EXAMEN DES ARTICLES
Article premier A
(nouveau)
(art. L. 6121-1-1 du code de la santé
publique)
Développement de la télémédecine
Objet : Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, vise à intégrer le recours à la télémédecine dans les schémas régionaux d'organisation sanitaire.
I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale
Cet article additionnel a pour objet d'intégrer le développement de la télémédecine dans les schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS). Cette pratique médicale, développée au fur et à mesure des progrès des nouvelles technologies de l'information, ouvrirait aux hôpitaux de proximité, voire aux maisons médicales et aux centres de consultation, la faculté d'offrir aux patients un diagnostic plus fin et plus sûr. Ces établissements ne disposent, en effet, pas toujours des équipements et des spécialistes requis. Les relier à un réseau large et bien organisé de télémédecine permettrait à la fois d'assurer une meilleure répartition de l'offre de soins et aurait des effets bénéfiques en matière d'aménagement du territoire.
II - La position de votre commission
Votre commission est favorable au développement de la télémédecine. Toutefois, elle observe que cet article additionnel a été inséré avant l'article premier du présent projet de loi, article qui définit les principes sur lesquels est fondée l'assurance maladie et qui doit symboliquement demeurer le premier article de la loi.
Elle vous propose donc la suppression du présent article et sa réintroduction après l'article 18 ter .
Article premier
(art.
L. 111-2-1 du code de la sécurité sociale)
Principes
fondateurs de l'assurance maladie
Objet : Cet article réaffirme le caractère universel et solidaire de l'assurance maladie, ainsi que les grands objectifs assignés au système de santé en France.
I - Le dispositif proposé
Le présent article propose de rappeler, par l'insertion d'un article L. 111-2-1 nouveau dans le code de la sécurité sociale, les principes régissant l'assurance maladie et les objectifs assignés au système de soins français.
Le premier alinéa énumère implicitement les droits des assurés, en rappelant l'attachement de la Nation :
- au caractère obligatoire et universel de l'assurance maladie , qui interdit à une personne exerçant une activité professionnelle, qu'elle soit salariée ou non, de refuser d'être affiliée à un régime de base d'assurance maladie, par exemple au motif qu'elle aurait déjà souscrit une couverture auprès d'un assureur ou qu'elle serait elle-même son propre assureur. Les personnes n'exerçant pas d'activité professionnelle peuvent être assurées à titre volontaire.
La loi du 27 juillet 1999 relative à la couverture maladie universelle, qui a étendu le bénéfice de la couverture de base à tout résident, a modifié sensiblement le lien entre l'exercice d'une profession et l'affiliation à un régime de base d'assurance maladie, la notion d'assuré désignant désormais essentiellement le régime auquel il est assujetti (régime général, agricole, indépendant ou spécial).
Le présent article assigne au demeurant à l'assurance maladie une fonction de garant du système de soins, qui relève tout autant de l'État que des régimes de sécurité sociale, au titre de sa mission de gardien de la solidarité nationale et de la cohésion sociale. Il ne détaille d'ailleurs pas le contenu de la protection ainsi garantie ;
- au caractère non discriminant de la protection qu'elle assure , en ne conditionnant pas à l'âge des assurés ou à leur état de santé le bénéfice des prestations.
Cette déclaration réitère le refus d'un système de santé qui distinguerait entre les « bons » et les « mauvais » risques. Elle écarte solennellement l'hypothèse avancée par certains, notamment lors du débat relatif à l'autonomie des personnes âgées, selon laquelle ces dernières pourraient être prises en charge dans un cadre différent, au motif que les pathologies dont elles souffrent sont dues au vieillissement et non à la maladie. Elle confirme également la solidarité de la Nation à l'égard des personnes souffrant des pathologies les plus lourdes, nécessitant des traitements longs et coûteux.
Cet article n'affirme toutefois pas que la protection offerte aux assurés est indépendante de leurs revenus puisque certaines catégories de personnes disposant de revenus modestes sont exonérées de ticket modérateur ;
- au caractère solidaire du financement qui la soutient , chaque résident y contribuant proportionnellement à ses ressources - au moyen de cotisations ou d'impositions affectées, dont l'assiette ou les taux varient selon les segments de la population.
Le deuxième alinéa fixe trois objectifs aux régimes d'assurance maladie :
- permettre l'accès effectif aux soins de tous les assurés . Le texte insiste sur le rôle joué par les régimes pour garantir cet accès à tous sur l'ensemble du territoire. Cette affirmation de principe, dont l'inspiration est généreuse, ne va toutefois pas de soi, car elle introduit une confusion entre les missions respectives de l'État et de la sécurité sociale. Si les régimes participent à l'objectif de résorption des inégalités sociales dans l'accès aux soins, ils ne disposent pas de tous les leviers leur permettant de pallier le creusement d'inégalités territoriales. L'installation des médecins libéraux demeure libre et la fixation du numerus clausus annuel relève de la compétence de l'État, de même que la répartition des moyens hospitaliers qui est du ressort des agences régionales d'hospitalisation. Certaines dispositions du projet de loi permettent de mieux associer les régimes d'assurance maladie à ce processus décisionnel mais elles ne justifient pas à elles seules de les élever, comme le propose cet article, au rang de « garant » ;
- diffuser les progrès de la médecine par la promotion de la coordination et de la qualité des soins ;
- participer à la réalisation des objectifs de la politique de santé publique, qui relèvent pourtant de la compétence de l'État, et veiller au bon usage des fonds publics dont ils sont dépositaires .
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté un amendement sous-amendé par les membres du groupe socialiste, visant :
- à garantir l'accès à des soins « de qualité » sur l'ensemble du territoire ;
- à assigner aux régimes la tâche de veiller à « l'exercice de ce droit » , notamment par la « création de maisons médicales ».
III - La position de votre commission
Les grands principes rappelés au début de cet article ne souffrent pas de contestation. Néanmoins, la rédaction finalement proposée, même amendée par l'Assemblée nationale, ne satisfait pas entièrement votre commission.
Les responsabilités respectives de chaque acteur du système de santé ne sont pas véritablement définies et l'article omet les professionnels de santé, dont l'influence est déterminante tant pour la coordination, la qualité et l'accès aux soins, que pour le bon usage des fonds consacrés à l'assurance maladie.
De ce fait, l'esprit de la réforme ne transparaît pas vraiment, l'importance des partenariats, l'appel à la responsabilité sont insuffisamment évoqués - alors qu'elle ambitionne de ne pas constituer un énième plan d'économie pour l'assurance maladie.
Votre commission s'est donc attachée à définir les principes de la refondation soutenue par le Gouvernement et propose d'inscrire, dans le présent article, les termes de l'affectio societatis 7 ( * ) qui doit unir toutes les parties concernées par l'assurance maladie : tuteur, gestionnaires, assurés, prescripteurs.
Ce pacte pourrait reposer sur les termes suivants :
- le rappel du caractère obligatoire, solidaire et universel de l'assurance maladie - et par là même le refus de toute organisation alternative de notre système de soins ;
- la place centrale qu'y occupe l'assuré, ses droits et devoirs figurant juste après les principes fondateurs : il bénéficie d'une protection à vocation préventive (le risque) et curative (les conséquences) de la maladie et finance cette protection en proportion de ses ressources, quels que soient son âge ou son état de santé ;
- l'affirmation du rôle de l'État, à la fois garant de l'accès de tous aux soins et maître d'oeuvre des politiques de santé publique ;
- l'implication des régimes d'assurance maladie, en partenariat avec les professionnels de santé, pour veiller à la coordination des soins, à leur qualité et à leur bonne répartition sur le territoire. La mention des professionnels de santé est indispensable sur ces trois objectifs car leur réalisation devra beaucoup à leur engagement ;
- l'attention que tous les acteurs (tuteurs, régimes, prescripteurs, assurés) doivent porter au bon usage des fonds consacrés à l'assurance maladie par la Nation.
Votre commission vous propose d'adopter cet article dans la nouvelle rédaction qu'elle vous soumet.
* 7 Affectio societatis signifie en droit l'intention des associés de collaborer sur un pied d'égalité.