EXAMEN DES ARTICLES
TITRE PREMIER
-
DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Article premier
(art. L. 114 à L. 114-3-1, L. 114-5, L. 540-1 et L. 580-1
du code de l'action sociale et des familles)
Définition du handicap, accès aux droits fondamentaux
et droit à compensation des personnes handicapées

Objet : Cet article donne, pour la première fois, une définition légale du handicap, pose le principe de l'accès des personnes handicapées à l'ensemble des droits fondamentaux reconnus à tous les citoyens et définit le droit à la compensation du handicap.

I - Le dispositif proposé

Le présent article, conformément au principe de non-discrimination qui oblige la collectivité nationale à garantir les conditions de l'égalité des droits et des chances à tous les citoyens, pose le principe d'un accès de la personne handicapée aux droits fondamentaux reconnus à l'ensemble des citoyens.

Dans son paragraphe I , il donne d'abord - pour la première fois - une définition légale du handicap. Jusqu'ici en effet, la loi ne reconnaissait qu'implicitement la qualité de personne handicapée, à travers la reconnaissance d'un droit à diverses prestations, l'orientation vers des dispositifs réservés aux personnes handicapées et surtout, à travers la définition d'un taux d'incapacité permanente.

La définition proposée est inspirée de la « classification internationale du fonctionnement du handicap et de la santé » définie en 2001 par l'organisation mondiale de la santé. Selon cette définition, le handicap suppose toujours une altération anatomique ou fonctionnelle mais les difficultés qui en résultent pour les personnes pour effectuer les gestes de la vie quotidienne et participer à la vie sociale sont aussi prises en compte.

Ce paragraphe modifie également l'article L. 114-1 du code de l'action sociale et des familles pour compléter la liste des droits fondamentaux reconnus à tous les citoyens auxquels la collectivité nationale garantit plus particulièrement l'accès aux personnes handicapées.

Il peut paraître superflu de préciser ces droits et l'on peut s'interroger sur les raisons qui ont poussé le législateur, lors du vote de la loi d'orientation du 30 juin 1975, à rappeler une telle évidence. La justification de ce rappel réside sans doute dans le fait que, si l'égalité des droits des personnes handicapées est bien un principe acquis, la mise en oeuvre de ces droits suppose que la loi organise l'accès des personnes handicapées au droit commun, au besoin en l'adaptant ou en le complétant par des dispositifs spécifiques.

Au demeurant, cette « liste » des droits fondamentaux n'est que peu modifiée par rapport au droit existant : seuls sont introduits le droit au logement et le droit d'accéder aux nouvelles technologies de l'information. L'apport le plus innovant de cet alinéa réside sans doute dans l'obligation faite à la collectivité nationale d'assurer l'accueil et l'accompagnement des personnes qui ne peuvent exprimer seules leurs besoins.

Conformément aux principes énoncés, le principe de non-discrimination pour l'accès aux institutions et au cadre de vie voit sa portée élargie, puisqu'il n'est plus fait référence à une quelconque condition d'aptitude de la personne handicapée.

Les modifications apportées par le projet de loi au second alinéa de l'article L. 114-1 sont, en revanche, d'une toute autre importance, puisqu'il s'agit de définir enfin le contenu du droit à compensation, dont le principe avait été introduit par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002.

La définition proposée est beaucoup plus large que celle qui est ordinairement retenue et qui se limite aux aspects proprement individuels de la compensation, à savoir les aides humaines - y compris dans le cadre de la scolarité - et techniques et les aménagements du logement et du cadre du travail. Elle inclut en effet des moyens collectifs de répondre aux besoins particuliers de compensation, comme l'accueil dans un établissement spécialisé, le suivi par un service d'accompagnement à la vie sociale, le soutien apporté par un groupe d'entraide mutuelle.

La nouvelle rédaction de l'article L. 114-3 du code de l'action sociale et des familles vient ensuite compléter la définition des actions concourant à la prévention du handicap déjà donnée par l'article 6 du projet de loi relatif à la santé publique actuellement en cours d'examen par le Parlement : aux aspects sanitaires mentionnés dans ce projet de loi qui s'adresse à l'ensemble de la population, il ajoute une dimension sociale d'information, d'accompagnement des personnes et des familles, de formation des professionnels et de sensibilisation du public. Afin de permettre aux personnes handicapées psychiques de s'apporter une aide mutuelle, il est prévu, comme cela se pratique dans de nombreux pays, que la prévention puisse également s'appuyer sur des lieux d'accueil spécifiques.

Un nouvel article L. 114-3-1 est enfin introduit dans le code de l'action sociale et des familles concernant la recherche sur le handicap. Il vise encore une fois à compléter les aspects strictement sanitaires prévus dans le projet de loi relatif à la santé publique, en prévoyant que cette recherche doit avoir un caractère pluridisciplinaire et associer non seulement des organismes de recherche au sens strict, mais aussi les établissements d'enseignement supérieur.

Le paragraphe II du présent article codifie ensuite les dispositions introduites par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé et connues sous l'appellation de « dispositif anti-Perruche ». Il prévoit que ses dispositions - qui interdisent à un enfant de demander réparation d'un préjudice qu'il aurait subi du fait de sa naissance et qui limite l'indemnisation des parents au seul préjudice moral, à l'exclusion des « charges particulières découlant, tout au long de la vie de l'enfant, de [son] handicap » - sont applicables aux instances en cours à la date d'entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002, à l'exception de celles où il avait été irrévocablement statué sur le principe de l'indemnisation.

Le paragraphe III abroge, par coordination, des dispositions de la loi du 4 mars 2002 qui soit ont déjà été codifiées par des lois antérieures, soit le sont par le présent article.

Le paragraphe IV précise, conformément au principe de spécialité législative prévu pour ces territoires, les dispositions du présent article applicables à Mayotte et dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). Il s'agit des dispositions relatives aux droits fondamentaux prévues au paragraphe I, de celles relatives à l'interdiction de demander réparation d'un préjudice du fait de sa naissance figurant au II et des dispositions de coordination concernant la loi relative aux droits des malades mentionnées au III.

Le paragraphe V , enfin, codifie les dispositions applicables à Mayotte et dans les TAAF dans le code de l'action sociale et des familles.

II - La position de votre commission

Votre commission ne peut qu'approuver les principes généraux définis par le présent article. Elle se félicite tout particulièrement qu'une définition soit enfin donnée du droit à compensation.

Elle tient à souligner que l'étendue donnée au droit à compensation, s'agissant notamment des moyens collectifs de compensation que sont les établissements et services spécifiquement destinés aux personnes handicapées, emporte des conséquences pratiques sur le champ de la prestation de compensation prévue à l'article 2 et sur la nature de l'aide apportée aux personnes handicapées pour financer leurs frais de séjour dans ces établissements ou les prestations de ces services. Elle veillera d'ailleurs à donner un contenu au droit à compensation pour ces dernières.

Outre deux amendements rédactionnels , votre commission vous propose d'adopter deux amendements à cet article :

- le premier vise à inscrire, parmi les droits fondamentaux garantis à l'ensemble des citoyens et auxquels la collectivité nationale garantit l'accès des personnes handicapées, la liberté du choix de vie . Votre commission estime qu'il est particulièrement important de rappeler ici cette liberté fondamentale car elle prend un relief tout particulier pour les personnes handicapées qui sont souvent, aujourd'hui, contraintes à des modes de vie qui ne correspondent pas forcément à leurs aspirations ;

- le second vise à placer l'intégration scolaire en milieu ordinaire parmi les objectifs poursuivis par les actions de l'État , des collectivités territoriales, des organismes de sécurité sociale et de l'ensemble des partenaires publics et privés en faveur des personnes handicapées car celle-ci conditionne souvent les possibilités de maintien, dans un milieu professionnel et social ordinaire, de la personne handicapée devenue adulte.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

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