C. UNE PRISE DE CONSCIENCE PROGRESSIVE
1. Un secteur à risque élevé
Selon le rapport Cailly-Mousseau 9 ( * ) , l'examen des statistiques d'accidents du travail et des maladies professionnelles provenant de GROUPAMA, pour l'assurance obligatoire en 1996, montre un taux de 6,66 % de victimes d'accidents par rapport au nombre d'assurés, tous non-salariés agricoles confondus. Ce taux est descendu à 5,19 % en 1997. Pour les seuls chefs d'exploitation, le taux est de 10,72 % en 1996 et de 8,31 % en 1997.
A titre de comparaison, les salariés agricoles présentaient en 1996 un taux de 4,31 %.
Dans son ensemble, l'activité agricole est un secteur à risques relativement élevés. En ce qui concerne les catégories les plus exposées, les exploitations forestières sont chaque année en tête pour le taux de victimes, suivies par les entreprises de travaux agricoles et les élevages spécialisés.
Pour les maladies professionnelles, c'est la polyculture, secteur qui englobe productions végétales et élevage, qui en recense le plus grand nombre, puis les élevages spécialisés, dans la plupart des cas.
2. Une préoccupation relayée par la profession
L'implication de la Mutualité sociale agricole sur cette question est ancienne.
L'assemblée générale des caisses centrales de la Mutualité sociale agricole de 1988, dans son rapport « prévention-santé », évoquait déjà largement les risques du métier d'agriculteur et les besoins insuffisamment couverts. Le thème central de la journée nationale, le 3 octobre 1997 à Poitiers, avait pour thème « la santé et la sécurité au travail en agriculture ». La question de la mise en place d'une politique de prévention spécialement destinée aux non-salariés agricoles a fait l'objet de projets et d'expériences de terrain dans un certain nombre de caisses régionales de la MSA depuis le début des années 90. Lors de son conseil d'administration d'avril 1998, la MSA a pris une résolution proposant « que le projet de loi d'orientation agricole comporte un article d'engagement du Gouvernement à créer un Fonds de prévention pour les non-salariés agricoles, géré sous sa responsabilité par la MSA, et demande au Gouvernement de s'engager à soumettre au Parlement, un rapport d'orientation sur l'assurance accidents des exploitants agricoles. Il estime que, pour l'AAEXA, s'agissant d'une protection à caractère obligatoire, elle relève naturellement de sa compétence » .
Répondant pour partie au souhait de la MSA, M. Jean Glavany, ministre de l'Agriculture et de la Pêche, et Mme Martine Aubry, alors ministre de l'Emploi et de la Solidarité, ont confié une mission, par lettre du 27 octobre 1998, à l'inspection générale de l'agriculture et à l'inspection générale des affaires sociales, ce qui a donné lieu au rapport de M. Pierre-Gérard Cailly et de Mme Monique Mousseau, dit « rapport Cailly-Mousseau », rendu en avril 1999.
Du côté des organisations professionnelles agricoles, le congrès de la FNSEA de mars 1999, ayant pour thème « la protection sociale des agriculteurs », a abordé notamment la question de la prévention des accidents du travail des exploitants. Trois critiques majeures ont alors été adressées à l'AAEXA :
- l'absence de politique de prévention ;
- l'insuffisance « dramatique » des rentes viagères et absence d'indemnités journalières ;
- et l'absence de couverture de certains exploitants malgré l'obligation d'assurance.
Le rapport de M. Jérôme Cahuzac et de Mme Béatrice Marre sur les adaptations à apporter à la fiscalité et au mode de calcul des cotisations sociales agricoles, rendu le 28 mars 2000, a abordé à titre incident la question de l'AAEXA, en présentant une synthèse du rapport « Cailly-Mousseau », mais en prenant parti, par référence au discours de M. Jean Glavany tenu le 7 mai 1999 lors du congrès de la confédération nationale de la mutualité, de la coopération et du crédit agricole (CNMCCA), pour « un système de cotisations sociales uniformes pour tous et ne variant que selon les risques » 10 ( * ) . Les auteurs du rapport ont mis en avant la nécessité de créer un fonds de financement de la prévention, financé conjointement par la MSA et par l'Etat. Ce « co-financement » n'a pas été retenu par le texte de la proposition de loi soumise à votre examen.
* 9 Rapport de l'inspection générale de l'agriculture et de l'inspection générale des affaires sociales, op. cit.
* 10 Rapport Cahuzac-Marre, mars 2000, p. 246.