II. LE RENFORCEMENT DE LA PROCÉDURE CENTRALISÉE D'AUTORISATION DE MISE SUR LE MARCHÉ
Outre la révision de la composition du conseil d'administration de l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments, la proposition de réforme prévue par la Commission européenne prévoit également un aménagement des procédures de mise sur le marché des médicaments.
Prévues par le règlement CEE n° 2309/93, et opérationnelles depuis le 1 er janvier 1995, plusieurs procédures de mise sur le marché d'un médicament coexistent, qu'elles soient européennes ou nationales.
Les procédures communautaires d'enregistrement s'organisent autour de deux architectures distinctes.
D'une part, la procédure centralisée (obligatoire pour les produits issus des biotechnologies, dits de liste A, optionnelle pour les nouvelles substances actives, dite de liste B) : le demandeur, généralement un laboratoire pharmaceutique, dépose son dossier de demande d'enregistrement à l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments. Le dossier fait l'objet d'une évaluation et conduit à l'avis du CSP. L'Agence fait parvenir cet avis à la Commission européenne, aux Etats membres et au demandeur. Dans les 30 jours suivant la réception de l'avis, la Commission prépare un projet de décision et le soumet au comité permanent pour les médicaments à usage humain 2 ( * ) .
Si l'autorisation est octroyée, elle est d'emblée valable pour tous les pays membres de l'Union européenne.
D'autre part, la procédure de reconnaissance mutuelle : le demandeur/laboratoire pharmaceutique dépose son dossier dans l'un des Etats membres dit « Etat membre de référence ». Si l'autorisation est accordée, elle peut être étendue aux autres Etats membres dits « Etats membres concernés » par une procédure de reconnaissance mutuelle. Ce système est souvent considéré comme la version aménagée de la procédure multi-états qui existait antérieurement à 1995, il est ouvert à tout médicament non soumis obligatoirement à la procédure centralisée, pour autant qu'il soit destiné aux marchés de plus d'un Etat membre.
La procédure nationale reste applicable pour certains médicaments, dont la commercialisation, depuis 1998, se trouve limitée au marché d'un seul Etat membre. Le dossier de demande d'autorisation de mise sur le marché est établi selon le modèle européen et doit être conforme à la Directive européenne 65/65/CEE. En France, ce dossier est déposé par le demandeur auprès de l'AFSSAPS.
L'évaluation de la politique mise en place depuis 1995, menée par les instances communautaires, a conclu à l'efficacité du système centralisé d'autorisation en matière dévaluation de la qualité et de la sécurité des médicaments. La durée des procédures a été également déclarée satisfaisante, sa moyenne d'environ 270 jours étant comparable aux délais d'approbation d'autres grands systèmes, comme par exemple celui de la Food and Drug Administration aux Etats-Unis.
La principale modification vise à rendre obligatoire cette procédure centralisée pour toutes les nouvelles substances actives (liste B) apparaissant sur le marché communautaire. La procédure centralisée serait optionnelle pour les autres médicaments qui représentent une innovation thérapeutique. L'analyse faite par la Commission européenne repose sur l'idée que le coût de développement de la plupart des molécules à fort potentiel innovant ne permet pas, du point de vue économique et sociologique, de limiter leur commercialisation à quelques marchés nationaux et justifie une approche globale et communautaire leur ouvrant l'accès d'emblée à un marché de dimension continentale. Le renforcement des relations entre l'Agence européenne, les laboratoires de recherche et les industries pharmaceutiques, prévu par la réforme en amont de l'autorisation de mise sur le marché, s'inscrit également dans la logique d'un plus grand recours à la procédure centralisée.
Parallèlement à l'extension de la procédure centralisée, la Commission européenne souhaite assurer l'harmonisation et la cohérence des systèmes de pharmacovigilance entre les Etats membres afin de rendre efficace la surveillance de tous les médicaments autorisés au sein de la Communauté.
Plusieurs mesures vont dans ce sens comme par exemple les recommandations relatives à l'utilisation des terminologies ICH3 ( * ), officiellement lancée depuis 1999, afin de garantir la cohérence des notifications des effets indésirables des médicaments dans un environnement multilingue.
La Commission européenne propose également de raccourcir les échéances de soumission obligatoire des rapports périodiques relatifs aux données en matière de sécurité et de renforcer les inspections liées aux obligations au titulaire de l'autorisation de mise sur le marché.
Dans ces conditions, le renforcement de la coopération en amont de l'autorisation de la mise sur le marché du médicament et le renforcement de l'information relative aux médicaments commercialisés, incite la Commission européenne à proposer la suppression du renouvellement quinquennal de l'autorisation devenu superflu avec l'instauration de ce système de « contrôle continu », le renouvellement quinquennal s'étant transformé en simple formalité administrative.
Selon les informations transmises par la délégation du Sénat pour l'Union européenne : « un consensus entre la Commission, le Parlement et le Conseil semble avoir été trouvé pour conserver uniquement le premier renouvellement quinquennal, l'autorisation devenant alors valable sans limitation de durée » .
Cette mesure s'accompagne d'une disposition complémentaire selon laquelle toute autorisation de mise sur le marché ne donnant pas lieu à la commercialisation effective du médicament concerné durant deux années consécutives, est déclarée caduque.
*
2
Le
Comité Permanent est constitué d'un représentant de chacun
des Etats membres de l'Union européenne, d'un représentant de
l'Agence européenne et d'un représentant de la Commission
européenne.
Le Comité adopte ces décisions par vote
des représentants des Etats membres à la majorité
qualifiée, les représentants de l'Agence européenne et de
la Commission européenne ne sont pas habilités à
voter.
Le Comité permanent est consulté lors du processus
décisionnel qui aboutit à l'adoption d'une décision
communautaire relative à l'AMM des médicaments à usage
humain sur la base d'une opinion du Comité des Spécialités
Pharmaceutiques.
* 3 Il s'agit de deux comités informels au sein desquels se déterminent les normes en matière d'exigences techniques et scientifiques dans le domaine des médicaments humains et vétérinaires. Il convient de distinguer :
- l'International Conference on Harmonisation of technical Requirements for the registration of Pharmaceuticals for Human use, pour les médicaments à usages humains;
l'International Conference on Harmonisation of technical Requirements for the registration of Veterinary Pharmaceuticals Products, pour les médicaments à usages vétérinaires.