B. DES RISQUES IMPORTANTS POUR LE DÉVELOPPEMENT INDUSTRIEL EUROPÉEN
1. La question des exclusions du régime de responsabilité sans faute
a) L'exclusion des activités qui ont fait l'objet d'une autorisation
Quoiqu'elle ait été proposée par le Commission européenne, le Parlement européen a supprimé l'exclusion des dommages environnementaux survenus dans le cadre d'une activité qui aurait fait l'objet d'une autorisation. Il a, en contrepartie, prévu que cette autorisation pouvait constituer une circonstance atténuante (notion juridique qui se révèle, en la matière, impropre car elle relève du droit pénal) au moment de la détermination de la responsabilité et du montant de la réparation.
Votre commission demande le maintien de cette exclusion , sous réserve que l'opérateur titulaire de l'autorisation se soit conformé aux prescriptions liées à l'autorisation qui lui a été délivrée.
En effet, l'autorisation donnée par l'administration est le résultat d'une procédure longue qui implique nécessairement une évaluation de l'activité . En France, les installations classées doivent réaliser une étude d'impact sur l'environnement et, pour les plus dangereuses d'entre elles, une étude de dangers.
Si l'administration accorde le permis à l'exploitant, c'est qu'elle considère que les conséquences environnementales résultant de l'activité sont acceptables . Il est d'ailleurs important de noter que le permis soumet l'exercice de l'activité au respect de certaines conditions. Dans le cas de la présente proposition de directive, l'exclusion ne pourrait être applicable qu'à condition que l'exploitant ait respecté ces limitations.
Au contraire, la mise en cause de l'opérateur en l'absence de faute reviendrait à fragiliser l'évaluation de l'impact et son caractère acceptable. Cela ferait peser des risques excessifs sur l'opérateur et menacerait la sécurité juridique dont ce dernier doit pouvoir bénéficier pour exercer ses activités.
Enfin, un permis est toujours délivré sous réserve du droit à réparation des tiers, notamment en cas d'accident affectant les biens et les personnes, auquel l'exclusion ne porte pas atteinte.
b) L'exclusion des activités jugées non néfastes compte tenu des connaissances scientifiques et techniques
De la même manière, le Parlement européen a rejeté l'exclusion du régime de responsabilité sans faute pour les émissions ou activités qui n'étaient pas considérées comme néfastes, compte tenu de l'état des connaissances scientifiques et techniques au moment de leur occurrence.
Votre commission, pour sa part, demande le maintien de cette exclusion . En effet, il paraît difficilement envisageable d'imposer au niveau communautaire une responsabilité de l'exploitant ou de l'Etat membre pour des risques inconnus scientifiquement au moment des faits.
Votre commission considère qu'une telle disposition aurait pour conséquence de freiner tout progrès scientifique et industriel, du fait des risques, impossibles à prévoir au moment de l'innovation, qui pourraient être liés à ces activités.
2. L'ampleur et la nature de la responsabilité des entreprises
a) Le maintien d'un lien de causalité établi entre le dommage et la réparation
Il est souhaitable que le texte prévoie l'obligation de prouver un lien de causalité strict entre le fait dommageable ou la faute de l'opérateur concerné et le dommage. Cette exigence est indispensable pour que le régime mis en place soit juridiquement satisfaisant et équitable . A défaut, la responsabilité d'un exploitant pourrait être recherchée au seul motif qu'il se trouvait sur le lieu du fait dommageable, même s'il n'est intervenu en aucune manière dans l'occurrence du dommage.
Or, le Parlement européen a introduit un élément de confusion dans ce raisonnement car il a précisé que la directive s'appliquait également aux dommages susceptibles d'être causés par les activités définies en annexe. A nouveau, cette disposition insère une incertitude qui pourrait être préjudiciable à la sécurité juridique des opérateurs.
b) La détermination des responsabilités
La question de la responsabilité solidaire des entreprises est également une source de confusion. Une telle disposition pourrait être d'application délicate car il est difficile de déterminer précisément les parts de responsabilité qui incombent à chaque exploitant, ce qui pourrait susciter d'importants contentieux.
Selon votre commission, il est équitable de rendre chaque exploitant responsable en fonction de sa participation dans la réalisation du préjudice , et non de façon solidaire.