CHAPITRE II
DISPOSITIONS
RELATIVES AUX DROITS
DES ENFANTS NATURELS ET ADULTÉRINS
Article 9
Suppression des discriminations successorales
applicables
aux enfants adultérins
Cet article supprime toute référence dans le code civil à la notion d'enfant adultérin . Il aligne de ce fait la situation de ces enfants sur celle de l'ensemble des enfants naturels.
En accord avec l'alignement proposé, le Sénat avait apporté à cet article des modifications uniquement formelles.
Il avait ainsi exclu de la liste des abrogations prévues par les III et IV de l'article les articles 759 à 764 du code civil ainsi que l'intitulé de la section VI du chapitre III, tacitement abrogés du fait des nouvelles rédactions intervenues aux articles 2 bis et 3 de la présente proposition.
Votre commission vous proposera un amendement rétablissant le texte adopté en première lecture.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 9 ainsi modifié .
CHAPITRE III
AUTRES
DISPOSITIONS RÉFORMANT
LE DROIT DES SUCCESSIONS
En première lecture, le Sénat avait souhaité, à l'occasion de l'examen de la présente proposition de loi relative aux droits du conjoint survivant, procéder à la refonte générale du droit des successions qui, à la suite des travaux du groupe de travail animé par le doyen Carbonnier et le professeur Catala, avait déjà donné lieu au dépôt à l'Assemblée nationale de deux projets de loi sous deux gouvernements d'orientation politique différente.
Il avait regroupé dans ce chapitre III intitulé « autres dispositions réformant le droit des successions », l'ensemble des dispositions en cause non abordées dans les chapitres précédents.
L'Assemblée nationale a supprimé ce chapitre.
Prenant acte, avec regrets, du délai inexistant (une semaine) imposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale pour examiner ce texte en deuxième lecture et du refus consécutif de l'Assemblée nationale de procéder à une réforme d'ensemble, votre commission vous proposera de ne reprendre à ce chapitre que le début de la rédaction proposée en première lecture, à savoir celle des articles 718 à 767 correspondant aux trois premiers chapitres actuels du titre Ier du livre troisième du code civil dans lesquels s'intègre la réforme des droits successoraux du conjoint survivant.
Votre commission vous propose de rétablir le chapitre III et son intitulé.
Article
9 bis B
(art. 720 à 724-1 du code civil)
Ouverture des
successions, titre universel et saisine
Cet article, adopté par le Sénat en première lecture, tend à déterminer clairement le cadre et les principes du système successoral en donnant une nouvelle rédaction du premier chapitre du code civil relatif aux successions. A travers les articles 720 à 724-1 du code civil , il traite de l'ouverture des successions, du titre universel et de la saisine.
L'article 720 proposé par l'amendement indique que les successions « s'ouvrent par la mort au dernier domicile du défunt ». Il fixe ainsi en une seule phrase les deux références capitales au temps et à l'espace qui encadrent les mécanismes du droit successoral. A l'heure actuelle, le lieu de l'ouverture de la succession est fixé par l'article 110 inclus dans le titre du code civil relatif au domicile. C'est une anomalie, ce titre ayant pour fonction de définir et de localiser le domicile alors que ses incidences sur les institutions qu'il affecte se situent normalement au sein de la matière concernée (compétence, conflits de lois etc...).
L'article 721 pose, à propos de la dévolution, les deux principes antagonistes de la liberté de disposer et de la réserve héréditaire. Le défunt a pu librement donner ou léguer ses biens dans les limites de la quotité disponible. La dévolution légale s'applique à concurrence de la réserve et, plus généralement, quand le de cujus n'a pas pris de disposition à cause de mort.
L'article 722 maintient le principe de prohibition des pactes sur succession future, sauf exceptions prévues par la loi. Ce faisant, il en déplace l'énoncé du titre du code civil relatif aux obligations où il figure actuellement ( art. 1130 ) au titre relatif aux successions qui est son siège naturel. Il est proposé une nouvelle formulation s'inspirant de la jurisprudence : « les conventions qui ont pour objet de créer des droits ou de renoncer à des droits sur tout ou partie d'une succession non encore ouverte ou d'un bien en dépendant ne produisent effet que dans les cas déterminés par la loi ».
L'article 723 proclame que notre droit demeure attaché au système traditionnel de la continuation de la personne du défunt par l'héritier : celui qui se substitue au défunt à la tête du patrimoine héréditaire recueille tout l'actif (ou une quote-part) et répond du passif dans les mêmes proportions. Il lie l'obligation indéfinie aux dettes de la succession au titre universel du successeur, mettant définitivement fin à une querelle qui a obscurci la jurisprudence pendant un siècle, en raison d'une doctrine qui prétendait rattacher l'obligation indéfinie à la saisine et non au titre universel.
L'article 724 , relatif à la saisine, est donc désormais clairement détaché de l'obligation aux dettes et aux charges de la succession. Il précise que les « héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et obligations du défunt ». Dans sa rédaction nouvelle, on relève une innovation significative. Là où le texte actuel du code civil dit : « les héritiers légitimes, les héritiers naturels et le conjoint survivant sont saisis ... », le texte proposé vise l'ensemble des héritiers désignés par la loi, faisant ainsi disparaître toute trace de l'époque où les héritiers naturels et le conjoint survivant étaient des « successeurs irréguliers », pourvus d'un statut successoral inférieur à celui des héritiers légitimes.
L'article 724-1 pose le principe de l'équivalence du titre universel résultant de la loi et de celui résultant d'une disposition du défunt. Le système héréditaire y gagne en clarté puisque les règles applicables aux héritiers ab intestat le seront aux gratifiés universels ou à titre universel, à moins d'une dérogation particulière.
L'Assemblée nationale a supprimé cet article.
Votre commission vous propose de rétablir l'article 9 bis B dans la rédaction adoptée en première lecture.
Article
9 bis C
(art. 725 à 729-1 du code civil)
Des
qualités requises pour succéder
Cet article, adopté par le Sénat en première lecture, crée dans le code civil une section comportant les articles 725 à 729-1 modernisant les qualités requises pour succéder .
Après avoir rappelé, dans les mêmes termes qu'actuellement, que pour succéder, il faut « exister » à l'instant de l'ouverture de la succession ou avoir été déjà conçu à la condition de naître viable ( art. 725 ), le texte apporte deux catégories de modifications concernant, l'une, la théorie des comourants , l'autre, les héritiers frappés d'indignité de succéder.
En premier lieu, donc, la proposition de loi supprime la théorie des comourants , dont on sait qu'elle était vivement critiquée, comme reposant sur des propositions de survie artificielles et, de surcroît, incomplètes. Ainsi, à l'heure actuelle, si un homme et une femme du même âge, compris entre quinze et soixante ans, ont péri ensemble dans un événement, l'homme est présumé avoir survécu à la femme. S'inspirant de plusieurs législations étrangères, le nouveau texte prévoit que si deux personnes ayant vocation à succéder l'une à l'autre périssent dans le même événement, si les circonstances ne permettent pas d'établir l'ordre des décès, la succession de chaque personne est dévolue sans que l'autre y soit appelée ( art. 725-1 ).
En second lieu, le texte modifie les dispositions relatives à l'indignité permettant d'exclure de la succession l'auteur de certains faits ayant porté gravement préjudice au défunt. L'actuel article 727 du code civil considère comme indigne celui qui a été condamné pour avoir attenté à la vie du défunt, pour l'avoir calomnié ou pour avoir l'avoir laissé assassiner. Le texte proposé distingue les condamnations criminelles qui rendraient obligatoire le prononcé de l'indignité ( art. 726 ) de celles, criminelles ou correctionnelles, qui entraîneraient un prononcé facultatif ( art. 727 ).
Le prononcé de l'indignité serait obligatoire en cas de condamnation à une peine criminelle pour :
- avoir volontairement attenté ou tenté d'attenter à la vie du défunt ;
- avoir commis des violences volontaires ayant entraîné la mort du défunt sans intention de la donner.
Le prononcé de l'indignité serait facultatif dans les cas :
- de condamnation correctionnelle pour avoir donné ou tenté de donner volontairement la mort au défunt ;
- de condamnation correctionnelle pour des violences ayant entraîné la mort du défunt sans intention de la donner ;
- de témoignage mensonger porté contre le défunt dans une procédure criminelle ;
- de condamnation pour abstention volontaire d'empêcher la commission d'un crime ou d'un délit ayant entraîné la mort du défunt ;
- de dénonciation calomnieuse contre le défunt pour des faits pour lesquels il aurait encouru une peine criminelle.
En première lecture, le Sénat avait en outre adopté un amendement présenté par M. Charasse permettant au juge de prononcer une indignité facultative dans le cas où une personne se serait donné volontairement la mort après avoir attenté à la vie du défunt, échappant ainsi à toute condamnation. Cette disposition présente un intérêt dans le cas où le meurtrier serait un conjoint sans enfant. Elle permettrait d'éviter qu'une partie de l'héritage du défunt ne passe à la famille de l'indigne.
Le texte met en outre fin à l'injustice dont étaient victimes les enfants de l'indigne : ceux-ci pourront désormais prendre la place de leur auteur dans la succession dont ce dernier est exclu, soit de leur chef, soit par l'effet de la représentation ( art. 729-1 ).
L'Assemblée nationale a supprimé cet article.
Votre commission vous propose de rétablir l'article 9 bis C dans la rédaction adoptée en première lecture.
Article 9 bis D
(art. 730
à 730-5 du code civil)
Preuve de la qualité
d'héritier
Cet article, adopté par le Sénat en première lecture, crée dans le code civil une nouvelle section relative à la preuve de la qualité d'héritier comprenant les articles 730 à 730-5 .
Les textes actuels ne renferment aucune disposition sur la façon dont la preuve de la qualité d'héritier peut être apportée. La pratique notariale, n'ignorant pas que l'on ne peut jamais exclure totalement l'existence d'un héritier inconnu ou d'un testament ignoré, et donc qu'il serait vain d'essayer de mettre au point une preuve absolue de la dévolution successorale, a donc imaginé, depuis fort longtemps, de dresser, après chaque décès, un acte dit « de notoriété », par lequel des témoins (deux, en règle générale) viennent indiquer quels sont les héritiers du défunt, et ce, en se référant à la notoriété publique (d'où la qualification donnée à l'acte).
Le texte proposé par le paragraphe I de cet article institutionnalise cette pratique , mais en la réglementant. Les notaires, créateurs de la formule, ont donc tout naturellement été désignés pour établir ce type d'acte ( art. 730-1 ). Toutefois, dans certains cas, les greffiers en chef des tribunaux d'instance auront également compétence à ce sujet. Par ailleurs, le texte précise qu'il n'est pas porté atteinte à la pratique des certificats de propriété ou d'hérédité par les autorités judiciaires ou administratives ( art. 730 ).
Le texte indique que l'acte de notoriété ne peut faire foi que « jusqu'à preuve du contraire » ( art. 730-2 ) ; simplement, les héritiers désignés dans l'acte de notoriété seront réputés, à l'égard des tiers détenteurs des biens de la succession, avoir la libre disposition de ces biens et, s'il s'agit de fonds, la libre disposition de ceux-ci dans la proportion indiquée à l'acte ( art. 730-4 ).
En outre, les déclarations qui servent de base à l'acte de notoriété sont celles des héritiers eux-mêmes -et non plus nécessairement de témoins-. Ce faisant, les héritiers engagent leur responsabilité : en cas de déclaration sciemment inexacte, les pénalités du recel seront applicables ( art. 730-5 ).
Le paragraphe II de l'article précise qu'il n'est pas porté atteinte au régime des certificats d'héritier en vigueur en Alsace-Moselle.
L'Assemblée nationale a supprimé cet article.
Votre commission vous propose de rétablir l'article 9 bis D dans la rédaction adoptée en première lecture.
Articles 9 bis E à 9 bis Z1
Autres dispositions
réformant le droit des successions
Ces articles, adoptés par le Sénat en première lecture et supprimés par l'Assemblée nationale, procédaient à la réforme d'ensemble du droit des successions.
Votre commission vous proposera de ne pas rétablir les articles 9 bis E à 9 bis Z1 .
Article 9 bis
Z2
Coordination
Cet article, adopté par le Sénat en première lecture, procédait dans divers textes à un certain nombre de coordinations de forme et de fond rendues nécessaires pas la réforme globale du droit des successions.
Les modifications proposées n'ont pour la plupart plus de raison d'être du fait de l'abandon de cette réforme globale. Elle ne seront pas reprises dans la rédaction de cet article.
Doit en revanche être reprise la nouvelle rédaction de l'article 1130 du code civil autorisant les obligations sur choses futures. Cette article doit désormais viser l'exception prévue par l'article 722 nouveau interdisant les conventions sur successions futures.
Votre commission vous propose de rétablir un article 9 bis Z2 ainsi rédigé .
Article 9 bis
Z3
Abrogations
Cet article, adopté par le Sénat en première lecture, prévoyait diverses abrogations par coordination avec le texte adopté.
Plusieurs de ces abrogations n'ont plus de raison d'être du fait de l'abandon de la réforme globale.
Trois d'entre elles restent pertinentes et doivent être reprises dans le présent article, à savoir celles de :
- l'article 110 du code civil relatif au domicile d'ouverture de la succession dont les dispositions ont été transférées à l'article 720 ;
- l'article 1094-2 du même code relatif à la conversion de l'usufruit en cas de libéralités, rendu inutile par les règles générales posées sur la conversion de l'usufruit par les articles 759 à 762 nouveaux ;
- l'article 1600 du même code interdisant la vente d'une succession d'une personne vivante, son objet étant inclus dans la formulation générale de l'article 722 interdisant les conventions sur les successions non encore ouvertes.
Votre commission vous propose de rétablir un article 9 bis Z3 ainsi rédigé .