C. LE DEBAT SUR LE MECANISME DE CORRECTION BRITANNIQUE
Le
Royaume-Uni bénéficie depuis 1984 d'une dérogation au
régime de droit commun des ressources propres, qui lui permet de voir
pris en charge par les autres Etats-membres les deux tiers de son
déséquilibre budgétaire
constaté l'année
précédente entre prélèvement sur recettes et
versements communautaires. La revendication originelle du Premier ministre
Margaret Thatcher reposait sur le double constat que le Royaume-uni contribuait
structurellement davantage que les autres pays aux ressources propres
traditionnelles et à la ressource TVA (qui constituaient à
l'époque les seules recettes de l'Union), et qu'il recevait moins au
titre de la PAC et de la politique régionale. La correction
appliquée permet donc de rétablir un certain équilibre,
mais cette dérogation a fait l'objet de
nouvelles
exceptions
: la première dès 1984 au profit de
l'Allemagne, dont la participation au financement de la correction britannique
est réduite d'un tiers en raison de sa position fortement contributrice
nette, la seconde à nouveau au bénéfice de l'Allemagne et
de trois autres pays contributeurs (Autriche, Suède et Pays-Bas), dont
la participation a été réduite de 75 % et
répartie entre les autres Etats membres lors du Conseil européen
de Berlin, avec entrée en vigueur en 2002.
Ainsi le Royaume-Uni ne participe qu'à hauteur de 13,8 % au
financement de l'Union, pour une part du PNB communautaire de 19 %
. Le
mécanisme de correction donne lieu à des calculs
particulièrement complexes, et la France figure au premier rang des
contributeurs (30,4 % du montant de la correction, contre 23 % avant
introduction des minorations au profit des Etats contributeurs nets) avec un
coût annuel moyen de 800 millions d'euros sur la période
1995-2001. La part respective des Etats membres au titre du budget 2003 est la
suivante :
Part des Etats membres dans le financement de la correction britannique en 2003
|
% |
millions d'euros |
Belgique |
5,5 |
275,5 |
Danemark |
3,7 |
187,9 |
Allemagne |
7,0 |
352,4 |
Grèce |
2,9 |
147,0 |
Espagne |
13,8 |
696,2 |
France |
30,4 |
1 529,4 |
Irlande |
2,2 |
110,6 |
Italie |
25,6 |
1 290,9 |
Luxembourg |
0,4 |
21,2 |
Pays-Bas |
1,5 |
76,9 |
Autriche |
0,7 |
35,8 |
Portugal |
2,5 |
127,3 |
Finlande |
2,8 |
140,0 |
Suède |
0,8 |
41,7 |
Royaume-Uni |
0,0 |
-5 033,1 |
Source : "jaune" annexé au PLF 2003 |
Il a en
outre été décidé à Berlin que les aides de
pré-adhésion et les autres dépenses externes de l'Union
qui ne peuvent être réparties entre les Etats membres
n'entreraient pas dans la base de calcul de la correction. Après leur
adhésion, les dépenses en faveur des nouveaux membres seront en
revanche totalement intégrées au budget et pourront donc
être insérées dans la base de calcul de la correction, mais
elles seront réduites du montant correspondant aux aides de
pré-adhésion versées en 2003. L'essentiel des
dépenses d'élargissement sera néanmoins soumis à la
correction britannique,
de telle sorte que le Royaume-Uni ne supportera
in fine
plus que le tiers de sa part « normale » du
coût de l'élargissement, alors que celui de la France se trouvera
mécaniquement accru.
Les calculs effectués par le gouvernement français indiquent
qu'à partir de 2007, la correction britannique coûtera davantage
à notre pays que ne lui rapportera la PAC, et que son montant global
doublera d'ici à 2013, toutes choses constantes par ailleurs. Ce constat
d'inégalité devant le financement de l'élargissement a
conduit le Président de la République à remettre en cause
les modalités de détermination de cet avantage, peu avant le
Conseil de Bruxelles.
Bien que ce type de « négociation » ne soit pas
conforme à l'idéal de solidarité communautaire et
s'inscrive dans une logique d'intérêt exclusivement national
susceptible d'alimenter indéfiniment les tractations, votre rapporteur
considère que la France est fondée à demander un
réexamen de la correction britannique, qui se justifie au moins autant
par la volonté d'introduire davantage de transparence et de
simplicité que par la simple constatation d'un coût croissant et
inéquitable.