2. L'impossibilité d'ignorer une tradition multiséculaire
L'attribution d'un double nom composé des deux noms du père et de la mère dans la limite d'un seul nom de famille, en cas de désaccord entre les parents, ne paraît pas opportune . La pratique du double nom bien ancrée dans certains pays d'Europe comme l'Espagne ne paraît pas transposable en France dans la mesure où elle reviendrait à remettre en cause une tradition multi-séculaire de transmission de nom du père, par ailleurs, bien acceptée par la population française.
Tout en admettant le bien-fondé d'une réforme des règles de dévolution du nom actuellement en vigueur, votre commission estime que l'abandon d'un nom à chaque génération auquel aboutit le double nom constitue une atteinte disproportionnée au principe d'indisponibilité du nom, qui demeure le fondement de notre droit .
De plus, cette solution n'apparaît pas la plus appropriée lorsque les parents sont en conflit . Elle ne fait que reporter sur la génération suivante le problème du choix du nom à transmettre. Le double nom transmis n'aboutirait qu'à une égalité de courte durée , une des deux lignées devant nécessairement être éliminée à chaque génération. Or, il ne s'agit pas de faire du nom de l'enfant l'enjeu d'un conflit récurrent au sein de chaque famille à chaque changement de génération.
Votre commission regrette que la prééminence paternelle dans les règles de transmission du nom ait été présentée par le Gouvernement et par les députés comme une pratique archaïque et régressive, « vestige de la loi salique » selon les propres termes de M. Gérard Gouzes. Ce discours apparaît d'ailleurs en contradiction avec le souci affiché par le Gouvernement de valoriser la place du père au sein de la famille 81 ( * ) .
Votre commission considère qu'en donnant son nom à l'enfant, le père affiche et proclame sa paternité.
Par coordination avec l'insertion de l'article 311-21 dans le code civil, votre commission vous propose d'appliquer ces règles dans tous les cas où la filiation est établie simultanément : lors de l'adoption plénière, lors de l'adoption simple par deux époux (y compris dans le cas d'une adjonction du nom de l'enfant et non plus dans le seul cas d'une substitution de nom), lors de la légitimation d'un enfant par mariage ou par décision de justice prononcée à l'égard des deux parents.
* 81 La loi n° 2001-1246 du 21 décembre 2001 de financement de la sécurité sociale pour 2002 a institué un congé de paternité destiné à conforter le lien entre le père et son enfant (onze jours ouvrables).