3. Une situation sociale explosive
La situation sociale s'est dégradée sous l'effet conjugué de la crise politique, d'une fluctuation du prix des hydrocarbures et des conséquences du programme d'ajustement structurel (1994-1997) exigé par le FMI .
Le PIB par habitant s'est effondré entre 1990 et 1999, passant de 3.524 dollars en 1990 à 1.550 dollars en 1999, en raison d'une croissance démographique (1,6 % par an environ) supérieure à celle du PIB (0,5 % en moyenne sur les dix dernières années). Plus de 190.000 ménages, soit environ 1,6 million de personnes (5,7 % de la population) vivraient en deçà du seuil de pauvreté alimentaire (183 euros par an).
Avec l'application du programme d'ajustement structurel, de 1994 à 1997, la progression du chômage s'est par ailleurs accélérée, passant de 1,7 million de chômeurs en 1994 à 2,1 millions en 1999, soit 27,8 % de la population active. Les jeunes sont plus particulièrement touchés par le phénomène.
Le système algérien de sécurité sociale ne paraît pas en mesure d'endiguer la montée de l'exclusion. Les autorités algériennes ont décidé l'augmentation de 33 % à compter du 1er janvier 2001 du salaire national minimum garanti (revalorisé à 8.000 dinars par mois, soit environ 122 euros) et de 15 % des salaires de la fonction publique.
L'Algérie consacre au total plus de 7 % de son PIB aux dépenses d'action sociale et de transferts sociaux. Les dispositifs de sécurité sociale semblent toutefois montrer leurs limites. Moins de 80 % des Algériens sont assurés contre les risques maladie, vieillesse, accident du travail et chômage. Plus du tiers des assurés sont des inactifs, chômeurs ou retraités. De nombreuses personnes en situation de grande précarité ne sont pas couvertes par ces dispositifs. Les inégalités tendent également à se creuser, l'écart de revenus entre les plus riches et les plus pauvres étant désormais de 1 à 10.
De même, si le niveau moyen d'éducation s'est amélioré (le taux de scolarisation des enfants entre 6 et 15 ans atteint aujourd'hui près de 90 %), l'école publique algérienne souffre aujourd'hui d'une crise profonde, ce qu'illustre le développement d'écoles privées interdites par la loi mais tolérées en pratique. Une commission nationale de réforme du système éducatif a d'ailleurs été mise en place en mai 2001 par le Président Bouteflika.
L'insuffisance des logements sociaux avive par ailleurs les mécontentements (le taux d'occupation des logements atteint 7,3 personnes par logement).
De graves émeutes avaient déjà éclaté à Sidi Bel Abbès, au sud d'Oran, le 24 juillet 2000. L'explosion de violences en Kabylie dans la seconde quinzaine du mois d'avril 2001 s'explique très largement par cette désespérance sociale qui frappe l'ensemble du territoire algérien.