II. LE COÛT DU DÉRAPAGE DES DÉPENSES ACTÉ DANS LE PRÉSENT COLLECTIF : 4,96 MILLIARDS D'EUROS
Par lettre circulaire en date du 25 février 2002 dont l'objet était sobrement intitulé « maîtrise des dépenses en gestion 2002 » , le secrétaire d'Etat au budget écrivait aux ministères dépensiers qu'« un dispositif de régulation budgétaire apparaît indispensable pour autoriser le financement des dépenses qui apparaissent en cours d'année, qu'elles résultent d'éléments imprévus ou de réorientations de la politique gouvernementale. Conformément à la tradition républicaine, il convient non seulement de limiter prorata temporis les crédits dont peut disposer l'actuel gouvernement, mais aussi de conserver les marges de manoeuvre permettant au gouvernement qui sera constitué à l'été prochain de mettre en oeuvre la politique souhaitée par nos concitoyens, dans le respect de la norme de dépenses. A cet égard, les dernières prévisions d'inflation pour 2002 aujourd'hui disponibles, inférieures aux hypothèses sur lesquelles a été construit notre budget, conduiront à un resserrement du taux d'évolution des dépenses en valeur ».
La circulaire indiquait que la part des crédits engagés au 31 juillet ne devait pas excéder 60 % des crédits disponibles sur les chapitres du titre III hors rémunérations, sauf pour les dotations globales de fonctionnement pour lesquelles le taux pouvait atteindre 80 %, 50 % des crédits disponibles sur les chapitres du titre IV et 40 % des autorisations de programme sur les chapitres des titres V et VI.
Force est de constater que ce « gel républicain » des crédits, qui ne consistait aucunement en des annulations de crédits, n'a pas empêché le dérapage des dépenses, chiffré par l'audit précité de MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse. Il correspond à des dettes des années précédentes non financées et à des insuffisances de crédits en loi de finances initiale pour 2002 afin de couvrir des besoins avérés.
A. UN MONTANT CHIFFRÉ PAR L'AUDIT SUR LES FINANCES PUBLIQUES
L'audit précité a évalué le dérapage brut de l'ensemble -tous budgets- de la dépense pour 2002 à un montant compris entre 10,3 et 10,8 milliards d'euros. En déduisant 3,4 milliards d'euros d'économies réalisables, il fait apparaître un dérapage net compris entre 6,9 et 7,4 milliards d'euros dont 5 milliards au titre du seul budget général.
1. Les raisons d'un tel dérapage
L'audit attribue ce dérapage à plusieurs causes.
La première tient à la croissance plus lente que prévu en loi de finances initiale. Si celle-ci a des répercussions immédiates en recettes, elle a aussi un effet en dépenses. En générant des difficultés sociales, notamment en matière d'emploi, elle entraîne un surcroît de dépenses qui apparaît au premier chef dans les organismes sociaux, mais qui finit, aussi, par affecter l'Etat. L'audit démontre par ailleurs que les dépenses d'aide à l'emploi, à l'emploi des jeunes notamment, à la charge de l'Etat sont plus élevées que prévu.
La deuxième raison s'explique par la montée en charge des dispositifs sociaux nouveaux, comme la couverture maladie universelle (CMU), dont le coût n'apparaît que peu à peu dans son ampleur réelle. L'audit constate également que les coûts induits par le passage aux 35 heures excèdent eux aussi la prévision. Selon MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse, « l'ensemble de ces circonstances provoque une pesée diffuse sur les dépenses de l'Etat » .
En matière de dépenses sociales, ils relèvent également l'écart préoccupant entre l'ONDAM (objectif national des dépenses d'assurance maladie) voté et l'ONDAM réalisé, conformément au graphique ci-après :
Evolution entre 1996 et 1997 de l'ONDAM voté et de l'ONDAM réalisé
Source : audit des finances publiques, juin 2002
La troisième raison s'explique par un phénomène propre à l'exécution budgétaire, celui des reports. L'audit montre que les années récentes ont vu s'accumuler une masse importante de crédits reportés qui atteint, fin 2001, près d'un point de PIB. Selon l'audit « tout indique que, après que son gonflement a facilité l'exécution des années antérieures, ce surplomb commence à dégrader l'exécution 2002. »