EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le 3 juillet 2002, la commission d'enquête du Sénat sur la délinquance des mineurs rendait son rapport 1 ( * ) et formulait de nombreuses propositions concrètes, afin d'améliorer la prévention et le traitement de la délinquance des mineurs.

Près d'un an plus tard, un grand nombre des propositions de cette commission d'enquête ont pu être mises en oeuvre.

L'une des propositions importantes de la commission relatives à la justice des mineurs tendait à faire du juge des enfants le juge de l'application des peines prononcées par les juridictions spécialisées pour mineurs.

Cette proposition n'ayant pas été mise en oeuvre jusqu'à maintenant, la présente proposition de loi, déposée par le président et le rapporteur de la commission d'enquête, tend à donner au juge des enfants une compétence pleine et entière en matière d'application des peines concernant les mineurs, afin de renforcer la continuité du suivi qui s'exerce sur le parcours éducatif des mineurs délinquants.

I. UN AN APRÈS : UN PREMIER BILAN DE LA COMMISSION D'ENQUÊTE DU SÉNAT SUR LA DÉLINQUANCE DES MINEURS

A. UN RAPPEL : LES TRAVAUX DE LA COMMISSION D'ENQUÊTE

Constituée en février 2002, la commission d'enquête du Sénat sur la délinquance des mineurs a entendu soixante-treize personnes et procédé à quinze déplacements.

A l'issue de ses travaux, elle a notamment effectué les constats suivants :

- la délinquance des mineurs n'est pas un phénomène nouveau, mais la situation actuelle est préoccupante parce que cette délinquance est plus importante, plus violente, plus jeune . Le nombre de mineurs mis en cause a augmenté de 79 % entre 1992 et 2001 ;

- les mineurs délinquants connaissent souvent une situation familiale difficile (absence du père, relations conflictuelles au sein de la famille...) et sont presque toujours en échec scolaire . Ils sont en mauvaise santé physique et psychique et sont souvent abuseurs d'alcool et de drogues, notamment du cannabis ; la commission a constaté une surdélinquance des jeunes issus de l'immigration ;

- la famille et l'école n'endiguent plus la délinquance. Tandis que de nombreux parents sont en grande difficulté pour assurer l'éducation de leurs enfants, l'école n'est plus ce sanctuaire à l'abri de la violence. A force de vouloir faire entrer tous les enfants dans un moule unique, l'école a fini par exclure plus gravement qu'auparavant une partie de ceux qui lui sont confiés ;

- l'insuffisance des liens entre les institutions exerçant une action de prévention crée des discontinuités, des ruptures de suivi qui nuisent à l'efficacité de cette prévention ; trop souvent, des enfants en difficulté sont repérés, sans qu'une prise en charge adaptée intervienne dans des délais acceptables ;

- la politique de la ville se caractérise par un empilement des programmes de prévention, une multiplication des axes d'action et la création incessante de nouveaux métiers (72 appellations différentes ont pu être recensées pour le seul secteur de l'animation) ;

- la justice des mineurs n'est pas particulièrement laxiste ; elle est erratique . Elle apporte bel et bien des réponses à la délinquance des mineurs, mais ces réponses ne sont pas claires, pas progressives, pas assez rapides, pas mises en oeuvre ;

- l'enfermement des mineurs donne lieu à un débat idéologique sur la possibilité ou non de conduire une action éducative en milieu fermé . La commission constate que nos partenaires européens, par exemple les Pays-Bas, plus pragmatiques, ont mis en place des parcours d'éducation et de réinsertion comportant des phases de liberté et des phases de contention pendant lesquelles le travail éducatif se poursuit ;

- l'administration de la protection judiciaire de la jeunesse, perpétuellement en réforme, semble néanmoins victime d'une inertie persistante, d'une crise de vocations, en définitive d'une véritable crise d'identité .

La commission d'enquête a formulé de nombreuses propositions organisées en dix principes essentiels :

1 - On n'agit bien que si l'on connaît bien ;

2 - Responsabiliser et soutenir la famille ;

3 - Diversifiez l'école, vous fermerez une prison ;

4 - Des quartiers à reconquérir ;

5 - Être impitoyable à l'égard des majeurs qui utilisent des mineurs pour commettre des infractions ;

6 - Justice : redécouvrir la dimension éducative de la sanction ;

7- Inventer des parcours éducatifs : mettre de la contrainte dans l'éducation et de l'éducation dans la contrainte ;

8 - PJJ : l'humain contre la bureaucratie ;

9 - Des partenariats responsables ;

10 - Évaluation à tous les étages.

* 1 « Délinquance des mineurs : la République en quête de respect », rapport n° 340 (2001-2002) présenté par M. Jean-Claude Carle au nom de la commission d'enquête présidée par M. Jean-Pierre Schosteck.

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