CHAPITRE IV
DISPOSITIONS CONCERNANT LA LUTTE
CONTRE LES DISCRIMINATIONS

Les articles 12 A à 16 bis du projet de loi tendent à renforcer la lutte contre les discriminations raciales.

En effet, on observe depuis deux ans une augmentation inquiétante des violences racistes, xénophobes et antisémites (lieux de culte incendiés, personnes frappées ou insultées en raison de la couleur de leur peau ou de leur religion), directement liée à l'actualité française et internationale. Si la violence raciste vise majoritairement la population d'origine maghrébine, les actes antisémites connaissent une progression importante, d'ailleurs soulignée par la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) dans son rapport d'activité pour l'année 2002 remis le 27 mars dernier au Premier ministre. Si les sentiments racistes semblent être moins partagés depuis 1995, leur expression est plus violente. En outre, ce phénomène concerne de plus en plus les jeunes, notamment dans les écoles.

Les textes réprimant le racisme, la xénophobie et les discriminations sont pourtant nombreux.

Au plan international ont été adoptées depuis la fin de la seconde guerre mondiale de nombreuses déclarations, recommandations ou conventions tendant à prohiber les discriminations raciales, ethniques ou religieuses, parmi lesquelles la charte des Nations Unies du 26 juin 1945 (article 1 er ), la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 (article 2), la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (article 14 120 ( * ) ), la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (article 3), la Convention internationale du 7 mars 1966 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale (préambule) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 (article 2).

Cette préoccupation a également été prise en compte au niveau de l'Union européenne , par le traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté européenne 121 ( * ) , puis le traité sur l'Union européenne 122 ( * ) .

Depuis juin 1997, un observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes situé à Vienne doit permettre l'échange d'informations et d'expériences dans ce domaine.

En outre, la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique a défini un cadre minimal afin d'interdire la discrimination fondée sur la race ou l'origine ethnique et d'en protéger juridiquement les victimes, qui doivent pouvoir avoir recours à une procédure administrative et judiciaire pour faire valoir leur droit à l'égalité de traitement. La charge de la preuve incombe au défendeur lorsque le plaignant « établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ».

La directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail tend pour sa part à interdire les discriminations directes et indirectes sur le lieu de travail.

Par ailleurs, une proposition de décision-cadre présentée le 28 novembre 2001 par la Commission européenne concernant la lutte contre le racisme et la xénophobie -et encore en cours de discussion- définit le racisme et la xénophobie comme « la croyance dans la race, la couleur, l'ascendance, la religion ou les convictions, l'origine nationale ou l'origine ethnique en tant que facteur déterminant de l'aversion envers des individus ou des groupes », et tend à imposer aux Etats membres d'ériger en infractions pénales une série de comportements intentionnels, tels que l'incitation publique à la violence ou à la haine, les insultes ou menaces à caractère raciste ou xénophobe, l'apologie publique de crimes contre l'humanité, le négationnisme, ainsi que la diffusion ou la distribution de tout contenu comportant des propos racistes ou xénophobes, y compris sur Internet.

En France , la prohibition du racisme et des discriminations fait partie du bloc de constitutionnalité, puisque le préambule de la Constitution de la IVème République adoptée le 27 octobre 1946, auquel fait référence la Constitution de la Vème République, déclare : « Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont tenté d'asservir et de dégrader la personne humaine, le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés ». De plus, en 1958, dans le contexte de la décolonisation, a été ajouté à l'article 1 er que : « La France (...) assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion ».

Ce n'est qu'avec la loi n° 72-546 du 1 er juillet 1972 réprimant directement les agissements discriminatoires qu'ont été érigés en infractions certains actes commis à raison de « l'origine ou de l'appartenance ou de la non appartenance [d'une personne] à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ». Les phénomènes racistes et discriminatoires ayant d'abord été abordés sous l'angle de la sanction des abus de la parole ou de l'écrit propagés dans le public, ces dispositions ont été insérées dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse .

Les dispositions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse relatives aux discriminations

Son article 24 punit d'un an d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende ceux qui auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

L'article 24 bis de cette loi, qui résulte de la loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe punit en outre d'un an d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende ceux qui auront contesté l'existence d'un ou plusieurs crimes contre l'humanité tels que définis par l'article 6 du statut du tribunal militaire international de Nuremberg. La Cour de cassation 123 ( * ) a estimé que cet article entre dans le champ des exceptions prévues par l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatif à la liberté d'expression 124 ( * ) .

Les articles 32 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 sanctionnent la diffamation et l'injure publique commises envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Ils ont motivé de nombreuses procédures, généralement à l'initiative d'associations habilitées à exercer les droits de la partie civile.

En effet, l'article 48-1 de cette loi permet aux associations de lutte contre le racisme d'exercer les droits reconnus à la partie civile pour les infractions de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence raciales, de diffamation et d'injures publiques à caractère racial, l'association devant avoir l'accord des personnes lorsque l'infraction est commise envers des personnes considérées individuellement. L'article 48-2 permet pour sa part aux associations défendant les intérêts moraux et l'honneur de la Résistance ou des déportés d'exercer les droits reconnus à la partie civile, notamment s'agissant de l'infraction de contestation de l'existence d'un crime contre l'humanité.

Néanmoins, ces délits ne sont constitués que s'ils sont commis « soit par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l'écrit, de la parole ou de l'image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affiches exposés au regard du public, soit par tout moyen de communication audiovisuelle ».

Condamnations prononcées sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881

1997

1998

1999

2000

2001*

Provocation à la discrimination nationale, sociale, religieuse (art. 24)

3

7

15

7

15

Contestation de l'existence du crime contre l'humanité (art. 24 bis)

1

3

2

3

2

Diffamation en raison de la race, la religion ou l'origine (art. 32)

2

1

3

3

9

Injure publique en raison de la race, la religion ou l'origine (art. 33)

83

83

82

98

106

* Provisoire

Source : Casier judiciaire.

En revanche, les diffamations ou injures non publiques commises envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée sont punies de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe par les articles 624-3 et 624-4 du code pénal.

Les dispositions du code pénal relatives aux discriminations

Le nouveau code pénal a regroupé l'ensemble des discriminations dans le Livre II parmi les « atteintes à la dignité de la personne » et créé de nouvelles infractions renforçant la répression des délits racistes (responsabilité des personnes morales, aggravation du délit de profanation des sépultures, incrimination des crimes contre l'humanité).

Le génocide, qui figure parmi les crimes contre l'humanité, est défini comme un « plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux », et puni de la réclusion criminelle à perpétuité. L'article R. 645-1 du code pénal punit de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe le port ou l'exhibition en public d'un uniforme, un insigne ou un emblème rappelant ceux portés par les membres d'une organisation déclarée criminelle par le tribunal de Nuremberg ou toute personne reconnue coupable de crime contre l'humanité.

Comme en matière de délits de presse, les associations de lutte contre le racisme peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile pour certaines infractions : discriminations, atteintes volontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne (meurtre, tortures et actes de barbarie, violences, menaces), ainsi que les destructions ou dégradations de biens.

L'article 225-1 du code pénal définit la discrimination comme une distinction opérée entre les personnes « à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs moeurs, de leur orientation sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

L'article 225-2 la punit de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende lorsqu'elle consiste à refuser la fourniture d'un bien ou d'un service, à entraver l'exercice normal d'une activité économique quelconque, à refuser d'embaucher, à sanctionner ou à licencier une personne, à subordonner la fourniture d'un bien ou d'un service à une condition fondée sur l'un des éléments visés à l'article 225-1, à subordonner une offre d'emploi, une demande de stage ou une période de formation en entreprise à une condition fondée sur l'un des éléments visés à l'article 225-1, à refuser d'accepter une personne à certains stages.

Condamnations prononcées sur le fondement
de l'article 225-2 du code pénal

1997

1998

1999

2000

2001*

Discrimination dans l'offre ou la fourniture d'un bien ou d'un service à raison de l'origine, l'ethnie ou la nationalité

0

1

2

2

4

Discrimination dans l'offre ou la fourniture d'un bien ou d'un service à raison de la race

2

9

0

5

1

Discrimination dans une offre d'emploi à raison de l'origine, l'ethnie ou la nationalité

0

1

0

1

1

Discrimination dans une offre d'emploi à raison de la race

1

1

1

7

1

Refus d'embauche à raison de l'origine, l'ethnie ou la nationalité

0

2

2

0

2

Refus d'embauche à raison de la race

0

0

1

1

0

Licenciement à raison de l'origine, l'ethnie ou la nationalité

1

0

0

0

0

Entrave à l'exercice d'une activité économique à raison de l'origine, l'ethnie ou la nationalité

0

1

1

0

0

Entrave à l'exercice d'une activité économique à raison de la race

0

0

0

0

1

* Provisoire

Source : Casier judiciaire

L'article 432-7 du code pénal punit de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende la discrimination commise à l'égard d'une personne physique ou morale par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission, lorsqu'elle consiste à refuser le bénéfice d'un droit accordé par la loi ou à entraver l'exercice normal d'une activité économique quelconque.

Enfin, la loi n° 2001-1066 du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations a modifié le code du travail afin de transposer les directives adoptées à la suite du Conseil européen de Tampere, et sanctionner les comportements discriminatoires lors d'un recrutement, dans le cadre du pouvoir disciplinaire de l'employeur ou encore dans le cadre du règlement intérieur de l'entreprise ou d'une convention collective. En cas de litige, l'article L. 122-45 du code du travail opère un renversement de la charge de la preuve , la partie défenderesse devant prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination au vu des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte présentés.

Ont été mises en place des structures spécifiques de lutte contre le racisme et de soutien aux victimes de discriminations raciales :

- le GELD (Groupement d'études et de lutte contre les discriminations) conduit et centralise les études et les données statistiques afin de mieux identifier les phénomènes racistes et d'en combattre les causes. Il gère en outre le numéro d'appel 114 mis en service en mai 2000, qui permet aux victimes ou aux témoins de discriminations de signaler des cas ou des pratiques qui leur semblent discriminatoires 125 ( * ) ;

- les CODAC (commissions départementales d'accès à la citoyenneté), créées en janvier 1999, lieux d'écoute et de conseil, mettent en place les programmes départementaux de lutte contre les discriminations et l'exclusion.

Les récentes avancées

Au vu de l'ampleur des cas de discrimination signalés, le Président de la République a annoncé le 14 octobre dernier la mise en place d'une autorité administrative indépendante de lutte contre toutes les formes de discrimination, préconisée par le Haut conseil à l'intégration dès 1998.

De même, le 21 mars dernier, à l'occasion de la journée pour l'élimination de la discrimination raciale, le garde des sceaux a adressé une circulaire aux procureurs généraux afin de réprimer systématiquement et avec sévérité les actes de discrimination raciale, qui portent atteinte « à la nécessaire cohésion de la Nation et au respect du pacte républicain » 126 ( * ) .

Encore récemment, le droit positif ne prenait pas en compte le fait que le délit soit commis « à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, des personnes décédées à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » comme élément constitutif d'une infraction de droit commun ou comme une circonstance aggravante de l'infraction commise (sauf en ce qui concerne la profanation de sépulture et l'atteinte à l'intégrité du cadavre réprimées à l'article 225-18).

Or, la Commission européenne a présenté le 28 novembre 2001 une proposition de décision-cadre concernant la lutte contre le racisme et la xénophobie dont l'article 8 demande aux Etats membres de « faire en sorte que la motivation raciste et xénophobe puisse être considérée comme une circonstance aggravante dans la détermination de la sanction ».

La loi n° 2003-88 du 4 février 2003 visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe adoptée à l'initiative de MM. Pierre Lellouche et Jacques Barrot en a donc anticipé la transposition. Néanmoins, elle ne concerne que les infractions racistes ou relatives à la religion et laisse de côté les discriminations.

Le nouvel article 132-76 du code pénal prévoit que les peines encourues pour certains crimes ou délits sont aggravées « lorsque l'infraction est précédée, accompagnée ou suivie de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature portant atteinte à l'honneur ou la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

Cette aggravation concerne :

- le meurtre, alors passible de la réclusion criminelle à perpétuité (article 221-4) au lieu de trente années d'emprisonnement dans le régime de droit commun (article 221-1) ;

- les actes de torture ou de barbarie, passibles de vingt ans de réclusion criminelle (article 222-3) au lieu de quinze (article 222-1) ;

- les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, punies de vingt ans de réclusion criminelle (article 222-8) au lieu de quinze (article 222-7) ;

- les violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, passibles de quinze ans de réclusion criminelle (article 222-10) au lieu de dix (article 222-9) ;

- les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours, punies de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende (article 222-12) au lieu de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende (article 222-11) ;

- les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n'ayant entraîné aucune incapacité de travail, punies de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende (article 222-13) ;

- les destructions, dégradations ou détériorations de biens appartenant à autrui, punies de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende et de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende lorsque les faits sont commis à l'encontre d'un lieu de culte, d'un établissement scolaire, éducatif ou de loisirs ou d'un véhicule transportant des enfants (article 322-2) au lieu de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende (article 322-1) ;

- les destructions, dégradations ou détériorations de biens appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes, punies de vingt ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende (article 322-8) au lieu de dix ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende (article 322-6).

Le présent projet de loi tend à compléter les dispositions récemment adoptées afin de poursuivre la politique menée par le Gouvernement en matière de lutte contre le racisme, la xénophobie et les discriminations.

Les mesures proposées par les articles 12 A à 16 bis ont pour objet :

- d'étendre le champ d'application de la circonstance aggravante créée par la loi du 3 février 2003 aux menaces, vols et extorsions, aux discriminations à caractère sexuel ainsi qu'aux refus d'accès dans des lieux accueillant du public ;

- de renforcer les peines encourues en cas de discrimination par des agents publics ou des personnes chargées d'une mission de service public ;

- d'allonger le délai de prescription de l'action publique pour certaines infractions à caractère raciste relevant de la loi du 29 juillet 1881.

La plupart de ces mesures avaient été préconisées par notre excellent collègue M. Patrice Gélard 127 ( * ) lors de l'examen de la loi du 3 février 2003.

SECTION 1
Dispositions relatives à la répression des discriminations et des atteintes
aux personnes ou aux biens présentant un caractère raciste
Article 12 A (nouveau)
(art. 132-76 du code pénal)
Circonstance aggravante liée au racisme

L'Assemblée nationale a, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement inséré un article additionnel avant l'article 12 visant à apporter une précision rédactionnelle à l'article 132-76 du code pénal introduit par la loi du 3 février 2003 précitée prévoyant une nouvelle circonstance aggravante liée au racisme, afin d'indiquer que cette circonstance aggravante ne s'applique qu'à certaines catégories d'infractions prévues par la loi .

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 12 A sans modification .

Article 12
(art. 222-18-1 et 222-18-2 nouveaux du code pénal)
Peines aggravées en matière de menaces
à caractère raciste ou discriminatoire

Les articles 12 et 13 du projet de loi visent à étendre le caractère aggravant des infractions à caractère raciste institué par la loi n° 2003-88 du 3 février 2003 aux menaces, aux vols et aux extorsions.

Il s'agissait là d'une préconisation de notre excellent collègue M. Patrice Gélard.

Le paragraphe II de l'article 12 tend à insérer dans le code pénal un nouvel article 222-18-1 prévoyant des peines aggravées pour les menaces proférées « à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

Ainsi, la menace réitérée ou matérialisée par un écrit, une image ou tout autre objet de commettre un crime ou un délit contre les personnes serait punie de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende au lieu de six mois d'emprisonnement et de 7.500 euros d'amende (premier alinéa de l'article 222-17 du code pénal).

La menace de mort (deuxième alinéa de l'article 222-18 du code pénal) ou celle de commettre un crime ou un délit contre les personnes avec ordre de remplir une condition (premier alinéa de l'article 222-18 du code pénal) serait punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende au lieu de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende.

Enfin, la menace de mort avec ordre de remplir une condition (deuxième alinéa de l'article 222-18 du code pénal) serait punie de sept ans d'emprisonnement et de 100.000 euros d'amende au lieu de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, de MM. André Vallini, Jean-Pierre Blazy, Jérôme Lambert, Jean-Yves Le Bouillonnec et les commissaires membres du groupe socialiste, ainsi que de M. Noël Mamère, Mme Martine Billard et M. Yves Cochet, et avec l'avis favorable du Gouvernement, un amendement tendant à étendre le champ de la circonstance aggravante prévue pour certaines infractions à caractère raciste aux menaces proférées à raison de l'orientation sexuelle vraie ou supposée de la victime, dans la logique des modifications apportées au code pénal par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 sur la sécurité intérieure à l'initiative de M. Pierre Lellouche.

Le paragraphe I tend à procéder à une mesure de coordination consistant à déplacer le principe de la responsabilité des personnes morales en matière de menaces de l'article 222-18-1 à l'article 222-18-2 (nouveau).

Votre commission des Lois vous propose d' adopter l'article 12 sans modification .

Article 13
(art. 311-4 et 312-2 du code pénal)
Peines aggravées en matière de vols et extorsions
à caractère raciste ou discriminatoire

L'article 13 du présent projet de loi tend à aggraver les peines encourues en matière de vols et d'extorsions lorsqu'ils sont motivés par l'appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une race ou une religion déterminée ou de son orientation sexuelle, vraie ou supposée, la prise en compte de cette dernière motivation résultant d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du Gouvernement à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur, et de MM. André Vallini, Jean-Pierre Blazy, Jérôme Lambert, Jean-Yves Le Bouillonnec et les commissaires membres du groupe socialiste.

Il s'agissait là encore d'une préconisation de notre excellent collègue M. Patrice Gélard.

Ainsi, un vol au mobile raciste ou discriminatoire serait passible de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende, au lieu de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende  (article 311-4 du code pénal), tandis qu'une extorsion, passible normalement de sept ans d'emprisonnement et de 100.000 euros d'amende, serait punie de dix ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende (article 312-2) si elle avait un fondement raciste ou discriminatoire.

Ces dispositions confortent donc la portée de la loi du 3 février 2003 et vont dans le sens d'une application plus complète de la proposition de décision-cadre du Conseil de l'Union européenne relative à la lutte contre le racisme et la xénophobie 128 ( * ) .

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 13 sans modification .

Article 14
(art. 225-2 et 432-7 du code pénal)
Renforcement de la répression à l'encontre des infractions
à caractère raciste ou discriminatoire

L'article 14 du projet de loi tend à aggraver les peines prévues à l'encontre des délits de discrimination et vise à instituer une circonstance aggravante lorsque lesdites infractions sont commises dans des lieux accueillant du public.

Le paragraphe I a pour objet de modifier et de compléter l'article 225-2 du code pénal.

- Le 1) vise à aggraver les sanctions prévues à l'encontre des faits de discrimination 129 ( * ) visés à l'article 225-2 du code pénal, c'est-à-dire le refus de fourniture d'un bien ou d'un service, l'entrave à l'exercice normal d'une activité économique, la subordination de la fourniture d'un bien ou d'un service, d'un emploi, d'un stage ou d'une formation à une condition fondée sur la race, la religion, l'orientation sexuelle, le sexe ou l'âge. Les peines seraient portées de deux ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende à trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende.

- Le 2) tend à compléter l'article 225-2 afin de prévoir que lorsqu'un « refus discriminatoire » est commis dans un lieu accueillant du public ou aux fins d'en interdire l'accès, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende.

Comme l'indiquait notre excellent collègue M. Patrice Gélard, les opérations de « testing » conduites ces dernières années par certaines associations à l'entrée de discothèques, et admises comme mode de preuve par la Cour de cassation 130 ( * ) , ont montré que les comportements discriminatoires n'étaient pas rares dans les établissements accueillant du public.

De même, le paragraphe II tend à aggraver les peines prévues par l'article 432-7 du code pénal en cas de discrimination commise par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, lorsqu'elle consiste à refuser le bénéfice d'un droit accordé par la loi ou à entraver l'exercice normal d'une activité économique. Les peines seraient portées de trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende à cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 14 sans modification .

Article 15
(art. 2-1 du code procédure pénale)
Constitution de partie civile par certaines associations

Cet article tend à modifier les règles relatives à l'exercice par les associations combattant le racisme ou assistant les victimes de discriminations des droits reconnus à la partie civile.

Le 1° vise à compléter la liste des infractions pour lesquelles ce droit peut s'exercer, afin de viser les vols et les extorsions, par coordination avec les dispositions prévues par l'article 13 du projet de loi.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement prévoyant que ce droit peut également être exercé s'agissant des menaces, par coordination avec les dispositions prévues à l'article 14 du projet de loi.

En outre, le 2° tend à préciser dans l'article 2-1 du code de procédure pénale que lorsque l'infraction a été commise envers une personne considérée individuellement, l'association doit justifier avoir reçu l'accord de la personne intéressée ou, si celle-ci est mineure, celui du titulaire de l'autorité parentale ou du représentant légal, lorsque cet accord peut être recueilli.

La subordination de l'action de l'association à l'accord de la victime est déjà prévue s'agissant de la lutte contre les violences sexuelles (article 2-2 du code de procédure pénale), contre la violence faite aux enfants (article 2-3 du code de procédure pénale), ou contre les discriminations fondées sur le sexe ou les moeurs (article 2-6 du code de procédure pénale).

De plus, l'article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse prévoit déjà que les associations ne peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne la diffamation (deuxième alinéa de l'article 32) et l'injure (troisième alinéa de l'article 33) qu'avec l'accord de la victime.

Cette règle du consentement de la victime ne s'applique que si celle-ci est une personne physique.

A l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 15 ainsi modifié .

SECTION 2
Dispositions procédurales relatives à la répression
des messages racistes ou xénophobes
Article 16
(art. 65-3 nouveau de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse)
Modification du délai de prescription
pour les messages racistes ou xénophobes publiés par voie de presse

En 1996, M. Jacques Toubon, alors garde des Sceaux, avait proposé dans un projet de loi 131 ( * ) de retirer de la loi de 1881 les infractions de provocation, de diffamation et d'injure raciales pour les insérer dans le code pénal. Il estimait en effet que leur insertion dans la loi sur la presse imposait le respect de règles de procédure spécifiques, comme le délai de prescription de trois mois (contre trois ans pour les délits de droit commun), qui a souvent pour conséquence, s'agissant d'écrits racistes ou xénophobes diffusés en faible nombre, d'empêcher le parquet ou les associations habilitées de réagir en temps utile pour engager des poursuites.

Si ce projet de loi n'a jamais été discuté, notre excellent collègue M. Patrice Gélard avait, lors de l'examen de la loi du 8 février 2003 précitée, préconisé de réexaminer l'opportunité d'exclure de la loi sur la presse les provocations, diffamations et injures raciales, ou du moins de prévoir des règles spécifiques de prescription concernant les infractions à caractère raciste.

Actuellement, l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 prévoit que « l'action publique et l'action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi se prescriront après trois mois révolus à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s'il en a été fait ».

Le présent article tend à insérer un article 65-3 nouveau dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse portant ce délai de prescription de trois mois à un an en ce qui concerne les délits suivants commis par voie de presse ou par tout autre moyen de publication :

- la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (huitième aliéna de l'article 24) ;

- la contestation de l'existence d'un ou plusieurs crimes contre l'humanité (article 24 bis) ;

- la diffamation à raison de l'origine ou de l'appartenance ou de la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion (deuxième alinéa de l'article 32) ;

- l'injure à raison de l'origine ou de l'appartenance ou de la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion (troisième alinéa de l'article 33).

La question d'une remise en cause, même marginale, de la loi de 1881 sur la liberté de la presse est très sensible. Néanmoins, ainsi que l'a souligné le garde des Sceaux lors de l'examen à l'Assemblée nationale de cet article, il ne s'agit là que d'une modification très limitée de la loi de 1881, qui vise à réprimer plus efficacement des infractions extrêmement graves en matière de racisme et de xénophobie (et d'ailleurs punies de peines d'emprisonnement, à la différence de la quasi-totalité des autres infractions prévues par la loi du 29 juillet 1881).

Cette modification s'avère indispensable du fait de l'évolution technologique et du développement d'Internet, qui entraîne une augmentation exponentielle des informations diffusées. Or, du fait des spécificités du réseau Internet (consultation continue après la première mise en ligne, publication spontanée de messages par des journalistes auto-proclamés, caractère plus ou moins confidentiel de certains sites notamment), il est extrêmement difficile de repérer tous les messages à caractère raciste ou xénophobe dans le délai de trois mois prévu.

Or, la Cour de cassation a, dans plusieurs arrêts rendus en 2001, estimé que le point de départ du délai de prescription de l'action publique prévu par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 devait être fixé, s'agissant d'Internet, à la date du « premier acte de publication » comme pour la presse traditionnelle sur un support écrit, celle-ci étant celle à laquelle le message avait été mis pour la première fois à la disposition des utilisateurs du réseau 132 ( * ) .

La modification apportée par le présent projet de loi apparaît donc indispensable.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative du rapporteur M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement, adopté un amendement de rectification d'une erreur matérielle.

Par un amendement , votre commission des Lois vous propose de déplacer ces dispositions avant l'article 65-2 de la loi de 1881 relatif à l'imputation sur un fait susceptible de revêtir une qualification pénale.

Le présent projet de loi contribue donc à renforcer la lutte contre le racisme et les discriminations. En outre, le paragraphe III de l'article 84 du projet de loi tend à modifier la loi n° 2003-88 du 3 février 2003 visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe, afin d'étendre son application à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna et à Mayotte.

Il conviendrait en outre que la France transpose intégralement les directives communautaires relatives à la lutte contre les discriminations, en particulier la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes, sans distinction de race ou d'origine ethnique. Cette directive, qui impose un aménagement de la charge de la preuve, couvre un champ d'application très vaste puisqu'elle vise les discriminations à raison de la race et de l'origine ethnique, non seulement dans le domaine de l'emploi, mais également dans les domaines de la protection sociale, des avantages sociaux, de l'éducation et de l'accès aux biens et services.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 16 ainsi modifié .

Division additionnelle après l'article 16
Dispositions concernant la prévention et la répression des infractions sexuelles

Votre commission vous soumet un amendement destiné à insérer une division additionnelle après l'article 16, consacrée à la prévention et à la répression des infractions sexuelles.

Article additionnel après l'article 16
(art. 131-36-1 du code pénal)
Allongement de la durée du suivi socio-judiciaire

La mesure de suivi socio-judiciaire a été introduite dans notre droit par la loi n°98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles.

Le suivi socio-judiciaire, qui peut être prononcé en cas de condamnation pour certaines infractions sexuelles, emporte pour le condamné l'obligation de se soumettre, sous le contrôle du juge de l'application des peines et pendant une durée déterminée par la juridiction de jugement, à des mesures de surveillance et d'assistance destinées à prévenir la récidive.

La durée du suivi socio-judiciaire ne peut excéder dix ans en cas de condamnation pour délit ou vingt ans en cas de condamnation pour crime.

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 16, afin d'augmenter la durée de la mesure de suivi socio-judiciaire. Il s'agit de prévoir :

- qu'en matière correctionnelle, la durée du suivi socio-judiciaire peut être portée à vingt ans par décision spécialement motivée de la juridiction de jugement ;

- que lorsque le crime est puni de trente ans de réclusion criminelle, la durée du suivi socio-judiciaire est de trente ans ;

- que lorsque le crime est puni de la réclusion criminelle à perpétuité, la cour d'assises peut décider que le suivi socio-judiciaire s'appliquera sans limitation de durée.

Article additionnel après l'article 16
(art. 706-47 et 706-47-1 nouveau du code de procédure pénale)
Organisation des dispositions relatives aux infractions sexuelles

Par un amendement ultérieur, votre commission vous proposera la création, dans le code de procédure pénale, d'un fichier des auteurs d'infractions sexuelles.

Par un amendement , elle vous propose d'insérer un article additionnel après l'article 16 pour apporter des modifications formelles au titre du code de procédure pénale consacré aux infractions sexuelles, afin qu'il comporte désormais deux chapitres, l'un consacré à des dispositions générales, l'autre au fichier des auteurs d'infractions sexuelles.

Votre commission vous propose en outre d'étendre le champ de la procédure applicable en matière d'infractions sexuelles aux délits de harcèlement sexuel et de recours à la prostitution d'un mineur, qui n'y figurent pas actuellement.

Article additionnel après l'article 16
(art. 706-53-1 à 706-53-5 du code de procédure pénale)
Fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 16 pour créer un fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles.

Des affaires récentes ont montré que les dispositifs en vigueur ne permettaient pas de connaître l'adresse de personnes condamnées pour des infractions sexuelles après l'accomplissement de leur peine.

Votre commission propose en conséquence la création d'un fichier spécifique qui, dans un souci d'efficacité, serait géré par le casier judiciaire. Ce fichier accueillerait les condamnations pour les infractions sexuelles énumérées à l'article 706-47 du code de procédure pénale.

Le fichier mentionnerait l'adresse ou la dernière adresse connue des condamnés. Les informations figurant dans le fichier seraient conservées pendant une durée de quarante ans à compter de la date de la décision judiciaire, y compris en cas d'amnistie ou de réhabilitation.

Les informations contenues dans le fichier seraient accessibles aux magistrats, aux officiers de police judiciaire pour les enquêtes portant sur des infractions sexuelles et aux préfets pour l'examen des demandes d'agrément concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs.

Les modalités de fonctionnement du fichier seraient déterminées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

Article additionnel après l'article 16
(art. 706-56 du code de procédure pénale)
Prélèvements d'empreintes génétiques

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 16 pour renforcer les règles relatives aux prélèvements d'empreintes génétiques.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 706-56 du code de procédure pénale dispose que l'officier de police judiciaire peut procéder ou faire procéder sous son contrôle, à l'égard de certains condamnés ou de certains suspects, à un prélèvement biologique destiné à permettre l'analyse d'identification de leur empreinte génétique.

Le refus de se soumettre au prélèvement biologique est puni d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende. Ces peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende lorsque la personne est condamnée pour crime.

Le présent article additionnel tend à renforcer l'efficacité de ces dispositions en prévoyant :

-la possibilité d'effectuer un prélèvement sans le consentement de l'intéressé lorsqu'il s'agit d'un condamné pour crime ;

- la possibilité d'identifier l'empreinte génétique d'une personne à partir de matériel biologique qui se serait naturellement détaché du corps de l'intéressé ;

- la création d'une incrimination sanctionnant le fait pour une personne faisant l'objet d'un prélèvement de commettre ou de tenter de commettre des manoeuvres destinées à substituer à son propre matériel biologique le matériel biologique d'une tierce personne.

Division additionnelle avant l'article 16 bis
Dispositions diverses

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer après l'article 16 du projet de loi un nouveau chapitre appelé à accueillir des dispositions diverses, en particulier l'article 16 bis du projet, inséré par l'Assemblée nationale et qui est sans rapport avec le chapitre sur les discriminations dans lequel il figure pourtant.

Article 16 bis
(art. 314-2 du code pénal)
Circonstances aggravantes en cas d'abus de confiance

Cet article additionnel résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale avec les avis favorables tant du rapporteur que du Gouvernement sur proposition de M. Guy Geoffroy, visant à prévoir deux nouvelles circonstances aggravantes pour le délit d'abus de confiance, défini à l'article 314-1 du code pénal comme le fait pour une personne de détourner au préjudice d'autrui des valeurs ou un bien qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé.

Normalement puni de trois ans d'emprisonnement et de 375.000 euros d'amende, l'abus de confiance est, en vertu de l'article 314-2, passible de sept ans d'emprisonnement et de 750.000 euros d'amende lorsqu'il est réalisé par une personne qui fait appel au public afin d'obtenir la remise de fonds ou par toute autre personne qui de manière habituelle se livre ou prête son concours, même à titre accessoire, à des opérations portant sur les biens de tiers pour le compte desquels elle recouvre des fonds ou des valeurs.

Le fait de réaliser un abus de confiance au préjudice, d'une part, d'une association faisant appel au public en vue de la collecte de fonds à des fins d'entraide humanitaire ou sociale, d'autre part, d'une personne particulièrement vulnérable (du fait de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse) constituerait désormais une circonstance aggravante.

Il s'agit d'une mesure de cohérence visant à prévoir des peines similaires à celles prévues en matière d'escroquerie par l'article 313-2 du code pénal et à prendre en compte les nouveaux seuils institués pour la détention provisoire.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 16 bis sans modification .

Article additionnel après l'article 16 bis
(art. 32-1 nouveau, 36 et 37 de la loi du 29 juillet 1881
sur la liberté de la presse, art.2 de la loi du 2 juillet 1931 modifiant l'article 70 du code d'instruction criminelle)
Offenses aux chefs d'Etat étrangers - Divulgation d'informations
relatives à une constitution de partie civile

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel pour modifier la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

Cet amendement vise à mettre notre droit en conformité avec les exigences de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, grâce à l'abrogation de plusieurs délits de presse jugés contraires à cette convention et qui ont donné lieu à plusieurs condamnations de la France.

Il s'agit d'une part des délits d'offense ou d'outrages aux chefs d'Etat étrangers et aux diplomates étrangers prévus par les articles 36 et 37 de la loi de 1881, d'autre part du délit prévu par l'article 2 de la loi du 2 juillet 1931 qui réprime le fait de publier des informations sur une plainte avec constitution de partie civile avant toute décision judiciaire, délit dont la Cour de cassation a demandé l'abrogation dans son rapport annuel pour 2001.

En contrepartie de l'abrogation du délit de publication d'informations sur une plainte avec constitution de partie civile, le présent article additionnel tend à aggraver la répression de la diffamation lorsqu'elle est accompagnée d'informations sur une plainte avec constitution de partie civile.

La solution proposée permettra une discussion judiciaire sur la vérité des allégations diffamatoires, à la différence de l'incrimination existante, ce qui a conduit à la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme.

* 120 « La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. »

* 121 dont l'article 13 prévoit que peuvent être prises les « mesures nécessaires en vue de combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle ».

* 122 dont l'article 29 fait de la lutte contre le racisme et la xénophobie l'un des objectifs de l'Union.

* 123 Cass crim, 23 février 1993.

* 124 Article 10 : « (...) L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions, prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire. »

* 125 Du 16 mai 2000 au 30 septembre 2002, 50.984 personnes ont appelé le 114 et 12.092 fiches de signalement ont été transmises aux secrétariats des CODAC.

* 126 Circulaire du garde des sceaux aux procureurs généraux près les cours d'appel du 21 mars 2003, CRIM-AP n° 00-1500-A13-A14 : « Réponses judiciaires aux actes à caractère raciste, antisémite ou xénophobe ».

* 127 Rapport de M. Patrice Gélard n° 139 (2002-2003) sur la proposition de loi visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe.

* 128 COM (1) 664 final du 28 novembre 2001.

* 129 En vertu de l'article 225-1, « constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs moeurs, de leur orientation sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

* 130 Cass. Crim, 11 juin 2002.

* 131 Projet de loi n° 3045 (dixième législature) relatif à la lutte contre le racisme.

* 132 Cass. Crim. 30 janvier, 16 octobre et 27 novembre 2001.

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