B. ASSURER LA COHÉRENCE DES STRATÉGIES DE RECHERCHE DÉFINIES AUX DIFFÉRENTS ÉCHELONS ET FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT DE SYNERGIES
1. Les préoccupations du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie rejoignent celles de votre commission
Depuis plusieurs années, votre commission des affaires culturelles attire l'attention du ministère de la recherche sur l'impérieuse nécessité de contrôler l'articulation des décisions arrêtées à l'échelon local, national et communautaire et de veiller à la cohérence du dispositif d'ensemble.
Dans son rapport annuel sur l'évaluation de la politique nationale de recherche et de développement technologique, remis en septembre 1995, le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie (CSRT) formule des recommandations qui rejoignent les préoccupations de votre commission.
« Le CSRT, considérant comme prioritaire la promotion de l'ensemble des dialogues et des actions qu'entretiennent les trois grands niveaux de la recherche (l'Union européenne, la nation et les régions), estime que l'État doit assumer un rôle de fond et d'intégration des équilibres nationaux tout au long des processus d'intégration européenne et de décentralisation régionale ».
Il suggère à cet effet de « construire un partenariat basé sur un contrat d'objectifs qui encadrerait l'ensemble des dialogues et des actions qu'entretiennent les trois grands niveaux de la recherche » et souligne « qu 'il s'agit-là d'un sujet de réflexion prioritaire ».
Aucune disposition n'a toujours été prise en ce sens. Votre commission ne peut donc que réitérer une nouvelle fois ce souhait, en y ajoutant celui d'une meilleure connaissance de l'importance et de l'utilisation des fonds collectés au titre du mécénat.
2. Encourager les synergies en favorisant une répartition harmonieuse du potentiel national de recherche sur l'ensemble du territoire
La recherche française souffre toujours d'une concentration excessive de son potentiel de recherche, public et privé, dans la région parisienne.
En 1992, la région Île-de-France, qui rassemble 18% de la population nationale, concentrait 40,7 % des effectifs de chercheurs et 44,4 % des personnels de la recherche publique. Pour les chercheurs, cette moyenne masque des situations contrastées : si 26,3 % des enseignants-chercheurs travaillent en région parisienne, cette proportion atteint 49,9 % pour les chercheurs du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), 44,9 % pour les autres établissements publics à caractère scientifique et technique, et 45,4 % pour les chercheurs des établissements publics à caractère industriel et commercial.
Dans ce contexte, les différents comités interministériels pour l'aménagement du territoire (CIAT) qui se sont réunis entre 1992 et 1994 ont prévu la relocalisation en province, à l'horizon de l'an 2000, de 3.600 personnels de recherche des organismes publics.
L'on doit se féliciter de la célérité qui préside à la mise en oeuvre de ces décisions. Dès la fin de 1994, près de 1.500 emplois avaient été déployés vers des opérations de recherche en région, dont 40 % par mobilité géographique de personnels et 60 % par redéploiement d'emplois vacants ou affectation d'emplois créés.
Cet effort sera poursuivi en 1996. La localisation des nouveaux emplois transférés viendra consolider les axes thématiques de recherche identifiés dans les schémas régionaux de l'enseignement supérieur et de la recherche qui seront élaborés l'an prochain.
Votre commission souligne toutefois que lorsque ces redéploiements s'effectuent par mobilité géographique des personnels, la gestion des dossiers par l'administration se révèle d'une extrême complexité, qui contribue à ralentir et pourrait même aboutir à compromettre dans certains cas des projets d'implantation de laboratoires en province.
Votre rapporteur rappelle par ailleurs la nécessité d'inciter fortement la recherche privée à amorcer une évolution comparable. En 1991, 55 % des dépenses de recherche et développement industriels réalisées en France l'étaient dans la région parisienne, les entreprises implantées dans le département des Hauts-de-Seine assurant à elles-seules 27 % de ce total, soit trois fois plus que leurs consoeurs de la région Rhône-Alpes, la deuxième au classement.
Un premier pas a été franchi en ce sens à l'initiative de votre rapporteur, qui a proposé au Sénat d'introduire une modulation des dépenses de fonctionnement éligibles au crédit d'impôt-recherche, selon que l'entreprise est située dans les territoires ruraux de développement prioritaire et les zones d'aménagement du territoire (ces dépenses sont calculées forfaitairement au taux de 100 % des dépenses de personnels relatives à la rémunération des chercheurs et des techniciens de recherche) ou qu'elle exerce tout ou partie de son activité en région parisienne (elles sont alors évaluées à 65 % des mêmes dépenses de personnel).