II. LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

1. Les orientations

En décidant de ne pas bouleverser le dispositif de la loi de 1997, votre commission a fait le choix de la continuité. L'objectif à atteindre reste l'ouverture du dialogue entre les architectes des Bâtiments de France et leurs différents interlocuteurs au sein d'une instance de dialogue dont la composition et la compétence territoriale garantissent mieux qu'à l'heure actuelle l'efficacité . Il faut sans doute du temps pour modifier en profondeur des habitudes ancrées dans le sentiment, et la fierté, de servir l'intérêt public envers et contre la pression d'intérêts parfois indifférents au sort de notre patrimoine architectural. Et il serait paradoxal que le législateur incite les architectes des Bâtiments de France à substituer en ce domaine la pédagogie au diktat sans avoir lui-même le souci pédagogique de reconnaître le rôle, à vrai dire irremplaçable, de ces serviteurs de l'État et de susciter leur adhésion. C'est pourquoi il convient aujourd'hui encore de chercher à tirer du système mis en place en 1997, dont le mérite est d'innover sans rompre, tout ce qu'il est possible d'en tirer . Or ce possible est vaste, comme le montrent les propositions adoptées par votre commission.

a) L'ouverture des recours aux pétitionnaires

Le choix avait été fait, en 1997, de ne pas ouvrir l'appel aux pétitionnaires. Il convient de rappeler les motifs de cette position : allongement de la procédure d'autorisation par l'ouverture d'un nouveau délai de recours entre la transmission de l'avis et la décision de l'autorité compétente, difficulté pour le maire, en cas de transformation d'un avis négatif en avis positif, de faire usage de son pouvoir d'appréciation sur l'opportunité d'accorder ou de refuser un permis, création d'une exception au principe selon lequel seules les décisions faisant grief ouvrent droit à recours.

L'expérience de deux années d'application de la loi tend cependant à démontrer que l'ouverture de l'appel aux principaux intéressés serait le moyen le plus expédient de faire entrer la procédure dans les habitudes et, par suite, de former l'administration à la pratique du dialogue dans le domaine de la protection du patrimoine architectural . Il est improbable que les commissions seront immédiatement débordées par un afflux de demandes : il faudra du temps pour passer d'une vingtaine de dossiers en deux ans à un chiffre plus représentatif de la réalité vécue sur le terrain. Au demeurant, la départementalisation de la procédure permettra d'accélérer le traitement des dossiers , même sensiblement plus nombreux.

Votre commission a donc décidé d'ouvrir l'appel aux pétitionnaires, pour les trois régimes juridiques de protection évoqués au début du présent rapport.

b) La départementalisation des recours

Des commissions départementales du patrimoine seraient chargées d'examiner les appels formés contre les avis des ABF et d'y substituer éventuellement leur avis. Le traitement des dossiers au niveau départemental permettra de faire face dans les meilleures conditions à l'augmentation souhaitée du nombre des recours . En outre le département apparaît généralement, spécialement face à l'hétérogénéité de certaines grandes régions sur le plan du patrimoine, comme le cadre adéquat du réexamen des avis des ABF. Enfin, compte tenu du nécessaire rééquilibrage, évoqué ci-dessous, de la composition de l'instance d'appel, la représentation des collectivités sera plus facile à organiser au niveau du département, compte tenu des problèmes que poserait la prise en compte des diversités régionales dans une commission au sein de laquelle le nombre des élus sera invariablement fixé à trois.

c) Le rééquilibrage de l'instance de dialogue

Il convient manifestement de préciser dans la loi la composition des commissions départementales du patrimoine, afin d'équilibrer la représentation des trois catégories de participants amenés à participer à leurs travaux.

Votre commission a donc fixé le nombre des membres des commissions départementales du patrimoine à huit. Elles seraient présidées par le préfet du département ou son représentant. Elles comprendraient en outre le directeur régional des affaires culturelles ou son représentant, un architecte des Bâtiments de France affecté dans le département désigné par le préfet, deux membres du Conseil général élus en son sein, un maire désigné par le président de l'association départementale des maires et deux personnalités qualifiées désignées l'une par le préfet et l'autre par le président du Conseil général. Ainsi serait parfaitement assuré l'équilibre entre la représentation de l'administration et celle des collectivités, et dissipé tout soupçon de mainmise de l'administration étatique sur la procédure d'appel .

La commission départementale du patrimoine émettra un avis se substituant à celui de l'architecte des Bâtiments de France. Votre commission a aussi estimé utile de fixer à deux mois le délai dans lequel elle aura à se prononcer.

2. Le dispositif

En fonction de ces orientations, le texte adopté par votre commission comporte cinq articles :

* L'article premier complète l'article premier de la loi n° 97-179 du 28 février 1997 afin de créer dans chaque département une commission départementale du patrimoine dont la composition est fixée comme indiqué ci-dessus.

En application des articles 2, 3 et 4, cette commission sera saisie des appels portés contre les avis conformes des architectes des Bâtiments de France, en application du troisième alinéa de l'article 13 bis de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, du quatrième alinéa de l'article L. 313-2 du code de l'urbanisme et du deuxième alinéa de l'article 71 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat, dans la rédaction de ces dispositions résultant de l'adoption du présent projet du loi. Elle substituera , le cas échéant, son avis à celui des ABF.

Les commissions régionales du patrimoine et des sites instituées par l'article premier de la loi n° 97-179 du 28 février 1997 conserveront les missions héritées en 1997 des commissions régionales du patrimoine historique et ethnographique (COREPHAE) et des collèges régionaux du patrimoine et des sites (CRPS), c'est à dire l'émission d'avis sur les propositions de classement parmi les monuments historiques et d'inscription sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et sur les projets de création de ZPPAUP.

* L'article 2 complète le troisième alinéa de l'article 13 bis de la loi du 31 décembre 1913 afin d'ouvrir aux pétitionnaires l'appel des avis conformes des ABF, et fixe à deux mois le délai dans lequel la commission départementale aura à se prononcer. Il effectue en outre une coordination au quatrième alinéa du même article.

* L'article 3 modifie le quatrième alinéa de l'article L. 313-2 du code de l'urbanisme afin d'introduire les mêmes possibilités dans la procédure d'instruction des autorisations de travaux effectués dans les secteurs sauvegardés.

* L'article 4 modifie le deuxième alinéa de l'article 71 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 pour étendre ces novations à la procédure d'instruction des autorisations de travaux effectués dans les ZPPAUP.

* L'article 5 prévoit que les conditions d'application de la loi seront fixées par décret en Conseil d'État.

Au bénéfice des observations qui précèdent, votre commission vous demande d'adopter la proposition de loi dans le texte résultant de ses conclusions, et qui figure ci-après.

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