III. LES ENJEUX DU PROCHAIN CYCLE DE NÉGOCIATIONS MULTILATÉRALES
La troisième conférence interministérielle de l'OMC qui se déroulera du 30 novembre au 3 décembre prochain à Seattle devrait décider de l'ouverture d'un cycle de négociations multilatérales dit cycle du millénaire. Le principal enjeu de la conférence de Seattle est ainsi la définition du champ et du calendrier de la négociation.
A. L'ORDRE DU JOUR DU CYCLE DU MILLÉNAIRE
Les
accords de Marrakech avaient prévu une reprise des négociations
dans les secteurs de l'agriculture et des services. Depuis, un certain nombre
d'Etats, au premier chef desquels les Etats membres de l'Union
européenne, ont plaidé pour un élargissement de l'ordre du
jour à de nombreux sujets tels le droit de la concurrence,
l'environnement, le droit de la propriété intellectuelle les
marchés publics ou l'introduction de normes sociales minimales. L'Union
européenne considère, en effet, que seule une négociation
portant sur un grand nombre de secteurs est susceptible d'aboutir à une
répartition équilibrée des avantages entre trous les
membres de l'OMC.
Dans cette perspective, le Conseil de l'Union européenne a
indiqué, dans une déclaration sur la préparation de la
troisième conférence ministérielle de l'OMC,
qu'
" une approche globale offrait l'occasion de réaliser, au
bénéfice de tous les membres de l'OMC, le vaste éventail
d'objectifs ci-après :
- pousser plus avant la libéralisation et poursuivre l'expansion
des échanges au bénéfice de tous les pays, pour conduire
à davantage de croissance, de concurrence et d'emplois, d'une
manière propre à favoriser un développement durable ;
- accroître la transparence, l'équité et la
prévisibilité grâce au renforcement des règles et
des disciplines de l'OMC ;
- veiller à ce que la libéralisation favorise un
développement durable et prenne en compte les préoccupations de
la société civile, y compris du milieu des affaires et des
consommateurs ;
- renforcer davantage le rôle de l'OMC en matière de
développement, avec des actions spécifiques en faveur des pays en
développement, en particulier les pays les moins avancés, afin de
favoriser leur intégration dans le système commercial
multilatéral, par l'accès au marché, l'amélioration
des règles et l'accroissement de l'aide technique ;
- veiller à un traitement plus cohérent des questions
commerciales, monétaires et financières grâce à une
amélioration de la coopération entre l'OMC et les autres
organisations internationales, y compris les institutions de Bretton Woods et
les autres organisations des Nations Unies, afin d'aider les pays en
développement à tirer pleinement parti d'une nouvelle
libéralisation des échanges ;
- assurer pour tous les membres de l'OMC des chances égales
d'obtenir des résultats sur la base de négociations
équilibrées
1(
*
)
".
Cette position est cependant loin de faire l'objet d'un consensus au sein des
membres de l'OMC. Les Etats-Unis ont à plusieurs reprises
manifesté leur hostilité à un élargissement de
l'ordre du jour des négociations. La majorité des pays en voie de
développement est également réticente à
l'idée d'inclure dans les négociations de nouveaux sujets, tels
que la concurrence, l'investissement l'environnement et les normes sociales .
Si le Japon partage nos analyses sur l'intérêt d'un cycle large,
ses liens privilégiés avec les Etats-Unis et les pays en voie de
développement et en particulier les pays émergents d'Asie du
Sud-Est pourrait le conduire à favoriser la formule d'un cycle
restreint.
Votre rapporteur pour avis souscrit cependant à la stratégie
adoptée par l'Union européenne
. Comme il l'a indiqué
dans son rapport
2(
*
)
sur les
propositions de résolution n°s 46
3(
*
)
, 47
4(
*
)
et 55
5(
*
)
sur la communication de la Commission
européenne et au Parlement européen du 8 juillet 1999 relative
à l'approche de l'Union européenne en vue du cycle du
Millénaire de l'organisation mondiale du commerce, au delà d'une
position stratégique pour les futures négociations, l'Europe
milite ici en faveur d'un équilibré approprié entre la
poursuite de la libéralisation des échanges et le renforcement
des règles multilatérales qui puisse contribuer au
développement durable, à la protection de l'environnement, au
progrès social, à la diminution de la pauvreté et à
la santé des consommateurs. La prise en compte de ces
préoccupations permettra à l'OMC de mieux répondre aux
défis que représentent les mutations techniques et
économiques rapides et fondamentales.
Favorable à un champ de négociations large, l'Union
européenne plaide également pour un accord global, aux termes
duquel aucun accord spécifique ne sera conclu avant qu'un accord
d'ensemble ne soit intervenu. Votre rapporteur pour avis souligne là
encore qu'il n'est effectivement pas dans l'intérêt de la France
qu'un affrontement entre l'Europe et les Etats-Unis puisse se focaliser sur un
nombre restreint de secteurs clefs, tel que l'agriculture, comme ce fut le cas
lors des négociations de l'Uruguay Round.
Au-delà de la définition de l'ordre du jour du cycle du
Millénaire, les négociations qui s'engageront à la
Conférence de Seattle concerneront, d'une part, les sujets
traditionnels, dits de " l'agenda " incorporé et, d'autre
part, de nouveaux sujets dits " de régulation ".