B. LES AUTRES AXES DE LA POLITIQUE EDUCATIVE
1. Les autres orientations générales du gouvernement en matière de politique éducative
a) La refondation de la politique d'élaboration des programmes
Le
ministre de l'Education nationale a présenté le 29 novembre 2000
un dispositif visant à refonder la politique
d'élaboration des
programmes
, notamment en clarifiant les responsabilités respectives
des différents acteurs institutionnels et en assurant une meilleure
cohérence des programmes entre les différents niveaux du primaire
et du secondaire comme entre les disciplines d'une même année.
Les responsabilités des différents acteurs institutionnels sont
donc désormais les suivantes :
- les missions du Comité National des Programmes (CNP) sont
renforcées. Cette instance interdisciplinaire, qui réunit des
membres choisis pour leur compétence scientifique et leur
expérience du système éducatif, est chargée
d'éclairer en amont la réflexion sur les grands choix à
opérer. Pour enrichir cette dernière, elle associe des membres
associés européens à ses travaux. Le CNP est
également responsable de la rédaction du « Cahier
d'exigences pour le collège », sorte d'idéal
éducatif du collégien, destiné à rendre les
programmes accessibles à tous. Ce document doit être
diffusé avant la fin de l'année 2001 ;
- la composition des groupes d'experts, précédemment
« groupes techniques disciplinaires », chargés de la
rédaction des programmes a été revue pour mieux associer
toutes les compétences, en intégrant des enseignants du primaire
comme du secondaire (collège et lycée). Pour la première
fois, un groupe a été mis en place pour le premier degré,
sous la présidence du recteur Philippe Joutard, également
chargé d'une mission de réflexion sur le collège. Un autre
groupe, présidé par le recteur Joseph Losfeld, travaille sur les
nouvelles pratiques d'enseignement ayant une dimension interdisciplinaire (TPE,
travaux croisés...) ;
- la direction de l'enseignement scolaire assure un rôle de coordination
d'ensemble : elle organise et facilite l'activité des groupes d'experts.
En liaison avec le CNP, elle veille au respect de l'impératif de
cohérence dans leurs travaux en favorisant les échanges entre
eux. Elle organise les consultations publiques qui doivent permettre
l'actualisation régulière des « documents
d'accompagnement » favorisant la mise en application des
programmes ;
- l'inspection générale est consultée tout au long du
dispositif ;
- les recteurs ont une pleine responsabilité pédagogique : ils
mettent en oeuvre les consultations qui permettent d'associer les enseignants
à l'élaboration des programmes ;
- enfin, les projets de programmes seront systématiquement
présentés aux enseignants.
Une première vague de consultation a ainsi eu lieu au cours de l'automne
2000 sur les programmes des classes de première. Les programmes des
classes terminales ont été présentés au printemps
2001. Les programmes de l'école primaire doivent être
prochainement mis en consultation.
On peut toutefois regretter que cette refonte des modalités
d'élaboration des programmes ne soit pas accompagnée d'une
impulsion forte visant à ce que ceux-ci prennent mieux en compte notre
contexte européen
.
En effet, l'inspection générale de l'éducation nationale
(IGEN) soulignait dans un rapport rendu en septembre 2000 que les programmes
d'enseignement se caractérisaient par «
l'atonie relative
des contenus
» en matière de construction
européenne, et relevait notamment : «
on cherche en
vain le mot Europe dans les récents programmes pour l'école
élémentaire - hormis une définition
géographique avec l'Oural pour frontière qui fait aujourd'hui
sourire -... Au lycée, le nouvel enseignement d'éducation
civique, juridique et sociale ne s'est guère prononcé encore sur
la présentation en classe de la citoyenneté européenne
depuis Schengen, et pas davantage sur les contenus civiques des textes
fondateurs de l'Europe communautaire depuis un demi-siècle. On observe
aussi qu'aucun des thèmes nationaux retenus pour les futurs travaux
personnels encadrés ne fait appel à une vision européenne
des questions proposées...[De même], le concept de
« citoyenneté européenne » demeure aussi
vague qu'indéterminé au collège, sans que sa mise en
examen [sic] figure clairement dans les finalités avouées de
l'éducation civique
».
b) Le développement des langues régionales
Les orientations du gouvernement en matière de langues régionales sont exposées infra dans le cadre du commentaire de l'article 65 du projet de loi de finances pour 2002.
2. Les réformes pédagogiques par niveau d'enseignement
a) A l'école primaire
On peut
rappeler que le ministre de l'Education nationale a annoncé en l'an 2000
un plan pour l'école maternelle et élémentaire visant
notamment à «
gagner la bataille de la lecture et de
l'écriture
» et réaffirmant pour ce faire
«
la priorité accordée à la maîtrise de
la langue nationale et aux pratiques de lecture, d'écriture et
d'échanges oraux
».
A cette fin, il a lancé à la rentrée 2000 un plan de
développement des bibliothèques centres de documentation des
écoles primaires consistant à renforcer leur dotation de 500.000
ouvrages (soit 0,13 par élève).
Deux dispositifs nouveaux ont été mis en place à la
rentrée 2001 :
- le
repérage
systématique des compétences, des
difficultés ou des retards au début de la grande section de
maternelle et au début du cours préparatoire. Ces
évaluations, qui portent essentiellement sur le langage oral et sur les
premières phases d'entrée dans la maîtrise de
l'écrit, visent le repérage des acquis et des indices de
difficultés naissantes. Les résultats de ces évaluations
ne feront pas l'objet d'une collecte nationale, mais serviront à
l'équipe pédagogique pour adapter les parcours d'apprentissage et
seront communiqués et expliqués aux parents ;
- l'amélioration de l'exploitation des
évaluations
nationales existantes. En particulier, la circulaire n°2000-205 du 16
novembre 2000 prévoit la mise en place de programmes
personnalisés d'aide et de progrès pour les élèves
les plus en difficulté afin que l'année de CE2 leur permette de
renforcer leurs acquis et de compléter leurs lacunes.
On peut toutefois observer que ce plan « pour l'école
maternelle et élémentaire » comporte en fait peu
d'orientations pour
l'école maternelle
. Interrogé par
votre commission sur les suites qu'il entendait donner au rapport de l'IGEN de
janvier 2000 portant «
état des lieux
» pour
l'école maternelle en France, le ministre s'est ainsi contenté de
répondre que ce rapport «
[n'avait]
pas
été rendu public
». Ce rapport contenait pourtant
nombre de recommandations de bon sens, comme celles consistant à ce que
les spécificités des classes de maternelle soient prises en
compte dans le cadre de la formation initiale des professeurs des écoles
appelés à y enseigner.
b) Au collège
En
s'appuyant notamment sur le rapport qu'il avait commandé à
M. Philippe Joutard, le ministre de l'Education nationale a annoncé
le 5 avril 2000 ses
nouvelles orientations pour le collège
(«
le collège pour tous et pour chacun
»).
Contrairement aux préconisations formulées par M. Jean-Luc
Mélenchon, ministre délégué à l'enseignement
professionnel, qui soulignait notamment les écarts d'âge
49(
*
)
dans les classes de
5
ème
et de 4
ème
, cette réforme a
maintenu le principe
d'un collège unique,
« lieu de
tous les brassages et impliquant le vivre ensemble
».
Afin de «
réaliser [cet] l'idéal du collège
unique
» et de démocratiser non plus seulement
l'accès au collège, mais aussi la réussite scolaire, ces
orientations pour le collège visent toutefois à
«
prendre en compte en compte et à valoriser les
différences individuelles
», c'est à dire
«
à
proposer aux collégiens un
véritable parcours de formation qui concilie un niveau
élevé d'exigences et une pluralité d'itinéraires
pour les atteindre
», «
les questions de
pédagogie et d'éducation, et non de structure, [étant]
prioritaires
».
Concrètement, il s'agit de mieux
gérer
l'hétérogénéité
des
élèves, non pas au travers de filières différentes,
mais grâce à la mise en place de
parcours individuels
différenciés
, à une meilleure prise en charge des
élèves en difficulté et à une meilleure
préparation aux choix d'orientation.
Pour atteindre ces objectifs, les établissements sont invités
à «
exercer leur responsabilité et à mettre
en place des dispositifs adaptés
», et leur
autonomie
est étendue à la gestion des moyens
destinés aux actions prioritaires prévues par le projet
d'établissement : ce principe de globalisation des moyens
délégués dans les collèges concerne la classe de
6
ème
à partir la rentrée 2001, et devrait
s'étendre progressivement à toutes les autres classes.
La
mise en oeuvre
des mesures annoncées pour le collège
doit se faire au rythme d'un cycle par année. La nouvelle
6
ème
fut donc mise en place à la rentrée 2001.
Les classes de 5
e
et de 4
e
seront concernées
à la rentrée 2002 et la classe de 3
e
à la
rentrée 2003. Enfin, la première session du «
brevet
d'études fondamentales
», qui remplacera le diplôme
national du brevet, aura lieu en juin 2004.
Année par année, ces orientations générales se
déclinent
de la manière suivante :
-
1a classe de 6
e
doit être «
un moment
d'adaptation et d'intégration
». Les collèges sont
donc «
invités à innover dans le domaine de
l'accueil des élèves
» et un horaire doit
être explicitement consacré à cet accueil et à cette
intégration de la rentrée à la Toussaint, afin d'une part
de permettre aux élèves de mesurer clairement les attentes du
collège en termes de savoirs, de méthodes, de
comportements ; d'autre part de donner confiance aux plus fragiles en
mettant en relief les éléments de continuité qui existent
d'un niveau d'enseignement à l'autre. Par ailleurs, l'apprentissage de
l'expression orale
sera conforté, et appuyé par la
prochaine généralisation, au niveau des programmes de toutes les
disciplines, d'une rubrique « maîtrise des langages »
telle qu'elle existe déjà en histoire-géographie. Enfin,
l'intérêt pédagogique de l'évaluation nationale
à l'entrée en 6
e
est réaffirmé et cette
évaluation sera étendue à d'autres disciplines que le
français et les mathématiques ;
- les
classes de 5
e
et de 4
e
doivent permettre la
«
reconnaissance de la diversité des goûts et des
aptitudes
». Les pratiques de
pédagogie
différenciée
mises en oeuvre depuis plusieurs années
dans le cadre des « parcours diversifiés » puis des
« travaux croisés » devraient ainsi connaître
un nouvel essor sous la forme d'
itinéraires de découverte
mis en place à partir de la rentrée 2002. Fondés sur une
approche interdisciplinaire, ils devront valoriser chez les
élèves le travail autonome autour de projets et favoriser le
travail en équipe des enseignants. Chaque élève choisira
plusieurs itinéraires de découverte parmi quatre
pôles : la nature et le corps humain, les arts et les
humanités, les langues et les civilisations, l'initiation à la
création et aux techniques. L'évaluation du travail
réalisé dans ces itinéraires sera l'une des composantes du
nouveau brevet d'études fondamentales ;
- la classe de 3
e
doit constituer «
une
préparation aux premiers choix d'orientation
». Cette
préparation s'inscrit dans le cadre de la circulaire n° 96-204
du 31 juillet 1996 relative à
l'éducation à
l'orientation
au collège. Cependant, cette préparation
à l'orientation devrait aussi s'appuyer sur les nouveaux
itinéraires de découverte choisis en 5
ème
et en
4
ème
et surtout sur
une nouvelle répartition des
enseignements
laissant une part de choix aux
élèves
: 15 % de l'horaire de la 3
e
seront
consacrés à des enseignements choisis par l'élève,
en plus des enseignements communs. Plusieurs domaines d'options seront
proposés : langues et cultures de l'Antiquité, langues et
cultures du monde, arts, sciences expérimentales, technologie,
découverte professionnelle. Sur la base de
quatre
heures
hebdomadaires
, chaque élève pourrait choisir deux domaines
représentant deux heures.
A partir de la rentrée 2003, le parcours de la scolarité au
collège sera par ailleurs couronné par un diplôme
unique :
le brevet d'études fondamentales.
Construit dans
l'esprit du baccalauréat, il remplacera l'actuel diplôme national
du brevet. Obligatoire pour tous les collégiens, et
«
symbole de la réussite au collège
»,
il «
sera un élément
déterminant
» pour la poursuite d'études en classes
de seconde générale, technologique ou professionnelle et portera
sur les enseignements suivis lors de toute la scolarité au
collège. Outre des épreuves communes, cet examen portera sur une
ou deux épreuves au choix dotées d'un fort coefficient, ce qui
sera une façon de valoriser les enseignements spécifiques choisis
par les élèves.
Ces orientations, au demeurant assez floues, appellent les trois observations
suivantes :
• En premier lieu, contrairement aux préconisations du rapport de
M. Joutard, qui estimait nécessaire, «
en rapport avec les
conclusions des réflexions en cours et du rapport récent [de
2000] des deux inspections générales, ... de
redéfinir clairement les missions
» des sections
d'enseignement général et professionnel adapté (SEGPA),
qui reçoivent des
élèves en grande difficulté
scolaire,
ces orientations se contentent d'en «
renforcer la
spécificité
» ;
• En second lieu, les orientations annoncées en faveur de
l'autonomie
des établissements demeurent extrêmement
modestes. En effet, si elle constitue un progrès, la globalisation des
moyens dans une même enveloppe (intégrant postes et heures
supplémentaires) contractualisée sur trois ou quatre ans et
modulée en fonction des établissements, n'est prévue que
pour les actions prioritaires prévues par le projet
d'établissement. En outre, si le protocole d'accord du 16 novembre 2000
relatif au statut des chefs d'établissements les a pour partie
déchargés de tâches administratives, il n'a presque pas
renforcé leurs prérogatives en matière d'animation
pédagogique (cf. encadré).
Le plan de revalorisation du rôle des chefs d'établissement de l'enseignement secondaire
A la
suite notamment des réflexions consécutives au rapport remis en
avril 1999 par le recteur BLANCHET, relatif à «
la
revalorisation du rôle des chefs d'établissement dans
l'enseignement secondaire
», le ministre de l'Education nationale
a signé le 16 novembre 2000 un protocole d'accord portant revalorisation
du rôle des chefs d'établissement, c'est à dire qui visait
plus précisément à :
- clarifier les missions et les responsabilités du chef
d'établissement ;
- créer les conditions d'un pilotage et d'un fonctionnement efficace de
l'établissement et de ses différentes instances, notamment en
installant une nouvelle organisation de la gestion matérielle et
financière pour alléger les tâches administratives du chef
d'établissement ;
- développer l'évaluation par objectifs des chefs
d'établissement ;
- enrichir et professionnaliser la formation initiale des personnels de
direction ;
- faire évoluer progressivement le recrutement en abaissant l'âge
maximum d'accès à 45 ans ;
- accroître la mobilité, qui sera rendue obligatoire à
l'issue de 9 ans dans le même poste ;
- accroître la déconcentration académique.
Parallèlement, la carrière des personnels de direction
était financièrement revalorisée (revalorisation des
indemnités, « repyramidage » du corps, etc.), pour
un surcoût annuel d'environ 24,4 millions d'euros (160 millions de
francs) d'ici 2004.
Enfin, les emplois de débouchés offerts était
élargis.
Dans le cadre de son rapport spécial au nom de la commission des
finances du Sénat sur les crédits de l'enseignement scolaire pour
2001, M. Jean-Philippe Lachenaud, alors rapporteur spécial total,
s'était félicité de la plupart de ces orientations,
notamment de l'amélioration de la formation, de l'évaluation et
de la mobilité de ces personnels indispensables au bon fonctionnement
des établissements locaux d'enseignement. Il était en effet
parfois peu satisfaisant que certains personnels de direction demeurent 20,
voire 25 ans dans le même établissement. De même,
l'amélioration de la formation initiale et continue des personnels de
direction pourrait permettre la diffusion de techniques modernes de management,
comme la construction de tableaux de bord.
Il avait toutefois souligné que protocole constituait à bien des
égards une
occasion
manquée
.
En premier lieu, le protocole ne prévoit d'ouvrir le recrutement des
personnels de direction qu'à des fonctionnaires détachés,
dans la limite de 5% de chacun des niveaux d'entrée des corps
concernés, et après la parution de nouvelles dispositions
statutaires toujours en examen un an après. Il était pourtant
envisageable d'élargir ce recrutement à des cadres issus du
secteur privé, au moins à titre expérimental.
En second lieu, la « clarification » annoncée des
personnels de direction relève plutôt d'un compromis flou.
En effet, si le protocole confirme que le chef d'établissement
« impulse et conduit une politique pédagogique et
éducative », il ne renforce aucunement le droit de regard et
d'évaluation des personnels de direction sur le travail des enseignants,
contrairement aux préconisations du rapport du recteur Monteil de 1999.
Par ailleurs, ce protocole tend à décharger les personnels de
direction des tâches d'administration et de gestion, alors même que
divers rapports de l'Inspection générale de l'administration de
l'Education nationale (IGAEN) soulignaient déjà que les chefs
d'établissement n'assumaient pas leurs responsabilités
d'ordonnateur de manière satisfaisante, les engagements de
dépense étant ainsi souvent signés par le gestionnaire
sans contrôle et sans délégation de signature.
Pour le reste, les orientations du ministère en matière
d'autonomie des établissement consistent selon le ministère
à développer les
« bassins de
formation
» (des «
structures non
hiérarchiques, niveau infra départemental d'animation de l'action
pédagogique et de la vie des établissements, qui offre aux
établissements qui les composent comme à leurs équipes de
direction un espace important d'échange, d'initiative qui contribue
à renforcer les capacités d'action des établissement et
donc leur autonomie
») ; à «
engager...
un travail visant l'amélioration, pour et dans l'établissement,
des outils de connaissance, d'analyse et de gestion de ses différentes
composantes
» ; enfin, à
«
envisager
la création d'un conseil
pédagogique chargé d'instruire les questions pédagogiques
soumises à l'examen du conseil d'administration, ...,
[et de
participer] au suivi de la mise en oeuvre du projet d'établissement et
à l'élaboration du rapport annuel sur le fonctionnement
pédagogique de l'établissement. Réuni sous la
présidence du chef d'établissement, il pourrait être
composé de 10 à 25 enseignants, désignés par les
équipes pédagogiques, à raison d'un enseignant pour chaque
discipline et d'un pour chaque niveau d'enseignement...
».
A bien des égards,
ces orientations paraissent en retrait par rapport
aux préconisations de M. Joutard,
selon lesquelles
« la
première condition [de réussite de la réforme] est
l'autonomie des établissements qui doit s'accompagner d'un meilleur
fonctionnement en réseau. Cette autonomie est assurée
- par deux globalisations distinctes de moyens : d'une part, ceux qui sont
accordés pour la réussite de tous ; d'autre part, ceux qui
sont prévus pour la diversification (parcours de
découverte) ;
- en donnant la possibilité au principal aidé par des professeurs
responsables en relation avec leurs collègues des lycées
professionnels et toute autre personne utile de trouver des dispositifs
adaptés pour les élèves en voie de rupture avec le
système scolaire sous la forme de contrats pédagogiques
personnalisés : classes relais, collèges
expérimentaux, internat, lycées professionnels, autres formules
plus souples encore...
L'instrument de ce projet reste le projet d'établissement... Il faut
donner au conseil d'administration une véritable fonction
pédagogique
».
Par ailleurs, le rapport de M. Joutard soulignait que cette autonomie devait
s'accompagner de quatre contreparties elles aussi partiellement absentes des
orientations ministérielles : «
une évaluation
rigoureuse, dont on tire les conséquences ; une formation initiale
et plus encore continuée de tous les acteurs de terrain ; une
attention particulière portée à la qualité des
chefs d'établissement ; [enfin] un pilotage clair, ferme et soutenu
de l'autorité tant ministérielle que
déconcentrée ».
• Enfin, on peut plus généralement
s'interroger sur la
capacité du ministère à mettre effectivement en oeuvre une
nouvelle réforme des collèges.
En effet, le rapport général de l'IGAENR pour 1999
soulignait
50(
*
)
que la
rénovation du collège engagée en
1994 «
avait quelque difficulté à se mettre en
place, faute sans doute d'avoir été bien comprise... Certes les
nouveaux programmes sont entrés en application, mais les
évolutions attendues en termes de structures et de méthodes ne
sont pas au rendez-vous
». En particulier, comme le relevait un
nouveau rapport de l'IGAENR en septembre 2000
51(
*
)
, «
le collège
en trois cycles n'est toujours pas assimilé, six ans après sa
création
».
De même, quoique « recentrées » par M. Lang
sur des priorités un peu mieux affirmées, les 40 mesures
annoncées en juin 2000 par Mme Ségolène Royal, alors
ministre déléguée à l'enseignement scolaire,
embrayent très inégalement sur les pratiques des
établissements et des enseignants. En particulier, les enseignants, et
a fortiori
les élèves et leurs parents éprouvent
toujours quelques difficultés à assimiler les subtiles
différences entre les heures normales, les heures de remise à
niveau, les heures dédoublées, l'enseignement modulaire, l'aide
individualisée, les parcours diversifiés, les groupes de
nouvelles technologies appliquées, la souplesse horaire, les travaux
croisés, les ateliers de lecture, les études dirigées ou
encadrées, le tutorat, les heures de vie de classe, etc., et ces
diverses modalités d'enseignement sont mises en oeuvre de manière
très inégale. L'IGAENR conclut
52(
*
)
d'ailleurs à cet
égard que les réformes du collège «
ont
souffert à la fois de [la] volonté de tout réglementer
dans le détail, mais aussi, parallèlement, de l'absence d'aide
concrète et de soutien apportés aux équipes enseignantes
et aux équipes de direction, en particulier en matière d'outils
pédagogiques et de formations
».
Tout en préconisant de nouvelles mesures pour le collège, M.
Joutard reconnaissait ainsi : «
on a parfois le sentiment
d'une accumulation de mesures superposées sans être
harmonisées ; L'exemple le plus clair réside dans la
succession mal comprise de parcours diversifiés en cinquième et
de travaux croisés en quatrième, sans que les acteurs de terrain
et encore moins les parents ou élèves comprennent la logique de
cette succession. Le système devient de plus en plus illisible. Tous les
observateurs insistent aussi sur la lassitude et le
désenchantement...
».
c) Au lycée
La mise
en place de la réforme amorcée à la rentrée 1999
dans les classes de seconde se poursuit, puisqu'elle s'étend à la
rentrée 2001 aux classes de terminale des séries
générales.
On peut rappeler que cette réforme consiste pour l'essentiel en la mise
en place de nouveaux programmes qui accordent une place plus importante
à l'initiative des enseignants, à l'accompagnement
personnalisé de chaque élève, à l'aide à
l'orientation progressive et au choix des options.
Les principales
novations
de la rentrée 2001-2002 sont
ainsi :
- la consolidation et extension progressive des
travaux personnels
encadrés
53(
*
)
(TPE) dans les séries de la voie générale :
confortés en classe de première, ils sont introduits en terminale
dans tous les lycées et dans toutes les séries de la voie
générale. A titre transitoire et pour la seule année
scolaire 2001-2002, les élèves pourront choisir ou non de
s'engager dans un TPE et de présenter ou non le travail effectué
comme épreuve supplémentaire au baccalauréat
(c'est-à-dire en plus des deux options facultatives). Seuls les points
au-dessus de la moyenne seront comptabilisés à l'examen. En
première comme en terminale, les élèves auront à
mener un seul TPE qui croisera au moins deux disciplines. Pour la
réalisation des TPE, deux heures consécutives sont prévues
dans l'emploi du temps des élèves de première comme de
terminale. A chacun de ces deux niveaux, soixante-douze heures annuelles sont
donc à répartir entre les professeurs concernés, qui sont
choisis sur la base du volontariat. Le bilan des TPE est toutefois pour le
moins mitigé (cf. encadré) ;
Le bilan mitigé des TPE
La
direction de la programmation et du développement (DPD) du
ministère a publié en février 2001 une note d'information
sur la mise en oeuvre de la réforme des lycées à la
rentrée 2000
54(
*
)
.
Réalisée à partir d'un sondage par téléphone
d'un panel de 400 chefs d'établissement choisis par la DPD, selon une
méthodologie (questions ouvertes ou questions fermées notamment)
qui n'a pas été précisée, cette note
affirmait d'emblée : «
une conclusion se dégage
de cette enquête : les travaux personnels encadrés (TPE)
démarrent très bien et ils rencontrent l'adhésion massive
des proviseurs. Certes, certains se plaignent d'une mise en oeuvre
précipitée, des difficultés d'emplois du temps et surtout
du manque de petites salles pour les nombreux petits groupes
générés par les TPE mais, sur le fond, la plupart
soutiennent cette réforme avec enthousiasme
».
Cette même note relevait toutefois
in extremis
«
qu'une vingtaine de proviseurs pensent qu'une évolution
du statut des enseignants conditionne l'approfondissement des réformes
[et] que...le développement d'activités telles que les TPE
supposent un temps de présence plus élevé et une nouvelle
définition du service... les récriminations sont nombreuses sur
le caractère précipité des réformes ou les
décisions tardives, sur la mauvaise communication, le manque de
précision sur le comment faire... Enfin, 5 % des proviseurs,
plutôt peu favorables aux réformes, posent le problème de
la responsabilité et du contrôle de la présence des
élèves...
».
Ces appréciations nuancées ont été
confirmées en juin 2001 par un rapport de l'IGEN, à ce jour non
public. Tout en indiquant que les TPE avaient «
fait
l'unanimité
» à leur lancement et en invitant
à prendre «
avec quelques
précautions
» le «
pari
risqué
» consistant à les
généraliser, l'IGEN relevait en effet le caractère parfois
trop général et ambitieux des thèmes nationaux, une
perception peu claire de ce que devaient être les TPE, l'absence de
réflexion sur l'articulation entre les programmes et les TPE, le
débordement des CDI lors des séances de TPE, la
préparation insuffisante des enseignants, la surcharge de travail
induite pour les élèves sans que ceux-ci n'en voient toujours le
sens, enfin, les dérives auxquelles donnent lieu le travail en
autonomie en citant des élèves selon lesquels
«
pour le travail en autonomie, vous nous trouverez plus
facilement au baby-foot du café d'en face ou dans notre lit plutôt
qu'au lycée
». En conclusion, ce rapport soulevait ainsi
une question récurrente : «
l'Education nationale
a-t-elle les moyens de mener à bien les réformes qu'elle
promeut ?
»
- la diffusion aux classes de première des
lycées
technologiques
de certaines innovations de la réforme des
lycées généraux, comme les heures de vie de classe et les
ateliers artistiques et, à titre expérimental dans des
établissements volontaires, des travaux personnels encadrés et de
l'enseignement d'éducation civique, juridique et sociale ;
- la poursuite de la
rénovation des programmes
;
- la création d'un enseignement complémentaire de 4 heures par
semaine d'éducation physique et sportive pour les élèves
ayant suivi l'enseignement de détermination d'EPS en classe de seconde
et souhaitant le prolonger au cours du cycle terminal, l'objectif étant
d'offrir cet enseignement dans 200 établissements d'ici trois ans ;
- le
recentrage de l'aide individualisée
en classe de seconde
générale et technologique vers le public scolaire le plus en
difficulté. En effet, à l'issue de la première
année de fonctionnement, le dispositif s'est révélé
peu efficace sur les résultats des élèves, en raison,
selon une étude commanditée par la direction de l'enseignement
scolaire du ministère
55(
*
)
du «
caractère
peu ciblé du dispositif
», mais aussi
«
[d'une] incohérence relative dans l'allocation des moyens
aux établissements et du faible nombre de séances suivies par les
élèves
».
- la mise en place d'une
expérimentation
dans des
établissements volontaires consistant à ménager plus de
souplesse dans la gestion des moyens horaires attribués aux
établissements pour les langues vivantes ;
- l'entrée en application de la nouvelle réglementation du
baccalauréat
.
Comme pour les mesures précédentes, comme pour la
rénovation du collège et comme l'illustre l'exemple des TPE (cf.
encadré ci-avant), on peut toutefois s'interroger sur la capacité
du ministère à mettre en oeuvre ces novations.
En effet, les premières évaluations
56(
*
)
de la réforme du
lycée avaient souligné les carences du ministère en
matière de conduite du changement : rafales de circulaires
difficiles à décrypter et à hiérarchiser, donc
d'interprétations aléatoires, et qui fixent
précisément les finalités générales et les
objectifs organisationnels, tout en restant discrets sur les méthodes
pédagogiques à mettre en oeuvre et sur les efforts de formation
et d'information nécessaires ; manque d'instances de pilotage, de
suivi et d'évaluation, tant au niveau des académies que des
établissements ; etc.
Or, interrogé par votre commission sur les mesures prises pour
remédier à ses dysfonctionnements structurels, le
ministère n'évoque que des amodiations apportées à
la réforme elle-même...
d) Au lycée professionnel
Le
gouvernement a lancé en l'an 2000 une réforme de
l'enseignement professionnel
qui devrait se mettre en place en 2001-2002.
Cette réforme se traduit notamment par un
allégement des
horaires
hebdomadaires moyens des élèves grâce à
une meilleure répartition des périodes de stage en
entreprises ; par la création de projets pluridisciplinaires
à caractère professionnel dans toutes les formations conduisant
aux brevets d'études et aux baccalauréats professionnels et par
la mise en place d'un encadrement pédagogique plus personnalisé
dans le cadre de travaux en petits groupes et surtout durant les
périodes de formation en entreprise.
Défini par une circulaire du 26 juin 2000, l'encadrement
pédagogique des élèves à l'occasion des
périodes de formation en entreprise, qui recouvre les différentes
phases de préparation, de suivi et d'exploitation pédagogique des
stages, figure ainsi désormais dans le nouveau statut des professeurs de
lycée professionnel, où il est pris en compte dans le service des
enseignants (dont les horaires d'enseignement sont parallèlement
réduits).
Les principales
novations
annoncées en 2001 sont :
- la mise en place de
temps de concertation
de 10 ou 12 heures pour
l'équipe pédagogique dans le cadre
des projets
pluridisciplinaires à caractère professionnel (PPCP) ;
-
la généralisation de
l'éducation civique
,
juridique et sociale (à hauteur de 0,5 heure par semaine) pour les
élèves entrant en BEP et en baccalauréat
professionnel ;
- la généralisation en seconde professionnelle de
l'aide
individualisée
en français et en mathématiques ;
- la priorité accordée à la voie professionnelle pour la
mise en place des classes à
projet artistique et culturel
;
- la faculté offerte aux élèves de faire valider le
brevet informatique et Internet
(B2i) au cours de leur scolarité
en lycée professionnel ;
- enfin, la poursuite de la
rénovation des diplômes
.