CHAPITRE III -
LES AXES MAJEURS
DE LA POLITIQUE
ÉNERGÉTIQUE FRANÇAISE
I. LA POURSUITE DU PROGRAMME NUCLÉAIRE
L'énergie nucléaire conserve des avantages
substantiels en termes d'impact sur l'environnement, de sécurité
d'approvisionnement et de coût des ressources. Comme le relevaient
récemment des experts de l'OCDE, malgré la baisse conjoncturelle
du prix des matières premières, il est souhaitable de poursuivre
les recherches destinées à moderniser la production
d'énergie nucléaire au siècle prochain. Faute de cela, on
risquerait de "
compromettre les possibilités de
développer l'énergie nucléaire au moment où l'on en
aura besoin.
"
4(
*
)
Des interrogations analogues, qui vont à contre-courant de certains
discours systématiquement hostiles au nucléaire, se sont
d'ailleurs faites entendre lors de la dernière Conférence
mondiale de l'énergie. Le Gouvernement français a, quant à
lui, choisi de rester fidèle à une stratégie
énergétique qui accorde toute sa place au nucléaire dans
la maîtrise durable des sources d'approvisionnement.
A. CONSERVER UN PILIER DE L'INDÉPENDANCE ÉNERGÉTIQUE DE LA FRANCE
Comme
l'a souligné le secrétaire d'Etat à l'industrie devant la
Commission d'enquête du Sénat sur la politique
énergétique de la France en se fondant sur une étude
récente sur les coûts de référence de la production
d'électricité : "
Pour la production en
" base ", c'est-à-dire pour les centrales fonctionnant toute
l'année, qui fournissent l'essentiel de notre électricité,
la filière nucléaire demeure la filière de production
d'électricité la plus compétitive, dans la plupart des
hypothèses ".
Le Gouvernement souhaite
faire face
à l'avenir d'un parc
électro-nucléaire parvenu à maturité. Vers 2010 se
posera le problème de son renouvellement.
B. PROGRESSER DANS LA GESTION DE L'AVAL DU CYCLE
Comme l'a relevé M. Christian Pierret devant votre commission des affaires économiques : " une politique qui se désintéresserait de l'aval du cycle signerait l'arrêt de mort du nucléaire ". Aussi, afin de gérer l'aval du cycle, les pouvoirs publics entendent explorer de façon équilibrée et parallèle les trois voies définies par la loi n° 91-1381 du 30 décembre 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs : la séparation et la transmutation des éléments à vie longue ; le stockage en couche géologique profonde ; l'entreposage de longue durée en surface. La politique nucléaire de la France se poursuit donc dans ce cadre général.
1. Séparation et transmutation des éléments à vie longue
Le
secrétaire d'Etat à l'Industrie a annoncé une
remontée en puissance du réacteur Phénix.
Celui-ci sera exploité jusqu'en
2004
, afin de réaliser les
recherches sur la transmutation.
2. Le stockage en couches géologiques profondes
Afin de
préparer la décision que le Parlement sera appelé à
prendre en 2006 sur les modalités d'un éventuel stockage
souterrain des déchets hautement radioactifs et à vie longue, le
Gouvernement doit
choisir parmi les sites retenus pour l'installation de
laboratoires souterrains.
La détermination des sites susceptibles de recevoir ces laboratoires a
fait l'objet d'une procédure longue et complexe qui parvient à
son terme, six ans après avoir débuté. A la suite du vote
de la loi du 30 décembre 1991 précitée, le
Gouvernement de l'époque avait chargé M. Bataille,
député du Nord, d'établir un rapport sur les sites
d'implantation. Ce document, remis en décembre 1993, a
suggéré de mener des recherches plus fouillées dans le
Gard, en Haute-Marne, dans la Meuse et dans la Vienne.
Les travaux réalisés entre Bagnols-sur-Cèze et la montagne
de la " dent de Marcoule " (Gard), dans le canton de Poissons
(Haute-Marne) et dans les cantons de Moutiers-sur-Saulx et d'Amerville (Meuse),
et dans les cantons de Charroux et Ciray (Vienne), ont fait l'objet d'un
rapport de l'Agence nationale des déchets radioactifs (ANDRA) remis au
Gouvernement en 1996.
Il résulte de ce document qu'aucun de ces sites
ne présente de caractère rédhibitoire du point de vue de
la sûreté.
Les
études préparatoires
(dépôt de demandes
d'installation, enquêtes publiques, avis des collectivités
locales)
se sont terminées, en décembre 1997
, par le
dépôt d'un rapport de la Direction de la Sûreté des
Installations Nucléaires.
Sur la base de ce document, la Commission nationale d'Evaluation a remis un
rapport au Gouvernement en juin 1998. La décision du Gouvernement est
désormais attendue très prochainement.
Votre commission des Affaires économiques donne acte au Gouvernement
du soin mis à choisir les sites des laboratoires souterrains, tout en
souhaitant qu'une décision soit prise dès que possible, afin
d'engager les recherches au plus tôt.
3. L'entreposage de longue durée en surface
Afin de mener à bien l'étude du conditionnement et de l'entreposage de longue durée en surface, de façon équilibrée par rapport aux deux autres alternatives ci-dessus évoquées, le Gouvernement a demandé au CEA d'intensifier son effort de recherche. Il a décidé d'augmenter les crédits consacrés à ces recherches de 20 % en 1999, après qu'ils ont crû de 15 % en 1998.
C. AMÉLIORER LA QUALITÉ ET LA TRANSPARENCE DU CONTRÔLE DE L'INDUSTRIE NUCLÉAIRE
Le
Premier ministre a annoncé, en février 1998, la
préparation d'un
projet de loi sur les modalités de
contrôle et de transparence en matière nucléaire
. Il a
confié à M. Jean-Yves Le Déault,
député, le soin de rédiger un rapport sur ce sujet avant
le dépôt du texte au Parlement. Dans son
rapport sur le
système français de radioprotection, de contrôle et de
sécurité nucléaire
, M. Le Déault
propose, en premier lieu, des
réformes institutionnelles
tendant
à :
-
conserver
deux niveaux séparés
d'autorité
et
d'expertise
;
-
renforcer la radioprotection
en la
rapprochant de la
sûreté ;
-
séparer l'Institut de Protection et de Sûreté
Nucléaire (IPSN) du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA),
tout en réglant les questions de mobilité du personnel, de sorte
que les compétences des agents de l'un et de l'autre s'enrichissent
mutuellement ;
-
conserver les capacités de recherche que l'IPSN a
développé
grâce aux réacteurs dont il dispose.
Concrètement, le rapport Le Déault prône la création
:
d'une
autorité unique de radioprotection et de
sûreté nucléaire
, dotée d'un statut
d'
autorité indépendante.
Elle aurait compétence
pour prendre
toutes les décisions relevant de la
sûreté
(arrêt temporaire, redémarrage d'une
centrale) tandis que les autorités politiques trancheraient les
questions de politique générale
(création,
démantèlement, arrêt définitif des centrales). Son
directeur serait titulaire d'un mandat difficilement révocable, sauf
défaillance manifeste.
Les
compétences de cette Agence,
que la loi devra définir,
comprendraient :
- les
décisions de sûreté et de radioprotection
concernant la
vie des installations
(hormis celles de création,
de mise à l'arrêt définitif ou de
démantèlement, comme on l'a vu ci-dessus) ;
- les
règles générales de sûreté et
de radioprotection
;
- les
autorisations de détention
et
d'importation
de
sources
radioactives
;
- les
agréments de colis
de
transport
et
matières radioactives
;
- les
agréments d'installation d'équipements
médicaux
utilisant des rayonnements ionisants ;
- les
sanctions administratives
, qui pourraient s'inspirer de
celles prévues en cas de violation de la législation sur les
installations classées ;
- le
commissionnement
des
inspecteurs des installations
nucléaires
;
- les
décisions techniques applicables aux installations
.
d'une
agence de sûreté nucléaire et de
radioprotection,
par rapprochement de l'IPSN et de l'Office de Protection
contre les rayonnements ionisants. Cette agence serait un
pôle
d'expertise spécialisé en sûreté nucléaire,
radioprotection
et
recherche
. Constituée sous forme
d'établissement public industriel et commercial
, elle serait
présidée par une personnalité scientifique unanimement
reconnue.
Afin de maintenir un lien entre
l'autorité et l'agence,
le
rapport suggère que
la première exerce la tutelle de la
seconde
.
A l'instar de la Commission d'enquête du Sénat selon laquelle
"
le temps de l'opacité
" était
révolu
et qui réclamait, outre un débat sur la
politique énergétique, le développement d'une
véritable
culture de l'évaluation
et
l'organisation
d'un contrôle de sûreté
et de radioprotection en mettant
fin à son éclatement, le rapport Le Déault souligne
l'importance de la
transparence
et du
caractère
démocratique du contrôle nucléaire
.
Dans le droit fil des travaux de la Commission d'enquête du
Sénat, votre Commission des Affaires économiques souscrit
pleinement à la recommandation tendant à instaurer un
véritable contrôle parlementaire du système de
sûreté nucléaire et à demander la discussion d'un
projet de loi sur ce sujet.
D. PRÉPARER LES RÉACTEURS DU FUTUR
En 1992,
la France et l'Allemagne ont lancé un projet commun de
réacteur à eau pressurisée
dit " EPR "
(European Pressurized Water Reactor). Ce réacteur est destiné
à prendre le relais des centrales nucléaires en cours
d'exploitation, lorsque celles-ci seront obsolètes. Framatome, Siemens,
Nuclear Power International, EDF et les électriciens allemands
coopèrent à sa réalisation.
Un avant-projet détaillé devant être terminé d'ici
à la fin de l'année, il était prévu d'entamer des
études de réalisation en 1999. Or, l'annonce -survenue
mi-octobre- d'un accord du SPD et des Verts allemands sur l'abandon
" à terme "
de la filière nucléaire
outre-Rhin suscite les plus vives inquiétudes chez les partenaires
industriels chargés de la réalisation de l'EPR
5(
*
)
.
Votre Commission des Affaires économiques se réjouit que lors
de son audition, le secrétaire d'Etat à l'industrie lui ait
donné l'assurance que la France ne suivrait pas le gouvernement de Bonn
dans sa stratégie de sortie du nucléaire et veillerait au respect
des engagements de nos partenaires en ce qui concerne le ré-acheminement
en Allemagne des déchets retraités en France. Elle a
également noté avec intérêt que le gouvernement
estimait indispensable de conserver -grâce à l'EPR- la
maîtrise d'une technologie de pointe dans le domaine des réacteurs
nucléaires du futur.
Elle souligne qu'une décision d'abandon du nucléaire rendrait
illusoire le respect des engagements de réduction d'émissions de
CO
2
souscrits à Kyoto.
Elle rappelle d'ailleurs que le ministère américain de
l'énergie des Etats-Unis vient de publier un rapport qui encourage les
pouvoirs publics américains à une relance du nucléaire,
afin de compenser la fermeture des centrales au charbon les plus
polluantes.
E. LES DOTATIONS EN FAVEUR DU CEA
Les
subventions civiles reçues par le CEA au titre du ministère de
l'industrie en 1998 s'élevaient à 2,916 milliards de francs
en fonctionnement et à 325,5 millions de francs en crédits
d'investissement.
En 1999, elles se monteront respectivement à 2.959,5 et à
375 millions de francs, comme le montre le tableau ci-après :
Ressources du CEA
|
1998 |
Prév. 99 |
Ressources propres, recettes externes et recettes exceptionnelles |
4 412 |
4 391 |
Budget
de l'industrie Subvention de fonctionnement
|
2 916
|
2 959,5
|
Budget
de la recherche Subvention de fonctionnement
|
2 916
|
2 959,5
|
Budget de la défense Subvention globale |
7 295 |
7 361 |
Total des ressources du CEA en DO + CP |
18 190 |
18 421 |
Total des ressources du CEA en DO + AP |
18 190 |
18 421 |
F. LA FERMETURE DE SUPERPHÉNIX
Annoncée par le Premier ministre devant
l'Assemblée
nationale le 19 juin 1997, la fermeture du prototype industriel de
réacteur à neutrons rapides Superphénix est
désormais techniquement entamée.
Elle se justifie, selon le
Gouvernement, par des raisons économiques
: les tensions
redoutées sur le marché de l'uranium naturel ne se sont pas
produites et ont peu de chances de survenir à court ou moyen terme. Il
convient donc de souligner que
l'arrêt du réacteur n'est
nullement dû à des problèmes de sûreté
.
Le secrétaire d'Etat à l'industrie a affirmé publiquement,
notamment devant la Commission d'enquête de l'Assemblée nationale
sur Superphénix que
" l'arrêt de Superphénix ne
remettait pas en cause la politique énergétique de la
France "
, que le
" gouvernement confirmait tout
l'intérêt que présente potentiellement la filière
des réacteurs à neutrons rapides "
et
"
entendait faire le nécessaire pour que la technologie
des réacteurs à neutrons rapides soit maintenue ouverte en
France ".
Le démantèlement de la centrale
Les opérations d'arrêt de la partie nucléaire de
Superphénix prévues entre 1998 et 2001 ont pour objet de mettre
la centrale en situation de confinement sous surveillance (cf. tableau
ci-après). Elles sont préalables au démantèlement
des installations proprement dites.
CALENDRIER DES OPÉRATIONS DE MISE À L'ARRÊT DE LA PARTIE NUCLÉAIRE DE LA CHAUDIÈRE DE SUPERPHÉNIX
-
automne 1998
: approbation du dossier de
sûreté par l'autorité de Sûreté ;
-
fin 1998
: décret autorisant le déchargement du
combustible du coeur ;
-
mi-1999 (durée de 18 mois)
: début des
opérations correspondant au stockage des assemblages combustibles dans
la piscine de la centrale (du point de vue de la sûreté, une
durée de stockage de 20 ans est envisagée) ;
-
après 2000
: retraitement du combustible neuf
stocké sur site ;
-
fin 2000
: préparation d'un deuxième décret
pour la vidange du sodium (dossier de sûreté, approbation puis
décret) ;
-
à partir de 2001
: vidange des circuits et transfert du
sodium ; entreposage du sodium sur site, à l'état
gelé, dans des réservoirs existants (circuit primaire : environ
4000 tonnes présentant une activité résiduelle faible et
circuit secondaire : 1500 tonnes de sodium très légèrement
radioactif).
Le coût social et économique de l'opération
Selon les prévisions du Gouvernement, à l'issue des
opérations préliminaires de déchargement du coeur de
Superphénix et de vidange du sodium, une
perte nette de
800 emplois
-particulièrement sensible pour les entreprises
prestataires d'EDF- serait enregistrée. Pour les
collectivités
locales
, dont certaines se sont endettées en prévision de
l'implantation de la centrale, la
perte nette fiscale nette
avoisinerait
100 millions de francs
par an environ.
Aux termes d'une convention signée en 1995 par les actionnaires
français, italiens, allemands, belges et néerlandais de NERSA,
l'exploitation devait se poursuivre jusqu'à la fin de l'an 2000, date
à laquelle la dette des partenaires d'EDF aurait été
apurée. L'entreprise nationale ayant dénoncé cet accord,
à la suite de la décision de fermeture de la centrale, elle devra
prendre en charge les frais qu'auraient acquittés ses associés.
Au total
EDF réglera 14,2 milliards de francs
qui se
décomposent entre l'ensemble des
frais d'exploitation
incombant
aux partenaires et la moitié des dettes et du
coût de
retraitement du combustible
(3,3 milliards de francs) et la
totalité du
démantèlement
(soit environ
10,9 milliards de francs).
EDF avait passé en 1996 et 1997 des
provisions
pour un total de
14,3 milliards de francs
afin de couvrir les risques financiers
susceptibles de découler de l'arrêt de Superphénix.
Les mesures d'accompagnement prévues
Un
programme d'accompagnement
a été présenté
par le Gouvernement en février 1998. Conduit sous la direction du
Préfet de l'Isère en collaboration avec une instance locale de
médiation, de suivi et d'évaluation des résultats. Il
s'adresse aux principales parties intéressées par la fermeture de
la centrale. Les
prestataires extérieurs
bénéficieront de l'aide d'un
relais-emploi
afin de
favoriser le reclassement, faciliter la diversification et rechercher de
nouveaux marchés.
La mobilité et le reclassement
des
agents d'EDF suivent leur cours : 150 personnes quitteront le site
dès 1998.
Un fonds de développement
doté de
15 millions de francs par an pendant 5 ans a été
constitué au profit du
bassin d'emploi de Creys-Malville
. Il sera
consacré à la création d'emplois et d'entreprises. Enfin,
pour tenir compte de la situation des
collectivités locales,
les
dettes qu'elles ont contractées, soit 32 millions de francs au
titre des avances de la Caisse Nationale de l'Energie et 21 millions de
francs au titre des prêts grands chantiers de la Caisse des
Dépôts et Consignations, seront
considérablement
réduites,
voire même
annulées.
Le Gouvernement souligne, en outre, que
" la procédure
d'arrêt de Superphénix n'a fait l'objet
d'aucune
réaction officielle
de la part des
partenaires
étrangers. "
II. UNE POLITIQUE DE L'ÉNERGIE TOUJOURS PLUS RESPECTUEUSE DE L'ENVIRONNEMENT
A. DE NOUVEAUX ENGAGEMENTS INTERNATIONAUX
Comme le relevait, voici deux ans, l'enquête du CREDOC sur les conditions de vie et les aspirations des Français, la lutte contre la pollution de l'air constitue désormais une priorité pour plus de la moitié de nos concitoyens . Seule une coopération internationale active est susceptible d'apporter des réponses valables à ces préoccupations. C'est pourquoi le Gouvernement souscrit au contenu des accords de Kyoto et prépare leur mise en oeuvre dans le cadre élargi de l'Union européenne.
1. Les acquis de Kyoto : un accord sur les principes
A
l'issue de la troisième conférence des Etats signataires de la
Convention des Nations-Unies sur le changement climatique, plus de
160 pays ont approuvé le principe d'une
réduction des
émissions de gaz à effet de serre
(GES)
d'ici à
2008 - 2012
.
Cette diminution ne s'applique cependant pas de façon identique à
tous les signataires. Pour le
groupe des pays industrialisés
, la
réduction moyenne des émissions de GES est fixée à
5,2 % par rapport au niveau de 1990. L'objectif assigné à chaque
Etat varie : - 8 % pour l'ensemble de l'Union européenne et la
plupart des pays d'Europe centrale et orientale ; - 7 % pour les
Etats-Unis ; - 6 % pour le Japon. Les
pays en
développement
ne sont soumis à
aucun objectif de
réduction,
bien que certains d'entre eux -que l'on songe à la
Chine ou à l'Inde- émettent des volumes de CO
2
non
négligeables.
La
réduction s'applique, outre les trois gaz à effet de
serre " classiques "
visés par l'avant-projet
préparé par l'Union européenne (CO
2
,
CH
4
, N
2
O), à trois autres types de gaz (HFC et
fluides frigorigènes ; PFC et SF
6
)
6(
*
)
.
Pour le calcul de la réduction des rejets de gaz,
l'approche
nette
(émissions-absorption) ne prendra en compte que l'absorption
de CO
2
qui résulte de forêts plantées
après 1990.
L'existence de "
permis négociables
" permettra
l'achat de droits d'émission
, mais les modalités
d'applications de ces permis ne seront définies que lors de la
conférence de Buenos-Aires qui se tient en novembre 1998.
Le texte prévoit également la
possibilité
,
pour
les Etats soumis à des réductions d'émissions
, de
se prévaloir
de diminutions d'émissions
résultant d'un investissement
réalisé dans un autre
pays industrialisé
ou dans un pays en développement.
Les modalités d'application de ces deux mécanismes,
respectivement dénommés "
application
conjointe
" et "
développement propre
",
seront déterminées dans les mois à venir.
Les
objectifs
fixés à Kyoto sont
très
ambitieux
. C'est ainsi que les Etats-Unis devront opérer une
réduction de leurs émissions de GES de 17 % d'ici à 2012.
La discussion de l'accord de Kyoto -au cours de laquelle aucun expert n'a remis
en cause la réalité de l'effet de serre- a permis de parvenir
à un résultat qui n'est pas sans créer certaines
difficultés pour la France.
La convention ne fait pas porter l'essentiel de l'effort sur les Etats les
plus pollueurs
. C'est pourquoi,
la France -dont les émissions de
CO
2
sont faibles
par rapport à d'autres Etats du fait
de l'existence d'une forte production d'énergie nucléaire
-
se trouve en l'occurence désavantagée
.
Dans un avant-projet élaboré en 1997, l'Union européenne
avait fixé un objectif global pour l'ensemble de ses membres de
réduction des émissions de 10 %. Le mode de calcul retenu
revenait à fixer un objectif de stabilisation des émissions de
notre pays à leur niveau actuel.
Or, deux dispositions de la
Convention de Kyoto
(réduction des rejets de trois nouveaux gaz
et limitation de la prise en compte de la captation du CO
2
par les
forêts)
conduisent à majorer l'estimation des émissions
françaises
de GES de 9 % environ. De ce fait, alors que la
France envisageait une diminution des émissions de ces gaz de - 2 %
avant Kyoto, notre pays enregistrera à l'horizon 2010 une augmentation
des émissions prises en compte d'environ 7 %.
La France sera donc dans l'obligation d'utiliser les mécanismes de
flexibilité
prévus par la Convention de Kyoto et notamment
l'achat de droits d'émissions ou " permis
négociables "
et le mécanisme de développement
"
propre
" destiné à aider les parties non
soumises à l'obligation de diminuer leurs émissions à
parvenir à un développement durable. Pour notre pays, l'un des
enjeux de la mise en oeuvre des mécanismes de flexibilité lors de
la prochaine conférence de Buenos Aires est donc la définition de
ce régime des " permis négociables " dont il aura
besoin.
La France entend également maîtriser les émissions des
trois nouveaux gaz pris en compte en commençant par établir un
inventaire de leurs sources d'émission et renforcer sa politique
d'utilisation rationnelle de l'énergie et de développement des
énergies renouvelables.
2. Les incertitudes de Buenos Aires : une mise en oeuvre difficile
Désormais,
37 Etats ont signé le
protocole de
Kyoto qui n'entrera toutefois en vigueur que lorsque 55 Etats
représentant 55 % des émissions mondiales de gaz à
effet de serre l'auront ratifié
. L'un des principaux obstacles
à la mise en oeuvre du Traité vient de la position adoptée
par les Etats-Unis. Ces derniers ont décidé de ne soumettre le
texte au Sénat que lorsque des progrès auront été
réalisés s'agissant des mécanismes de flexibilité
et des engagements des PVD. Tel était notamment l'objet de la
conférence qui s'est tenue à Buenos-Aires.
En ce qui concerne les mécanismes de flexibilité, la Commission
européenne souhaite que leur élaboration repose sur des
exigences minimales
auxquelles les entités privées
devront satisfaire
7(
*
)
. L'Union
européenne souhaite également que les mécanismes de
flexibilité ne constituent qu'un supplément aux politiques et aux
mesures nationales.
La répartition de la réduction des
émissions entre les Etats de l'Union européenne
a fait
l'objet d'un accord lors du Conseil des ministres de l'environnement de juin
1998. Il en résulte que l'objectif assigné à la France
reste de parvenir à
stabiliser les émissions à leur
niveau actuel
. Cependant,
la prise en compte des émissions de
trois nouveaux gaz
(HFC, PFC, SF
6
)
rendra cet objectif
plus difficile à atteindre car les rejets de ces substances connaissent
une forte croissance
. Les ministres européens de l'environnement ont
d'ailleurs mis l'accent sur la nécessité :
-
de limiter les émissions dues aux transports
qui ne
cessent de croître (un accord a été passé avec
l'association des constructeurs européens de véhicules
prévoyant, d'ici à l'an 2008, une réduction des
émissions de CO
2
par kilomètre de 25 % par
rapport à la moyenne actuelle) ;
- d'encourager les
énergies renouvelables
et l'utilisation
de la
cogénération
.
La politique conduite par la France en matière d'utilisation rationnelle
de l'énergie et de production d'énergies renouvelables s'inscrit
dans le cadre général des engagements souscrits par l'Union
européenne et des négociations en cours.
B. ENCOURAGER L'UTILISATION RATIONNELLE DE L'ÉNERGIE
1. Appliquer la loi sur l'air
Les
titres VII et VIII de la loi n° 96-1236 du
30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de
l'énergie ont prévu divers mécanismes destinés
à en améliorer la qualité. Depuis le vote du budget pour
1998, plusieurs décrets d'application ayant une incidence directe sur la
consommation d'énergie sont parus. Il s'agit des décrets :
- n° 98-257 du 31 mars 1998 relatif à la
consommation en énergie des réfrigérateurs
et
congélateurs électriques
à
usage
domestique
;
- n° 98-817 du 11 septembre 1998 relatif aux
rendements minimaux
et à l'équipement des
chaudières
de puissance comprise entre 400 kW et 500 MW,
tous deux pris en application de l'article 21 de la loi ;
- n° 98-704 du 17 août 1998 pris pour
l'application des dispositions de l'article 8A du code de la route
relatives à l'identification des véhicules automobiles
contribuant à la
limitation de la pollution atmosphérique
,
qui prévoit :
.
d'une part,
l'identification de la consommation
énergétique
des véhicules afin de
faire
bénéficier les moins polluants
de
conditions de
circulation
et de
stationnement privilégiées
;
.
et, d'autre part, que
la flotte de toute collectivité
publique doit, lorsqu'elle est supérieure à
20 véhicules
,
être composée pour au moins un
cinquième de véhicules électriques
ou fonctionnant au
gaz de pétrole liquéfié
ou encore au
gaz
naturel
, en application de l'article 24 de la loi (cette disposition
entre progressivement en vigueur au fur et à mesure du renouvellement de
la flotte).
Il convient d'y ajouter le décret n° 97-1279 du
23 décembre 1997 fixant les modalités d'application de
l'article 265 alinéa 3 du code des douanes, portant
remboursement de la taxe intérieure de consommation sur le gaz
naturel véhicule
et
sur le gaz de pétrole
liquéfié
, carburants utilisés par les exploitants de
réseaux de transports publics en commun de voyageurs. Ce texte a
été pris en application de l'article 26 de la loi.
On notera cependant que
plusieurs dispositions importantes
de la loi du
30 décembre 1996
attendent toujours leurs textes
d'application
:
-
l'article 21
qui prévoit, d'une part, qu'avant le
1er janvier 2000 les
spécifications du fioul domestique, du
gazole, de l'essence
et des
supercarburants
devront être
redéfinies
et, d'autre part, que ces substances devront comporter
un
taux minimal d'oxygène
;
-
l'article 24
, qui dispose que dans les deux ans suivant la
publication de loi, les
flottes de véhicules de transport en commun
gérées par les collectivités publiques
utilisent
des
carburants
dont le
taux en oxygène est relevé
;
- enfin,
l'article 27
aux termes duquel un arrêté
interministériel
agrée les systèmes de réduction
des émissions polluantes qui
, installés sur des
véhicules acquis entre 1991 et 1996,
bénéficient d'une
aide à l'achat
qui peut atteindre 8.000 francs par
véhicule.
Votre Commission des Affaires économiques souhaite connaître
les orientations qui présideront à la rédaction de ces
futurs décrets, compte tenu de l'état d'avancement des
négociations " auto-oil " tendant à la
définition de normes européennes relatives aux
carburants.
2. Encourager les transports " propres "
Les travaux de la Commission d'enquête du Sénat ont confirmé l'importance du développement des transports non polluants, qu'il s'agisse du véhicule électrique ou du renforcement de la consommation de GNL ou de GPL.
a) Le véhicule électrique
Malgré son coût de fabrication
élevé et
son autonomie limitée, le
véhicule électrique
présente de réels avantages en ville en termes
d'émissions polluantes et de silence. Bien que des voitures
particulières et utilitaires ainsi que des deux-roues soient produits en
France, le nombre des immatriculations de ces véhicules ne connaît
pas encore de croissance stable puisqu'il est passé de
1.304 unités en 1996 à 727 en 1997, avant de connaître
un sursaut au 1er trimestre 1998 (600 véhicules).
L'Etat accorde pourtant une aide substantielle à l'achat de
véhicules électriques depuis 1995.
L'achat
de
deux-roues électriques par les particuliers
fait l'objet d'un
prime de
2.000 francs.
La loi de finances pour 1995 puis la loi sur
l'air ont, en outre, prévu un
amortissement sur douze mois des
véhicules électriques
ainsi que des
accumulateurs
nécessaires à leur fonctionnement. Des aides de 2.000
à 16.000 francs sont également versées aux
collectivités locales, en fonction de la charge utile des
véhicules qu'elles acquièrent.
L'annonce par Toyota de la fabrication de son véhicule électrique
sous le nom de " Prius " à la cadence de
2.000 véhicules par mois est un signe du retard que prend peu
à peu notre pays sur ce créneau.
b) Le véhicule à gaz de pétrole liquéfié
Un autre
espoir tient à l'utilisation croissante du
véhicule à
gaz de pétrole liquéfié.
Ses avantages sont connus :
technologie éprouvée, logistique minimale, prix hors taxes
modéré et émissions polluantes nettement
inférieures aux normes actuelles, qui en font une alternative aux
véhicules " classiques ". Moyennant l'installation d'un kit
dont le coût varie de 10.000 à 18.000 francs, les
véhicules à essence peuvent être transformés en
véhicules bicarburation essence-GPL, par l'adjonction d'un second
réservoir. Certains constructeurs, dont Renault, produisent même
des véhicules neufs bicarburation dotés d'un réservoir
intégré. Depuis 1996, quatre mesures ont donné un
" second souffle " à la consommation de GPL qui était
passée de 66.000 à 21.000 tonnes entre 1993 et 1995. Il
s'agit de :
- la
réduction de la taxe intérieure sur les produits
pétroliers
(TIPP) qui a permis de ramener le prix du GPL au litre
à un niveau inférieur de 40 % à celui du gazole ;
-
l'amortissement exceptionnel sur douze mois
des véhicules
utilisant le GPL ;
- la
récupération de la TVA à 100
% pour les
véhicules de fonction ou de société ;
- la
possibilité
ouverte aux conseils généraux
d'exonérer de vignette
les véhicules " propres "
à compter de 1998.
La consommation de GPL, qui a atteint 90.000 tonnes en 1997, pourrait
s'élever à 150.000 tonnes cette année selon le
Conseil national des professions automobiles. Selon la même source, le
réseau des distributeurs de GPL atteindra 2.000 stations en 2002,
grâce au versement d'aides à la construction de cuves et
d'installations. De même, le nombre de véhicules fonctionnant au
GPL pourrait s'élever à 400.000 au tournant du siècle. Ces
prévisions optimistes doivent cependant être nuancées par
une comparaison avec l'étranger. Notre pays enregistre, en effet, un
certain retard par rapport à ses partenaires : un million de
véhicules utilisent le GPL en Italie et 600.000 véhicules en
consomment aux Pays-Bas.
Votre Commission des Affaires économiques recommande
une
poursuite de l'effort accompli en faveur du gaz de pétrole
liquéfié.
c) Le gaz naturel pour véhicules
Doté d'un net avantage comparatif en termes
d'émissions de polluants, le gaz naturel pour véhicules (GNV) est
cependant bridé dans son développement par des contraintes
spécifiques (réduction de la puissance des véhicules,
stockage sous pression, autonomie plus limitée, coût d'adaptation
des véhicules supérieur à celui du GPL...).
Il semble cependant
adapté à l'équipement de flottes
captives
telles que les
autobus
, d'autant que son utilisation est
susceptible d'être mise en oeuvre sans nouvelles avancées
technologiques.
Reste à savoir si les dispositions de la loi sur l'air (réduction
de la taxe sur le gaz naturel) suffiront pour assurer son développement.
Beaucoup reste à faire puisque l'on ne compte que
17.000 véhicules de ce type en France, dont 4.000 à la RATP.
Votre commission des affaires économiques souhaite que le
gouvernement encourage l'utilisation de cette source d'énergie par les
transports collectifs.
d) De nouveaux encouragements fiscaux
L'article 31 du projet de loi de finances pour 1999
prévoit d'étendre aux
véhicules fonctionnant
en
bicarburation et aux accumulateurs
le régime
d'amortissement
exceptionnel sur douze mois
dont bénéficient
déjà les automobiles non polluantes fonctionnant en
monocarburation.
L'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de sa
Commission des Finances, un amendement de Mme Nicole Bricq (article
additionnel après l'article 31) prévoyant
l'exonération des véhicules fonctionnant en bicarburation de
la moitié du montant de la taxe sur les véhicules
de
sociétés
. Cette taxe s'élève actuellement
à 6.800 francs pour les véhicules de 7 chevaux fiscaux
et moins, et à 14.800 francs pour les véhicules de
8 chevaux fiscaux et plus.
L'Assemblée nationale a également
diminué de 15 %
le taux de la TIPP sur l'aquazole
, constitué d'un mélange
émulsionné de 15 % d'eau, d'additif et de gazole,
utilisé par les bus urbains et qui permet une réduction des
émissions de NOX, de CO
2
et de particules solides (article
additionnel après l'article 18).
Elle a enfin
porté de 6.500 à 8.000 litres par an le
volume de GPL exonéré de TIPP dont disposent les chauffeurs de
taxi
, afin de rendre l'utilisation de ce carburant plus attractive (article
additionnel après l'article 18).
3. Donner un nouvel élan à la politique de maîtrise de l'énergie
Après la publication du rapport d'évaluation sur la politique de maîtrise de l'énergie, réalisé sous l'égide du Comité interministériel de l'évaluation et du Commissariat au Plan, le Secrétaire d'Etat à l'Industrie a présenté, en février 1998, les grandes lignes d'une politique de relance des efforts de maîtrise de l'énergie. Cette initiative politique est accompagnée, au plan financier, d'un accroissement substantiel des moyens de l'Agence pour le Développement et la Maîtrise de l'Energie (ADEME).
a) Le rapport de l'instance d'évaluation de la politique de maîtrise de l'énergie (1973-1993)
Comme le
relève l'ingénieur général Yves Martin, qui
présidait l'instance d'évaluation de la politique de
maîtrise de l'énergie, dans sa préface au rapport
8(
*
)
, la France a besoin de
conduire une
politique de maîtrise de l'énergie de longue haleine,
même si les prix de l'énergie n'y incitent guère
actuellement.
Or, la politique de maîtrise de l'énergie
,
lancée en 1974,
a été
plus conjoncturelle que
structurelle.
Pourtant, comme le souligne Y. Martin :
" [...] la demande d'énergie a une élasticité
forte, mais des temps de réponse plus longs encore que ceux de
l'offre : nos besoins en énergie dans un demi-siècle
dépendent largement des choix peu réversibles que nous faisons
aujourd'hui en matière d'immobilier, de transports, d'urbanisme et
d'aménagement du territoire. Il convient d'anticiper très
à l'avance, dans tous ces domaines, l'évolution des coûts
de l'énergie. "
En outre, les progrès
réalisés en matière d'extraction pétrolière
" n'éloignent pas le mur des ressources ultimes de
pétrole qui sont à notre disposition, ils nous permettent d'aller
plus vite, avec plus d'insouciance, dans ce mur. "
Enfin,
" une autre bonne raison de mener une politique forte de maîtrise
de l'énergie tient à la place majeure [...] qu'occupe le
nucléaire dans notre politique énergétique. [...] beaucoup
de ceux qui [le] rejettent aujourd'hui comme une facilité dangereuse
pourraient [...] l'accepter comme un mal nécessaire s'il était
couplé à une maîtrise de l'énergie vigoureuse qui en
limite le développement. "
Selon l'instance d'évaluation, une politique structurelle de
maîtrise de l'énergie devrait notamment :
-
pallier la " myopie " du marché de l'énergie
fossile en intégrant, par la fiscalité, dans le prix de cette
énergie, les externalités et les coûts futurs.
Cette
observation, à laquelle a adhéré la Commission
d'enquête du Sénat sur la politique énergétique,
vaut spécialement pour les
transports
dont les
externalités négatives (coût des infrastructures, des
accidents de la route et du bruit) sont plus nombreuses et plus
élevées que pour les installations de combustion.
-
encourager la recherche-développement,
afin
d'accroître l'efficacité énergétique des
équipements
utilisateurs d'énergie ;
-
fournir aux utilisateurs
d'énergie
les informations
nécessaires
à
l'optimisation de leurs investissements
et de leur
comportement
(informations sur la consommation des
matériels, versement d'aides en cas de recours à des bureaux
d'étude et aides à la démonstration) ;
-
doter l'administration centrale -
notamment le
ministère des transports - d'une
organisation
permettant
d'intégrer la maîtrise de l'énergie dans
les politiques fiscales ou sectorielles,
telles que celles des
transports
, du
logement,
de
l'urbanisme,
de
l'aménagement du territoire
, qui ont un fort impact sur la
consommation d'énergie ;
-
doter l'ADEME de moyens humains et financiers stables
et
doubler le niveau de ses budgets d'intervention et de recherche
qui
n'ont pas évolué depuis 1993.
b) Les orientations de la politique du Gouvernement
Le
secrétaire d'Etat à l'industrie a présenté une
stratégie qui se fonde sur
l'efficacité économique
des mesures prises,
la permanence dans l'action
et
l'ouverture du
champ des options énergétiques.
Pour ce faire, il a notamment
été décidé de :
-
poursuivre l'application de la loi sur l'air (cf.
ci-dessus)
;
-
promouvoir l'aide à la décision des utilisateurs
d'énergie
, en ouvrant les fonds régionaux d'aide aux conseils
gérés par les DRIRE destinés aux PMI, aux audits
énergétiques et en favorisant ces audits avant la construction de
bâtiments appartenant à l'Etat ;
- soutenir les
technologies éoliennes
parvenues à
maturité. Le programme Eole 2005 tend ainsi à doter la
France d'une production de 250 à 500 MW en sept ans, tandis qu'EDF
est appelé à accroître ses interventions en matière
d'énergies renouvelables (cf. ci-dessous) ;
Le Gouvernement prévoit également, outre l'application de la loi
sur l'air :
- une association de l'ADEME et d'EDF dans le cadre d'un programme de
maîtrise de la demande d'électricité
(par la
diffusion de lampes à basse consommation dans le secteur
résidentiel, ainsi que par des économies dans le domaine
industriel (moteurs destinés au pompage et à la
ventilation ; technologies du froid et de l'air
comprimé) ;
- un renforcement des
aides aux énergies renouvelables,
par
l'amélioration des
conditions d'achat de
l'électricité,
par la mise en oeuvre d'aides à
l'installation de
chauffe-eau solaires
et par l'électrification
de sites isolés par production photovoltaïque ;
- par le lancement d'un programme de
valorisation de l'utilisation
énergétique du biogaz
;
- par la valorisation des
déchets de la filière bois
.
Au total, l'objectif serait
d'améliorer l'efficacité
énergétique de 1 %
par an, comme c'était le
cas avant 1990
.
Votre Commission des Affaires économiques souscrit à la
relance de la maîtrise de l'énergie, tout en souhaitant une
sensibilisation accrue des producteurs d'appareils
électroménagers aux enjeux de cette politique.
c) Un renforcement de l'action de l'ADEME
1998 restera une année charnière pour l'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (ADEME) dont l'équipe de direction a été renouvelée afin de définir une nouvelle stratégie d'action reposant sur des moyens renforcés.
(1) Le budget de l'ADEME
A
l'issue du Comité interministériel sur le nucléaire de
février 1998, le Premier ministre a annoncé la mise en place d'un
financement pérenne, de l'ordre de 500 millions de francs par
an
, au profit de l'Agence. Le projet de loi de finances pour 1999 traduit
cette volonté. Au titre des crédits du secrétariat d'Etat
à l'industrie, le chapitre Interventions (n° 62-92) est
doté de 242 millions de francs en autorisations de programme et de
249,5 millions de francs en crédits de paiement, soit un triplement
des crédits par rapport au budget 1998. Quant aux crédits de
fonctionnement de l'Agence, ils s'élèvent à
97 millions de francs, soit un million de plus qu'en 1998.
Parallèlement,
l'article 30
du projet de loi de finances
pour 1999 prévoit la
création
d'une
taxe
générale sur les activités polluantes
. Elle se
substituera
aux
cinq taxes que percevait
précédemment l'ADEME
: taxe sur les activités
concourant à la pollution atmosphérique, sur les déchets
ménagers, sur les déchets industriels et spéciaux, sur les
huiles de base et sur les nuisances sonores.
Son montant, estimé
à 1.935 millions de francs en 1999,
sera
versé au
budget général
. Il est en hausse de plus de 500 millions
de francs par rapport à 1998, ce qui correspond à l'accroissement
des moyens budgétaires mis par ailleurs à la disposition de
l'ADEME comme l'avait annoncé le Premier ministre.
Votre Commission des Affaires économiques qui a émis un avis
défavorable à la création de la la taxe sur les
activités polluantes souhaite que le Gouvernement s'engage à ce
que la budgétisation du produit de cette taxe ne débouche pas,
dans les années à venir, sur une réduction de la
subvention de l'ADEME
.
(2) Les activités de l'ADEME
L'action
de l'ADEME intéresse aussi bien le développement des
énergies renouvelables que l'utilisation rationnelle de l'énergie.
Les énergies renouvelables
Le Programme Bois, Energie, Développement Local (PBEDL)
,
lancé en 1994, a permis d'aider plus d'une centaine de chaufferies au
bois, correspondant à une puissance totale installée de
82,7 MW.
Le programme de
production d'électricité
issue des
énergies nouvelles et renouvelables
a permis
l'électrification par système photovoltaïque ou
éolien de 1.000 sites isolés, en métropole et dans
les départements d'outre-mer. Le
programme Eole 2005
, qui
tend à porter la puissance du parc éolien français entre
250 et 500 MW en sept ans, a progressé (la puissance totale
installée s'élevait à 77 MW fin 1997). Un quart du
programme solaire thermique,
destiné à l'installation de
20.000 chauffe-eau solaires dans les départements d'outre-mer, est
désormais réalisé.
Votre commission des affaires économiques rappelle, en outre, que la
commission d'enquête sur la politique énergétique de la
France observant que "
l'existence d'une entreprise monopolistique
avait été peu favorable au développement de petits projets
locaux [...] et que dans les communes où l'électricité est
distribuée par des régies locales, de petites unités
avaient vu le jour qui s'étaient avérées parfaitement
compétitives
" avait en conséquence souhaité que
ces expériences se développent.
L'utilisation rationnelle de l'énergie
Parmi les programmes menés par l'ADEME, on retiendra celui tendant
à
l'optimisation énergétique dans le secteur des
transports
par l'aide à l'achat de véhicules
électriques ou utilisant le gaz naturel et l'encouragement de
l'utilisation de véhicules performants (aide à l'investissement
dans le secteur du transport combiné).
III. LA SITUATION DES GRANDS OPÉRATEURS FRANÇAIS
A. LA PRODUCTION D'ÉLECTRICITÉ
1. Situation et résultats d'EDF
A cause
de la
douceur exceptionnelle du climat en 1997,
EDF a enregistré
une
baisse de la consommation
de 4 Twh par rapport à 1996.
De ce fait, la production totale a atteint 442,5 Twh. Conformément
aux dispositions du contrat d'entreprise, les
tarifs de
l'électricité
ont été
réduits de
4,6 % en avril 1997,
pour toutes les catégories de
clientèle. Cette réduction a coûté environ
3,6 milliards de francs à EDF. Le
chiffre d'affaires
de
l'opérateur public, est, en conséquence, passé de 191,1
à 186,5 milliards de francs.
Au cours de l'exercice 1997, le
bilan d'EDF
a fait l'objet de
restructurations importantes
, destinées à définir
le statut patrimonial des ouvrages de transport d'électricité qui
lui appartiennent. Afin de contribuer au désendettement d'EDF, les
capitaux propres
ont été portés de 24,2 à
72,9 milliards de francs, grâce à des dotations en capital
(51 milliards de francs) et des réserves. Consacrés pour
près des 2/3 au transport et à la distribution, les
investissements
sont réduits à
29 milliards de
francs environ,
contre 36,1 milliards de francs auparavant. Quant au
résultat net comptable,
il passe de 1,87 à
1,54 milliard de francs,
étant entendu qu'EDF a
acquitté
3 milliards de francs
d'impôt sur les
sociétés. Le
désendettement
d'EDF a
considérablement
progressé. La dette
qui atteignait
132,9 milliards de francs fin 1996, a été réduite de
8,5 milliards de francs
. L'objectif reste de ramener la dette
à environ 100 milliards de francs en l'an 2000.
L'année 1998 a est marquée par la réorganisation interne
d'EDF. Dans un programme de travail intitulé : "
Vers le
client, le compte à rebours européen
",
l'opérateur public s'est fixé quatre objectifs principaux :
- tourner toute l'entreprise vers le client ;
- conforter l'outil de production ;
- faire de l'Europe le marché domestique ;
- impulser une nouvelle dynamique sociale.
2. La réforme de l'obligation d'achat d'électricité aux producteurs indépendants
L'année 1997 a été marquée
par la
réforme des conditions d'achat de l'électricité aux
producteurs indépendants. Le décret du 20 mai 1955
modifié impose à EDF et aux distributeurs non nationalisés
l'obligation
de passer des contrats
d'achat
de
l'électricité produite par les producteur autonomes. Cette
obligation s'applique à l'énergie produite par des techniques de
cogénération
et des installations utilisant, à
titre exclusif ou principal, des
énergies renouvelables ou des
déchets.
Le contrat d'entreprise signé par l'Etat et EDF prévoit des
modalités d'achat destinées à favoriser ces formes de
production de courant.
La cogénération
Le nouveau contrat d'achat, approuvé en mars 1997, détermine
la rémunération des cogénérateurs sur une
période de 12 ans, ce qui correspond à la durée
d'amortissement de leurs installations.
Cette rémunération est fonction :
- des " coûts évités " de
développement du système électrique ;
- des économies d'énergie primaire que réalisent
certaines installations.
Le cogénérateur a la faculté de vendre
l'intégralité de sa production à EDF et de racheter la
part qu'il consomme, ce qui lui évite de payer les
pénalités de dépassement de puissance qu'il aurait
à acquitter en cas de défaillance de son installation.
La cogénération fournit actuellement 3 % de la
capacité du parc français de production électrique.
Même si elle ne pourra se substituer aux principales sources
d'énergie, elle mérite d'être développée.
La petite hydroélectricité
L'ensemble des producteurs autonomes d'électricité hydraulique
dotés d'installations de moins de 8 MVA représentent une
puissance installée de 1.000 MW. Le nouveau contrat d'achat fixe
leurs modalités de rémunération sur 15 ans, en tenant
compte des " coûts évités " et du coût
initial de l'investissement hydro-électrique.
Votre Commission des affaires économiques se félicite de ces
innovations qui favorisent le recours à des énergies
renouvelables et les économies d'énergie.
3. La réduction de la TVA sur les abonnements de gaz et d'électricité
L'article 19 du projet de loi de finances prévoit
d'assujettir au taux réduit de TVA
-soit 5,5 %-
au lieu du
taux normal de 20,6 %, les abonnements relatifs aux livraisons
d'électricité et de gaz combustible.
Le coût de cette mesure est estimé à
4 milliards de
francs
.
B. LE SECTEUR GAZIER
Comme le relève un ouvrage 9( * ) récemment publié, le gaz naturel pourrait, par son abondance et sa propreté, connaître un " âge d'or " dans les années à venir. A n'en pas douter, l'opérateur gazier français a une carte maîtresse à jouer dans la compétition internationale.
1. Evolution de l'activité et des résultats de GDF
Des
résultats satisfaisants en 1997
Les ventes de gaz ont diminué l'an passé, tant à cause de
la baisse des prix du fioul et de l'électricité que du fait d'un
hiver doux et pluvieux. L'appréciation du dollar et la montée des
cours du gaz brut ont suscité une hausse des coûts
d'approvisionnement de près de 25 %. La facture gazière a
crû de 17 %, passant de 17,6 à 20,3 milliards de francs.
Cet accroissement du coût des ressources n'a pas été
intégralement compensé par les augmentations de tarif aux
particuliers de mai et de novembre 1997, qui se sont respectivement
élevées à 3,5 % et 3 %, ni par le
relèvement des tarifs industriels (+0,3 centimes/Kwh en février).
Le chiffre d'affaires de Gaz de France
s'est élevé
à
55,217 milliards de francs
(+1,7 %), bien que les
ventes corrigées à climat moyen se soient contractées de
417 Twh en 1996 à 412 Twh en 1997. Compte tenu du différentiel de
variation entre les prix du gaz à l'achat (+16 %) et à la
vente (+4 %), la marge unitaire à baissé, entraînant
une réduction de la marge brute de 1,7 milliard de francs. En
conséquence, le résultat net est passé de
2,563 milliards à 1,528 milliard de francs entre 1996 et 1997.
La situation financière de GDF continue néanmoins de
s'assainir
. L'entreprise a réduit son
taux d'endettement
de
96 %
à
85 %.
Les
capitaux
propres
(inexistants en 1984) ont atteint
15 milliards de francs
. La
capacité d'autofinancement (7,7 milliards de francs) a permis de
financer l'ensemble des investissements (6,8 milliards de francs).
GDF a intensifié son
action commerciale
:
122.230 nouveaux clients lui ont passé commande. Ce mouvement a
été particulièrement sensible dans la grande industrie,
notamment à cause des nouvelles conditions de rachat par EDF de
l'électricité produite par cogénération. GDF a
également renforcé ses activités de
transit de gaz
grâce à des accords avec les entreprises italiennes SNAM et ENEL.
Il a aussi pris le contrôle de la première entreprise italienne du
secteur climatique et thermique, AGIP SERVIZI.
Des prévisions positives pour 1998
Les conditions climatiques observées en 1998 ne sont pas plus favorables
à la consommation de gaz naturel que celles de 1997. Cependant, à
la différence de l'année passée, les prix du gaz à
la production ont baissé, ce qui a permis d'opérer des baisses de
tarifs de 2,5 % en mai et de 0,4 et 0,25 centime/kWh respectivement en
avril et en juillet pour la consommation domestique. Une nouvelle baisse des
tarifs de 2,5 % est prévue à compter du 1er novembre 1998.
La desserte gazière se renforce grâce à la création
de 350 concessions nouvelles en 1998 (contre 268 en 1997 et 220 en 1996).
La société envisage d'atteindre un chiffre d'affaires de
57,6 milliards de francs et un résultat net de 2,6 milliards
de francs. Cette amélioration des comptes permettrait de renforcer les
capitaux propres, qui atteindraient alors 17,7 milliards, et de
poursuivre la réduction de l'endettement (aux alentours de
11,4 milliards de francs) en 1998.
Au
plan industriel, 1998
sera marquée par l'entrée en
service du
gazoduc NORFRA
qui achemine directement le
gaz
norvégien à Dunkerque
. Long de 840 kilomètres,
c'est le plus grand gazoduc sous-marin du monde. Il permettra d'acheminer
jusqu'à 15 milliards de mètres-cubes de gaz à compter
de 2005. Un nouveau réseau terrestre,
l'artère des Hauts de
France
, acheminera le gaz norvégien destiné au réseau
français. La réalisation de cet équipement va de pair avec
la conclusion
d'accords de transit
avec l'Espagne et l'Italie.
2. La desserte gazière
L'
article 50
de la
loi du 2 juillet 1998
portant
diverses dispositions d'ordre économique et financier fait suite
à une
mise en demeure
adressée par la Commission
européenne à la France au sujet d'un
abus de position
dominante
commis par Gaz de France. L'établissement public se
fondait, en effet, sur le monopole que lui confère la loi de
nationalisation du 8 avril 1946, pour
s'opposer à
l'intervention d'autres distributeurs dans des zones non desservies, alors
même qu'il n'envisageait pas de les approvisionner lui-même
.
Dans ces conditions, les 17 distributeurs de gaz naturel qui n'avaient pas
été nationalisés en 1946 et qui desservaient
174 communes l'an passé ne pouvaient en aucune façon
étendre leurs activités à des zones que GDF ne pouvait pas
desservir, compte tenu de la faiblesse de la rentabilité des
opérations qui y étaient projetées par rapport au taux
minimal fixé par une circulaire ministérielle.
L'article 50 précité dispose qu'un
plan de desserte
gazière
précisant
les communes
où
GDF aura
obligation de desserte pour une période de trois ans
sera
établi par l'Etat en concertation avec les collectivités locales.
Les préfets seront chargés d'élaborer un avant-projet de
plan en fonction d'un critère de rentabilité, le plan
étant définitivement arrêté par le ministre
chargé de l'énergie. Le texte prévoit que les communes non
encore desservies et non inscrites au plan de desserte pourront faire appel
à un autre opérateur agréé par le ministre. Elles
auront la faculté de constituer des régies ou des
sociétés d'économie mixte dont le capital devra être
détenu à 30 % aux moins par l'Etat ou un
établissement public.
Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis,
GDF a été autorisé à accroître son programme
d'investissement 1998-1999 de 400 millions de francs. Cette augmentation
permettra de desservir
1.200 nouvelles communes,
soit un
cinquième de celles que l'opérateur public approvisionne
actuellement.
Votre Commission des Affaires économiques souhaiterait
connaître l'état d'avancement des projets de plan de desserte
gazière et du décret portant fixation des nouveaux
critères de rentabilité qui s'imposeront à Gaz de
France
.
3. L'application du contrat d'entreprise 1997-1999
Signé le 1er avril 1997, le contrat d'entreprise
liant
l'Etat à GDF fixe trois grands axes à l'établissement
public : la poursuite du
développement national dans une
optique de service public
, l'accroissement de son
internationalisation
, le
renforcement
de sa
structure
financière
.
Au titre du
développement de l'entreprise en France
, GDF
enregistre une amélioration de la compétitivité du
" coût propre corrigé ", mesure de l'évolution
des coûts excluant le coût d'achat du gaz par GDF. De 1996 à
1997, le coût propre moyen du kWh a diminué de 2,9 %. Cette
baisse, qui reflète des gains de productivité, a
été répercutée pour plus de la moitié lors
de l'établissement des tarifs-client. En matière commerciale, GDF
a, par exemple, développé son offre en matière de
qualité et de sécurité des installations
intérieures en proposant systématiquement un diagnostic à
tous ses clients.
En ce qui concerne les
missions d'intérêt
général
, GDF a renforcé la
sécurité
de ses approvisionnements
en négociant des contrats de gaz provenant
du Royaume-Uni, et en signant, outre
l'accord de transit
de gaz
norvégien avec la SNAM, un
accord d'échange
de gaz
nigérian avec l'opérateur italien ENEL.
On notera que, compte tenu de
l'abaissement du ratio d'endettement à
85 % en 1997, l'objectif
fixé par le contrat d'entreprise -qui
tend à
ramener ce ratio à 45 % en 1999-
est
toujours susceptible d'être atteint.
C. LE SECTEUR PÉTROLIER
L'année 1998 a été marquée par l'existence d'une production de pétrole brut excédentaire, notamment due à la crise asiatique, et par une chute des cours (12 dollars en mars 1998) que les efforts de l'OPEP ont été impuissants à contenir. Cette situation a causé des problèmes graves aux pays producteurs, qui ont souvent misé leur développement sur l'accroissement de leurs exportations pétrolières. En France, l'année est marquée par la réforme de la fiscalité, l'adoption de la directive sur la qualité des carburants et la question de l'aide aux petites stations-service.
1. La réforme de la fiscalité des hydrocarbures
Outre la suppression du prélèvement sur les bénéfices des entreprises exploitant des gisements d'hydrocarbures (article 34), le projet de loi de finances comporte des dispositions importantes destinées à diminuer l'écart relatif de la fiscalité entre gazole et super.
a) Un recours excessif au diesel encouragé par la fiscalité
L'écart français de taxation entre le super sans plomb et le gazole (1,43 franc par litre) est le plus élevé de l'Union européenne. Comme l'a relevé la Commission d'enquête du Sénat sur la politique énergétique, cette situation entraîne un taux de diésélisation du parc de véhicules automobiles français de 38,1 %, contre 14,6 % en Allemagne et 10,3 % en Italie. Outre des conséquences néfastes en termes d'émission de particules polluantes, cette situation présente deux inconvénients majeurs. Elle aboutit à un manque à gagner de 7 milliards de francs pour l'Etat causé par une perte de recettes fiscales et elle met à mal l'équilibre du système de raffinage. La France a dû importer 8 millions de tonnes (Mt) de gazole au prix fort, alors qu'elle produit 3 millions de tonnes d'excédent d'essence.
b) Une réforme progressive
L'article 18 du projet de loi prévoit une modification des tarifs des taxes intérieures de consommation sur les produits pétroliers et le gaz naturel ainsi qu'un remboursement de TIPP aux transporteurs routiers. Le Gouvernement souhaite obtenir un alignement de l'écart de taxation entre le gazole et le supercarburant sans plomb sur l'écart moyen dans l'Union européenne en sept ans . Il a également mis en place un mécanisme spécifique destiné à éviter de pénaliser le transport public de marchandises qui utilise principalement du gazole. En pratique, le texte prévoit le remboursement d'une fraction de la hausse de la TIPP pour certaines utilisations professionnelles .
2. L'enjeu de la directive sur la qualité des carburants
Respectivement lancés en 1992 et en 1997, les programmes
Auto-oil I et Auto-oil II ont été conduits, de
façon tripartite, par la Commission européenne, les
pétroliers et les constructeurs automobiles. Ils sont à l'origine
des travaux préparatoires à l'élaboration de deux
directives respectivement consacrées à la
diminution des
émissions
et à la
composition des
carburants
. Ils tendent à réduire la concentration de
polluants dans l'air en milieu urbain.
Le Parlement européen a fortement amendé, en avril 1997, les
propositions émanant de la Commission et du Conseil des ministres. Il a,
notamment, souhaité que des normes plus sévères soient
instaurées en matière d'émissions de soufre, de
benzène et de composés aromatiques, et voté l'interdiction
de la commercialisation de l'essence plombée à compter du
1er janvier 2000. De ce fait, le
coût total
du
programme, fixé initialement à 12 milliards d'euros,
était susceptible de se monter à
50 milliards d'euros
pour l'ensemble de l'Union.
Au cours des négociations, notre secrétariat d'Etat à
l'industrie s'est déclaré soucieux de trouver une position
commune qui permette de
donner une visibilité à l'industrie en
fixant les normes
applicables
en l'an 2000
et de
prendre
le temps nécessaire pour éviter d'imposer des investissements
importants au secteur du raffinage d'ici à 2005
.
Après dix semaines de débat, les instances de l'Union sont
parvenues à un accord. Il en résulte que les
spécifications de la position commune du Conseil pour l'an 2000 ont
finalement été adoptées. Pour 2005, les valeurs retenues
initialement à titre indicatif auront finalement un caractère
obligatoire.
Au 1er janvier 2000
Les
teneurs maximales
de l'
eurosuper
en
benzène
et
soufre
seront
réduites
par rapport au niveau
actuellement admis tandis que les
teneurs
en
oléfine
et en
substances aromatiques
feront l'objet d'une
limitation
. La
teneur maximale du gazole
en soufre sera aussi réduite et une
limite à sa teneur en polyaromatiques entrera en vigueur. La
vente
d'essence plombée
sera
interdite
.
Il semble avéré que l'entrée en vigueur de la directive,
si elle est compatible avec des investissements modérés dans le
secteur du raffinage, y favorisera nombre de restructurations à compter
de l'an 2000. Certaines études prévoient même la
fermeture de 10 à 20 raffineries en Europe dans les prochaines
années.
Votre Commission des Affaires économiques souhaite que
le Gouvernement se préoccupe de la situation de l'industrie du raffinage
et l'aide à opérer d'inéluctables transformations.
Au cours d'une
seconde étape
,
préparée entre
2000 et 2005
, les teneurs en soufre et en
substances aromatiques
du
gazole et du supercarburant seront
limitées
.
A l'occasion de la discussion de ces deux projets de directives, le Parlement
européen a souhaité la
préparation d'une directive
fiscale
favorisant le recours aux carburants propres.
3. Le problème récurrent du maintien des petites stations-services
Dans son
rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 1998, votre rapporteur
s'était inquiété de la
disparition des petites
stations-service
. Il constate, avec regret, que ce mouvement ne semble pas
prêt de prendre fin. Or, l'heure est grave :
il ne restait plus
que 17.500 stations en 1997
, sur les 36.000 que comptait la France en
1985. Même si la croissance du nombre de points de vente au sein de la
grande distribution s'est ralentie (+0,7 % en 1997, contre +3,7 % en
1996), il n'en demeure pas moins que leur part de marché
s'élève à environ 51 % actuellement. Cette
disparition progressive des petits points de vente de carburant est
observée avec appréhension par les élus des zones à
faible densité de population.
Dans ce contexte, l'
application des mesures d'aides
consécutives
à l'adoption de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996
relative au développement et à la protection du commerce et de
l'artisanat, dont notre collègue le sénateur Jean-Jacques Robert
fut le rapporteur au Sénat, et de la loi de finances pour 1997
est
d'autant plus urgente.
Ces textes ont, en effet, prévu
l'obtention d'une autorisation spéciale pour l'implantation des
stations-services
, à proximité des centres commerciaux ainsi
que la perception d'une
taxe additionnelle à la taxe
d'aide au
commerce et à l'artisanat
destinée à venir en aide aux
petites stations-service. Depuis lors, les décrets du
15 mai 1997 et du 2 mars 1998 ont fixé le taux et
les modalités de répartition du produit collecté. La loi
prévoit cependant qu'un arrêté interministériel fixe
le plafond des ressources affectées au Comité professionnel de
distribution des carburants (CPDC), l'organisme chargé de la
répartition des fonds.
Votre Commission des Affaires économiques déplore que les
problèmes de fonctionnement du CPDC et le retard pris dans la
publication de l'arrêté interministériel
précité n'aient toujours pas permis de soutenir les petits
détaillants -deux ans après la création des
mécanismes d'aides précités-.
D. LE SECTEUR CHARBONNIER
L'activité et les résultats des Charbonnages de France en
1997-1998 et leurs perspectives pour 1999
En 1997, dernier exercice connu, le
chiffre d'affaires
de CDF a atteint
3,489 milliards
de francs, le résultat d'exploitation
2,8 milliards et le
résultat final -6,5 milliards
de
francs. L'endettement de l'entreprise, qui était de 27,7 milliards
en 1996, atteint 29,3 milliards de francs en 1997. En 1999,
l'aide de
l'Etat au Charbonnages de France
reste au même niveau qu'en 1998.
Elle s'élève à
5,35 milliards de francs
, et se
décompose en une
subvention budgétaire de 2,5 milliards
et une
dotation en capital de 2,52 milliards de francs
.
La production
charbonnière passera de 5,7 à
5,15 millions de tonnes entre 1998 et 1999
, parallèlement
à la baisse des effectifs (celle-ci était de -10,32 % en
1997).
La reconversion des zones minières
La fermeture des sites de La Mure et de Forbach en 1997 pose de nouveau le
problème de la reconversion des
friches industrielles
consécutives à l'arrêt de l'activité
charbonnière, en particulier dans la région Nord-Pas-de-Calais
où est situé l'essentiel des 5.000 hectares
concernés. Conformément aux dispositions du code minier, qui
prévoit que les Charbonnages de France doivent prendre les mesures
appropriées pour traiter les zones charbonnières, le Gouvernement
a demandé, par lettre du 5 mai 1998, à
l'opérateur public de pourvoir à la
remise en état
des sites. La requalification des friches industrielles constitue d'ailleurs
l'un des objectifs du contrat de plan. La maîtrise d'ouvrage est
assurée par l'établissement public foncier Nord-Pas-de-Calais.
La question des effondrements miniers
Le 17 juin dernier, votre Commissions des Affaires économiques a
approuvé les conclusions du rapport de notre collègue Jean-Marie
Rausch sur six propositions de lois relatives à la
responsabilité et à la prévention des dommages
consécutifs à l'exploitation minière
10(
*
)
.Cette question -qui
n'intéresse d'ailleurs pas exclusivement les mines de charbon-
résulte de la multiplication des effondrements miniers,
consécutifs à l'arrêt de l'exploitation du sous-sol tels
que ceux qui se sont récemment produits à
Auboué
et
Moutiers
. Le rapport de notre collègue a bien cerné les
problèmes posés par
l'indemnisation des personnes victimes de
sinistres
, notamment à cause de l'existence de clauses
exonérant les exploitants miniers de leur responsabilité dans les
actes de vente de leur ancien patrimoine immobilier.
Votre Commission des Affaires économiques souhaite que,
conformément au contenu de la communication du secrétaire d'Etat
à l'industrie du 28 janvier 1998, le Gouvernement mette en
place un mécanisme d'indemnisation et élabore un texte prenant en
compte les conséquences de la fermeture des mines.
*
* *
En
conclusion, votre rapporteur pour avis constate que la politique de
l'énergie française est empreinte d'une grande continuité.
Beaucoup des conclusions présentées par la Commission
d'enquête du Sénat sur la politique énergétique de
la France sont, mutatis mutandis, partagées par le Gouvernement et la
majorité des membres du Parlement.
Pérennité de la politique nucléaire, relance de la
maîtrise de l'énergie, souci de respecter les engagements
souscrits à Kyoto : tous ces éléments font l'objet d'un
consensus qui conduit votre rapporteur pour avis à vous demander
d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits
inscrits au titre du ministère de l'industrie pour la politique de
l'énergie.
*
* *