste dans 30 nouvelles zones. En 2003, le CSA a rendu publiques, le 10 avril, les fréquences identifiées sur 15 nouvelles zones auxquelles sont venus s'ajouter 14 sites supplémentaires, le 19 décembre, portant à 88 sur 110 le nombre de sites planifiés.

Cette phase de planification permet d'aboutir à un taux de couverture potentielle d'environ 68 % de la population française, l'objectif final étant d'atteindre une couverture comprise entre 80 % et 85 % de la population à partir des 110 sites de diffusion prévus .

La planification du numérique a été entreprise en tenant compte des fréquences utilisées actuellement pour la diffusion des services de télévision en mode analogique. Pour autant, le réaménagement d'environ 1.500 émetteurs analogiques doit être effectué, de façon à éviter les brouillages qui pourraient survenir lors du démarrage du numérique.

Un décret en date du 4 juillet 2003 23 ( * ) a été pris pour l'application de l'article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée qui pose le principe, au deuxième alinéa de son IV, selon lequel l' intégralité du coût des réaménagements est supportée par les éditeurs de services de la télévision numérique de terre .

Dix-sept premiers réaménagements de fréquences analogiques - dont ceux ordonnés par le Conseil d'Etat le 27 mars 2003 - ont été achevés fin avril 2003. Le 14 mai 2003, le Conseil d'Etat a publié une liste de 90 fréquences à réaménager avant le 31 mars 2004. Le 30 septembre 2003, le Conseil d'Etat a publié une liste de 131 fréquences à réaménager avant le 28 mai 2004.

Le 30 mars 2004 et le 20 juillet 2004, deux nouvelles tranches de réaménagements ont été décidées. Elles concernent, respectivement, 62 et 23 fréquences et les réaménagements correspondants devront être réalisés au plus tard le 15 décembre 2004.

b) Les normes de diffusion

Lors des réponses à la consultation publique lancée par le CSA en février 2004 sur l'utilisation des capacités du multiplex R5, la majorité des acteurs de la TNT (éditeurs de service, diffuseurs techniques, candidats à la distribution commerciale) ont souhaité que le démarrage de la TNT se fasse en utilisant la norme MPEG 2, en vigueur en France et en Europe . L'usage de cette norme permet en effet de lancer la TNT avec des équipements (adaptateurs, décodeurs) fiables, simples et peu coûteux.

En revanche, le groupe TF1 s'est prononcé en faveur d'un changement de norme, avec l'adoption de MPEG 4 , conduisant à une refonte complète du projet TNT et introduisant la haute définition pour les seules chaînes historiques. M6, pour sa part, a fait valoir les avantages procurés par MPEG 4. La distinction entre la norme MPEG 2 et la norme - ou plutôt les normes - MPEG 4 est présentée dans l'encadré ci-dessous.

Les normes de diffusion MPEG 2 et MPEG 4

« Tous les systèmes de télévision numérique utilisent aujourd'hui le MPEG 2, à l'exception des réseaux ADSL. Cette norme permet aujourd'hui de diffuser un programme de télévision simple définition (SD) dans une gamme allant de 3 Mbits/s (rendu ADSL actuel) à 6 Mbits/s (codage de certaines chaînes sur câble ou satellite). Elle est également utilisée pour toutes les chaînes de télévision HD existantes avec un débit de 18 et 20 Mbits/s, soit presque la capacité d'un multiplex hertzien.

« MPEG 2 a aujourd'hui atteint sa maturité technique : ses performances n'évolueront plus, sinon à la marge . Le gain ultime de compression est estimé de 5 à 15 %.

« L'événement technologique majeur qui motive ce rapport est la fin du processus de standardisation d'une nouvelle norme de compression. Il n'existe d'ailleurs pas une seule nouvelle norme, mais plusieurs, très proches dans leur fonctionnement. La principale est le MPEG 4.

« L'apparition du MPEG 4 n'est pas inattendue : elle était en effet prévisible depuis le milieu des années 1990 -- comme l'est d'ailleurs dès aujourd'hui l'apparition de la prochaine génération, le MPEG 21, dans une dizaine d'années.

« Le standard MPEG 4 comporte en réalité deux systèmes de codage : MPEG 4 part 2, norme améliorant MPEG 2 mais sans procurer un gain considérable de compression ; et MPEG 4 part 10, appelée aussi MPEG 4 AVC (Advanced Video Coding) ou H.264. C'est cette seconde norme qui constitue la véritable rupture technologique. Elle résulte d'un travail conjoint du groupe MPEG et de spécialistes de la visioconférence de l'UIT, réunis en 2001 au sein d'un groupe de travail commun, le JVT (Joint Video Team). Cette norme sera désormais appelée « MPEG-4 » dans toute la suite du rapport.

« Pour être utilisable, MPEG 4 doit être combinée à un protocole de transport adapté au canal de diffusion choisi : satellite, câble, TNT ou IP (ADSL). Le groupe DVB (Digital Video Broadcasting) a tout récemment intégré ces normes de compression dans le standard utilisé pour la diffusion de la TNT, le DVB-T. Soumis en octobre à l'Institut européen des normes de télécommunication (ETSI), le codage MPEG 4 HD pour la TNT est sur le point d'être adopté formellement par cet institut, ce qui confèrera à cette norme une existence légale au sein de l'Union européenne, et donc en France.

« La nouvelle norme apporte deux avantages majeurs :

«
A qualité d'image égale, elle divise le débit par deux par rapport à MPEG 2. Cela permet de diffuser un plus grand nombre de chaînes à définition standard ou d'introduire des chaînes à haute définition, ou encore de diminuer sensiblement le coût global de la télédiffusion.

«
Contrairement à MPEG 2, MPEG 4 permet aussi de transmettre des images de définition réduite à des débits faibles : ce codage autorise la transmission de petites images (résolution du seizième de la définition standard), adaptées à un écran de téléphone portable, d'assistant numérique ou de voiture.

« En résumé, MPEG-4 rend, pour un débit moitié moindre, les mêmes services que MPEG-2 et étend sa gamme d'usages vers les bas débits.

« MPEG-4 a aujourd'hui un concurrent d'importance : VC-1, tirée d'un produit Microsoft (Windows Media 9) qui atteint aujourd'hui la phase finale de standardisation. Cette situation a permis à certains d'évoquer une véritable « guerre des normes ». En effet, les performances de MPEG-4 et de VC-1 sont très comparables. Le coût de leurs licences a fait l'objet d'âpres négociations, qui ont néanmoins atteint récemment un point d'équilibre.

« Les constructeurs proposent d'ores et déjà des prototypes, voire des produits (encodeurs et décodeurs) construits autour de MPEG-4. Certains d'entre eux prévoient de proposer des appareils « multilingues », acceptant MPEG-2, MPEG-4 et VC-1 » .

Source : Daniel Boudet de Montplaisir, « Télévision numérique et haute définition », rapport remis au Premier ministre, octobre 2004

La normalisation de la diffusion de la télévision numérique terrestre en compression MPEG 4 n'est pas encore achevée : le codage MPEG 4 est normalisé mais son intégration dans la norme de diffusion DVB fait toujours l'objet de travaux. La norme MPEG 4 en TNT n'est ainsi pas utilisée à ce jour, tant pour la télévision standard que pour la télévision haute définition.

La télévision haute définition entraînera une recomposition de l'ensemble de la chaîne audiovisuelle. Sa mise en place demandera, pour profiter d'une meilleure qualité d'image, l'achat de nouveaux téléviseurs, notamment à écrans plats, dont le prix actuel est élevé. Si l'on se réfère à d'autres changements technologiques (tels que le passage de la télévision noir et blanc à la télévision couleur), les évolutions normales du marché permettent toutefois d'envisager une diminution du prix des équipements, sous l'effet de la demande.

En se fondant sur une étude de l'IDATE, centre d'études et de conseil en Europe spécialisé dans l'analyse des industrie des technologies de l'information et de la communication, votre rapporteur spécial observe en outre que la télévision haute définition devrait être lancée fin 2005 , soit dans des délais proches de ceux prévus pour la TNT, alors que 3,5 millions de foyers ont déjà accès à un service de télévision haute définition aux Etats-Unis.

Compte tenu de ces différents arguments, et suite au rapport qui lui a été remis le 21 octobre 2004 par M. Daniel Boudet de Montplaisir 24 ( * ) , le Premier ministre a annoncé, le 8 novembre 2004, que la norme MPEG 2 en simple définition serait retenue pour le lancement des chaînes gratuites en mars 2005 , en soulignant que la TNT permettra de recevoir « quinze chaînes sans abonnement et avec une qualité d'image et de son numérique », à condition de s'équiper d'un adaptateur numérique dont le coût sera modéré, de l'ordre de 50 euros. Le débat sur la possibilité d'utiliser la norme MPEG 4 pour les chaînes payantes devrait être tranché d'ici la fin de l'année 2004.

Votre rapporteur spécial estime ainsi qu'il conviendrait d'anticiper le passage à la norme MPEG 4 , dans la mesure où celle-ci serait disponible dans des délais rapprochés et que le prix des nouveaux équipements resterait raisonnable. Les industriels ont annoncé la commercialisation d'adaptateurs capables de recevoir des émissions à la fois en MPEG 2 et en MPEG 4, en définition standard comme en haute définition, dès septembre 2005.

3. La question du calendrier

La question du calendrier du lancement de la TNT, plusieurs fois reporté, et de son rythme de diffusion, semble s'être précisée au cours de l'année écoulée .

Après une consultation de l'ensemble des acteurs concernés, le CSA a décidé, le 19 décembre 2003, que le début des émissions devrait intervenir entre le 1 er décembre 2004 et le 31 mars 2005. La date précise de lancement a été arrêtée le 8 juin 2004, avec un décalage entre les services gratuits et payants.

Ainsi, la date du 1 er mars 2005 a -t-elle été confirmée par le Premier ministre le 8 novembre 2004 pour l'ensemble des chaînes gratuites de la TNT , qu'il s'agisse des chaînes publiques (France 2, France 3, France 5, Festival, Arte, La Chaîne parlementaire), des services analogiques bénéficiant d'un droit de reprise en numérique hertzien (TF1, M6 et Canal+ pour son programme en clair), ou des nouvelles chaînes en clair de la TNT (Direct 8, iMCM, M6 Music, NRJ TV, NT1 et TMC). La diffusion de ces différents services devra commencer dans le délai d'un mois à partir du 1 er mars 2005 .

Pour les chaînes payantes de la TNT (AB1, Canal J pour la partie réservée aux abonnés, CinéCinéma Premier, Comédie, Cuisine. TV, Eurosport France, I-Télé, LCI, Match TV, Paris Première, Planète, Sport+, TF6 et TPS Star), la date de début des émissions a été fixée au 1 er septembre 2005. L'exploitation commerciale de chacun des services devra intervenir dans un délai de six mois .

Le démarrage s'effectuera grâce à la mise en place, en mars 2005, des 17 premiers sites qui permettront de couvrir environ 35 % de la population française . Les principales agglomérations desservies lors du démarrage seront Paris et la région parisienne, Bordeaux, Brest, Lille, Lyon (Fourvière), Marseille, Niort, Rennes, Rouen, Toulouse (Toulouse Est) et Vannes.

Le CSA a publié le 20 juillet 2004 une nouvelle vague de fréquences qui devront être mises en service le 1 er septembre 2005 pour les services gratuits et le 1 er mars 2006 pour les chaînes payantes. Elles concernent les villes suivantes : Ajaccio, Bayonne, Bourges, Caen, Cherbourg, Grenoble, Le Havre, Le Mans, Lyon (Mont Pilat), Nantes, Orléans, Reims, Saint-Etienne, Toulon et Toulouse (Pic du Midi).

Le calendrier de déploiement des autres sites fera l'objet de décisions ultérieures, dans la perspective d'atteindre, à la fin du premier semestre 2006, une couverture d'environ 65 % de la population, avec une soixantaine de sites, pour atteindre 85 % de la population en 2007, sur 110 à 115 sites.

Le CSA a précisé qu'il était prêt à délivrer, préalablement à la date de démarrage, des autorisations temporaires de façon à permettre la tenue d'opérations de validation technique et de promotion auprès du public.

Les opérations techniques relatives au déploiement des réseaux de diffusion devront être effectuées dans des délais permettant le respect des dates de démarrage. Il convient donc, notamment, que les contrats de diffusion et de transmission soient conclus suffisamment tôt pour que les diffuseurs aient le temps de procéder à l'installation des sites de diffusion dans le calendrier fixé par le CSA . En cas de retard dans la conclusion de ces contrats, le V de l'article 32 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, complété pour ce faire par la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, a prévu la possibilité pour le CSA de fixer de façon unilatérale cette date de démarrage .

Le CSA a décidé, le 7 septembre 2004, de ne pas user de cette faculté, dès lors que la totalité des contrats portant sur les 17 premiers sites ont fait l'objet d'accords entre, d'une part, les opérateurs de multiplex ainsi que les éditeurs et, d'autre part, les diffuseurs techniques présents sur le marché.

Votre rapporteur spécial relève enfin la décision du Conseil d'Etat du 20 octobre 2004 d'invalider les autorisations délivrées par le CSA pour la reprise sur la TNT de six chaînes, appartenant aux groupes Canal+ et Lagardère. Le lancement d'un nouvel appel à candidatures apparaît susceptible de peser sur le calendrier de mise en place de la TNT. Il convient en outre d'observer qu'un retrait durable, le cas échéant, pourrait diminuer la diversité de l'offre de programmes en documentaires et pour la jeunesse.

4. La désignation des distributeurs commerciaux

La désignation des distributeurs commerciaux conditionne en grande partie le succès de la TNT . Sans leur présence, en effet, les chaînes payantes ne pourront être proposées aux téléspectateurs et l'offre de programmes sur la télévision numérique de terre serait alors remise en question de façon substantielle.

A ce jour, différentes sociétés ont fait connaître leur intérêt pour la distribution auprès du public des services de la TNT et indiqué qu'elles examinaient les possibilités de la constitution d'offres commerciales. En particulier, Canal+ semble décidé à commercialiser directement les chaînes de son groupe et les récentes déclarations du président de TF1 font penser que TPS fera de même pour les chaînes du groupe TF1-TPS.

Concernant un sujet connexe à la distribution commerciale, votre rapporteur spécial rappelle que le CSA a décidé de lancer une consultation relative à la numérotation des chaînes de la télévision numérique de terre.

* 23 Décret n° 2003-620 du 4 juillet 2003 pris pour l'application de l'article 30-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 et relatif à la répartition et au préfinancement du coût des réaménagements des fréquences.

* 24 Daniel Boudet de Montplaisir, « Télévision numérique et haute définition », rapport remis au Premier ministre, octobre 2004. Le rapport envisage notamment un lancement de la TNT en norme MPEG 2, puis un passage progressif à la norme MPEG 4 : « Dès lors, le public n'étant pas encore appelé à s'équiper en masse d'adaptateurs mais simplement à les tester, rien n'empêcherait, au fil du printemps et de l'été, d'expérimenter une diffusion en MPEG 4 SD puis en MPEG-4 HD des chaînes qui le souhaiteraient. De sorte qu'à la rentrée 2005, et sous réserve de la disponibilité des matériels sur laquelle certains industriels se sont engagés (...), on pourrait envisager que les téléspectateurs s'équipent directement en décodeurs MPEG 4 HD, supprimant ainsi l'obstacle du parc mentionné plus haut. Ces appareils, d'un prix encore relativement incertain à un an de leur commercialisation, mais comparable à celui annoncé pour les adaptateurs MPEG 2 lors de la conception, il y a deux ans, du projet TNT (environ 150 euros), permettraient en effet une réception optimale de tous les programmes, en simple ou en haute définition. Certains éditeurs réaliseraient aussi de substantielles économies en diffusant leurs chaînes selon la norme MPEG 4 SD » (citation pp. 36-37).

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page