II. AUDITION DE M. FRANÇOIS FILLON, MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES, DU TRAVAIL ET DE LA SOLIDARITÉ (MERCREDI 14 MAI 2003)
Réunie le mercredi 14 mai 2003 sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'audition de M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, sur le projet de loi n° 282 (2002-2003) portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, s'est réjoui de pouvoir présenter, à la commission, un tel projet de loi, pour une raison de fond : la situation actuelle du RMI n'est pas satisfaisante sur le plan de la justice sociale ; un allocataire sur trois est au RMI depuis plus de trois ans, et près d'un sur dix depuis plus de dix ans.
Il a considéré que ce relatif échec du dispositif était à l'origine d'un doute qui monte dans notre pays ; un fossé se creuse entre le monde du travail et celui de l'assistance.
M. François Fillon a déclaré que, face à l'urgence de ce dossier, l'attentisme et le statu quo n'étaient pas défendables. Il a annoncé que, face à cet échec, le Gouvernement avait décidé de mettre en application l'un des engagements forts du Président de la République lors de sa campagne. Il s'est également félicité que le Sénat ait déjà, par le passé, pris plusieurs initiatives pour créer un revenu minimum d'activité.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a précisé que le projet du Gouvernement partait d'un constat : celui d'un net décalage entre l'objectif d'insertion assigné dès l'origine au RMI et les résultats insuffisants observés depuis plusieurs années.
Il a rappelé que, lors de sa création en 1988, le RMI devait représenter une rupture par rapport à la logique traditionnelle de l'assistance. Il a souligné que le contrat d'insertion matérialisait « l'engagement réciproque » entre la collectivité et l'allocataire et devait permettre à ce dernier de retrouver le chemin de l'insertion sociale et, si possible, professionnelle.
M. François Fillon a constaté que quinze ans après, le dispositif, conçu au départ comme une aide momentanée, était devenu une prestation sociale de « masse » et d'assistance dans la durée : le filet de sécurité qu'instituait le RMI est, en réalité, devenu un filet qui retient.
Il a mentionné plusieurs signes qui témoignent de cette évolution : la proportion des personnes en contrats aidés parmi les allocataires du RMI a diminué, pour revenir de 21 % en 1996 à 13 % en 2001 ; le nombre des allocataires âgés de 35 à 60 ans depuis plus de deux ans au RMI témoigne d'un phénomène « d'installation », voire d'enfermement, dans l'assistance ; le taux de contractualisation stagne à 50 %, voire à 35 %, dans les départements à forte densité d'allocataires.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a considéré que ce constat d'essoufflement de l'insertion était à la source d'un certain malaise pour nos concitoyens qui acceptaient l'effort de solidarité, mais estimaient aussi légitime une contrepartie en termes d'effort d'insertion et de quête d'une activité. Il a affirmé que cette attente était renforcée chez les Français qui tirent de leur travail quotidien des revenus faibles sans que leurs conditions d'existence diffèrent sensiblement de ceux qui ne travaillent pas.
Il a précisé qu'en disant cela, il n'entendait nullement dresser le procès des RMIstes, dont le profil, d'ailleurs extrêmement varié, ne se prêtait nullement à des généralisations blessantes. Il a insisté sur sa volonté de décrire la situation telle qu'elle est ressentie par nos concitoyens, mais aussi par une majorité de RMIstes qui aspirent au retour à l'emploi, par souci d'améliorer leur situation personnelle, mais aussi par besoin d'utilité sociale, de dignité personnelle ou encore d'autonomie familiale.
Face à ce constat, M. François Fillon a considéré qu'une réforme ample apparaissait nécessaire avec un double objectif : optimiser la gestion du RMI en étant au plus près du terrain et des hommes et développer le cadre d'une insertion plus incitative.
Afin d'assurer la proximité de gestion, le projet de loi propose tout d'abord de décentraliser le RMI.
M. François Fillon a estimé au préalable que, pour répondre au principe d'égalité de traitement, les conditions d'attribution du revenu minimum d'insertion, ainsi que son barème, devaient être fixés au plan national, de même que le service de l'allocation devait continuer à être assuré par les caisses d'allocations familiales (CAF) et les caisses de mutualité sociale agricole (CMSA).
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a indiqué, à l'inverse, que la responsabilité de la gestion et du financement de l'allocation relèvera à l'avenir des départements. Il a observé que, dès l'automne 1988, les débats parlementaires sur le projet de création du RMI avaient souligné l'incohérence consistant à confier ce dispositif à l'État, cinq ans à peine après la première loi de décentralisation qui avait confié l'aide sociale au département.
M. François Fillon a souligné que le projet de loi constituait ainsi la première application de la récente réforme constitutionnelle sur l'organisation décentralisée de la République. Il a rappelé les termes de l'article 72, alinéa 2, de la Constitution : « les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon ».
Il a estimé que cet effort de décentralisation était particulièrement significatif, dans la mesure où il portera sur environ 4,5 milliards d'euros et s'accompagnera d'un transfert de ressource fiscale dans des conditions qui seront précisées par la loi de finances pour 2004.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a relevé que le projet de loi, en confiant au seul département le pilotage local de l'insertion des allocataires, mettait également fin à l'enchevêtrement actuel des compétences de l'État et du conseil général.
Il a noté que plusieurs articles du projet de loi illustraient cette orientation : la présidence du comité départemental d'insertion (CDI) sera confiée au président du conseil général, qui en désignera les membres et élaborera, puis mettra en oeuvre le programme départemental d'insertion (PDI) ; le président du conseil général désignera seul les membres et le président des commissions locales d'insertion (CLI) ; les compétences en matière d'approbation des contrats d'insertion seront transférées des CLI vers les services du conseil général ; l'accompagnement de l'allocataire sera renforcé, dès le dépôt de la demande de l'allocataire, par une information complète sur ses droits et ses devoirs et par la désignation d'une personne référente.
M. François Fillon a fait valoir que, dans ce cadre rénové, le Gouvernement avait souhaité maintenir l'obligation d'inscription au budget départemental d'un crédit d'insertion égal à 17 % du montant des allocations de RMI versées l'année précédente dans le département. Il a expliqué que ce choix, dont il n'a pas douté qu'il donnera lieu à un ample débat parlementaire, était destiné à apaiser les inquiétudes de ceux qui craignaient une éventuelle réduction de l'effort d'insertion sociale et professionnelle à l'occasion du transfert de compétence et de ressource.
Evoquant ceux qui ont pu qualifier, ces derniers jours, le second volet de la réforme, le RMA, de « retour du servage » ou qui se sont insurgés à l'idée que les RMIstes se voient proposer un « boulot », il a jugé que ces apostrophes étaient consternantes et ignorantes des objectifs du Gouvernement et, de surcroît, décalées par rapport aux attentes de nos concitoyens et aux espoirs exprimés par de nombreux RMIstes.
Il a observé que le RMI était souvent considéré comme le filet de sécurité de notre protection sociale et qu'il jouait ce rôle à bien des égards. Il a jugé, en revanche, que ce filet devait protéger, et non emprisonner dans une assistance durable et déstructurante, des centaines de milliers d'hommes et de femmes.
M. François Fillon a considéré que le RMI ne devait pas être l'antichambre de l'exclusion, ni l'alibi de l'inaction, mais être mis au service d'une véritable reconstruction professionnelle et individuelle.
Il a estimé qu'à côté du RMI qui demeurera, l'objet du RMA consistait à imaginer un cadre incitatif et stimulant rehaussant la valeur et l'intérêt du travail.
M. François Fillon a rappelé que le RMA répondait à une aspiration constante du Sénat, qui s'était exprimée, en 1998, à l'initiative de la commission, lors des débats sur la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, et plus récemment en 2001 par la proposition de loi de MM. Alain Lambert et Philippe Marini. Il a précisé que le projet de loi portant décentralisation en matière de RMI et créant le RMA s'inspirait de ces initiatives.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a considéré que l'idée du RMA était simple dans la mesure où il s'agissait de combattre la précarité et le chômage de longue durée en activant les dépenses de solidarité, de mettre en contact le RMIste et le monde du travail, dans la mesure ou l'un et l'autre peuvent y trouver un intérêt respectif.
Il a observé que ce nouveau dispositif était ciblé sur ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi : les allocataires depuis plus de deux ans du RMI.
M. François Fillon a précisé que le RMA s'appuyait sur un contrat de travail à mi-temps, de vingt heures, s'inscrivant dans un parcours d'insertion personnalisé et bénéficiant d'actions de tutorat, de suivi individualisé ou de formation, déterminées par l'employeur, le titulaire d'un RMA pouvant également bénéficier des actions d'insertion du conseil général.
Il a estimé que le RMA devait être considéré comme une transition vers l'emploi ordinaire et que, pour éviter tout risque d'installation dans ce dispositif, sa durée ne pourra pas excéder dix-huit mois.
M. François Fillon a mis en avant les traits spécifiques liés à cet objectif. Il a ainsi noté que le RMA associera une allocation forfaitaire du RMI versée par la CAF ou par la CMSA à l'employeur et un complément à la charge de ce dernier ; le salaire sera versé par l'employeur au salarié, lequel bénéficiera au total d'une rémunération au moins égale au SMIC. Il a relevé que le RMA maintiendra pour chaque membre du foyer les droits garantis aux allocataires du RMI, et notamment l'accès à la couverture maladie universelle (CMU).
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a indiqué que le champ d'application de ce contrat était celui des employeurs du secteur marchand et du secteur non marchand (à l'exception de l'État et des départements). S'agissant du secteur non marchand, il a précisé que le RMA ouvrira droit à une exonération des cotisations patronales de sécurité sociale compensée par le budget de l'État.
Il a expliqué que la spécificité du RMA était liée également à l'équilibre entre plusieurs finalités qu'il apparaissait souhaitable de marier : améliorer les gains de l'allocataire dans le respect des limites de la dépense publique ; rendre plus attractif le passage à l'activité sans remettre en cause les avantages associés à l'allocation, comme l'accès aux soins grâce à la CMU ; créer, à la différence des contrats aidés, un dispositif dont l'architecture est identique dans le secteur marchand et le secteur non marchand ; rechercher une réciprocité entre l'allégement du coût du travail dont bénéficie l'employeur grâce à l'aide publique et les responsabilités attachées à une embauche.
M. François Fillon a réaffirmé que ce projet de loi visait, d'une part, à optimiser et rénover la gestion du RMI en allant au plus près du terrain et, d'autre part, à épauler et inciter les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, à retrouver le chemin de l'activité et de la confiance.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a considéré, en définitive, que ce projet était animé par une conception positive et dynamique de notre pacte social.
M. Bernard Seillier, rapporteur, s'est interrogé sur les gains en terme de simplification et d'efficacité apportés par la décentralisation du RMI ; il a souhaité connaître les raisons qui avaient conduit le Gouvernement à écarter le maintien d'une allocation versée pour le compte de l'État par des caisses d'allocations familiales davantage responsabilisées et une décentralisation du seul volet insertion.
Il a ensuite demandé des précisions quant aux mécanismes exacts de répartition de la ressource fiscale transférée pour compenser les charges liées au RMI. Il a notamment voulu savoir si ce transfert concernerait une part fixe de cet impôt ou une part révisable en fonction des dépenses d'allocations constatées les années précédentes.
Il a enfin fait part de ses inquiétudes concernant l'articulation de la politique d'insertion et de la politique de l'emploi, qui reste à la charge de l'État. Il s'est notamment interrogé sur ses implications en termes de programmation des emplois aidés.
M. Bernard Seillier s'est également interrogé sur la possibilité, pour le département, de moduler un certain nombre de paramètres du contrat d'insertion RMA - notamment sa durée et la condition d'ancienneté pour en bénéficier - afin de permettre une plus grande individualisation de la mesure et de tirer les conséquences de la décentralisation du RMI.
Il s'est enfin interrogé sur les conséquences, en matière d'accès à la protection sociale, de l'assiette retenue des cotisations sociales, qui ne porte que sur le complément de rémunération versé par l'employeur.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a souligné qu'une séparation entre la gestion de l'allocation elle-même et celle de la politique d'insertion posait d'abord une question de principe dans le cadre général d'une décentralisation de l'aide sociale. Il a également rappelé que l'absence de liens entre le versement de l'allocation et l'obligation d'insertion était la principale critique adressée aujourd'hui au RMI. Il a donc plaidé pour un transfert clair de l'ensemble du dispositif.
S'agissant de la compensation aux départements des charges liées à ces nouvelles compétences, il a précisé que celles-ci seraient financées par une quote-part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) et qu'il s'agirait d'une quote-part fixe dont le produit suivrait l'évolution du rendement de la taxe.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a ensuite écarté tout risque d'éclatement de la politique de l'emploi, en soulignant que le RMA ne serait pas un passage obligé pour les allocataires et que la décentralisation du RMI ne modifierait pas la programmation des emplois aidés. Il a souligné, par ailleurs, que l'État et le département seraient amenés à coopérer au sein des commissions départementales d'insertion et que le président du conseil général pourrait, dans tous les cas, demander le concours du service public de l'emploi pour la mise en oeuvre des actions d'insertion.
S'agissant des paramètres du CIRMA, M. François Fillon a précisé que la condition d'ancienneté de deux années au RMI répondait à un souci d'équilibre entre la volonté de prévenir une installation durable du bénéficiaire dans le RMI et le souci d'éviter tout effet de substitution avec les autres dispositifs d'insertion. Il a, par ailleurs, indiqué que la fixation de la durée du contrat à vingt heures hebdomadaires tenait aux caractéristiques du public visé constitué par les personnes en grande difficulté pour lesquelles un temps plein n'était pas envisageable dans l'immédiat.
Il a enfin observé que l'assiette retenue pour le calcul des cotisations sociales permettait de maximiser le revenu net du bénéficiaire, mais avait nécessairement des conséquences sur les avantages contributifs. Il a ainsi précisé que le contrat permettrait de valider deux trimestres par an pour l'assurance vieillesse et que le niveau de l'assurance chômage restait fonction de la durée de cotisation. Il a toutefois estimé que la protection sociale des bénéficiaires du RMA restait favorable, dans la mesure où le dispositif leur garantissait le maintien des droits connexes au RMI, et notamment la CMU complémentaire.
M. Michel Mercier, rapporteur pour avis de la commission des finances, a estimé que la décentralisation devait se fixer pour objectif de rendre plus efficace l'action publique et qu'un tel objectif supposait de responsabiliser les départements. Il a indiqué que, selon lui, un transfert d'impôt, calculé sur le coût total actuel du RMI, et dont l'évolution suivrait ensuite celle du produit de l'impôt, était conforme à cette responsabilisation des départements.
Il a regretté, dans ces conditions, que le projet de loi maintienne l'obligation pour les départements d'inscrire à leur budget 17 % des sommes versées l'année précédente au titre de l'allocation, soulignant que cette obligation était incohérente dans le cadre d'une décentralisation responsable.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a précisé que le maintien de ces 17 % avait pour but de ne pas envoyer un message qui serait incompris par le monde associatif et, qu'à terme, la logique de la décentralisation devait, en effet, conduire à leur suppression.
M. Alain Vasselle s'est étonné du fait que l'accès au RMA soit conditionné par une ancienneté de deux ans de perception du RMI. Il a estimé que l'effort d'insertion du bénéficiaire devait être entamé le plus tôt possible afin d'accroître ses chances de trouver un emploi. S'agissant de l'exonération de charges prévue au titre du RMA, il s'est interrogé sur leur compensation au régime de sécurité sociale.
Mme Sylvie Desmarescaux s'est inquiétée de la totale liberté laissée aux présidents de conseils généraux pour déterminer la composition des CDI et des CLI. Elle a voulu s'assurer que les communes seraient effectivement représentées au sein de ces instances.
M. Jean-Pierre Fourcade s'est félicité de la rupture opérée par le projet de loi en compensant les charges nouvelles pour les départements, non plus par une augmentation de la dotation globale de fonctionnement, mais par le transfert d'une ressource fiscale. Il a fait part de son inquiétude face à la complexité des flux de trésorerie entre les départements et les caisses d'allocations familiales engendrés par le maintien du service de l'allocation par celles-ci. Il a néanmoins convenu qu'il était exclu de reconstituer au niveau des services sociaux départementaux des services de liquidation du RMI.
Il s'est enfin fait l'écho de l'inquiétude des associations et des entreprises intermédiaires et il a estimé qu'il était nécessaire de faire un geste dans leur direction en rappelant leur rôle dans la loi.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, s'est voulu rassurant quant à la condition d'ancienneté de deux ans nécessaire pour bénéficier du RMA. Il a expliqué que cette condition était motivée par une volonté de ciblage sur les allocataires les plus en difficulté et que la durée d'ancienneté requise pourrait être revue à la baisse au vu du fonctionnement du dispositif. Il a également précisé que les exonérations de charges prévues au titre du RMA seraient compensées par l'État à la sécurité sociale.
S'agissant de la composition des CLI, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a insisté sur le fait que la décentralisation impliquait de laisser la liberté aux départements d'organiser, au cas par cas, le pilotage du dispositif d'insertion. Il a fait part de sa volonté de rassurer la caisse nationale des allocations familiales concernant la compensation des charges de trésorerie et il a indiqué qu'il travaillait, d'ores et déjà, à un décret visant à préciser les modalités de cette compensation.
Il a enfin reconnu le rôle essentiel du monde associatif en matière de lutte contre l'exclusion et en matière d'insertion et s'est montré ouvert à la possibilité qu'il soit mentionné dans le texte même de la loi.
M. Roland Muzeau s'est inquiété du risque d'une nouvelle stigmatisation des bénéficiaires du RMI. Il s'est interrogé sur l'utilité du contrat RMA, observant que celui-ci revenait aussi cher pour l'employeur qu'un CES, mais offrait moins de garanties pour son bénéficiaire. Il a regretté que l'accent soit essentiellement porté sur l'insertion professionnelle et ignore largement l'insertion sociale, notamment pour les questions de logement ou de santé.
M. Gilbert Chabroux s'est interrogé sur la précipitation ayant présidé au dépôt de ce projet de loi, regrettant à cet égard l'absence d'évaluation préalable. Il a considéré que le contrat RMA s'apparentait à un contrat de travail « au rabais », n'offrant aucune garantie d'insertion sociale. Il a insisté sur la nécessité de fonder la politique d'insertion sur une approche globale et non sur la seule question de l'activité.
Observant que la principale faiblesse du RMI avait été l'échec de l'insertion, M. Jean Chérioux a souhaité obtenir des précisions sur l'articulation entre la décentralisation du RMI et l'évolution de l'action de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE).
M. Guy Fischer a souhaité que le débat sur le projet de loi soit reporté afin de laisser au Parlement la possibilité de l'examiner sérieusement.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a souligné la différence entre le CES et le contrat RMA : s'ils assurent une rémunération similaire au bénéficiaire, le contrat RMA est moins coûteux pour l'employeur, mais vise des publics plus en difficulté.
S'agissant de la méthode retenue par le Gouvernement, il a rappelé que le projet de loi se fondait sur les nombreuses évaluations du RMI et des politiques d'insertion qui avaient été publiées et que la concertation avait été menée, le Conseil national de l'insertion par l'activité économique (CNIAE), le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (CNLE), l'Assemblée des départements de France (ADF), les partenaires sociaux et les caisses de sécurité sociale ayant été consultés. Il a estimé qu'il importait d'agir rapidement dans le domaine de l'insertion.
Il a souhaité que le rôle de l'ANPE soit renforcé en matière d'insertion des bénéficiaires du RMI.
M. Bernard Cazeau a craint que le projet de loi ne conduise à créer une main d'oeuvre à bas prix et s'est interrogé sur son efficacité dans une période d'aggravation du chômage.
M. André Lardeux s'est interrogé sur les conséquences du projet de loi pour les crédits d'insertion départementaux jusqu'à présent reportés. Il a également souhaité savoir si la gestion du RMA se ferait à moyens constants pour les départements ou s'ils seraient amenés à accroître leurs dépenses de fonctionnement en créant de nouveaux services.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a jugé nécessaire de garantir un coût du travail relativement faible pour les employeurs afin d'assurer l'efficacité du dispositif. Il a estimé que le dispositif n'engendrerait pas d'effet d'aubaine, dans la mesure où le recrutement d'un bénéficiaire du RMI depuis plus de deux ans constituerait un choix lourd pour l'employeur. Il a, à cet égard, avancé l'hypothèse qu'au départ le dispositif soit principalement utilisé dans le secteur non marchand.
Il a indiqué que les règles relatives au report des crédits d'insertion non consommés restaient identiques dans la mesure où le projet de loi ne prévoyait pas, en l'état, de modifier leur régime budgétaire.
S'agissant des transferts éventuels de personnels, il a précisé que cette question serait traitée dans le cadre des dispositions relatives au transfert de services du projet de loi de décentralisation actuellement en cours de préparation.