E. LES DÉPENSES LIÉES AUX ACTIONS EXTÉRIEURES
1. Des priorités mal établies et des actions parfois redondantes avec celles des Etats membres
Ces
actions sont théoriquement complémentaires de celles
menées par les Etats membres, et concernent quatre grands domaines :
- des programmes
d'aide humanitaire d'urgence et d'aide alimentaire
, qui
représentent environ 19 % de l'ensemble des dépenses ;
- des programmes de
coopération technique
,
spécialisés par zone géographique et représentant
la majeure partie des crédits (près de 74 %) ;
- des programmes de soutien dans des domaines
thématiques
(santé, droits de l'homme), se traduisant par des subventions et
versements à des fonds multilatéraux ;
- la
politique étrangère et de sécurité
commune
(gestion de crises), assez résiduelle avec 1 % des
crédits.
L'aide au développement
des pays ACP (Afrique, Caraïbes,
Pacifique) est en outre régie par l'Accord de Cotonou du 23 juin
2000
33(
*
)
, et financée
hors budget par le Fonds européen de développement. Au total les
crédits européens d'aide publique au développement
représentent moins des trois quarts des dépenses d'actions
extérieures de l'Union, alors que leur part était de 90 % en
1990. La répartition de l'aide manifeste également le recul
continu de la part consacrée aux pays les moins avancés (un peu
plus de 20 % des crédits, hors fonds multilatéraux), au
profit des pays à revenu intermédiaire et des Balkans.
Le large spectre des interventions communautaires témoigne d'une
hésitation
entre la volonté de concentrer les actions de
l'Union sur son voisinage (Méditerranée et Balkans) et le souhait
de répondre à la problématique mondiale du
développement.
Il en résulte un certain saupoudrage et des
articulations incertaines avec l'aide des pays membres
. Les outils
d'intervention de l'Union se sont en effet considérablement
étoffés (subventions aux ONG, aides d'urgence, coopération
technique...) et tendent à se superposer aux interventions nationales,
qui utilisent des canaux similaires. Les contributions aux fonds
multilatéraux s'additionnent ainsi à celles émanant des
budgets nationaux, le soutien à l'Afghanistan reçoit des
versements tant communautaires que des Etats membres, et les réseaux de
délégations européennes et nationales coexistent sur le
terrain sans véritable complémentarité ni concertation.
Votre rapporteur estime que les incohérences flagrantes de l'aide
extérieure au sein de l'Union plaident en faveur d'une réflexion
approfondie sur la répartition des compétences et interventions
entre les échelons communautaire et national, dont la Commission ne
pourra faire l'économie à moyen terme.
Considérant la
vocation et la taille critique de l'Union européenne, il serait sans
doute souhaitable qu'elle se concentre à l'avenir sur
trois
volets
: les interventions dans son périmètre
géographique proche, les actions d'urgence et le financement de biens
publics globaux (projets d'aide au développement de grande envergure,
plutôt que des projets plus réduits qui relèvent davantage
de l'aide bilatérale).
Cette réflexion de fond doit être
menée conjointement avec l'accélération de la
modernisation déjà amorcée des procédures de
gestion
, rendue hautement nécessaire par l'importance parfois
confondante des « restes à liquider », en
particulier sur les septième et huitième FED.
2. Au-delà des crédits budgétaires, la nécessaire réforme de la gestion
Le projet de budget pour 2003 du Conseil Ecofin prévoit une augmentation des crédits d'engagement de 1,8 % avec 4 891,9 millions d'euros, et une quasi stabilité des crédits de paiement (+ 0,3 %) avec 4 680,9 millions d'euros . Le Conseil a renforcé de 20 millions d'euros la marge disponible sous plafond, afin de préserver les moyens de répondre à d'éventuelles crises en 2003. Cet aménagement ne remet toutefois pas en cause les priorités exprimées par la Commission dans son APB, en particulier la poursuite du programme pour la reconstruction de l'Afghanistan et l'aide aux pays voisins (+ 81 millions d'euros dans l'APB), un abondement supplémentaire du Fonds mondial pour la santé de 35 millions d'euros, et une hausse de 28 millions d'euros de l'aide humanitaire d'urgence. Le Conseil a cependant majoré de 7,5 millions d'euros l'augmentation de la dotation de la PESC par rapport à celle proposée dans l'APB, pour une hausse globale de 58 % des crédits d'engagement, afin de mettre en place le potentiel opérationnel de l'Union dans la gestion civile des crises 34( * ) , décidé au sommet de Laeken des 14 et 15 décembre 2001. Les programmes d'assistance destinés aux Balkans et à la Méditerranée concentrent 34 % des crédits d'aide extérieure (44 % en y incluant l'Europe orientale).
Budget 2002 et projet de budget 2003 des actions extérieures |
||||||||||
|
Exécution 2001 |
Budget 2002 |
Projet Conseil 2003 |
Projet Parlement 2003 |
Ecart Parlement 03/budget 02 |
Part de chaque poste (CE Parlement) |
||||
(millions d'euros) |
CE |
CP |
CE |
CP |
CE |
CP |
CE |
CP |
CP |
|
Aide alimentaire |
461 |
484 |
455 |
421 |
455 |
401 |
453 |
447 |
6,2% |
9,0% |
Aide humanitaire |
523 |
561 |
442 |
442 |
470 |
470 |
469 |
469 |
6,1% |
9,3% |
Asie |
408 |
382 |
488 |
465 |
557 |
475 |
563 |
483 |
3,9% |
11,2% |
Amérique latine |
300 |
152 |
347 |
218 |
324 |
292 |
337 |
304 |
39,4% |
6,7% |
Afrique australe |
121 |
99 |
125 |
149 |
127 |
128 |
127 |
153 |
2,7% |
2,5% |
Méditerranée |
935 |
581 |
761 |
597 |
640 |
520 |
640 |
520 |
-12,9% |
12,7% |
Moyen-Orient |
93 |
72 |
106 |
92 |
106 |
92 |
27,8% |
2,1% |
||
BERD |
0 |
8,4 |
0 |
8,4 |
0 |
8,4 |
0,0% |
0,0% |
||
Europe orientale et Mongolie |
448 |
423 |
474 |
543 |
490 |
491 |
507 |
515 |
-5,2% |
10,0% |
Balkans |
822 |
919 |
765 |
782 |
685 |
775 |
695 |
785 |
0,4% |
13,8% |
Autres actions de coopération |
808 |
588 |
420 |
411 |
447 |
437 |
554 |
570 |
38,7% |
11,0% |
Démocratie et droits de l'homme |
N.D. |
N.D. |
104 |
101 |
89 |
90 |
106 |
108 |
6,9% |
2,1% |
Accords de pêche |
N.D. |
N.D. |
193 |
196 |
194 |
199 |
194 |
199 |
1,5% |
3,8% |
Volet externe des pol. communautaires |
N.D. |
N.D. |
79 |
91 |
80 |
90,6 |
80 |
91 |
0,0% |
1,6% |
PESC |
33 |
29 |
30 |
35 |
47 |
50 |
34 |
40 |
14,3% |
0,7% |
Malte Chypre Turquie |
N.D. |
N.D. |
21 |
20 |
174 |
58 |
174 |
60 |
200,0% |
3,4% |
Total rubrique |
4 803 |
4 666 |
4 892 |
4 681 |
5 047 |
4 951 |
6,1% |
100,0% |
||
Marge sous plafond |
70 |
80 |
-75 |
|
|
|||||
Source : "jaune" annexé au PLF 2003 et document du Parlement européen |
|
|
Le
Parlement s'est montré « volontariste » avec une
hausse des crédits de paiement de 5,8 %
par rapport au projet
du Conseil, induite notamment par d'importantes hausses sur les dotations au
profit de l'aide humanitaire, de l'Afrique australe et des actions diverses de
coopération. Le Parlement a en revanche fortement minoré
l'augmentation des crédits de la PESC souhaitée par la Commission
et le Conseil.
Bien que le taux global de paiement (CP/CE) ait progressé de
10 points (pour s'établir à 87 %) entre 2000 et 2001,
le taux global d'exécution des actions extérieures a
reculé à 86,2 % en 2001, après 91,4 % en 2000.
Il en est résulté une augmentation de 4,4 % des restes
à liquider
(en dépit de l'annulation de plus de
600 millions d'euros d'engagements dormants), qui avec 13 218
millions d'euros représentent pas moins du triple des crédits de
paiement exécutés en 2001... La situation est toutefois
contrastée selon les programmes et zones géographiques, puisque
les décaissements ont progressé sur les Balkans, l'Asie ou la
Méditerranée, et diminué sur l'Amérique latine ou
le programme TACIS. Ces différences de performance s'expliquent
principalement par le
mode de gestion des fonds
(le mode
déconcentré semble ainsi avoir un impact positif) et le choix des
instruments d'intervention
35(
*
)
.
Il apparaît que le niveau d'exécution ne reflète pas
encore pleinement la réforme de la gestion de l'aide extérieure
initiée en mai 2000 par la Commission selon trois axes
:
généralisation de la programmation, rationalisation du dispositif
institutionnel par la création en 2001 de l'office de coopération
EuropeAid, (toutefois dirigé par deux commissaires et non un seul) et
déconcentration de la gestion vers les délégations de
l'Union.
L'aide européenne en faveur de l'Afghanistan et des territoires palestiniens
Dans le
cadre de la conférence des donateurs qui s'est tenue à Tokyo les
21 et 22 janvier 2002
, l'Union européenne s'est engagée
à participer à hauteur d'environ 200 millions d'euros en 2002 au
plan de reconstruction de l'Afghanistan, et s'est donnée pour objectif
de mobiliser un milliard d'euros sur cinq ans
. Les engagements de
contributions nationales des Etats membres s'élèvent en outre
à 400 millions d'euros (dont 80 millions pour l'Allemagne et
27 millions pour la France), et les Etats-Unis ont confirmé une
participation de 296 millions d'euros en 2002 mais ont refusé tout
engagement ultérieur.
Les 155 millions d'euros de crédits inscrits dans le budget de
l'Union pour 2002 couvrent notamment la première phase du plan de
reconstruction (57 millions d'euros), l'aide humanitaire
(35 millions) et l'aide alimentaire (30 millions). Deux initiatives
supplémentaires de la Commission (proposition de mobilisation de tout ou
partie des crédits disponibles de la marge sous plafond de
70 millions d'euros de la rubrique 4) et du Conseil (renforcement de
25 millions d'euros des crédits humanitaires) permettront sans
doute de dépasser le montant initialement prévu de
200 millions d'euros
. Pour 2003, la Commission prévoit de
ramener l'effort européen à 170 millions d'euros
, la
diminution de l'aide humanitaire permettant une montée en charge du plan
de reconstruction.
L'aide en faveur des Palestiniens a démarré en 1971
avec
les premiers versements au profit de l'Office des Nations Unies pour le secours
des réfugiés palestiniens au Proche Orient (UNRWA), et a
été étendue à partir de 1981 par des versements
à des ONG. Après les accords d'Oslo de septembre 1993, une
conférence de donateurs a recueilli une promesse d'engagements de
2,4 milliards de dollars sur la période 1994-1998, dont
500 millions pour l'Union européenne (dons et prêts de la
BEI). Les engagements européens ont en réalité
approché les 800 millions d'euros entre 1994 et 1999, et l'Union a
renouvelé son engagement de 500 millions de dollars pour la
période 1999-2003.
Le projet de budget 2003 comprend plus de 200 millions d'euros de
crédits
destinés à financer un programme d'assistance
technique dans le cadre de MEDA (100 millions d'euros), le soutien au
processus de paix (46 millions d'euros), et l'UNRWA dans un cadre pluriannuel
(58 millions d'euros en 2003). Les deux premières actions prendront
la forme d'appuis budgétaires directs mais conditionnés à
l'Autorité palestinienne. Ces contributions peuvent également
être complétées par des crédits d'aide humanitaire
d'urgence (25 millions d'euros en 2002).
Source : « jaune » annexé au PLF 2003