III. LES EMPLOIS - JEUNES : DE FUTURS FONCTIONNAIRES ?

Les emplois-jeunes peuvent être considérés comme des emplois publics, puisque l'Etat prend en charge 80 % de leur rémunération, et même 100 % pour les adjoints de sécurité recrutés par l'Intérieur et les aides-éducateurs embauchés par l'Éducation nationale.

Le gouvernement continue à afficher son ambition initiale de recruter 350.000 emplois-jeunes, bien qu'il semble peu probable qu'il y parvienne, ne serait-ce que parce que, l'année dernière, il poursuivait déjà le même objectif pour la fin de l'année 2000. Or, comme le montre le tableau ci-après, cet objectif était loin d'être réalisé à la fin du mois d'août dernier :

Un recrutement aussi volontariste a évidemment fait baisser le niveau du chômage des jeunes, mais peu d'attention a été portée à leur avenir à l'issue des cinq années que doit durer leur contrat de travail.

C'est sans doute parce que le gouvernement commence à se préoccuper du devenir de ces jeunes à l'issue des cinq années que doit durer le dispositif, qu'il a annoncé la réunion prochaine d'un comité interministériel consacré à la pérennisation de ces emplois 18 ( * ) .

Votre rapporteur spécial s'interroge également sur le caractère novateur des emplois occupés à grand frais par ces jeunes - 23 milliards de francs dans le projet de budget pour 2001 -, l'innovation se limitant souvent, semble-t-il, à donner de nouvelles appellations à d'anciens métiers. Par ailleurs, l'esprit du dispositif est trop souvent détourné, des collectivités territoriales, notamment, étant incitées à recruter des emplois jeunes avant de les titulariser à l'issue du contrat de cinq ans, afin de bénéficier des aides publiques, non sur des postes nouveaux, mais sur des postes existants " reprofilés ". On ne saurait d'ailleurs en faire reproche aux gestionnaires locaux qui optimisent ainsi leur gestion.

Enfin, votre rapporteur spécial s'inquiète de la probable intégration d'une part conséquente des emplois-jeunes dans la fonction publique, rappelant que l'ancien ministre de la fonction publique avait déclaré, au début de l'année, que certains d'entre eux deviendraient fonctionnaires.

Il souhaite reproduire ci-après la réponse que lui a apportée le gouvernement sur ce point :

" L'intégration massive des emplois-jeunes dans la fonction publique de l'Etat est exclue "

Le programme en faveur de l'emploi des jeunes initié par la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 est essentiellement destiné à créer des emplois pour les jeunes de 18 à 30 ans dans des activités répondant à des besoins émergents ou non satisfaits. La vocation première des personnes en bénéficiant au sein des personnes morales de droit public n'est donc pas l'intégration dans la fonction publique. Elles peuvent toutefois faire acte de candidature à tous les concours externes sous réserve de remplir les conditions prévues pour s'y présenter.

S'agissant de la fonction publique de l'Etat, le protocole d'accord relatif à la résorption de l'emploi précaire et à une meilleure gestion de l'emploi public signé le 10 juillet 2000 prévoit la création d'un groupe de travail réunissant des représentants des administrations et des organisations syndicales représentatives de fonctionnaires et chargé d'envisager les suites de ce dispositif. Sans anticiper sur les conclusions de cette réflexion, l'intégration massive et directe des emplois-jeunes concernés dans la fonction publique de l'Etat est exclue.

Les adjoints de sécurité et les agents de justice, seuls emplois-jeunes à disposer, en application des dispositions législatives, d'un contrat de droit public, peuvent se présenter aux concours internes d'accès à des corps de fonctionnaires dès lors qu'ils remplissent les conditions fixées par le statut particulier du corps auquel le concours ouvre droit. Le ministère de l'intérieur a d'ores et déjà explicitement ouvert le concours interne de gardiens de la paix aux adjoints de sécurité.

En tout état de cause, ces dispositifs se traduiront essentiellement par des titularisations sur des emplois existants et n'engendreront donc pas en tant que tels de surcoût.

Dans le cas de la fonction publique hospitalière, le protocole d'accord signé entre la ministre de l'emploi et de la solidarité et les organisations syndicales représentatives le 14 mars dernier prévoit également une réflexion sur le devenir des emplois-jeunes à l'hôpital dont les conclusions ne sauraient être anticipées.

La problématique qui caractérise la fonction publique territoriale est différente puisque la création d'emplois budgétaires susceptibles d'accueillir des emplois-jeunes que leur employeur voudrait intégrer relève de la libre appréciation des collectivités.

Il est toutefois permis de douter de ces propos, du reste ambigus, ne serait-ce qu'en raison des très fortes pressions syndicales qui ne manqueront probablement pas de s'exercer lorsque se posera concrètement la question de l'avenir de ces jeunes.

* 18 Il convient de rappeler que la commission des affaires sociales du Sénat, qui avait mis en place un groupe de travail sur l'avenir des emplois-jeunes, a rendu ses conclusions il y a peu de temps : elles insistent sur l'étroitesse des voies de sortie du dispositif.

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