D. LE DISPOSITIF NATIONAL
Sur le plan national, quelle est notre marge de manoeuvre ?
Des lois existent mais dans le cadre des conventions internationales.
C'est une loi du 16 juillet 1976 qui a consacré, en France, la « zone économique au large des côtes du territoire de la République ».
Une loi du 5 juillet 1983 (récemment modifiée par une loi du 3 mai 2001 relative à la répression des rejets polluants des navires) a mis en place un dispositif répressif inséré dans le code de l'environnement et qui s'applique tant aux navires français qu'aux navires étrangers dans nos eaux territoriales mais aussi dans nos zones économiques de la Manche, de l'Atlantique et Outre-mer.
L'efficacité des ces dispositions est évidemment subordonnée aux moyens légers et lourds de surveillance, de contrôle et de dissuasion disponibles. Les personnels, les bateaux, les hélicoptères et les avions relèvent de la marine nationale et de la gendarmerie (défense), de la direction des affaires maritimes (équipement) et des douanes (finances). En cas d'urgence, le préfet maritime (Marseille, Brest ou Le Havre) assure la coordination des opérations... On relèvera qu'une récente circulaire du 4 avril 2002 s'est efforcée d'améliorer la coordination notamment entre les actions sur terre et sur mer.
E. LE PROJET DE LOI
L'objet du présent projet de loi est de créer, en Méditerranée, une « zone de protection écologique » dans les conditions apparemment autorisées par la convention sur le droit de la mer de Montego Bay dans sa cinquième partie. Il s'agit de pouvoir appliquer dans un nouveau « zonage » (où la France ne revendique pas de zone économique exclusive pour des raisons de bon voisinage liées notamment à la pêche) les dispositions coercitives qui ne sont applicables que dans la zone économique.
D'après les informations qui ont été communiquées à votre rapporteur, la France fera ici oeuvre innovatrice même si le Royaume-Uni a déjà créé au large de ses côtes une zone de même type dénommée « Special Area » tandis que l'Espagne s'est dotée d'une zone de protection halieutique.
Le nouveau texte s'inscrit dans la logique de la convention sur la protection de la mer Méditerranée contre la pollution, adopté à Barcelone le 16 février 1976 et amendé à Barcelone en 1995 2 ( * ) .
La négociation sur la délimitation de la ZPE en Méditerranée a déjà commencé. Si un accord avec l'Italie et l'Espagne ne paraît pas poser de difficultés, l'Algérie serait, par exemple, plus réservée.
On notera, d'autre part, que la Turquie -qui n'a pas signé la convention de Montego Bay- pourrait exprimer des craintes quant à une possible extension de ce type de zonage.
Le présent projet de loi s'inscrira, souhaitons-le, dans une dynamique visant à prendre « à bras le corps » un dossier qui n'a connu, malgré les catastrophes successives de ces dernières années, que trop d'atermoiements.
C'est en tout cas la volonté politique que deux grands responsables européens (le Président de la République française et le Premier ministre espagnol) ont exprimé à Malaga en se fixant pour objectif rien de moins que d'interdire la circulation maritime aux navires suspects dans les zones soumises à nos droits de juridictions . Tel est le cas des ZEE, tel sera celui des ZPE.
Le repérage, l'identification et l'éloignement forcé des navires au « comportement délinquant » qui procèdent à des dé-ballastages (parfois qualifiés de « dégazages ») de résidus de cargaisons d'hydrocarbures (le cas échéant, 100 tonnes par navire !) sont tout aussi nécessaires que le repérage, l'identification et l'éloignement des navires qui présentent un danger ou une menace (les « navires-poubelle »).
A cet effet, nous avons besoin de moyens matériels et de moyens juridiques : le présent projet de loi renforce, de ce point de vue, nos capacités d'action.
Votre rapporteur émettra pour sa part un souhait : ne nous cachons plus derrière le droit international ou même le droit communautaire pour justifier notre « immobilisme » voire notre impéritie dans le domaine de la sécurité maritime, alors qu'il y a « péril en la demeure ».
Puisse l'initiative franco-espagnole modifier rapidement la donne et exercer les effets d'entraînement indispensables .
C'est le code de l'environnement (articles 3 à 7 du projet de loi) que le présent projet entend principalement compléter en même temps que la loi précitée du 16 juillet 1976 relative à la zone économique (article 1er du projet de loi), ainsi que, à titre de coordination, la loi du 11 juillet 1986 relative à la recherche scientifique maritime (article 2 du projet de loi).
Le texte soumis à la commission des affaires économiques est, en soi, difficilement amendable. Il se borne en effet à codifier et à porter différentes coordinations législatives.
Lors de sa réunion du 18 décembre 2002, votre commission n'a pas adopté d'amendement.
Votre rapporteur a toutefois souhaité poursuivre sa réflexion.
La discussion du présent projet de loi se trouve, en effet, plongée dans l'actualité.
Au sommet franco-espagnol de Malaga a succédé le conseil européen de Copenhage qui a, à son tour, proposé des solutions d'urgence. Le Roi du Maroc vient d'interdire les navires à simple coque dans les eaux territoriales de son pays.
Quelques semaines supplémentaires ne paraissent donc pas de trop pour analyser la situation nouvelle créée par toutes ces initiatives, procéder à des consultations complémentaires et réfléchir à quelques initiatives utiles au débat.
La commission des affaires économiques a, en conséquence, demandé au rapporteur de lui soumettre, s'il le juge utile, des propositions qui pourraient se traduire en mesures législatives avant la discussion en séance publique du présent projet.
Sous cette réserve, elle a adopté, à l'unanimité des présents, le projet de loi.
* 2 On relèvera la publication au Journal officiel du 15 décembre 2002 d'un décret 2002-1454 du 9 décembre 2002 portant publication du protocole relatif aux aires spécialement protégées et à la diversité biologique en Méditerranée, fait à Barcelone le 10 juin 1995 et signé par la France, la Grèce, l'Italie et l'Espagne.