IV. L'UTILITÉ COMMERCIALE ET ÉCONOMIQUE DE LA PROMOTION DE LA LANGUE FRANÇAISE

1. Prendre en compte la dimension culturelle des échanges commerciaux

Trop souvent, les enjeux de la francophonie sont tenus pour secondaires dans l'ordre politique et négligeables dans les domaines économique, technique et commercial.

Outre le soupçon qui pèse sur la politique de la langue et les arrière-pensées nationalistes qu'on lui prête, la francophonie est souvent réduite à un sympathique phénomène culturel, riche de nostalgies et d'exotisme, mais qui ne saurait avoir d'incidences sérieuses sur le développement économique. Cette méconnaissance des enjeux de la francophonie trouve son origine dans la séparation radicale qui est ordinairement et abusivement établie entre les facteurs économiques et techniques, regardés comme seule réalité tangible, et les « facteurs culturels » considérés comme négligeables.

À ces préjugés, s'ajoute l'idée selon laquelle le français est une langue de culture par opposition à l'anglais qui serait la langue du commerce international.

Votre rapporteur, tout en n'ignorant pas que le domaine des affaires est aujourd'hui particulièrement perméable à la pénétration de l'anglais, souhaite s'élever contre cet ensemble de préjugés qui constituent à la fois des erreurs théoriques et des préceptes aux conséquences économiques désastreuses.

Comme le soulignait un rapport élaboré en 1989 par Bertrand Renouvin pour le Conseil économique et social 2 ( * ) , « la langue se trouve évidemment placée au coeur de la relation d'échange : elle désigne les objets, les surcharge éventuellement de significations nouvelles, leur attribue des qualités et des valeurs, donne du sens et fixe une interprétation des images parmi toutes celles qui sont possibles. Le nom de l'objet, la marque de fabrique, le message qui les associe ne sont jamais indifférents quant au succès ou à l'échec d'une stratégie commerciale ».

En effet, non seulement toutes les approches théoriques des sciences humaines invalident l'hypothèse d'une séparation entre la langue et les objets qu'elle désigne mais en outre le rôle déterminant de la langue s'accroît dans nos sociétés modernes qui tendent à devenir des sociétés d'information.

Or, la méconnaissance de la dimension culturelle des échanges commerciaux n'est pas sans conséquences. L'observation des échanges économiques montre que nombre d'entre eux continuent d'être inscrits dans des comportements culturels qu'aucune stratégie commerciale ne peut ignorer, sous peine de se heurter à des obstacles qui restent incompréhensibles à la seule logique marchande.

L'intégration de cette dimension culturelle dans la définition d'une stratégie commerciale doit certes conduire les entreprises françaises à s'adapter aux caractéristiques spécifiques des marchés nationaux auxquels elles s'adressent. Mais elle permet également de prendre conscience des atouts considérables que constituent pour nos exportations la langue française et la francophonie.

* 2 L'utilité économique et commerciale de la langue française - Conseil économique et social -30 mai 1989.

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