TITRE II :
EXTENSION DE L'ÉPARGNE
SALARIALE
ARTICLE 4
Provision pour
investissement et dispositions diverses relatives à l'épargne
salariale
Commentaire : le présent article prévoit plusieurs dispositifs destinés à améliorer l'épargne salariale.
I. LE TEXTE PROPOSÉ
A. LE PROJET DE LOI DÉPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT
Cet article prévoit tout un ensemble de dispositions destinées à promouvoir et développer les dispositifs d'épargne salariale existants.
Le I de l'article entend d'abord porter de 25 à 50 % de taux de la provision pour investissement, en franchise d'impôts, selon le mécanisme de l'article 237 bis A du code général des impôts. Ce dispositif constitue une incitation fiscale importante pour les entreprises qui instaurent une réserve spéciale de participation allant au delà des obligations légales. Son taux est de 50 % de la partie excédant ce minimum dans les entreprises de plus de 50 salariés soumises à l'obligation de mise en place d'un accord de participation. Il est en outre de 25 % pour les sommes allant jusqu'au minimum légal dans les entreprises de moins de 50 salariés non soumises à l'obligation mais faisant la démarche volontaire de mettre en place un accord de participation. Le projet de loi proposait quant à lui de faire porter ce dernier taux de 25 à 50 % pendant deux ans.
Le 2° crée un mécanisme proche en faveur des entreprises de moins de 100 salariés. Il s'agit d'une provision pour investissement, en franchise d'impôt, de 50 % des abondements consentis par l'entreprise en sus des versements faits par le salarié au titre de son intéressement. Deux conditions sont posées : il faut que les entreprises aient conclu un accord d'intéressement et qu'elles aient mis en place un plan d'épargne, à savoir un PEE, un PEI ou un PPESV.
Le II modifie sur trois points l'article L. 441-2 du code du travail qui définit l'accord d'intéressement.
Le 1° du II du présent article entend ainsi favoriser la conclusion d'accords d'intéressement dans des holdings. En effet, l'accord d'intéressement est lié selon l'article L. 441-2 du code du travail, " aux résultats ou aux performances de l'entreprise " ce qui exclut toute notion de groupe. Ce point, abordé à plusieurs reprises dans le projet de loi, interdit donc de prendre en compte les résultats et performances de filiales alors que certaines holdings n'ont pour activité que d'animer leurs filiales. Le projet de loi permettait ainsi de prendre en compte ces résultats dans la mesure où ils reflétaient la performance des salariés et où les filiales en question étaient couvertes par un accord d'intéressement. La définition retenue pour les filiales était celle de l'article L. 233-1 du code du commerce : il s'agit des filiales contrôlées de manière strictement majoritaire à savoir détenues par une société ayant plus de la moitié du capital.
Le 2° du II instaure un délai de contestation par l'administration du contenu des accords d'intéressement. Le code du travail prévoyait déjà la transmission au DDTEFP de l'accord d'intéressement, la transmission ouvrant droit aux exonérations prévues. Le projet de loi instaure un délai de contestation de quatre mois et autorise dans ce laps de temps l'administration à demander le retrait ou la modification de ce qui lui apparaît contraire aux lois et règlements ; au-delà de ce délai, la contestation ne pourra remettre en question les exonérations acquises. En cas de contestation, le projet de loi prévoit que l'une des parties pourra dénoncer l'accord en vue de sa renégociation. Cette disposition entend apporter une plus grande sécurité juridique aux accords et aux exonérations, puisque l'administration fiscale ou l'URSSAF peut aujourd'hui contester la conformité de l'accord et en déduire, plusieurs mois, voire plusieurs années après sa conclusion, l'illégalité des exonérations consenties. En contrepartie du délai de contestation, le 2° du II précise donc le régime juridique des exonérations et instaure une reconnaissance par l'administration du travail de la conformité de l'accord, par voie tacite à l'issue d'un délai de quatre mois après sa transmission.
Le 3° du II unifie formellement les conséquences d'une absence de respect des deux conditions de délai de conclusion d'un accord du point de vue du bénéfice des exonérations. L'article L. 441-2 du code du travail prévoit en effet que pour donner droit à exonérations à une date donnée, les accords doivent avoir été conclus " avant le premier jour du septième mois suivant la date de leur prise d'effet et déposés par la partie la plus diligente au plus tard dans les quinze jours suivant la conclusion à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du lieu où ils ont été conclus " . L'article précise ensuite que l'absence de dépôt dans les quinze jours n'ouvre le droit aux exonérations qu'à partir du moment du dépôt. En revanche, il est muet sur l'absence de respect de la première condition, ce qui semblerait signifier qu'aucune exonération n'est possible en ce cas. Pour éviter cela, le projet de loi indique dans ce 3° que l'absence de respect de l'une comme de l'autre des conditions limite le bénéfice des exonérations à la période postérieure au dépôt, ce qui signifie que les exonérations à venir ne seront pas remises en cause.
Enfin, le projet de loi contenait un III qui précisait les conditions d'appréciation de la règle de non-substitution de l'intéressement à des éléments de rémunération dans le cadre d'accords de réduction du temps de travail. Il s'agissait de compléter l'article L. 441-4 du code du travail qui pose le principe de l'absence de substitution entre l'intéressement et tout élément de rémunération, allant jusqu'à préciser que les sommes reçues dans le cadre de la rémunération ne sont pas des éléments de salaires. Ainsi, les articles L. 441-5 et L. 441-6 définissent le régime fiscal et social dérogatoire de ces sommes. Cependant, dans le cadre d'accords de réduction du temps de travail, certaines entreprises ont pu négocier une modération salariale en contrepartie, outre de la réduction du temps de travail proprement dite, d'un effort fait sur l'intéressement et la participation. Ceci aurait été reconnu par la circulaire interministérielle du 9 mai 1995, ce qui n'a pas empêché le développement d'un contentieux sur ce point, la jurisprudence faisant une application rigoureuse du code du travail. Le III prévoyait donc explicitement une exception à la règle de non substitution si l'accord d'intéressement a été prévu, conclu ou modifié dans le cadre d'un accord de réduction du temps de travail fixant la durée du travail à 35 heures par semaine ou 1.600 heures par an.
B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a souhaité étendre le dispositif du 1° du I (PPI de 50 % pour les entreprises de moins de 50 salariés qui instaurent une RSP) en l'appliquant aux accords déjà conclus et à ceux conclus dans les deux ans à venir. Cela se justifie pleinement dans la mesure où, d'une part, rien ne pouvait justifier d'écarter du dispositif les entreprises qui avaient déjà fait l'effort volontaire de s'engager sur la voie de la participation et, d'autre part les risques de fraude étaient importants. Elle a fait de même au 2° du I (PPI de 50 % pour les entreprises de moins de 100 salariés en cas d'accord d'intéressement).
Les députés ont également réécrit le 1° du II pour éviter que des contestations naissent de la condition selon laquelle le résultat des filiales devait révéler les performances des salariés de la holding. Ils ont préféré supprimer purement et simplement cette condition et ne retenir que la condition de présence d'un accord d'intéressement en précisant qu'il faut un accord de même nature en cas de présence à l'étranger.
Surtout, l'Assemblée nationale a entendu réaffirmer le principe de l'absence de substitution des sommes issues de l'intéressement avec toute élément de rémunération. Elle a ainsi adopté quatre amendements de suppression identiques présentés par le rapporteur pour avis de sa commission des affaires culturelles, M. Pascal Terrasse, et par MM. Yves Cochet, Jean-Jacques Jégou et Jean-Pierre Brard. Ces amendements n'ont recueilli qu'un avis de sagesse du gouvernement.
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Votre commission reconnaît que le choix du seuil de 100 salariés pour l'application dans le 2° du I a un caractère complètement arbitraire. Néanmoins, même si elle regrette l'absence d'évaluation chiffrée 13 ( * ) , elle est consciente des conséquences budgétaires de ce dispositif et de son élargissement : se pose donc la question du coût que doit supporter l'Etat afin de promouvoir l'intéressement dans les PME. Conformément à ses prises de position s'agissant des finances publiques, elle ne vous proposera donc pas de revoir à la hausse ce seuil. En revanche, elle souhaite appeler vivement l'attention du gouvernement sur les effets bénéfiques que pourrait avoir une telle mesure et surtout sur les risques liés aux effets de seuil. Sur ce point, elle fait confiance aux tribunaux et à l'administration du travail pour apprécier dans le sens de la plus grande souplesse les conséquences d'un dépassement du seuil.
La question de la définition du champ des filiales devant entrer dans le calcul de la participation des salariés d'une holding ne manque pas d'étonner votre commission. Dans sa version issue des travaux de l'Assemblée nationale, le texte ne prévoyait pas moins de trois notions différentes du groupe à trois articles. Ici, il s'agit de savoir ce dont les salariés de la holding doivent bénéficier. Il est vrai qu'ils ne sauraient se référer à autre chose que les résultats et performances des filiales sur lesquels ils ont une influence dominante, et non pas à tous ceux des sociétés dans lesquelles ils ne détiennent qu'une participation sans autre influence. Mais la définition proposée par le projet de loi apparaît comme excessivement restrictive : chacun sait que des holdings ont la première place dans une entreprise et orientent de manière déterminante ses décisions de gestion sans avoir 50 % des droits de vote plus un ! Une solution mesurée paraîtrait donc de retenir la définition du contrôle exclusif ou conjoint de l'article L 233-16 du code du commerce.
Les interrogations sont plus vives s'agissant de l'obligation d'avoir un accord d'intéressement dans chacune des filiales prises en compte. La logique semble parfaite : il ne saurait y avoir intéressement pour les salariés de la holding calculé sur les performances de salariés qui eux-mêmes ne bénéficieraient pas de leur propre performance. Cependant, la rédaction actuelle du projet de loi se heurte à plusieurs difficultés pratiques :
• il peut arriver que certains salariés n'aient pas d'intéressement mais un dispositif plus favorable ;
• comment prouver à l'administration du travail d'un département français qu'une filiale à l'autre bout du monde a un " dispositif de même nature " que l'intéressement à la française.
Votre rapporteur est conscient des difficultés techniques de rédaction, mais partage le double souci de ne pas conférer un avantage indû à certains salariés de holding et de laisser une marge de souplesse pour tenir compte des diversités de situation. Il vous proposera donc de fixer une obligation générale dans la loi en laissant le soin aux textes d'application d'en préciser les aménagements.
La fixation à quatre mois du délai de contestation possible par les DDTEFP des accords d'intéressement ne correspond sur aucun des deux points (pourquoi quatre mois ? pourquoi seulement les accords d'intéressement ?) à une solution mûrement choisie et réfléchie. Il s'agit d'un double compromis qui ne sied guère au travail législatif s'agissant de la sécurité juridique d'accords qui engagent l'entreprise et ses salariés. Le gouvernement a en effet dû composer avec les composantes de la majorité plurielle sur le choix du délai. Il lui a fallu aussi négocier avec son administration du travail, tant il est vrai que l'intérêt général doit s'évaluer au regard du souci des charges de travail des services déconcentrés de l'Etat. Votre commission remarque que si les DDTEFP avaient moins à faire avec l'explication et l'application de la circulaire de plus de 160 pages relative à l'application de la loi sur la réduction du temps de travail, elles pourraient aussi se consacrer à d'autres tâches. Cependant, votre rapporteur, qui a pu observer sur pièces et sur place la charge de travail des DDTEFP, ne vous proposera pas de remettre en cause le délai. En revanche, il semble sinon nécessaire au moins justifié de sécuriser également les accords d'entreprise de mise en place de la participation.
Enfin, il semble délicat de balayer d'un revers de main par le biais d'un amendement de suppression la difficulté réelle que rencontrent des entreprises qui, dans le cadre de l'application de la réduction du temps de travail, ont pu soit conclure concomitamment un accord sur l'intéressement, la participation ou l'épargne salariale, soit inclure ceux-ci dans l'accord, conformément à la circulaire du 9 mai 1995. 6 % des entreprises seraient concernées potentiellement par une remise en cause de leur accord et donc, peut-être, des exonérations qui vont avec. Le risque d'insécurité juridique est donc fort et ne saurait être contourné.
A l'inverse, le principe de la non substitution doit s'appliquer avec la plus grande rigueur et ne saurait connaître que de aménagements motivés par des considérations d'intérêt général marquées. Il semble à votre commission que ce soit effectivement le cas pour le III de cet article. Aussi vous proposera-t-elle de sécuriser les accords déjà conclus, et uniquement ceux-là.
Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 5
Plans d'épargne
interentreprises
Commentaire : afin de développer l'épargne salariale dans les petites et moyennes entreprises, le présent article institue des plans d'épargne interentreprises (PEI), établis par accord des partenaires sociaux, et qui prendraient les caractéristiques soit d'un plan d'épargne d'entreprise (PEE), soit d'un plan partenarial d'épargne salariale volontaire (PPESV).
I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT
Le paragraphe I du présent article tend à introduire un nouvel article L. 443-1-1 dans le code du travail 14 ( * ) qui définit le plan d'épargne interentreprises (PEI) et fixe ses principales règles de fonctionnement.
Plus que véritablement un nouveau type de plan d'épargne salariale, le PEI est un nouveau mode de négociation d'un plan qui pourra être tantôt un PEE, tantôt un PPESV 15 ( * ) . Toutefois, pour l'application du droit du travail, le PEI constituera un plan spécifique : en particulier, la conclusion d'un PEI n'imposera pas d'adapter un PEE ou PPESV de niveau inférieur.
A. MODALITÉS DE MISE EN PLACE D'UN PLAN D'ÉPARGNE INTERENTREPRISES
1. La mise en place d'un PEI ne pourra se faire que par signature d'un accord collectif
En ne mentionnant aucun autre moyen de conclure un PEI, le texte du nouvel article L. 443-1-1 prévoit que le PEI ne pourra être établi que par accord collectif conclu dans les conditions habituelles aux accords collectifs de travail 16 ( * ) . Pour mémoire, un accord collectif est conclu, aux termes de l'article L. 132-3 du code du travail, entre une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives et une ou plusieurs organisations syndicales d'employeurs ou tout autre groupement d'employeurs, ou un ou plusieurs employeurs pris individuellement. Contrairement aux PEE, la disposition proposée par le gouvernement exclut donc qu'un PEI puisse être conclu par décision unilatérale des employeurs, par vote favorable des comités d'entreprise, ou par ratification à la majorité des deux tiers du personnel.
2. Contenu de l'accord
L'accord fixera le règlement du plan qui devra notamment contenir certains champs obligatoires :
- " les entreprises signataires ou le champ d'application professionnel et géographique ".
Le PEI a un champ d'application laissé libre aux auteurs de l'accord puisqu'il peut être signé entre plusieurs entreprises d'un même bassin d'emploi par exemple, d'une même région, d'une même branche, d'un même groupe (capitalistique ou non), voire entre deux entreprises en relations proches.
La taille des entreprises concernées n'est pas précisée : si ce dispositif vise principalement les petites et moyennes entreprises, il n'en est pas exclusif et peut concerner des entreprises plus importantes ayant, ou non, mis en place un PEE ou un PPESV et qui seraient soit signataires du PEI soit simplement comprises dans son champ d'application.
Les champs d'application de plusieurs PEI peuvent en effet se chevaucher et des entreprises disposant déjà d'un PEE ou d'un PPESV peuvent être concernées par un PEI. Les PEI ouvrant des droits aux salariés des entreprises qui sont comprises dans son champ d'application , la superposition de PEI donne le choix aux salariés concernés de participer à un ou plusieurs PEI (dans la limite du versement d'un quart de leur rémunération annuelle). Cette possibilité n'entraîne pas de contrainte pour l'entreprise à laquelle appartient ce salarié (et qui n'aurait pas adhéré à un de ces PEI) autre que celle relative aux frais de gestion. En outre, il convient de noter que le PEI, comme tout autre accord collectif, pourra être étendu ou élargi par arrêté du ministre chargé du travail.
- " la nature des sommes qui peuvent être versées " : comme pour le PEE actuellement, l'accord instaurant le PEI pourra restreindre la liste des versements permis par le présent article.
- " les différentes possibilités d'affectation des sommes recueillies " : celles-ci sont celles prévues pour le PEE (article L. 443-3 du code du travail) à l'exception d'une règle spécifique pour le PEI prévue au II du présent article ; ici encore le PEI pourra restreindre les possibilités ouvertes par le présent article.
- " les conditions dans lesquelles les frais de tenue de compte sont pris en charge par les employeurs " : il s'agit donc d'une contribution qui sera obligatoire pour les entreprises entrant dans le champ de l'accord, y compris, vraisemblablement, celles ne souhaitant pas adhérer à un PEI . Ce dispositif est donc plus contraignant que pour le PEE. Cette contribution sera répartie entre les entreprises partie prenantes selon des modalités fixées dans l'accord qui opérera ainsi une mutualisation des coûts de gestion 17 ( * ) .
- " les différentes modalités selon lesquelles les entreprises qui le souhaitent effectuent des versements complémentaires à ceux de leurs salariés " : il convient de noter que seules les entreprises qui le souhaitent abonderont les plans de leurs salariés ; les règles du PEE sont ici applicables et en particulier le plafond de ces versements complémentaires (article L. 443-7 du code du travail), fixé à 15.000 francs par an et par salarié, ou 30.000 francs sur le PEI est un PPESV.
- " les conditions dans lesquelles sont désignés les membres des conseils de surveillance des fonds communs de placement prévus par le règlement du plan et les modalités de fonctionnement des conseils ". L'article 12 du présent projet de loi autorise le règlement du PEI à ne prévoir qu'un conseil de surveillance à l'ensemble des FCPE proposés dans ce cadre.
B. NATURE DES VERSEMENTS
Le huitième alinéa du texte proposé par le gouvernement prévoit que le PEI pourra recueillir les sommes issues de plusieurs sources, le règlement du plan pouvant n'autoriser que certaines d'entre elles.
Ces sources sont au nombre de quatre :
- l'intéressement , s'il existe ;
- la participation , si elle existe ;
Il est par ailleurs prévu que l'accord instaurant le PEI pourra dispenser de signer un accord de participation les entreprises de moins de 50 salariés qui souhaitent verser volontairement la participation à leurs salariés : le règlement du PEI définira les modalités de la participation. Cette disposition a pour objectif de faciliter la mise en place de la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés en évitant qu'une entreprise ayant signé un PEI soit obligée d'engager une seconde négociation relative à la participation. Le règlement peut prévoir que les sommes issues de la participation sont affectées à un FCPE.
- des versements volontaires des salariés ( et anciens salariés ayant quitté une entreprise entrant dans le champ de l'accord, à la suite d'un départ à la retraite ou en préretraite) ou des mandataires sociaux dans les entreprises de moins de cent salariés 18 ( * ) ;
- le cas échéant, des versements complémentaires des entreprises entrant dans le champ de l'accord ; en aucun cas, ces versements n'auront de caractère obligatoire pour une entreprise n'ayant pas adhéré à l'accord.
C. SÉCURITÉ DES PLACEMENTS ET RETOUR EN FONDS PROPRES VERS LES ENTREPRISES
Afin d'assurer une plus grande sécurité des sommes recueillies dans un PEI (et éviter le cas où un salarié perdrait dans un même temps son emploi et son épargne par faillite de sa société), le paragraphe II du présent article prévoit que ce plan :
- ne pourra pas prévoir l'acquisition de parts de FCPE dits de l'article 21 de la loi de 1988 (investis à plus de 30 % dans des titres de l'ensemble des entreprises entrant dans le champ du PEI) ;
- et ne pourra prévoir l'acquisition de parts de FCPE dits de l'article 20 de la loi de 1988 (diversifiés, c'est à dire comportant moins de 30 % de titres de l'ensemble des entreprises entrant dans le champ du PEI) que si ceux-ci ne détiennent pas plus de 10 % de titres non cotés. Toutefois dans les 90 % restant, on pourra trouver des parts ou actions d'OPCVM qui ne sont pourtant pas des titres cotés.
Pour assurer le retour en fonds propres vers les PME sans réduire la sécurité des fonds investis par les salariés, le gouvernement prévoit de rendre éligible, par voie réglementaire 19 ( * ) , à l'actif des FCPE :
- des parts de fonds communs de placement à risque (FCPR) ; ces fonds sont constitués à plus de 40 % de titres non cotés ou de parts de sociétés à responsabilité limitée ;
- ou de parts de fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) ; ces fonds sont composés à plus de 60 % de titres de PME-PMI remplissant certaines conditions relatives à leurs dépenses ou résultats de recherche.
Sous réserve des règles édictées dans le présent article et qui lui sont spécifiques, le PEI emprunte ses règles de fonctionnement au PEE.
II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des finances, a souhaité regrouper toutes les dispositions relatives au PEI dans le même article L. 443-1-1 et a donc transféré les dispositions de l'actuel II dans ce même article et supprimé par conséquence le II.
Elle a ensuite adopté un amendement présenté par sa commission des finances et qui donne une portée générale à la possibilité pour le règlement de prévoir que les sommes issues de la participation peuvent être affectées à un fonds créé dans l'entreprise. Dans la rédaction du gouvernement, cette possibilité semblait limitée aux entreprises de moins de cinquante salariés décidant de mettre en place un dispositif de réserve spéciale de participation dans le cadre du PEI.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
A. UN DISPOSITIF UTILE ET ATTENDU
1. La faiblesse de l'épargne salariale dans les PME
En 1997, seuls 1,4 % des salariés des PME (moins de 500 salariés) ont bénéficié de la participation, et seuls 2,7 % ont bénéficié de l'intéressement, pour un niveau moyen de près de 10.000 francs (contre 5.600 francs en moyenne en France) : sur les 3 millions de salariés couverts par des accords d'intéressement, seuls 150.000 se trouvent dans les PME ; pour la participation, le rapport est de 90.000 sur 4,7 millions de salariés couverts. Dans le même temps, il faut rappeler, comme le fait le rapport de MM. Jean-Pierre Balligand et Jean-Baptiste de Foucauld 20 ( * ) , que les entreprises de moins de 50 salariés représentent près de 55 % des emplois en France et 97 % des entreprises françaises. L'enjeu de la promotion de l'épargne salariale est donc de taille.
2. Des propositions
Dans son rapport de septembre 1999 21 ( * ) , notre collègue Jean Chérioux soulignait avec justesse que la " principale faiblesse de l'épargne salariale (était) sans conteste sa faible diffusion dans les PME ". Pour y remédier, il avait notamment proposé l'instauration de PEE " inter-entreprises ", qui simplifieraient la gestion administrative pour ces entreprises, mutualiseraient les coûts de gestion et initieraient un mouvement d'entraînement pour les autres entreprises qui pourraient facilement adhérer aux plans existants. Cette vision proposée par le Sénat est largement reprise dans le présent projet de loi.
Quelques mois plus tard, le rapport de MM. Jean-Bapstiste de Foucauld et Jean-Pierre Balligand proposait l'expérimentation pendant deux ans de " plans d'épargne interentreprises régionaux " . Ils privilégiaient également le retour en fonds propres intermédié sur l'actionnariat salarié afin de protéger l'épargne des salariés concernés.
B. ASSURER LA RÉUSSITE DU PEI
Pour assurer la réussite de ce produit, le dispositif proposé doit être simple et surtout de mise en oeuvre facile et largement ouverte.
1. Elargir les modalités de conclusion d'un accord
Comme le souligne justement le rapport de la commission des finances de l'Assemblée nationale 22 ( * ) , " l'exigence de l'implication des organisations syndicales dans la négociation de l'accord mettant en place le PEI est de nature à créer un certain nombre de difficultés pour les petites et moyennes entreprises. En raison de l'absence fréquente de sections syndicales, celles-ci risquent dans certains cas de manquer d'interlocuteurs pour négocier un accord collectif ".
Le présent article propose donc de développer l'épargne salariale dans une direction que votre commission approuve mais sans s'en donner les moyens puisqu'il restreint beaucoup trop les modalités de mise en place en excluant la décision unilatérale des employeurs ou l'accord avec les personnels (comités d'entreprise ou référendum).
Votre commission estime donc nécessaire de conserver l'accord collectif dans le cas général ; mais de prévoir, à titre subsidiaire, si le PEI est conclu entre des employeurs pris individuellement , que l'accord peut être conclu au sein du comité d'entreprise ou à la suite d'un référendum des salariés . L'accord devra donc être conclu dans les mêmes termes au sein de chaque entreprise et une entreprise qui souhaitera alors adhérer à ce PEI devra obtenir l'accord de son comité d'entreprise ou de deux tiers de ses salariés.
2. Assurer le passage aisé d'un plan à un autre
Plusieurs PEI pouvant se chevaucher et être signés à des dates différentes, il importe de s'assurer que le salarié pourra bien transférer sans charges fiscales ou sociales et sans plafonnement ses avoirs d'un PEI à un autre. Cette possibilité est particulièrement importante dans le cas où l'entreprise pour laquelle ce salarié travaille adhère à un PEI - différent de celui sur lequel le salarié a antérieurement déposé des sommes - et opère des versements complémentaires. Il convient dans ce cas que le salarié ne soit pas " bloqué " dans un plan qui ne bénéficierait pas de ces versements complémentaires. Cette contrainte serait particulièrement forte en cas de PEI prenant la forme d'un PPESV glissant 23 ( * ) dans lequel les sommes sont bloquées au moins dix ans.
L'article 2 du présent projet de loi prévoit des facilités de transfert pour les sommes bloquées sur un PEE en cas de changement d'employeur. Il convient de permettre sur le même modèle des facilités de transfert des sommes bloquées sur un PEI vers un autre plan d'épargne salariale de même durée minimum de placement (PEI, PEE ou PPESV), même sans changement d'employeur, lorsque l'entreprise décide d'adhérer à cet autre plan ou d'en mettre un en place.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 5 bis (nouveau)
Extension
aux coopératives agricoles
Commentaire : le présent article étend le bénéfice du PEI aux coopératives agricoles.
Introduit au cours de la discussion en première lecture à l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue Jean-Louis Dumont, cet article tend à préciser que les coopératives agricoles comme leurs filiales pourront mettre en place des PEI.
Ce dispositif paraît en parfaite cohérence avec l'introduction de la notion de groupe, l'extension du PEI aux unions et le souci de développer l'épargne salariale sur des bases sectorielles ou géographiques. Il permettra aux coopératives, à leurs filiales, et à plusieurs d'entre elles de se réunir pour bénéficier du PEI mais aussi d'un PPESV constitué sur une base interentreprise.
Votre commission ne voit pas pourquoi on exclurait les salariés du secteur coopératif agricole du bénéfice de ces dispositions.
Cependant, une erreur matérielle dans le texte adopté par l'Assemblée nationale pour le I rend le texte en l'état actuel des choses illisible et non applicable. Il conviendrait donc de rectifier cette erreur par un amendement purement rédactionnel. Cette rectification permettrait aussi de réparer une erreur du code rural qui indique que les FCPE sont " constitués " entre les salariés alors que ces derniers souscrivent au PEE.
Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 6
Ouverture du PEE
à certains mandataires sociaux
Commentaire : le présent article ouvre le PEE aux mandataires sociaux des entreprises de moins de 100 salariés.
I. LE TEXTE PROPOSÉ
A. LE BUT DU PROJET DE LOI : PROMOUVOIR L'ÉPARGNE SALARIALE DANS LES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES
Ainsi que le constatait le rapport Balligand / de Foucauld, en 1997, seuls 1,4 % des salariés des PME (moins de 500 salariés) ont bénéficié de la participation, et seuls 2,7 % ont bénéficié de l'intéressement, pour un niveau moyen de près de 10.000 francs (contre 5.600 francs en moyenne en France) : sur les 3 millions de salariés couverts par des accords d'intéressement, seuls 150.000 se trouvent dans les PME ; pour la participation, le rapport est de 90.000 sur 4,7 millions de salariés couverts. Dans le même temps, il faut rappeler, comme le fait le rapport, que les entreprises de moins de 50 salariés représentent près de 55 % des emplois en France et 97 % des entreprises françaises. L'enjeu de la promotion de l'épargne salariale y est donc de taille.
Dans leurs propositions, les auteurs du rapport suggéraient ainsi notamment de permettre aux mandataires sociaux des PME d'avoir accès au PEE.
Le gouvernement a repris cette suggestion dans l'article 6 du projet de loi. Celui-ci prévoyait ainsi de modifier l'article L. 443-1 du code du travail, qui énumère les personnes pouvant ouvrir et abonder un PEE (salariés et anciens salariés ayant quitté l'entreprise pour cause de retraite ou de préretraite) pour y ajouter les mandataires sociaux.
Le I du présent article énumère ainsi les nouveaux bénéficiaires du PEE : chefs d'entreprises, présidents, directeurs généraux, gérants et membres du directoire. Le texte limite cette possibilité aux entreprises de un à cent salariés, l'effectif étant calculé selon la méthode de l'effectif " habituel " au sens du code du travail. Il prévoyait le renvoi à un décret pour prévoir les conditions de versement des intéressés.
Le II tire les conséquences de cette nouvelle possibilité sur les plafonds de versements susceptibles d'être faits au PEE (article L. 443-2 du code du travail) : la règle de 25 % de la rémunération est entendue pour les mandataires sociaux du " revenu professionnel imposé à l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente " .
Le III cherchait à compléter l'article L 443-7 du code du travail quant au plafonnement de l'abondement que peut effectuer l'entreprise en plus des versements du titulaire du PEE. Ce plafond est de 15.000 francs dans la limite du triple du versement effectué, en le majorant éventuellement, dans la limite de 50 %, de ce qui sert à acquérir des actions ou certificats d'investissement émis par l'entreprise. Le gouvernement avait proposé de plafonner la somme totale que peut représenter cet abondement à 20 % du total des versements des salariés dans les entreprises de 5 salariés ou plus, et dans la limite de l'abondement le plus élevé en-dessous de cinq salariés.
B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a d'abord souhaité supprimer le renvoi à un décret dans la mesure où elle a considéré que les II et III de l'article suffisaient pour encadrer le dispositif proposé.
Par ailleurs, à l'initiative de leur commission des finances, les députés ont entendu remplacer le mécanisme d'encadrement de l'abondement de l'entreprise pour les mandataires sociaux proposé par le gouvernement par l'édiction d'une règle générale voulant que les mandataires ne soient pas " mieux traités que les salariés les moins bien traités de l'entreprise " 24 ( * ) . Elle a ainsi inséré dans l'article L. 443-7 du code du travail un alinéa prévoyant que la modulation des abondements se fait selon des règles générales. Ces dernières ne sauraient lier de manière croissante le versement de l'entreprise et la rémunération du salarié.
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
A. UN PREMIER PAS UTILE ET ATTENDU...
Votre commission partage complètement l'objectif de promouvoir l'épargne salariale dans les petites et moyennes entreprises. Elle estime aussi que la possibilité d'ouverture de PEE par les mandataires sociaux dans les PME peut constituer une forte incitation à la mise en place des dispositifs facultatifs. De ce point de vue, il peut vraiment s'agir d'un élément porteur d'avenir.
Certes, on peut à nouveau déplorer qu'il faille en passer par une disposition législative pour introduire une possibilité que l'ACOSS et l'administration ont souhaité proscrire. Ainsi, les mandataires sociaux se retrouvent assimilés aux salariés pour le code de la sécurité sociale mais pas pour le code du travail dont relèvent les mécanismes de participation. Il n'en n'a pas toujours été le cas. Ainsi, comme l'indique la réponse à une question écrite parlementaire 25 ( * ) , l'administration avait d'abord admis que les dirigeants assimilés à des salariés sur le plan fiscal et social pouvaient bénéficier de la participation. Puis l'ACOSS, dans sa circulaire n° 89-41 du 31 mai 1989, a restreint le bénéfice de l'intéressement aux seuls mandataires liés à la société par un contrat de travail cumulé avec leur contrat social. Puis le ministère du travail, dans une réponse à une question écrite 26 ( * ) , a confirmé cette position et l'a étendue au bénéfice de la participation. Seuls peuvent donc bénéficier aujourd'hui de la participation et de l'intéressement les mandataires sociaux également liés à l'entreprise par un contrat de travail, ainsi que la confirmé la circulaire interministérielle du 9 mai 1995.
Le dispositif de l'article 6 va plus loin que ce qui avait été interdit depuis 1989 puisque les mandataires sociaux pourront désormais ouvrir et abonder des PEE. Cependant se pose la question de savoir s'ils seront aussi éligibles aux mécanismes de participation et d'intéressement, faute de quoi le bénéfice du PEE risque de n'être que très théorique pour eux, ainsi que la promotion de l'épargne salariale dans les PME.
Par ailleurs, le projet de loi a fait le choix de limiter le bénéfice de ces dispositions aux entreprises de moins de 101 salariés. Votre commission ne peut que critiquer ce choix dont les interventions en séance publique du rapporteur de la commission des finances comme du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie laissent à penser qu'il revêt un caractère pour le moins arbitraire. " A la limite, on aurait pu en rester à cinquante salariés, effectif à partir duquel la participation et le comité d'entreprise sont obligatoires, même si l'obligation n'est pas toujours respectée. Le gouvernement a opté pour le seuil de cent salariés. On pourrait l'abaisser ou bien le relever. Je pense que le mieux est de le maintenir " , expliquait M. Jean-Pierre Balligand, tandis que M. Laurent Fabius indiquait : " il y a toujours une part d'arbitraire à définir des seuils " 27 ( * ) .
B. ...MAIS À POURSUIVRE
Votre commission estime que l'ajout effectué par l'Assemblée nationale s'agissant de l'impossibilité de prévoir des règles individuelles de calcul de l'abondement de l'entreprise a un caractère superfétatoire au regard du droit existant qui proscrit déjà toute règle individuelle. Cependant, elle peut en comprendre l'utilité, dans la mesure notamment où ce principe inscrit dans la partie réglementaire du code du travail, ne revêt peut-être pas un simple caractère réglementaire. Il en va de même pour la condition supplémentaire interdisant de lier de manière croissante salaire et abondement de l'entreprise.
En revanche, elle ne comprend pas le choix de limiter à 100 salariés le seuil des entreprises où le PEE est ouvert aux mandataires sociaux. Ce seuil ne revêt guère de sens dans la mesure où les situations sont extrêmement diversifiées : la mise en place d'outils d'épargne salariale n'est pas seulement une question de nombre de salariés mais de niveau des salaires, de situation de l'entreprise, d'existence ou non de liens avec une grande entreprise, de volonté des partenaires sociaux, etc. L'argument budgétaire avancé à l'article 4 semble ici quelque peu spécieux dans la mesure où le coût pour les finances publiques n'est pas le même s'agissant de l'ensemble des salariés ou des seuls mandataires sociaux, qui plus est qui ne peuvent pas bénéficier de l'intéressement et de la participation. Aussi vous proposera-t-elle d'étendre ce dispositif à l'ensemble des PME, en fixant le seuil à 500 salariés.
Enfin, comme à plusieurs autres reprises dans ce projet de loi, votre commission vous proposera de rectifier l'absence de coordination au dernier alinéa : le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale ne parle que de la rémunération du salarié alors que l'article inclut justement les mandataires sociaux.
Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 6 bis (nouveau)
Fonds de
solidarité de l'épargne salariale
Commentaire : le présent article crée un fonds de solidarité destiné à financer des études préalables à la mise en place de PEI et du livret d'épargne salariale par le biais des fonds tombés en déshérence.
I. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
A. L'INTENTION DU RAPPORT BALLIGAND / DE FOUCAULD
Dans leur rapport précité, MM. Balligand et de Foucauld, avaient formulé la proposition de créer un fonds de solidarité de l'épargne salariale. Cela partait d'un double constat :
• il existerait des fonds en déshérence dont il peut paraître justifié que l'ensemble des salariés profite plutôt que le Trésor public (estimés à 350 millions de francs non réactualisés) ;
• il existera des besoins en terme de financements d'études préparatoires pour aider au développement de l'épargne salariale.
Il s'agissait donc dans l'esprit des rédacteurs de créer un " dispositif d'impulsion et d'amorçage, susceptible de créer de la cohésion entre les PME et les grandes entreprises " . Ils en étaient venus à la conclusion que les seules forces de marché seraient insuffisantes et que les barrières financières à l'entrée dans l'épargne salariale risqueraient de constituer un frein réel à son développement. Le dispositif proposé était assez précis dans ses principes et dans ses modes de fonctionnement.
La consignation de l'épargne salariale en déshérence Aux termes de l'article 14 du décret n° 67-1112 du 19 décembre 1967, fixant les conditions d'application de l'ordonnance n° 67-693 du 17 août 1967, lorsqu'un salarié ayant quitté l'entreprise ne peut être joint à la dernière adresse indiquée par lui, les sommes et droits auxquels il peut prétendre sont tenus à la disposition par l'entreprise pendant un délai d'un an à compter de la date d'expiration du délai de blocage de ses droits. Passé ce délai, ils sont remis à la Caisse des dépôts et consignations où l'intéressé peut les réclamer jusqu'au terme de la prescription trentenaire. Il résulte donc de l'article 14 susvisé que le délai à partir duquel la consignation pouvait être effectuée était d'un an à compter de la date d'expiration de délai de blocage des droits du salarié, blocage fixé à cinq ou huit ans, suivant que les parties intéressées avaient ou non conclu l'accord visé aux articles 4, 10 et 11 de l'ordonnance du 17 août 1967. Les droits des salariés pouvaient être représentés, non seulement par du numéraire ou des valeurs mobilières négociables en bourse (actions ou obligations), mais également par des parts de FCP, lesquelles ne sont pas matérialisées par des titres et ne sauraient donc, en principe, être reçues par la Caisse des dépôts et consignations. Toutefois, à la demande du ministre du travail et du ministre de l'économie et des finances, il avait été décidé, à titre exceptionnel, de recevoir, en lieu et place de ces titres, des attestations individuelles délivrées par les entreprises ou par les fonds communs de placement intéressés, faisant connaître le nombre de parts dont les salariés sont titulaires. En outre, par assimilation avec le cas prévu à l'article 14, pouvaient également être reçus en consignation : a) Les sommes, titres et droits revenant à des salariés et devenus négociables ou exigibles, avant les délais normaux, par application des dispositions de l'article 6, 2 ème alinéa de l'ordonnance et de l'article 16 du décret (soit le cas de mariage, de licenciement, de départ à la retraite de l'intéressé, d'invalidité ou de décès de celui-ci ou de son conjoint), lorsque ces salariés, dont les droits n'avaient pas encore été liquidés à la date de leur départ, n'avaient pu être touchés par l'entreprise ; la consignation étant alors effectuée un an après l'envoi de l'avis leur notifiant le montant de leurs droits. b) Les sommes, actions et parts revenant aux salariés qui ont adhéré à un plan d'épargne d'entreprise, établi en application de l'ordonnance, soit que le délai fixé par l'article 6 de ladite ordonnance soit venu à expiration, soit que les salariés aient quitté l'entreprise, pour une des raisons énumérées à l'article 8 du décret du 30 mai 1968 (mariage, licenciement, départ à la retraite de l'intéressé, invalidité ou décès de celui-ci ou de son conjoint), avant que leurs droits aient été liquidés, si ces salariés n'avaient pu être joints à la dernière adresse indiquée par eux. Aux termes de l'article 21 du décret n° 87-544 du 17 juillet 1987, fixant les conditions d'application de l'ordonnance n° 89-1134 du 21 octobre 1986, relative à l'intéressement et à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise et à l'actionnariat des salariés, lorsque le salarié ne peut être joint à la dernière adresse indiquée par lui, les sommes auxquelles il peut prétendre sont tenues à sa disposition, par l'entreprise pendant une durée d'un an à compter de la date d'expiration du blocage de ses droits. Passé ce délai, elles sont remises à la Caisse des dépôts et consignations où l'intéressé peut les réclamer jusqu'au terme de la prescription trentenaire. Il n'est plus possible de consigner les attestations individuelles de fonds communs de placement, l'ordonnance du 21 octobre 1986 indiquant expressément que les parts des fonds communs de placement sont conservées par l'organisme gestionnaire. Le décret du 11 avril 1995 (article L. 441-3 du code du travail) prévoit que lorsqu'un salarié, susceptible de bénéficier de l'intéressement, quitte l'entreprise avant que celle-ci n'ait été en mesure de calculer les droits dont il est titulaire, l'employeur est tenu de lui demander d'indiquer l'adresse à laquelle il pourra être avisé de ses droits et de le tenir informé de ses changements d'adresse éventuels. Lorsque le salarié ne peut être joint à la dernière adresse indiquée par lui, les sommes auxquelles il peut prétendre sont tenues à la disposition par l'entreprise pendant une durée d'un an à compter de la date limite de versement de l'intéressement prévue à l'article L. 441-3. Passé ce délai, les sommes sont remises à la Caisse des dépôts et consignations où l'intéressé peut les réclamer jusqu'au terme de la prescription. A l'expiration du délai de prescription, ces sommes sont versées au Trésor public. La Caisse des dépôts et consignations agissant en sa qualité de simple dépositaire, ces consignations sont donc effectuées sous la seule responsabilité du déposant qui est tenu de respecter les délais prévus par les textes en vigueur ; les fonds ainsi consignés sont remis aux bénéficiaires sur simple demande de leur part. Source : Jean-Pierre Balligand, Jean-Baptiste de Foucauld, Rapport au Premier ministre sur l'épargne salariale, janvier 2000 |
Le Fonds de solidarité de l'épargne
salariale (FSES) :
principes et fonctionnement
théoriques
Principes |
Fonctionnement |
- Ré-appropriation par les salariés de l'épargne salariale en déshérence avant la déchéance trentenaire ; |
- Alimentation par les fonds en déshérence de l'épargne salariale et les intérêts servis sur les accords d'autorité ; |
- Amorçage de l'épargne salariale ; |
- Constitution d'un fonds géré administrativement de manière indépendante ; |
- Prise en charge des coûts irrécupérables liés à la mise en place des plans d'épargne interentreprises régionaux (PEIR) ;PEIR ; |
- Prise en charge des frais de gestion administratifs et des frais d'études des PEIR (formule d'intéressement standardisée, formule de participation volontaire standardisée, etc.) ; |
- Mise au point de conventions entre le FSES et les PEIR pour la période d'expérimentation de deux ans ; |
- Prise en charge de l'étude d'un livret d'épargne salariale commun à l'ensemble des PEIR ; |
- A terme, les gestionnaires de l'épargne salariale devront constituer un fonds de garantie de l'épargne salariale, alimenté par une cotisation, dont le principe pourrait s'inspirer du fonds de garantie bancaire, institué par la loi de juillet 1999. |
- Prise en charge des frais de gestion des PEIR pour les salariés sortant d'entreprises adhérant à un PEIR et arrivant dans des entreprises dépourvues de tels dispositifs . |
Source : Jean-Pierre Balligand, Jean-Baptiste de Foucauld. Rapport au Premier ministre sur l'épargne salariale au coeur du contrat social
Cette proposition n'a pas été reprise dans le projet de loi déposé par le gouvernement, mais a été partiellement introduite à l'initiative de M. Jean-Pierre Balligand lors de la discussion en première lecture à l'Assemblée nationale.
B. LE DISPOSITIF INTRODUIT À L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Le I de l'article 6 bis crée un fonds de solidarité de l'épargne salariale. Ce dernier se voit attribuer deux missions :
• contribuer au financement de la mise en place du livret d'épargne salariale ;
• contribuer aux études préalables à la mise en place des PEI.
Le texte renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de définir les modalités de fonctionnement du fonds.
Le II désigne les ressources de ce fonds comme celles issues de l'application du titre IV du livre IV du code du travail, à savoir l'ensemble de celles issues de la participation, de l'intéressement et des produits d'épargne salariale, et reçues par la Caisse des dépôts et consignations, théoriquement un an après l'expiration du délai de blocage des sommes.
Au cours du débat, le gouvernement, par la voix du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, s'est alors montré " dubitatif " devant cette initiative. Il a estimé que les propositions commerciales suffiront à susciter la mise en place des PEI et des livrets d'épargne salariale. Quant à l'existence de ces sommes, il a souligné d'une part qu'elles seraient reversées au budget général faute de retrouver leur propriétaire et que, par ailleurs, il conviendrait surtout d'améliorer l'efficacité de cette recherche.
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
A. UNE INTENTION LOUABLE AU CARACTÈRE PEU OPÉRATIONNEL
Votre rapporteur estime que l'intention de l'Assemblée nationale correspond à un sujet d'importance, non seulement par les sommes potentiellement en jeu, mais aussi par les questions et souvenirs qu'elle éveille.
Il n'a pas été possible à votre rapporteur de disposer d'éléments fiables sur le montant des fonds en jeu. Les ordres de grandeur avancés à l'Assemblée nationale restent donc les seules données disponibles, soit 350 millions de francs. Cependant, ce montant - déjà pas anodin - est destiné à croître dans la mesure où le dispositif de participation a connu un essor en France que progressivement à partir de 1967, et surtout dans les années 80. La question se posera donc avec acuité dans les années à venir et il convient de l'aborder résolument. Certains mécanismes professionnels existent d'ailleurs déjà qui mutualisant les fonds tirés de l'épargne salariale ont résolu le problème. Il conviendrait de prendre en compte ces exemples.
Par ailleurs, ces sommes correspondent au fruit du travail de leurs propriétaires. A l'issue de la prescription elles tombent certes sous le coup des dispositions du code civil, mais elles conservent, au moins de manière symbolique, leur origine : le travail des salariés. Il ne paraît donc pas possible de discuter de leur affectation sans garder en tête ce caractère et il convient de trouver la solution la plus satisfaisante pour que ces sommes soient restituées à leurs propriétaires et, sinon, profitent à l'ensemble de la collectivité nationale qui, si un jour on venait à les réclamer, se trouverait mise au banc des accusés.
B. POUR UNE DIMINUTION DE CES SOMMES ET LEUR AFFECTATION AU FONDS DE RÉSERVE POUR LES RETRAITES
Votre rapporteur, quoique reconnaissant qu'il conviendra de trouver une solution pour que ici ou là les questions financières ne constituent pas un obstacle à la constitution des PEI, estime donc d'abord que cet argent doit revenir à l'ensemble de la Nation. Il doit donc être versé au budget général ou au fonds de réserve pour les retraites plutôt que de retourner dans les caisses des entreprises par le biais d'études diverses.
Par ailleurs, il souligne le caractère ambigu de la disposition adoptée à l'Assemblée nationale qui indique tout à la fois qu'il faut réduire au minimum ces sommes en déshérence et trouver un financement pour aider à la mise en place des PEI et des livrets. La création d'une nouvelle entité administrative, avec de nouveaux frais, des procédures complexes d'attribution des aides, etc ne semble aller ni dans le sens de la simplification souhaitée, ni dans celui de la bonne utilisation de ces ressources. De plus, le montant en jeu semble faire relever aujourd'hui la proposition davantage d'un voeu pieux (combien restera-t-il dans trente ans des sommes en déshérence ?) que d'un dispositif réellement opérationnel. Pour financer le PEI, il faudrait une autre ressource que celle-ci qui ne semble ni en avoir la légitimité, ni y suffire si réellement il y a besoin.
Pour toutes ces raisons, votre rapporteur préfère que la Caisse des dépôts accentue ses efforts pour retrouver les propriétaires des sommes en jeu et que le solde éventuel profite, pourquoi pas par le biais du fonds de réserve, à l'ensemble de la Nation.
Décision de votre commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.
ARTICLE 6 ter
(nouveau)
Affectation des fonds en déshérence
au fonds de réserve pour les retraites
Commentaire : le présent article affecte au fonds de réserve pour les retraités les sommes en déshérence.
I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
En complément au dispositif de l'article 6 bis , l'Assemblée nationale a introduit le présent article pour affecter au fonds de réserve pour les retraites les sommes issues de toutes les formes de l'épargne salariale, tombées en déshérence. Il s'agit des mêmes sommes que celles visées à l'article 6 bis .
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Votre commission a proposé la suppression de l'article 6 bis et a indiqué à cette occasion les raisons qui la poussait à estimer qu'il convenait d'abord de minimiser les sommes en jeu et, ensuite, de les affecter à l'ensemble de la collectivité nationale sous la forme soit d'un versement au budget général, ce qui est le cas aujourd'hui, soit au fonds de réserve pour les retraites.
De plus, le dispositif proposé par le présent article ne s'articule absolument pas avec celui de l'article 6 bis , dans la mesure où ces deux articles proposent deux utilisations concurrentes des mêmes sommes.
Votre commission comprend le choix fait par l'Assemblée nationale de proposer l'affectation au fonds de réserve pour les retraites. Même si elle estime qu'il est économiquement équivalent de désendetter l'Etat que de mettre des sommes de côté en vue d'engagements futurs, elle considère comme compréhensible le choix du fonds de réserve et rejoint cette démarche.
D'un strict point de vue rédactionnel, mais aussi parce qu'il s'agirait d'une ressource pérenne du fonds, elle a souhaité intégrer cette proposition dans l'article du code de la sécurité sociale qui définit les recettes de ce dernier, et même si l'examen parallèle du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 rend l'exercice quelque peu acrobatique du point de vue de la rédaction législative.
Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
* 13 Une fois de plus est mis en lumière le manque criant du Parlement en moyens de simulations financières indépendants, mais aussi le déficit démocratique que représente l'absence d'étude financière d'impact systématiquement publiée (car elle existe nécessairement), à l'inverse de ce qui peut se pratiquer dans le plus petit des Etats des Etats-Unis. Notre démocratie est peut-être moins mûre que celle du Mississippi.
* 14 Cet article prend place dans le livre IV (les groupements professionnels, la représentation, la participation et l'intéressement des salariés), titre IV (intéressement et participation), chapitre 3 (plans d'épargne d'entreprise) du code du travail.
* 15 Voir article 7 portant création du PPESV.
* 16 Titre III du livre 1 er du code du travail.
* 17 De l'ordre de 60 francs par salarié adhérant au PEI et par an.
* 18 En vertu de l'article 6 du présent projet de loi.
* 19 Modification de l'article 6 du décret n° 89-623 du 6 septembre 1989 (décret d'application de la loi de 1988).
* 20 " Rapport au Premier ministre sur l'épargne salariale ", janvier 2000.
* 21 " L'actionnariat salarié : vers un véritable partenariat dans l'entreprise ", M. Jean Chérioux, Commission des affaires sociales, Sénat, n° 500, 1998-1999.
* 22 " Epargne salariale ", par M. Jean-Pierre Balligand, Commission des finances, Assemblée nationale, n° 2594, onzième législature.
* 23 Cf. article 7.
* 24 Jean-Pierre Balligand, Journal officiel des débats , Assemblée nationale, 3 ème séance du 3 octobre 2000, page 6412, 2 ème colonne.
* 25 QE n° 21025, JOAN (Q) du 28 mars 1983, page 1486.
* 26 QE n° 16748, JOAN (Q) du 26 février 1990, page 909.
* 27 Journal officiel des débats , Assemblée nationale, 3ème séance du 3 octobre 2000, page 6411, 2 ème colonne.