2. Objectifs et indicateurs
La Direction de la réforme budgétaire (DRB) considère que les futurs objectifs, pour être pertinents, doivent respecter huit principes : être sélectifs tout en couvrant l'essentiel (pas de prétention à l'exhaustivité), attester l'amélioration de la dépense, être équilibrés entre les trois points de vue du citoyen, de l'usager et du contribuable, être atteignables et ne pas se situer dans le trop long terme, être suffisamment explicités dans le commentaire comme dans l'introduction stratégique des PAP, être compréhensibles, être mesurables, et être coordonnés dans les missions ou les documents de politique transversale. Les indicateurs doivent quant à eux permettre de formuler un jugement (notamment en privilégiant les indicateurs de dispersion aux valeurs moyennes), être immédiatement interprétables et être précisément documentés dans le PAP. Les objectifs et indicateurs ne doivent pas être trop nombreux ; la DRB promeut ainsi environ 5 objectifs par programme (10 au maximum) et en moyenne deux indicateurs par objectif.
A l'aune de ces principes, on constate en premier lieu que le MAE propose un nombre raisonnable d'objectifs (6) mais beaucoup d'indicateurs (20), pour un programme budgétaire certes assez ample et dont la grande variété des actions suppose une masse critique suffisante d'indicateurs pour bien en mesurer l'efficacité. Aucun des indicateurs n'est pour l'heure renseigné ni ne se voit attribuer de cible, ce qui reste compréhensible compte tenu des délais passés et de l'échéance de septembre 2005, mais contrairement au programme du MINEFI (cf. infra ), les précisions méthodologiques sur la construction des indicateurs sont quasiment inexistantes , ce qui témoigne d'un certain retard pris par le ministère. Les fiches relatives aux indicateurs qui ont été transmises à votre rapporteur spécial sont en revanche un peu plus précises sur le mode de construction, mais la description de leurs biais et limites apparaît très lacunaire en comparaison des explications apportées au programme « Rayonnement culturel et scientifique » , qui participe partiellement de l'APD française mais n'est pas inclus dans la mission interministérielle. Ces deux programmes ont donc pour l'heure fait l'objet d'un traitement inégal. Les indicateurs proposés sont enfin essentiellement d'impact - ce qui se conçoit compte tenu de la vocation de l'APD - mais l'efficience budgétaire est marginalement prise en compte, ce qui est moins satisfaisant du point de vue du contribuable.
Objectifs et indicateurs du programme « Solidarité à l'égard des pays en développement » |
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Objectif |
Point de vue |
Indicateur |
Type d'indicateur |
Mettre en oeuvre les objectifs du millénaire adoptés par les Nations-Unies concernant la lutte contre la pauvreté et le développement durable |
Citoyen |
Part de l'aide gérée par le MAE affectée aux objectifs du millénaire |
Impact |
Proportion de l'aide gérée par le MAE dirigée vers les PMA et l'Afrique sub-saharienne |
Impact |
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Proportion de l'aide gérée par le MAE affectée aux principales priorités sectorielles définies au CICID |
Impact |
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Amélioration de l'accès à l'éducation de base : nombre d'élèves sortant du cycle primaire rapporté à la population en âge de suivre un cycle primaire |
Impact |
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Contribuer à la gouvernance démocratique et à la consolidation de l'Etat de droit |
Citoyen |
Nombre de cadres formés avec l'appui de la France |
Impact |
Participation de la société civile au pilotage et à l'évaluation des projets : part de l'APD gérée par le MAE mise en oeuvre par la société civile |
Impact |
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Taux de projets associant des ONG et des collectivités territoriales françaises à des partenaires étrangers |
Impact |
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Promouvoir le développement par la culture, la formation et la recherche |
Citoyen |
Part moyenne des programmes locaux (hors information) dans les grilles de TV dans la ZSP |
Impact |
Nombre d'heures-élèves dans le réseau culturel français de coopération |
Impact |
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Nombre, par grande zone géographique (ZSP et pays émergents), des étrangers diplômés des deuxième et troisième cycles de l'enseignement supérieur français |
Impact |
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Nombre de programmes de recherche associant des chercheurs français et étrangers |
Impact |
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Nombre d'inscrits dans les bibliothèques soutenues au titre de l'effort de la France en faveur de la lecture publique |
Impact |
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Renforcer le partenariat mondial pour le développement dans un cadre européen et multilatéral |
Citoyen et contribuable |
Part de l'APD européenne et multilatérale allouée à l'Afrique subsaharienne et aux PMA |
Impact |
Proportion de l'aide bilatérale française relevant des projets participant au NEPAD |
Impact |
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Rang de la France parmi l'ensemble des contributeurs volontaire aux organisations internationales contribuant à l'aide au développement |
Impact |
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Réagir aux catastrophes humanitaires et participer aux plans de reconstruction |
Citoyen et usager |
Délai de réponse aux situations |
Qualité |
Délai moyen de décaissement des aides |
Qualité |
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Rang de la France dans l'aide d'urgence |
Impact |
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Assurer un service culturel et de coopération de qualité |
Citoyen et contribuable |
Proportion de l'aide consacrée aux objectifs du millénaire réalisée en partenariat avec les bénéficiaires |
Impact et qualité |
Délai moyen de mise en oeuvre des projets du MAE |
Qualité |
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Evolution du ratio coûts de structure / dépenses d'intevention (y compris pour les opérateurs) |
Efficience budgétaire |
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Source : avant-projet annuel de performances de la mission interministérielle APD |
Le premier objectif « Mettre en oeuvre les objectifs du millénaire adoptés par les Nations-Unies concernant la lutte contre la pauvreté et le développement durable » est pertinent : il traduit la cohérence de l'aide française avec ses engagements internationaux et se réfère à des buts ambitieux (au point que certains apparaissent aujourd'hui résolument inaccessibles), précis et acceptés par la communauté des bailleurs. Les indicateurs, en revanche, se réfèrent peu aux ODM eux-mêmes ; il eût peut-être été plus approprié de retenir un indicateur pour chaque ODM, en dépit de leur nombre a priori élevé pour un seul objectif. Une seule priorité sectorielle, celle de l'éducation primaire, est ainsi consacrée par un indicateur, mais ne reflète aucunement l'influence de la France dans l'amélioration éventuelle de l'accès à l'école. L'indicateur relatif à la proportion de l'aide gérée par le MAE affectée aux principales priorités sectorielles définies au CICID ne paraît en outre guère éclairant sur l'impact comme sur l'efficacité de la dépense d'APD, dans la mesure où on peut raisonnablement espérer que la DGCID s'approprie effectivement et mette en oeuvre les priorités édictées par une structure interministérielle.
Le deuxième objectif, « Contribuer à la gouvernance démocratique et à la consolidation de l'Etat de droit », constitue une préoccupation légitime pour notre APD, mais les indicateurs correspondants ne sont pas tous susceptibles de refléter les perspectives de renforcement de l'Etat de droit dans les Etats que nous aidons. La formation des cadres (premier indicateur) constitue un vecteur important de diffusion des principes démocratiques et de saine gestion, mais la participation des ONG et collectivités territoriales françaises n'est pas une garantie de bonne gouvernance ; il y a là confusion entre les fins et les moyens.
Le troisième objectif, « Promouvoir le développement par la culture, la formation et la recherche », apparaît vaste, et est de fait servi par pas moins de cinq indicateurs, qui sont pertinents et bien construits. Le dernier indicateur, relatif à l'effort de la France en faveur de la lecture publique, semble en revanche quelque peu anecdotique.
Le quatrième objectif, « Renforcer le partenariat mondial pour le développement dans un cadre européen et multilatéral », ne remplit pas tous les critères d'un bon objectif : formulation floue (la notion de « partenariat mondial » est pour le moins protéiforme, bien qu'elle constitue un des objectifs du millénaire), difficulté à faire l'objet d'une mesure, pas d'attestation de l'efficacité de la dépense publique. L'indicateur relatif à la part de l'APD européenne et multilatérale allouée aux pays les moins avancés peut être considéré comme relativement représentatif de la capacité de la France à influencer les choix d'affectation de ces enceintes, et le deuxième indicateur fait le pari de l'efficacité du NEPAD, initiative africaine qui a quelque peu tardé à se concrétiser par des projets sur le terrain. Le troisième indicateur est quant à lui conforme à la priorité du CICID de relèvement de nos contributions volontaires aux agences des Nations Unies, afin de figurer parmi les dix premiers contributeurs, mais ne permet guère de mesurer l'efficacité, in fine , de ces dons ; il s'agit donc plutôt d'un indicateur de moyens.
Le cinquième objectif, « Réagir aux catastrophes humanitaires et participer aux plans de reconstruction », traduit opportunément la réactivité de la France aux situations d'urgence, qui constitue une composante importante de l'APD, complémentaire de l'optique de développement sur le long terme, mais il apparaît trop similaire à l'action 6 « Aide aux populations touchées par les crises », d'où une certaine confusion méthodologique. Les indicateurs proposés sont en revanche bien ciblés.
Le sixième objectif, « Assurer un service culturel et de coopération de qualité », reflète l'exigence de qualité, et pas seulement d'impact, de notre coopération. Les indicateurs relatifs au délai moyen de mise en oeuvre des projets et à l'évolution des coûts de structure par rapport aux dépenses d'intervention sont à cet égard synthétiques et significatifs.