2. Un quota impossible à respecter
L'objectif de croissance des effectifs fixé par le ministre a été largement dépassé, puisque l'enquête suivant la rentrée scolaire de septembre 1996 a fait apparaître, en dépit de très nombreux refus d'inscription, une nouvelle augmentation de. 5,9 %, soit environ 9.450 élèves, qui se répartit de la façon suivante entre les différentes catégories d'enseignement :
a) Les raisons du dépassement
Ces dépassements ne sont évidemment pas le résultat d'une ignorance délibérée des consignes ministérielles. Ils étaient sans doute inévitables, essentiellement pour deux raisons :
La première, et la principale, est que l'objectif de 2 % ne tenait pas compte de « l'effet de stock » qui imposait mécaniquement une progression supérieure à 2 % des effectifs totaux, en raison :
* de la poursuite des filières : quand on a ouvert à une rentrée une filière, et donc une classe correspondant à la première année de cette filière, il faut bien ouvrir ensuite les classes suivantes. Cet effet a sans doute été relativement circonscrit, en particulier dans l'enseignement public, les restrictions budgétaires de ces dernières années ayant réduit les « ouvertures nettes » de classes. Mais il fallait quand même compter avec la « montée en puissance » des baccalauréats technologiques, ou avec les ouvertures de classes correspondant à des formations nouvelles ou rénovées, par exemple à la mise en place à la rentrée 1995 des nouveaux CAPA en deux ans, ainsi qu'avec la répartition inégale des filières entre les différentes catégories d'établissement (l'enseignement privé compte beaucoup plus de filières courtes, tandis que l'enseignement public a concentré ses efforts -et redéployé ses moyens- sur les filières longues).
* de l'allongement de la scolarité, dont les effets sont potentialisés dans l'enseignement agricole par le développement récent des formations de niveau IV, notamment des nouveaux baccalauréats (qui débouchent cette année sur une reprise de la progression des BTSA) et par la mise en place de « filières de promotion » favorisant la poursuite d'études des diplômés et leur accès à une qualification de niveau supérieur.
* des effets cumulés de la reprise depuis 1993 des augmentations d'effectifs dans les formations de niveau V (CAPA, BEPA, 4e et 3e) ces formations, après avoir nettement baissé entre 1985 et 1992, avaient en effet presque retrouvé en 1995 leur niveau de 1985, et ont progressé de 5.700 élèves à la dernière rentrée.
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En second lieu, il convient de prendre
aussi en compte le fait que la planification centralisée a ses limites,
surtout quand elle est quelque peu improvisée : même
si l'objectif fixé avait été plus réaliste, il
était de toute façon difficile d'escompter que la somme des
décisions intervenues dans chaque établissement coïnciderait
avec le résultat souhaité au niveau national...
b) Les refus d'inscription
Pourtant, contrairement à ce que pourrait laisser croire l'augmentation des effectifs, les établissements ont effectivement essayé de se conformer à la règle des 2 %, ce qui s'est traduit par de très nombreux refus d'inscription.
La rigueur budgétaire avait d'ailleurs déjà pesé sur l'évolution des effectifs. Les établissements d'enseignement agricole sont loin, en effet, d'avoir accueilli ces dernières années « tous ceux qui se présentaient ».
Le premier indice en a été l'inversement de la tendance au rééquilibrage des effectifs entre public et privé. Parce que l'évolution de leurs effectifs est plus facilement maîtrisable par le ministère que celle des établissements privés, et parce que le développement des formations longues n'a pu être obtenu qu'au prix de nombreuses fermetures de formations courtes, dont les effectifs ont recommencé à croître, les établissements publics ont connu depuis 1993 une baisse relative de leurs effectifs : ils accueillaient, à la rentrée 1993, 43,7 % des effectifs scolarisés, ils ne représentent plus, à la rentrée de 1996, que 40,8 % des effectifs totaux, soit une proportion très voisine de celle observée avant la réforme de 1984 et le début de la rénovation.
L'an dernier, le resserrement des moyens s'était déjà traduit par une poussée des refus d'inscription dans les établissements : au moins 1.500 élèves n'avaient pu trouver de place dans les établissements publics, et plus de 1.000 dans les établissements privés à temps plein.
Ce mouvement s'est indiscutablement amplifié cette année : les établissements privés à temps plein évaluent à 2.300 le nombre des élèves qu'ils n'ont pu accueillir et, pour les établissements à rythme approprié, ce nombre serait de l'ordre de 2.500. Pour ce qui est de l'enseignement public, le ministère de l'agriculture n'a fourni aucun chiffre. Les estimations qu'a pu recueillir votre rapporteur, et qui sont cohérentes avec l'évolution des chiffres communiqués par des établissements privés, varient entre 3.000 et 5.000 refus d'inscription.
Certes, ces chiffres sont certainement supérieurs au nombre des candidats malheureux, qui ont pu tenter leur chance dans des établissements appartenant à ces trois catégories. Mais ils sont significatifs d'une certaine « fermeture » de l'enseignement agricole, sur les conséquences de laquelle il convient de s'interroger.