CHAPITRE IX
-
L'apprentissage
Article 28
(art. L. 117-3 du
code du travail)
Dérogations à la limite d'âge
d'entrée en contrat
d'apprentissage
Objet : Cet article vise à introduire deux
nouveaux cas de dérogation à la limite d'âge de conclusion
d'un contrat d'apprentissage.
I - Le dispositif proposé
L'apprentissage est une forme d'éducation alternée qui
relève de la formation initiale. Les dispositions qui le concernent
figurent au livre I du code du travail. Il a pour but de donner à de
jeunes travailleurs ayant satisfait à l'obligation scolaire une
formation générale théorique et pratique d'une
durée comprise entre un et trois ans en vue de l'obtention d'une
qualification professionnelle sanctionnée par un diplôme ou titre
homologué par l'Education nationale. En 2002, il y avait environ
364.000 apprentis auxquels s'ajoutent les 9.000 élèves en
classes de préapprentissage.
L'article L. 117-3 du code du travail dispose que le contrat
d'apprentissage est ouvert aux jeunes de 16 à 25 ans, au début de
l'apprentissage. Le présent article vise à
créer des
dérogations à cette limite d'âge pour des personnes de plus
de 25 ans dans deux cas
:
- lorsque le contrat proposé fait suite fait suite à un
contrat d'apprentissage précédemment souscrit et conduit à
un niveau de diplôme supérieur à celui obtenu à
l'issue du contrat précédent ;
- lorsqu'il y a eu rupture de contrat pour des causes indépendantes
de la volonté de l'apprenti ou suite à une incapacité
physique et temporaire de celui-ci.
Ce n'est pas la première dérogation liée à
l'âge qui est ainsi introduite dans le droit relatif à
l'apprentissage. Ainsi, la loi n° 2000-1207 du
13 décembre 2000 a porté à 30 ans l'âge limite
pour l'apprentissage maritime dans les départements d'outre mer. De
même, le contrat d'apprentissage peut être ouvert aux personnes de
26 ans révolus au début de leur apprentissage, auxquelles la
qualité d'handicapé est reconnue.
Cette disposition n'a pas pour objet de permettre aux jeunes d'entrer en
apprentissage pour la première fois après 25 ans mais de
favoriser la poursuite d'un apprentissage amorcée après cet
âge, soit pour acquérir un diplôme plus élevé
soit pour conclure un nouveau contrat après une interruption
accidentelle.
Cette dérogation s'inspire des recommandations formulées par le
Livre blanc publié par M. Renaud Dutreil, secrétaire
d'État aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à
l'artisanat, aux professions libérales et à la
consommation : «
Moderniser l'apprentissage :
propositions pour former plus et mieux
» :
«
Actuellement, nul ne peut signer un contrat d'apprentissage si,
à la date de signature du contrat, il est âgé de plus de 25
ans.
« Cette rigidité constitue un frein au développement de
l'apprentissage dans l'enseignement supérieur et empêche des
jeunes s'étant fourvoyés dans des formations dans
débouché pour eux, de se tourner vers l'apprentissage pour y
suivre un parcours long (plusieurs contrats successifs).
« Par ailleurs, cette restriction absolue apparaît comme une
anomalie dans la mesure où la formation initiale, dont relève
l'apprentissage, ne connaît pas de limite d'âge.
« Enfin, dans l'optique de la possibilité donnée
à l'employeur d'ouvrir une période d'apprentissage dans un CDI
(voir article 29 du projet de loi), la limite d'âge de 25 ans semble
extrêmement restrictive
»
.
Toutefois, ces dérogations sont doublement encadrées :
- d'une part, elles doivent être accordées par
«
l'autorité administrative chargée de
l'enregistrement du contrat
». Aux termes de l'article
L. 117-14 non modifié par le présent projet de loi, il peut
s'agir de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la
formation professionnelle, du service départemental de l'inspection du
travail, de l'emploi et de la politique sociale agricole, de la subdivision
d'inspection du travail des transports ;
- d'autre part, un décret fixera les conditions d'obtention de ces
dérogations ainsi que le délai maximum dans lequel le contrat
d'apprentissage doit être souscrit après l'expiration du contrat
précédent.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté
deux amendements
sur
proposition de la commission de la commission des Affaires culturelles,
familiales et sociales.
Le premier vise à simplifier les formalités administratives
d'enregistrement et de contrôle du contrat d'apprentissage
dérogatoire institué au présent article. Estimant qu'il
n'était pas nécessaire de prévoir une procédure
administrative spécifique, l'Assemblée nationale préconise
d'appliquer le droit commun à la procédure d'enregistrement des
contrats conclus à titre dérogatoire.
Le second est un amendement rédactionnel de conséquence.
III - La position de votre commission
Votre commission propose
un amendement
au présent article tendant
à créer un nouveau cas de dérogation par l'âge en
faveur des travailleurs handicapés de moins de trente ans dont le
handicap peut nécessiter un apprentissage plus long.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi
amendé.
Article 29
(art. L. 115-3 nouveau du code du travail)
Suspension du
contrat de travail pour cause
d'apprentissage
Objet : Cet article vise à autoriser la suspension
d'un contrat de travail à durée indéterminée en vue
de la conclusion d'un contrat d'apprentissage.
I - Le dispositif proposé
Le dispositif du présent article s'inspire du Livre blanc
précité de M. Renaud Dutreil. Celui-ci propose de donner aux
entreprises la possibilité d'ouvrir une période d'apprentissage
au sein d'un contrat à durée indéterminée. Cette
mesure est ainsi justifiée :
«
L'accord national interprofessionnel sur la formation tout au
long de la vie prévoit d'ouvrir une période de
professionnalisation à l'intérieur d'un CDI.
« Or, la reconversion profonde de certains salariés ou la
préparation de futurs créateurs-repreneurs en poste dans une
entreprise pourrait tout à fait justifier une formation de type
apprentissage dans laquelle les contraintes de formation sont plus importantes
que celles du futur contrat de professionnalisation.
« Il est donc proposé d'offrir la possibilité d'ouvrir
une période d'apprentissage au sein d'un CDI.
« Le public visé serait celui des populations entrées
en contrat jeune avec de faibles niveaux de formation ou des salariés
voulant obtenir, par la voie diplômante, une nouvelle qualification
éloignée de leurs compétences exercées.
« Cette possibilité s'avérerait importante pour les
entreprises dont la branche n'aurait pas étendu le quota d'heures de
formation fixée par défaut à 15 % du temps de travail
pour le contrat de professionnalisation
. »
Le présent article propose donc de créer un article L. 115-3
dans le code du travail disposant que
le contrat de travail à
durée indéterminée peut, par accord entre le
salarié et l'employeur, être suspendu pendant la durée d'un
contrat d'apprentissage conclu avec le même employeur
. La
durée de la suspension est égale à la durée de la
formation nécessaire à l'obtention de la qualification
professionnelle recherchée.
Ce dispositif a vocation à aider les jeunes à faible
qualification entrés très tôt dans la vie active à
accéder à des formations diplômantes.
Pendant la suspension du contrat de travail, le salarié est titulaire
d'un contrat d'apprentissage et bénéficie à ce titre de la
même couverture sociale et des mêmes droits à congés
que l'ensemble des salariés de l'entreprise. Toutefois, sa
rémunération n'est pas maintenue. Le maintien de la
rémunération limiterait fortement la portée de ce nouveau
dispositif, étant peu probable que l'employeur y consente si le
salarié est absent de l'entreprise.
En tout état de cause, à l'issue du contrat d'apprentissage, le
jeune qu'il ait ou non acquis un diplôme ou un titre professionnel,
retrouve son précédent emploi ou un emploi équivalent. Le
contrat peut même être prorogé, par avenant, pour une
durée d'un an au plus (article L. 117-9 du code du travail).
Néanmoins, toutes ces précisions, confirmées par le
Gouvernement, n'ont pas été introduites dans le présent
article.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale n'a adopté aucun amendement au
présent article.
III - La position de votre commission
L'Assemblée nationale a rejeté, sur un avis défavorable du
Gouvernement, un amendement tendant à supprimer le présent
article pour les motifs suivants :
- la possibilité d'introduire un contrat d'apprentissage à
l'intérieur d'un contrat de travail risque de «
brouiller
complètement les limites entre la formation initiale et la formation
continue
» ;
- d'autre part, «
si la suspension du contrat de travail est
un cas de figure bien connu du droit du travail, la conclusion, entre les deux
mêmes parties qui ont suspendu ce contrat, d'un autre contrat de travail
parallèle, en l'espèce un contrat d'apprentissage, constitue pour
le moins une curiosité juridique
» ;
- enfin, «
les conséquences de la suspension du
contrat de travail ne sont que très sommairement définies dans
cet article, ce qui pose la question des garanties apportées au
salarié. Ainsi, le présent article laisse de côté
l'hypothèse où l'apprenti, sans commettre de faute
vis-à-vis de l'employeur, échouerait au cours de la formation et
souhaiterait anticiper son retour dans son statut antérieur de
salarié de droit commun.
Pour le reste, aucune des garanties
habituellement apportées dans les différents cas de suspension du
contrat de travail n'est ici présente : conservation du salaire ou
du moins garantie de le retrouver à la fin de la période de
suspension ; conservation des avantages liés à
l'ancienneté, voire prise en compte à ce titre de la
période de suspension ; obligation pour l'employeur de garantir en
fin de suspension un emploi au moins équivalent à celui
antérieur à la période d'apprentissage (on se place dans
l'hypothèse où le salarié aurait
échoué)... »
Votre commission considère ce dispositif pertinent pour les jeunes
rentrés très tôt dans la vie active. C'est la raison pour
laquelle, s'en remettant aux engagements du Gouvernement, elle estime que les
dispositions du présent article ne pourront avoir qu'un impact positif
sur la qualification des jeunes actifs.
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans
modification.
Article 30
(art. L. 117-bis-3 et L. 212-13 du code du
travail)
Durée quotidienne de travail applicable
aux apprentis
âgés de moins de 18
ans
Objet : Cet article vise à relever de sept
à huit heures la durée légale quotidienne de travail des
apprentis de moins de dix huit ans.
I - Le dispositif proposé
L'article L. 117-
bis
-3 du code du travail dispose que les apprentis
de l'un ou de l'autre sexe âgés de moins de dix huit ans ne
peuvent être employés à un travail effectif excédant
sept heures par jour non plus que la durée fixée, pour une
semaine. Toutefois, à titre exceptionnel, des dérogations peuvent
être accordées, dans la limite de cinq heures par semaine par
l'inspecteur du travail après avis conforme du médecin du travail
de l'établissement.
Le
paragraphe I
, modifiant l'article L. 117-
bis
-3 du code du
travail, propose de
relever de sept à huit heures la durée
quotidienne de travail des apprentis de moins de dix huit ans
. Il est ainsi
procédé au retour du droit antérieur à la loi
n° 2002-73 du 17 janvier 2002 relative à la modernisation
sociale.
Le
paragraphe II
, modifiant l'article L. 212-13 du code du travail
propose
la même disposition pour les jeunes travailleurs de moins de
dix huit ans bénéficiant de stages d'initiation ou d'application
en milieu professionnel dans le cadre d'un enseignement alterné ou du
déroulement de leur scolarité
.
Cette réglementation demeure respectueuse de la directive
européenne 94/33 du 22 juin 1994 relative à la protection des
jeunes au travail et transposée par l'ordonnance n° 2001-174
du 22 février 2001 qui a instauré le principe d'une durée
quotidienne de travail de huit heures par jour et quarante heures par semaine,
les dérogations étant fortement encadrées.
Elle s'inspire également de la recommandation du Livre blanc de
l'apprentissage de M. Renaud Dutreil, selon lequel la durée
légale de travail appliquée aux jeunes, en raison de son
caractère strict, «
est extrêmement contraignante
pour nombre de professions, notamment, celles comme les métiers du
bâtiment, où le travail ne s'effectue pas au sein de l'entreprise.
Cette contrainte suffit parfois à elle seule à décourager
un chef d'entreprise de prendre un jeune en apprentissage. De plus, cette
règle apparaît plus stricte que celle imposée par la
directive européenne relative à la protection des jeunes au
travail
».
Ainsi, le relèvement de la durée maximale quotidienne de travail
«
permettra, tout en conservant la limite de la durée
hebdomadaire à 35 heures d'introduire de la souplesse dans la
gestion des heures travaillées par les jeunes, dans les métiers
qui le nécessitent
».
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans
modification.
III - La position de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans
modification.
Article 31
(art. L. 117-13 du code du travail)
Délai de conclusion
des contrats d'apprentissage
Objet : Cet article vise à porter de deux à
trois mois la période après la rentrée scolaire durant
laquelle les contrats d'apprentissage pourront être conclus de droit.
I - Le dispositif proposé
L'article L. 117-13 du code du travail actuellement en vigueur dispose que
le contrat d'apprentissage fixe la date du début de l'apprentissage.
Sauf dérogation, cette date, ne peut être antérieure de
plus de trois mois ni postérieure de plus de deux mois au début
du cycle du centre de formation d'apprentis que doit suivre l'apprenti.
En pratique, cela signifie que la période de signature des contrats
s'étendrait alors de juillet à décembre.
Le Livre blanc précité souligne les limites du droit actuellement
applicable : «
L'objectif d'élargissement de la base
de recrutement de l'apprentissage va entraîner l'arrivée dans le
dispositif de deux types de jeunes qui ne peuvent pas forcément
s'inscrire dans le calendrier traditionnel de la rentrée en
apprentissage :
«
• des jeunes, en difficulté ou pas, qui ont
besoin d'affiner leur projet avant d'entrer dans un dispositif de formation ;
«
• des jeunes ayant de bonnes connaissances
générales mais s'étant mal orientés dans le
système scolaire et/ou qui ne trouvent pas d'emploi parce que leur
parcours de formation ne leur a pas réellement donné un
métier.
« Les cas de rupture de contrat d'apprentissage en cours
d'année peuvent se situer dans l'un ou l'autre des deux cas
cités
».
S'appuyant sur cette analyse, le Gouvernement propose de porter de deux
à trois mois la période postérieure à la
rentrée en CFA pendant laquelle des contrats d'apprentissage peuvent
être conclus. Il y avait certes une solution alternative qui consistait
à instaurer une seconde rentrée en CFA, par exemple en
février. Néanmoins, elle a été
considérée comme trop coûteuse et sa mise en oeuvre dans
les centres de formation d'apprentis trop difficile. C'est d'ailleurs pour des
raison identiques que ce dispositif de type « rentrée tardive
», un temps envisagé, a été expérimenté
et a dû être abandonné en 1998.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale n'a pas apporté de modification au
présent article.
III - La position de votre commission
Estimant que le dispositif ainsi proposé apportera davantage de
souplesse à la mise en oeuvre de l'apprentissage, votre commission vous
propose d'adopter cet article sans modification.