Avis n° 78 (1995-1996) de M. Pierre LAFFITTE , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 30 novembre 1995

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N° 78

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1995.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 1996, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VIII

RECHERCHE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE

Par M. Pierre LAFFITTE, Sénateur.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (l0ème législ.) ; 2222, 2270 à 2275 et T.A. 413.

Sénat : 76 et 77 (annexe n°18) (1995-1996).

Lois de finances.

(1) (1) Cette commission est composée de MM Adrien Gouteyron , président; Pierre Laffitte,Albert Vecten, Jean Delaneau, Jean-Louis Carrère, vice-présidents; André Egu, Alain Dufaut, André Maman, Ivan Renar, secrétaires ; François Autain, Honoré Bailet, Jean Bernadaux, Jean Bernard, James Bordas, Jean-Pierre Camoin, Jean-Claude Carle, Robert Castaing, Marcel Charmant, Philippe Darniche, Marcel Daunay, André Diligent, Ambroise Dupont, Daniel Eckenspieller, Alain Gérard, Jean-Paul Hugot, Pierre Jeambrun, Alain Joyandet, Philippe Labeyrie, Pierre Lacour, Henri Le Breton, Jacques Legendre, Guy Lemaire, François Lesein, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin, François Matthieu, Philippe Nachbar, Sosefo Makapé Papilio,MichelPelchat, Jean-Marie Poirier, Guy Poirieux, Mme Danièle Pourtaud. MM.Roger Quilliot,Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, Claude Saunier, Franck Sérusclat, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Marcel Videl, Henri Weber.

Mesdames, Messieurs,

Le budget civil de recherche et développement (BCRD), qui retrace l'ensemble des crédits affectés par l'État à la recherche civile, atteindra 53,092 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement en 1996, en progression de 1,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1995.

Sur ce total, les crédits inscrits au budget du ministère de la recherche représenteront 28,857 milliards de francs, en augmentation de 4,91 %.

En dépit de cette progression apparente, le budget de la recherche pour 1996 apparaît fondamentalement comme un budget de rigueur.

Il tend, pour l'essentiel, à restaurer les capacités de paiement des grands établissements publics de recherche et à accroître les capacités d'intervention du Fonds de la recherche et de la technologie.

Votre rapporteur ne peut que se féliciter de ces priorités. On se souvient en effet que les organismes de recherche ont souffert dans le passé de l'écart croissant observé entre les autorisations de programme ouvertes en loi de finances et leur couverture effective par des crédits de paiement. L'assainissement de leur situation financière, engagée en mars 1993, devrait leur permettre de recouvrer progressivement une marge réelle d'engagement.

La progression des crédits du Fonds de la recherche technologique, sur laquelle votre rapporteur reviendra dans le cadre du présent avis, répond par ailleurs à une demande récurrente de votre commission des affaires culturelles.

Laissant à la commission des finances et à la commission des affaires économiques et du plan le soin d'analyser plus en détail les orientations du budget civil de recherche et développement pour 1996, votre rapporteur a choisi d'ordonner sa réflexion autour de six préoccupations essentielles. La première est dictée, en période de restriction budgétaire, par la nécessité de favoriser le meilleur emploi des crédits disponibles, en orientant systématiquement ces moyens vers les équipes les plus performantes. La quête de l'excellence est au prix de cette exigence.

La seconde en appelle à une participation accrue des personnels de recherche au plan d'urgence pour les universités.

La troisième souligne la nécessité de mieux coordonner les politiques de recherche définies respectivement à l'échelon national, local et communautaire et d'assurer une meilleure transparence et information des évolutions et des besoins recensés en la matière.

La quatrième est relative aux autoroutes de l'information et à leur contenu.

La cinquième, commandée par la volonté d'accroître la compétitivité des entreprises françaises et de favoriser la création d'emplois, insiste une nouvelle fois sur la nécessité de favoriser le transfert de technologies vers le tissu industriel et le développement des entreprises innovantes grâce à la mise en place de structures financières adaptées à leurs spécificités.

La sixième tend, enfin, par la présentation d'un amendement, à surmonter au sein d'organismes scientifiques créés en exécution d'engagements internationaux l'obstacle que constitue pour le recrutement de chercheurs, l'interdiction posée par le code du travail de conclure des contrats à durée déterminée pour une période excédant dix-huit mois.

I. FAVORISER L'EXCELLENCE : UN IMPÉRATIF EN PÉRIODE DE RIGUEUR BUDGÉTAIRE

La quête de l'excellence ne saurait se satisfaire d'une répartition équilibrée des concours de l'État entre tous les laboratoires de recherche, et d'une reconduction quasi automatique des moyens affectés à leur fonctionnement.

Cette évidence ne saurait être contestée, particulièrement en période d'austérité budgétaire.

Il importe dans le même temps que soient sensiblement accrus les crédits incitatifs qui, en raison de leur effet multiplicateur, permettent au ministère d'orienter de manière efficace l'effort de recherche national.

A. ORIENTER SYSTÉMATIQUEMENT LES MOYENS VERS LES ÉQUIPES OU LES PROGRAMMES LES PLUS PERFORMANTS

La mise en oeuvre d'une telle politique suppose d'une part que soit généralisée l'évaluation des acteurs et des programmes de recherche, et d'autre part que le redéploiement des moyens publics puisse atteindre une masse critique.

1. Généraliser l'évaluation des équipes et des programmes

Un consensus s'est aujourd'hui formé autour de la nécessité de procéder systématiquement à l'évaluation des différents acteurs, opérateurs ou procédures de recherche. Cette évaluation sert de fondement à toute évolution ou adaptation du potentiel national de recherche et de développement.


• Des progrès notables ont été accomplis dans l'évaluation des programmes, des procédures et des structures de recherche au cours des dernières années. Constitué en 1989, le Comité national d'évaluation de la recherche a rendu ses premières conclusions en 1992, après avoir élaboré une méthodologie d'analyse adaptée aux spécificités de l'évaluation des opérateurs des programmes de recherche.

Un premier train d'évaluations a porté sur l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), l'Institut national des sciences de l'univers, le Centre scientifique et technique du bâtiment, la structure des groupements d'intérêt public (GIP), ainsi que sur trois programmes nationaux de recherche (spatial, essor des biotechnologies, « homme, travail et technologies »). A la fin de l'année 1994, le Comité national d'évaluation de la recherche rendait ses conclusions sur l'Institut français de recherche scientifique pour le développement en coopération (ORSTOM). Une évaluation des programmes de recherche sur les matériaux et la structure des centres régionaux d'innovation et de transfert de technologies est en cours.

Un audit du Comité national de la recherche scientifique et technique du Centre national de la recherche scientifique a par ailleurs été effectué. Ses conclusions, publiées en septembre 1995, font état de certains dysfonctionnements et suggèrent un certain nombre de réformes.

Le Comité national d'évaluation de la recherche remet par ailleurs un rapport annuel au Président de la République, où sont consignées ses réflexions sur l'appareil national de recherche et de développement technologique.

Les travaux de ce comité, complétés par l'évolution des indicateurs quantitatifs élaborés par l'Observatoire des sciences et des techniques institué en 1990, permettent désormais aux pouvoirs publics de disposer des éléments d'appréciation du potentiel national de recherche et de ses différentes composantes sur lesquels peut reposer la définition des orientations d'une politique de recherche cohérente.

C'est la raison pour laquelle il est particulièrement regrettable que ces évaluations ne soient généralement pas suivies de décisions tendant à remédier aux lacunes ou aux imperfections mises en lumière par les évaluateurs.


L'évaluation des chercheurs et des laboratoires repose, dans les établissements publics de recherche, sur l'avis de conseils scientifiques ou de commissions spécialisées.

L'évaluation des hommes par leurs pairs est, pour l'essentiel, fondée sur des critères qui tendent à apprécier la notoriété scientifique du chercheur (nombre de publications faites dans des revues primaires dotées d'un comité de lecture, citations à l'index, participation à des colloques, invitation à l'étranger ...).

Pour l'appréciation des unités de recherche prévalent le plus souvent des critères tirés de la qualité des membres du laboratoire, du nombre de chercheurs invités dans des universités ou des centres de recherche à l'étranger, de l'attrait exercé par l'unité sur des professeurs et des chercheurs étrangers.

S'ils permettent de rendre compte de la contribution des chercheurs et des laboratoires publics aux progrès de la recherche fondamentale, force est de constater que ces critères ne contribuent pas à inciter la recherche publique à s'ouvrir vers l'extérieur, à tisser des liens avec le monde de l'industrie et à favoriser les transferts de technologies.

Il importe, qu'à côté des critères traditionnels d'évaluation des chercheurs et des unités de recherche, une plus grande considération soit accordée aux indicateurs suivants : participation au transfert de technologies, importance des brevets déposés, concessions de licence, mobilité des chercheurs vers l'industrie ou l'enseignement supérieur.

Ainsi seraient jetées les bases d'un décloisonnement du potentiel de recherche national, dont le repli sur soi nuit dangereusement à la valorisation industrielle des résultats de la recherche, et par conséquent à la compétitivité des entreprises françaises et à l'emploi.

Votre rapporteur rappelle par ailleurs le souhait, exprimé à plusieurs reprises par la commission des affaires culturelles, que soit organisé un événement annuel permettant d'associer les personnalités du monde de la recherche, de l'économie et de la politique à la présentation de l'état de l'art et de la position internationale de la France en matière scientifique et technologique, ainsi que des retombées économiques, culturelles et sociales induites.

Inspiré du modèle suédois, où l'Académie des sciences de l'ingénieur célèbre chaque année le progrès des sciences et des techniques en réunissant les forces vives du pays, cet événement pourrait être organisé par un comité ad hoc associant l'Académie des sciences et son comité d'application, la commission de la recherche du CNPF, les ministères chargés de la recherche, de l'industrie et des petites et moyennes entreprises, et l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

2. Quelle stratégie de redéploiement ?

La fonction recherche nécessite une vigilance accrue de la part des pouvoirs publics.

L'excellence des équipes constitue la justification essentielle de l'effort financier consenti par l'État. La recherche, qu'elle soit fondamentale, technologique ou industrielle, ne se conçoit que si elle est de bon niveau et efficace. Les bonnes équipes doivent être aidées. Les équipes dont les résultats sont moins performants doivent être reconverties et leur personnel affecté soit au renforcement d'équipes très performantes, soit à d'autres actions dont la finalité est liée à la modernisation de la société, à l'enseignement technologique ou scientifique, à la diffusion de la culture scientifique, au transfert de compétences vers les PME, c'est-à-dire à l'ensemble des fonctions qui revêtent un caractère stratégique pour l'avenir de la nation.

Le redéploiement des postes et des moyens budgétaires doit être systématique et important. Il ne constitue en aucun cas une sanction, mais traduit une volonté politique et permet d'ailleurs de donner de nouvelles chances aux équipes et aux individus.

Votre rapporteur estime que pour atteindre un effet critique, le redéploiement des postes et des moyens budgétaires vers les laboratoires les mieux cotés devrait atteindre, au sein de chaque établissement public de recherche, 10 % du budget qui leur est affecté.

La contractualisation des relations entre l'État et les grands organismes de recherche, engagée à la fin de 1' année 1994, devrait par ailleurs contribuer à accroître la capacité d'orientation de la recherche par les pouvoirs publics. Dans un premier temps, cette politique a été mise en oeuvre avec le Commissariat à l'énergie atomique (CEA), l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA), l'Agence pour le développement de la maîtrise de l'énergie (ADEME), et le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD). De nouvelles conventions doivent être signées au cours des deux prochaines années.

Il serait souhaitable que des clauses prévoyant la participation des chercheurs au plan d'urgence universitaire puissent être introduites dans les nouvelles conventions, et viennent compléter, par la signature d'avenants, les contrats d'objectifs déjà signés.

B. ACCROÎTRE LES CRÉDITS INCITATIFS

1. Un premier pas vers la restauration des capacités d'engagement du Fonds de la recherche et de la technologie (FRT)

Le Fonds de la recherche et de la technologie constitue l'outil privilégié du ministère pour orienter la recherche fondamentale et soutenir la recherche industrielle finalisée ou la recherche technologique de base. Ce fonds a pris le relais des programmes d'actions concertées définis par la Délégation générale à la recherche scientifique et technique.


• Situé à l'interface entre les organismes publics de recherche et les laboratoires universitaires d'une part, les entreprises d'autre part, le FRT joue le rôle d'un catalyseur au service de la valorisation de la recherche.

Il permet de susciter les partenariats publics et privés à l'échelon local (transfert de technologies vers le tissu des PME-PMI), national (appels d'offres ciblés, grands programmes, sauts technologiques) ou européen (Eurêka).

Dans un dispositif de recherche marqué par une forte individualisation des opérateurs, une certaine rigidité des structures et une grande variété des « cultures d'entreprise », la vocation première du FRT est donc d'inciter différents acteurs qui ne le feraient pas spontanément à travailler ensemble sur des projets déterminés.

Enfin, le FRT, par son effet de levier, permet à l'État d'orienter les recherches vers des besoins nouveaux. Il a notamment joué un rôle essentiel dans le lancement du programme de recherche pluridisciplinaire de lutte contre le SIDA, et a permis une importante mobilisation de la communauté scientifique autour de l'établissement de la cartographie du génome humain.

On notera, pour le regretter, que la mutation majeure induite par l'entrée de la société dans celle de l'information n'a été préparée ni par le FRT ni par les organismes de recherche pilotés par le ministère, à l'exception notable de l'INRIA (Institut national de recherche en informatique et automatisme) dont les moyens restent cependant trop modestes. Il est étonnant et critiquable que cette priorité essentielle de la recherche n'ait pas été perçue par les pouvoirs publics.


Depuis 1994, le FRT se trouve dans une situation financière critique, dont l'origine peut être imputée à la couverture insuffisante des autorisations de programme ouvertes sur ce chapitre entre 1990 et 1993 par des crédits de paiement. A la fin de l'année 1994, les encours exigibles atteignaient 970 millions de francs...

Un effort important a été accompli en 1995 pour assainir les finances du FRT. Les crédits de paiement inscrits en loi de finances initiale ont atteint 774,5 millions de francs, tandis que les autorisations de programme ont été ramenées à 399 millions de francs 1 ( * ) .

Cet effort de redressement sera poursuivi en 1996 : la dotation du FRT inscrite dans le projet de loi de finances atteint 800 millions de francs en crédits de paiement, tandis qu'est réamorcée une augmentation significative des autorisations de programme (525 millions de francs).

Toutefois, cette progression des crédits du FRT ne permettra pas au ministre d'exercer un véritable pouvoir d'orientation de la recherche nationale.

Le volume des crédits incitatifs inscrits au FRT reste en effet notablement insuffisant pour satisfaire cet objectif. Votre rapporteur estime qu'il conviendrait que les dotations du FRT représentent 5 % des crédits de la recherche publique pour que la capacité d'orientation du ministre dépasse le stade des intentions. Il ne peut que constater qu'aucune volonté de redéployer les moyens des organismes publics de recherche vers le FRT n'a encore été affichée.

C'est l'objectif vers lequel il convient de tendre au cours des prochaines années, ainsi que le réclame votre commission depuis plusieurs années.

2. La reconduction du crédit d'impôt-recherche

Institué en 1982, et reconduit à plusieurs reprises, le crédit d'impôt-recherche tend à encourager le développement de l'effort de recherche scientifique et technique des entreprises par l'octroi d'un avantage fiscal. H permet de déduire de l'impôt sur les sociétés ou de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises (ou, pour les entreprises déficitaires, d'obtenir que leur soient restituées) les sommes correspondant à 50 % de l'accroissement en volume de l'effort de recherche et de développement de l'année en cours par rapport à la moyenne des deux années précédentes.


• Huit types de dépenses sont éligibles au crédit d'impôt-recherche :

*les dotations aux amortissements des immobilisations affectées à la recherche et au développement ;

*les salaires des ingénieurs et des techniciens de recherche. L'examen de la ventilation des dépenses de recherche et développement déclarées confirme que le crédit d'impôt-recherche constitue une forte incitation en faveur de l'embauche de chercheurs et de techniciens : les frais de personnel représentent à eux seuls près de 43 % des dépenses de recherche déclarées ;

*les frais de fonctionnement, évalués de façon forfaitaire en proportion de ces salaires. Toutefois, à compter de l'exercice 1995, la prise en compte des dépenses de fonctionnement a été modulée afin de favoriser une répartition plus harmonieuse du potentiel de recherche privé sur le territoire national. Elle porte sur :

- 100 % des dépenses de personnel qui se rapportent aux chercheurs et techniciens de recherche affectés exclusivement dans les territoires ruraux de développement prioritaire et les zones d'aménagement du territoire ;

- 65 % des dépenses de personnel qui se rapportent aux chercheurs et techniciens de recherche qui exercent tout ou partie de leur activité dans la région Île-de-France ;

- 75 % des dépenses de personnel, dans les autres cas ;

*la sous-traitance de recherche effectuée par des organismes agréés. Entre 1990 et 1993, les dépenses de recherche et développement sous-traité par les entreprises ont ainsi progressé de 14 % ;

*les frais de dépôts et de maintenance des brevets ;

* les dotations aux amortissements des brevets acquis en vue de la recherche ;

* certaines dépenses de normalisation ;

*les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections exposées par les entreprises individuelles du secteur textile.

Le montant du crédit d'impôt recherche est enfin plafonné à 40 millions de francs par entreprise et par an.

L'article 56 du projet de loi de finances pour 1996 prévoit la reconduction du crédit d'impôt-recherche jusqu'en 1998.

Votre rapporteur ne peut que s'en féliciter, de même qu'il se félicite de la modulation territoriale des dépenses de fonctionnement prises en compte dans le calcul du crédit d'impôt-recherche introduite l'an passé. Ce mécanisme incitatif contribue efficacement à sensibiliser les entreprises françaises à la recherche et au développement. L'enquête annuelle recherche-développement dénombre 1.300 entreprises environ, représentant près de 10 % des dépenses de recherche des entreprises (8 milliards de francs en 1992), pour lesquelles le crédit d'impôt-recherche a été le premier révélateur de leur engagement dans une activité de recherche et de développement. Elles réalisent désormais une activité de recherche permanente et contribuent ainsi à la transformation de la structure de recherche du système français.

Ce dispositif constitue par ailleurs un puissant facteur de diffusion des compétences scientifiques dans le tissu industriel en favorisant l'embauche de chercheurs ou d'ingénieurs. Il bénéficie enfin dans des proportions importantes aux petites et moyennes entreprises : les PMI-PME employant de 20 à 500 personnes en sont les premières bénéficiaires. Réalisant 27,9 % des dépenses de recherche et développement déclarées, elles jouissent de 46,5 % des dépenses fiscales correspondant au crédit d'impôt-recherche. A l'inverse, les grandes entreprises qui déclarent 67,4 % des dépenses de recherche, entrent pour 36,6 % dans le total du crédit d'impôt.

En 1994, 8.720 entreprises ont souscrit une déclaration de crédit d'impôt au titre de l'année 1993 et 5.234 parmi celles-ci ont déclaré un crédit positif pour un montant cumulé de 3.532 millions de francs.

En se fondant sur les premières déclarations transmises au cours du 1er semestre 1995, le montant des crédits d'impôt relatifs aux dépenses exécutées en 1994 est évalué à 3.600 millions de francs.

II. FAIRE PARTICIPER LES CHERCHEURS AU PLAN D'URGENCE UNIVERSITAIRE

Votre rapporteur souligne depuis des années l'anomalie que constitue l'insuffisance des dépenses de recherche affectées au système éducatif. Les grands organismes dotés de chercheurs à plein temps et à vie ont pris dans notre pays un poids excessif. La transformation du statut des chercheurs de certains organismes publics, et en particulier des chercheurs du CNRS, en statut de fonctionnaire poursuivait l'objectif de faciliter le passage vers les universités. Des postes d'accueil dans les universités pour ces chercheurs ont été créés, mais n'ont pas été pourvus.

La fonction recherche, et ceci indépendamment du statut du chercheur ou de l'organisme qui l'emploie, est pourtant intrinsèquement liée aux fonctions d'enseignement, de transfert des compétences et de diffusion du savoir.

Dès lors que la nation se trouve confrontée à une situation dans laquelle le système universitaire rencontre des difficultés à faire face à un afflux d'étudiants, qui restent trop peu encadrés, il faut, à l'évidence, adopter des mesures appropriées. Ces mesures peuvent être de diverses natures :

- octroi de moyens financiers supplémentaires pour recruter du personnel enseignant ;

- appel à des personnels enseignants agrégés de l'enseignement secondaire ;

- recours à des personnels de recherche du système industriel ou à des retraités compétents ;

- appel à des personnels de recherche issus du système de recherche public, et tout particulièrement à ceux d'entre eux qui bénéficient du statut de fonctionnaire.

Il semble très souhaitable en ce qui concerne ce dernier élément de profiter de la structure gouvernementale actuelle, qui réunit au sein d'un même portefeuille ministériel les compétences relatives à l'enseignement supérieur et à la recherche, pour que des changements temporaires d'affectation puissent être effectués au sein de ce grand ministère.

Bien entendu, il appartient aux présidents d'université et aux responsables d'instituts de recherche de recenser dans chaque site universitaire les postes nécessaires, et de définir les périodes d'affectation et les conditions d'emploi et de poursuite des activités de recherche.

Il importe par ailleurs d'adresser aux instances d'évaluation des personnels de recherche des directives précises afin que les personnels affectés pour un temps à des fonctions mixtes enseignement-recherche ne soient pas défavorisés, mais que cette expérience soit au contraire valorisée.

De même, il est souhaitable que ceux des personnels de recherche qui voudraient être intégrés au système universitaire, s'ils s'y sont adaptés, puissent l'être au niveau de leurs compétences.

Bien entendu lorsque les besoins en personnel enseignant et les disponibilités des personnels de recherche ne correspondent pas à une même localisation géographique, des indemnités d'accompagnement doivent être prévues ; il convient également de chercher à aplanir les difficultés administratives et pratiques (travail du conjoint, inscriptions dans les écoles et les cantines, etc.) que sont susceptibles de rencontrer les éventuels candidats.

III. COORDONNER LES STRATÉGIES DE RECHERCHE DÉFINIES À L'ÉCHELON LOCAL, NATIONAL ET COMMUNAUTAIRE

Au cours des années quatre-vingt, les collectivités territoriales d'un coté, l'Union européenne de l'autre, ont pris une part croissante dans la définition et le financement d'actions de recherche et de développement.

Cette évolution, dont on doit se féliciter, implique néanmoins que le ministère de la recherche s'attache à mieux connaître la réalité et les orientations de l'effort de recherche consenti à ces différents échelons, et qu'il s'emploie à assurer leur cohérence et à favoriser les synergies.

La contribution de l'Union européenne à la recherche française est clairement identifiée, puisqu'elle ressortit pour l'essentiel au programme-cadre de recherche et de développement conclu pour une durée pluriannuelle.

L'implication des entreprises et des laboratoires de recherche français dans les projets soutenus par le programme Eurêka mérite une mention particulière. Ces programmes, dont l'efficacité est remarquable, émanent des entreprises et des équipes de recherche. Ils sont labellisés et aidés par les Gouvernements. Leurs résultats sont immédiatement transférés vers l'économie.

A. LA CONTRIBUTION DES COLLECTIVITÉS LOCALES À L'EFFORT NATIONAL DE RECHERCHE

1. L'effort financier consenti par les régions est relativement bien identifié

Les régions jouent désormais un rôle éminent en matière de recherche et de développement.

Entre 1981 et 1991, leur effort budgétaire en faveur de la recherche a quasiment décuplé en francs courants, passant de 127,70 millions de francs à 1.170 millions de francs.

Après avoir légèrement fléchi au cours des deux années suivantes, les sommes affectées par les régions à la recherche ont repris leur croissance en 1994. Entre 1993 et 1994, la progression atteindrait 8,4 % en francs constants. Cette reprise serait confirmée en 1995 si l'on en juge l'évolution des budgets de recherche des treize régions métropolitaines pour lesquelles le ministère de la recherche dispose aujourd'hui des informations correspondantes (pour celles-ci l'augmentation atteint près de 15 % en volume).

Le tableau ci-après retrace l'évolution des budgets de recherche des régions, de leur part dans le budget régional et de l'effort régional de recherche rapporté à la population entre 1994 et 1995.

LE BUDGET RECHERCHE DES RÉGIONS EN 1994 ET 1995

2. La participation financière des départements et des communes : un recensement qui s'impose

Depuis plusieurs années, les questions adressées par votre rapporteur au ministère de la recherche concernant l'apport financier des collectivités locales à l'effort national de recherche sont laissées sans réponse.

Interrogé sur ce point par votre rapporteur lors de son audition par la commission des affaires culturelles le 26 octobre dernier, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, M. François Bayrou, a invoqué les difficultés statistiques qui s'opposaient à la comptabilisation de l'effort de recherche des collectivités locales, en raison du périmètre variable de l'agrégat de recherche retenu par les communes et les départements.

Le ministre a notamment indiqué que certains départements faisaient entrer dans cette définition les dépenses exposées par les technopôles, même lorsque celles-ci n'avaient qu'un rapport très lointain avec la recherche et le développement technologique.

Il a cependant estimé que la contribution des collectivités locales au fonctionnement des laboratoires de recherche s'établissait globalement entre 300 et 500 millions de francs par an, et qu'en termes d'investissement cet effort atteignait 2,5 à 3 milliards de francs dès lors qu'on y incluait les technopôles.

Votre rapporteur incline à penser que ces évaluations, hors technopôles, sont largement sous-évaluées, si l'on tient compte des investissements immobiliers consentis en faveur des organismes de recherche.

C'est la raison pour laquelle il importe, afin d'avoir une vision enfin claire et précise de l'effort de recherche consenti par les communes et les départements, que le ministère de la recherche invite les préfets à procéder au recensement de cet effort, selon une grille de critères établie préalablement par ses services, afin de prévenir toute contestation ultérieure des résultats obtenus.

Il conviendrait également de tenir compte des financements consentis par les assemblées consulaires.

3. Le mécénat, sa répartition géographique et le contrôle des fonds

Les fonds recueillis, en particulier pour la recherche médicale, sont très importants, mais restent mal connus. Dans certains cas, leur utilisation semble poser problème. On peut notamment regretter leur très forte concentration dans la région parisienne.

Les avantages fiscaux consentis aux donateurs justifieraient pourtant que les fonds drainés par le mécénat soient mieux appréciés, connus et orientés.

B. ASSURER LA COHÉRENCE DES STRATÉGIES DE RECHERCHE DÉFINIES AUX DIFFÉRENTS ÉCHELONS ET FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT DE SYNERGIES

1. Les préoccupations du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie rejoignent celles de votre commission

Depuis plusieurs années, votre commission des affaires culturelles attire l'attention du ministère de la recherche sur l'impérieuse nécessité de contrôler l'articulation des décisions arrêtées à l'échelon local, national et communautaire et de veiller à la cohérence du dispositif d'ensemble.

Dans son rapport annuel sur l'évaluation de la politique nationale de recherche et de développement technologique, remis en septembre 1995, le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie (CSRT) formule des recommandations qui rejoignent les préoccupations de votre commission.

« Le CSRT, considérant comme prioritaire la promotion de l'ensemble des dialogues et des actions qu'entretiennent les trois grands niveaux de la recherche (l'Union européenne, la nation et les régions), estime que l'État doit assumer un rôle de fond et d'intégration des équilibres nationaux tout au long des processus d'intégration européenne et de décentralisation régionale ».

Il suggère à cet effet de « construire un partenariat basé sur un contrat d'objectifs qui encadrerait l'ensemble des dialogues et des actions qu'entretiennent les trois grands niveaux de la recherche » et souligne « qu 'il s'agit-là d'un sujet de réflexion prioritaire ».

Aucune disposition n'a toujours été prise en ce sens. Votre commission ne peut donc que réitérer une nouvelle fois ce souhait, en y ajoutant celui d'une meilleure connaissance de l'importance et de l'utilisation des fonds collectés au titre du mécénat.

2. Encourager les synergies en favorisant une répartition harmonieuse du potentiel national de recherche sur l'ensemble du territoire

La recherche française souffre toujours d'une concentration excessive de son potentiel de recherche, public et privé, dans la région parisienne.

En 1992, la région Île-de-France, qui rassemble 18% de la population nationale, concentrait 40,7 % des effectifs de chercheurs et 44,4 % des personnels de la recherche publique. Pour les chercheurs, cette moyenne masque des situations contrastées : si 26,3 % des enseignants-chercheurs travaillent en région parisienne, cette proportion atteint 49,9 % pour les chercheurs du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), 44,9 % pour les autres établissements publics à caractère scientifique et technique, et 45,4 % pour les chercheurs des établissements publics à caractère industriel et commercial.

Dans ce contexte, les différents comités interministériels pour l'aménagement du territoire (CIAT) qui se sont réunis entre 1992 et 1994 ont prévu la relocalisation en province, à l'horizon de l'an 2000, de 3.600 personnels de recherche des organismes publics.

L'on doit se féliciter de la célérité qui préside à la mise en oeuvre de ces décisions. Dès la fin de 1994, près de 1.500 emplois avaient été déployés vers des opérations de recherche en région, dont 40 % par mobilité géographique de personnels et 60 % par redéploiement d'emplois vacants ou affectation d'emplois créés.

Cet effort sera poursuivi en 1996. La localisation des nouveaux emplois transférés viendra consolider les axes thématiques de recherche identifiés dans les schémas régionaux de l'enseignement supérieur et de la recherche qui seront élaborés l'an prochain.

Votre commission souligne toutefois que lorsque ces redéploiements s'effectuent par mobilité géographique des personnels, la gestion des dossiers par l'administration se révèle d'une extrême complexité, qui contribue à ralentir et pourrait même aboutir à compromettre dans certains cas des projets d'implantation de laboratoires en province.

Votre rapporteur rappelle par ailleurs la nécessité d'inciter fortement la recherche privée à amorcer une évolution comparable. En 1991, 55 % des dépenses de recherche et développement industriels réalisées en France l'étaient dans la région parisienne, les entreprises implantées dans le département des Hauts-de-Seine assurant à elles-seules 27 % de ce total, soit trois fois plus que leurs consoeurs de la région Rhône-Alpes, la deuxième au classement.

Un premier pas a été franchi en ce sens à l'initiative de votre rapporteur, qui a proposé au Sénat d'introduire une modulation des dépenses de fonctionnement éligibles au crédit d'impôt-recherche, selon que l'entreprise est située dans les territoires ruraux de développement prioritaire et les zones d'aménagement du territoire (ces dépenses sont calculées forfaitairement au taux de 100 % des dépenses de personnels relatives à la rémunération des chercheurs et des techniciens de recherche) ou qu'elle exerce tout ou partie de son activité en région parisienne (elles sont alors évaluées à 65 % des mêmes dépenses de personnel).

IV. L'ENTRÉE DANS LA SOCIÉTÉ DE L'INFORMATION

Un exemple démontre le danger que représente la rigidité des structures de recherche en France : c'est l'absence de réaction des pouvoirs publics, des organismes de recherche et partiellement du système universitaire face à la grande mutation économique, culturelle et sociale de notre temps symbolisée par la thématique « autoroutes de l'information » à laquelle nous préférons la terminologie « société de l'information » plus générale et plus exacte.

« Electronic Highways », c'est le thème que le vice-président des États-Unis, M. Al Gore, a mis à l'honneur. C'est le thème qui sous-tend les grandes stratégies industrielles aux États-Unis, et qui intéresse les milieux les plus variés. Au départ, ceci concerne la télévision, les câblo-opérateurs, les opérateurs de Telecom, l'industrie informatique, les industriels du logiciel.

Par la suite, compte tenu des effets induits, toute la société est impliquée : les milieux médicaux (et les malades) à cause de la télémédecine, les milieux enseignants et les élèves par suite du développement du téléenseignement, le grand public en raison des potentialités -et des réalités-offertes en termes de formation professionnelle continue, du choix des lieux de vacances ou de tourisme par télématique, de développement de centres de télétravail, de téléservices, etc.

Dans le monde de la recherche, cette révolution concerne au premier chef le CNET et l'INRIA. Or ceux-ci n'ont pas bénéficié du doublement ou du triplement de leurs crédits qui serait à court terme indispensable. Certains autres organismes ont ouvert des cellules de recherche et de réflexion, mais qui restent généralement sous-dimentionnées au regard des besoins.

Ainsi le CNRS, les universités et les grandes écoles devraient semble-t-il. reconvertir d'urgence des équipes de recherche en sciences humaines, économiques et sociales vers l'analyse des effets et l'évaluation des multiples projets, programmes, services télématiques, et nouvelles pratiques qui se mettent en place.

L'industrie privée, grande ou petite, est beaucoup plus réactive -heureusement. Mais il semble là que le monde de la recherche n'ait pas compris le sens de l'impulsion donnée par le Gouvernement dans le cadre de l'appel à propositions pour les inforoutes, par la Commission de Bruxelles avec ses divers programmes spécialisés (dont les conditions de sélection restent toujours aussi lourdes et mystérieuses).

Cet exemple est typique de l'inertie constatée dans un secteur qui devrait pourtant être à l'affût de l'innovation.

V. ACCENTUER LES TRANSFERTS DE TECHNOLOGIES VERS LES ENTREPRISES INNOVANTES

A. UN ENJEU FONDAMENTAL EN TERMES DE COMPÉTITIVITÉ ET D'EMPLOI

Comme le souligne un récent rapport de l'OCDE, l'investissement constituera, dans 1'« économie de la connaissance » vers laquelle nous évoluons, plus encore qu'aujourd'hui, le facteur-clé de la croissance. Toutefois, cette croissance ne pourra être créatrice d'emplois qu'à la condition qu'une part importante de cet investissement soit orientée vers l'innovation.

La persistance d'un fort taux de chômage en France, sensiblement plus élevé que celui dont souffrent les autres pays industrialisés, doit être rapprochée de la faible capacité de notre dispositif économique à assurer le transfert de technologies vers le tissu industriel.

L'aptitude d'une économie à valoriser les résultats de la recherche scientifique détermine aujourd'hui sa compétitivité sur le marché mondial, et par conséquent son niveau d'emploi.

Or, la France souffre en la matière d'un réel handicap. Un article publié dans Le Monde du 8 septembre dernier rapporte que l'Institut international du développement du management de Lausanne a attribué à la France le 17e rang mondial en termes de valorisation de la recherche, alors que l'ensemble des évaluations convergent pour reconnaître l'importance de l'effort de recherche français (4e rang mondial) et la qualité de sa composante académique.

En dépit des progrès réels observés au cours de la dernière décennie, les PME-PMI françaises restent encore trop souvent en marge des évolutions technologiques.

De fait, il n'existe pas ou peu en France d'exemples de développement économique accéléré d'entreprise comparable aux « success stories » américaines. Aux États-Unis, le paysage industriel est souvent bouleversé par des entreprises comme Apple, Sun Microsystem, Compaq, Silicon graphics, etc, qui, exploitant une percée technologique, atteignent en moins de dix ans d'existence une taille considérable. Bien souvent, ces entreprises, lorsqu'elles sont parvenues à maturité, consacrent chacune à la recherche et au développement plus d'un milliard de francs par an, soit l'équivalent des crédits publics consacrés en France à la recherche et au développement dans la filière électronique ...

L'importance des rapports ou des études consacrés ces toutes dernières années au transfert de technologies vers les PME-PMI et au financement de l'innovation témoigne d'une récente et heureuse prise de conscience du handicap français en ce domaine, et de la volonté d'y remédier.

Outre les observations formulées de façon réitérée par votre commission sur ce sujet depuis une dizaine d'années, l'on peut citer : une insertion dans le rapport annuel du Comité national d'évaluation de la recherche au Président de la République (1994) ; deux rapports confiés à M. Robert Chabbal par le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et le ministre des entreprises et du développement économique, portant respectivement sur « l'innovation dans les PME » (1993) et « le financement de l'innovation dans les PME » (juillet 1994) ; un rapport de M. Cicurel au ministre de l'industrie et au ministre de l'économie sur le financement des entreprises de haute technologie (mars 1995) ; un rapport établi par M. Lattes et M. Blondel pour le comité d'application de l'Académie des sciences sur le thème « innovation, technologie, emploi : la problématique française » (avril 1995) ; enfin, une insertion de M. Jacques Martinat sur « les PME de technologies » au rapport annuel du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie (septembre 1995).

Il reste à souhaiter que ces réflexions trouveront rapidement une traduction effective, permettant de surmonter les handicaps français.

B. UN IMPÉRATIF : COORDONNER LES INITIATIVES DES STRUCTURES D'AIDE AU TRANSFERT

1. Le constat : un foisonnement d'acteurs qui nuit à l'efficacité du dispositif

A la différence des grandes entreprises dont la demande d'innovation répond généralement à un besoin clairement identifié, l'attente technologique des PME-PMI reste le plus souvent imprécise, diffuse et mal formulée. C'est la raison pour laquelle le transfert de technologies vers les petites entreprises s'effectue le plus souvent par l'intermédiaire d'une structure d'aide dont la compétence s'étend du diagnostic à la formulation de la demande, de la recherche de la technologie au choix d'une ingénierie financière adaptée.

Durant la dernière décennie, un tissu diversifié et parfois très dense d'acteurs de l'innovation et d'appuis au transfert technologique s'est constitué. On trouve désormais, aux côtés des traditionnelles aides à l'innovation de l'Agence nationale pour la valorisation de la recherche (ANVAR), des sociétés de recherche sous contrat, des sociétés d'ingénierie et de conseil, des centres techniques professionnels, les centres régionaux d'innovation et de transferts technologiques (CRITT), les agences régionales d'information scientifique et technique (ARIST), les conseillers technologiques, etc...

Comme le notait déjà l'an passé votre rapporteur, ce foisonnement d'acteurs, certes encouragé par l'importance des besoins recensés, nuit aujourd'hui à la cohérence et à la lisibilité du dispositif d'aide au transfert. La multiplicité de l'offre et l'enchevêtrement des compétences jouent un effet dissuasif sur les entreprises qui se révèlent le plus souvent incapables d'identifier l'interlocuteur le mieux placé pour répondre à leurs besoins spécifiques.

Le même diagnostic est formulé par la plupart des observateurs qui se sont penchés sur cette question.

Parmi ceux-ci, l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques qui soulignait, en juin 1994, la nécessité « d'évaluer l'ensemble des structures de conseil, d'interface et de transferts de technologies, et pas seulement les centres de ressources technologiques »
• Ou encore, M. Michel Charzat, qui notait, dans un rapport publié en juillet 1994 par le Conseil économique et social sur les transferts de technologies en matière de recherche industrielle : « la cartographie (des organismes de transfert) est trop complexe et leur démarche d'aide à l'innovation et à l'appui technologique trop souvent technocratique et partielle ».

Il importe aujourd'hui d'organiser la cohérence et d'accroître la lisibilité du dispositif national d'aide au transfert de technologies. A cette fin, il apparaît nécessaire de commencer par recenser l'ensemble des intervenants, identifier leurs compétences respectives et procéder à leur évaluation.

Votre rapporteur doit par ailleurs regretter le retard observé dans la mise en place des centres de ressources technologiques (CRT) dont la création a été annoncée dans le cadre des contrats de plan État-région (1994-1998), et qui devaient mettre à la disposition des PME-PMI des interlocuteurs et des structures particulièrement avertis de leurs problèmes spécifiques.

D'après les informations qui ont été communiquées à votre rapporteur, ce retard serait imputable au souci manifesté par l'administration de mieux préciser les fonctions, le métier et le cahier des charges des CRT, afin qu'ils puissent apporter une réponse satisfaisante aux entreprises. La charte des CRT devrait être définie avant la fin du mois de novembre. Il faut espérer que ce calendrier sera respecté, car le besoin de ces structures se fait ressentir de façon urgente.

2. Une initiative exemplaire : la Route des hautes technologies


• Certaines régions se sont préoccupées d'ordonner les interventions des différentes structures d'aide au transfert qui exercent sur leur territoire.

C'est le cas en particulier de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, qui a fédéré au sein d'une association, la « Route des hautes technologies », financée, dans le cadre du XIème Plan, par l'État et le conseil régional, les quelques 90 organismes s'intéressant au transfert.

Il serait souhaitable que l'aide accordée par l'État à cette association puisse être renforcée après une évaluation objective des résultats obtenus en fin de plan.


• Dans le cadre de la définition d'une nouvelle politique de l'innovation, le Premier ministre a annoncé le 13 octobre dernier, en région Poitou-Charente, la volonté du Gouvernement de proposer, dans chaque région, à l'ensemble des partenaires technologiques et financiers des entreprises innovantes, la signature d'une « convention innovation-plus ».Cette convention poursuivra un double objectif : fédérer les initiatives régionales en matière d'innovation ; ériger ces associations en « pilote » de la politique régionale de transfert technologique.

Elles auront notamment vocation à offrir au tissu des PME-PMI traditionnelles 1 ( * ) , peu familiarisées avec le monde de l'innovation, un « service premier conseil ». Elles seront appelées à prospecter systématiquement le tissu des PME régionales pour leur offrir, dans un délai rapide, un service personnalisé et adapté à leurs besoins (diagnostic de la situation de l'entreprise, orientation vers les partenaires financiers ou technologiques, informations sur les procédures d'aides existantes...).

Aux entreprises innovantes, les associations d'innovation régionales offriront un « contrat de partenariat privilégié » destiné à les accompagner dans leur démarche d'innovation, de la conception à la mise sur le marché d'un produit ou d'un procédé.

3. Mettre les nouvelles technologies de l'information au service de l'innovation

A l'heure des autoroutes de l'information, il convient d'accélérer la mise en réseau des données scientifiques et technologiques existantes, et de favoriser l'accessibilité des entreprises à ces informations, afin d'accroître la diffusion des connaissances technologiques dans le tissu des PME-PMI.

C'est précisément à cet objectif que répond la création de la « bourse innovation plus » annoncée en octobre dernier par le ministère de l'industrie. Cette bourse, qui devrait être opérationnelle à compter du 1er juillet 1996, sera accessible sur Internet et sur minitel. Elle devrait être un lieu d'échanges pour toutes les informations technologiques. On y trouvera notamment des informations déversées par les centres de recherche labellisés par le ministère.

C. L'OUVERTURE PROCHAINE DU « NOUVEAU MARCHÉ »

Toutes les études mentionnées ci-dessus convergent pour souligner que le manque de financements adaptés aux spécificités des entreprises innovantes à fort potentiel de développement constitue un handicap majeur de l'économie française.

Votre rapporteur, qui préside le groupe d'étude « innovation et entreprise » rattaché à la commission des affaires culturelles, se félicite du rôle joué par celui-ci dans la formulation de ce problème, et la progression de ce dossier qui devrait aboutir à la création, à Paris, le 1er février 1996 d'un nouveau marché financier.

Le 13 avril 1994, ce groupe d'étude organisait en effet au Sénat un colloque sur le thème : « les entreprises innovantes et l'emploi : le problème des fonds propres ». Cette réunion, à laquelle participaient des responsables financiers, des chefs d'entreprises innovantes et des représentants des ministères concernés, a conclu à la nécessité de combler rapidement la lacune du dispositif financier national et communautaire en envisageant la création, à l'échelle européenne, d'un marché équivalent au NASDAQ américain.

1. Le diagnostic : les fonds propres des entreprises innovantes restent insuffisants pour assurer leur développement

A la différence des PME traditionnelles dans lesquelles l'innovation vise généralement à améliorer un produit ou un procédé sans provoquer de réel bouleversement, les entreprises innovantes se créent et se développent à partir d'un concept scientifique et technique nouveau qu'elles conduisent à l'industrialisation.

Elles ont un taux de croissance particulièrement élevé (15 à 20 % par an) et des besoins de financement très supérieurs aux entreprises traditionnelles.

En France, le financement de la phase de développement de ces entreprises se heurte au cumul de deux handicaps : une faiblesse relative de l'épargne longue, aggravée par l'orientation insuffisante de ces « capitaux-patients » vers les entreprises innovantes.


• La rareté des sources de capital-patient s'explique d'abord par l'absence de fonds de pension. Aux États-Unis, alors qu'une part infime des sommes collectées par capitalisation est orientée vers le financement des entreprises innovantes, les fonds de pension procurent 45 % des ressources du capital-risque.

On peut aussi regretter que les sommes dégagées par l' assurance-vie, qui représentent un volume significatif, restent insuffisamment orientées vers l'industrie, en raison notamment de la concurrence des placements sur le marché financier international qui permettent d'optimiser le rendement à court terme du capital investi.


• L'impossibilité actuelle de « sortir » du capital d'une entreprise innovante à fort potentiel de croissance contribue à détourner l'épargne de cet investissement, en raison de la préférence marquée des investisseurs pour les liquidités.

De façon générale, les seconds marchés européens n'apportent pas une réponse adaptée aux besoins spécifiques des entreprises innovantes.

Les prix d'équilibre n'y sont pas très représentatifs, les marchés sont généralement vendeurs, la capitalisation est insuffisante, les titres sont mal suivis, les informations financières le plus souvent lacunaires les introductions de sociétés sur ces marchés peu nombreuses.

Ils se contentent de jouer en réalité un rôle d'antichambre à l'égard des marchés financiers principaux pour les entreprises dont la rentabilité n'est pas subordonnée à une prise de risque importante.

2. La création d'un marché financier adapté au financement des entreprises innovantes à fort potentiel de croissance

Ce constat fait apparaître la nécessité de créer, à l'échelle européenne de préférence, un marché spécialisé dans le financement des entreprises innovantes à fort potentiel de croissance.

Il s'agit en effet d'offrir aux investisseurs la possibilité de « sortir » du capital de l'entreprise innovante. Comme le souligne en effet M. Robert Chabbal, si le système français de financement de l'innovation apparaît aujourd'hui « coincé », c'est en grande partie parce qu'il lui manque une « sortie par le haut », c'est-à-dire un marché financier spécialisé dans les sociétés innovantes. Et de comparer le système de financement de ces entreprises « à une cheminée qui ne tire que si elle est largement ouverte en son sommet ».


• Le « nouveau marché », qui sera inauguré le 1er février prochain,est inspiré du NASDAQ américain.

Créé par les courtiers et les agents financiers pour répondre aux besoins des entreprises en croissance, le NASDAQ américain (National association for security dealers on automatic quotation) a pris une importance considérable. Il est devenu en quelques années plus important que la bourse de Tokyo, même s'il reste moins développé que celle de Wall Street. Plus qu'un simple marché financier, le NASDAQ offre aux entreprises innovantes de multiples services, parmi lesquels le conseil ou l'analyse financière de très jeunes sociétés. Il favorise en outre la multiplication des opérations de gré à gré. Son fonctionnement fait appel à plusieurs milliers d'experts. On notera qu'une part non négligeable des capitaux disponibles sur ce marché est originaire d'Europe.


• Constitué sous l'égide de la Société des bourses françaises, lenouveau marché sera électronique. Il sera relié à 50.000 écrans répartis dansle monde. Supervisé par la commission des opérations de bourse, il offrira lesgaranties de sécurité nécessaires aux investisseurs.

Les conditions d'admission à ce nouveau marché seront plus souples que celles qui prévalent pour accéder à la cote officielle ou au second marché. Plusieurs critères devront être réunis (le bilan de l'entreprise devra excéder 20 millions de francs ; ses fonds propres 8 millions de francs ; un minimum de 100.000 titres représentant 10 millions de francs devront être diffusés auprès du public). La sélection s'opérera également au vu du projet et du plan de développement de l'entreprise, qui devra bénéficier d'un début de marché, et de ses carnets de commande.

L'objectif poursuivi par MM. Dominique Leblanc, directeur général, et Yannick Petit, directeur-général adjoint de la société « Le nouveau marché » est de parvenir à coter dès l'ouverture une quinzaine de valeurs et d'y introduire une quinzaine d'entreprises supplémentaires au cours de la première année.

Le nouveau marché a une vocation européenne, même si un seul accord a pu être jusqu'à présent finalisé avec la Belgique.

Les Italiens, les Suisses et l'Allemagne ont fait connaître leur intérêt pour cette initiative.

Si cette partie financière peut paraître s'éloigner de l'objet d'un avis sur la recherche scientifique et technique, votre rapporteur tient à souligner qu'elle est en réalité très directement liée à l'efficacité de la recherche et du développement en termes de création de richesses et d'emplois. Ce nouveau marché devrait par ailleurs contribuer à accroître le niveau de la recherche industrielle en France, qui reste jusqu'à présent inférieur à celui que connaissent la plupart des pays industrialisés.

VI. AUTORISER LE RECRUTEMENT, SUR CONTRAT À DURÉE DÉTERMINÉE DE CINQ ANS, DE CHERCHEURS AU SEIN DES ORGANISMES À CARACTÈRE SCIENTIFIQUE CRÉÉS EN EXÉCUTION D'ENGAGEMENTS INTERNATIONAUX

Une mission récemment conduite par l'inspection du travail auprès de l'institut Laue-Langevin a mis en lumière la difficulté que pose, pour le recrutement de chercheurs au sein d'organismes scientifiques créés en application d'une convention internationale, l'interdiction édictée depuis 1990 par le code du travail de conclure des contrats à durée déterminée pour une durée de plus de dix-huit mois.

L'exemple de l'institut Laue-Langevin est particulièrement éclairant.

Créé à l'initiative conjointe du Général De Gaulle et de Konrad Adenauer, cet institut installé à Grenoble accueille des physiciens de haut niveau dans le cadre d'une convention intergouvernementale signée le 19 janvier 1967 par MM. Alain Peyrefitte et G. Stoltenberg, à laquelle la Grande-Bretagne a adhéré ultérieurement.

Dès l'origine, le choix a été fait de recruter des scientifiques sur la base de contrats d'une durée maximale de cinq ans. Cette solution, que ne prohibait pas à l'époque le droit du travail, paraissait la mieux adaptée pour assurer le renouvellement des équipes, permettre une répartition harmonieuse des postes offerts entre les différents États contributeurs et favoriser la réinsertion de ces chercheurs dans leur pays d'origine.

L'évolution du code du travail interdit désormais que des contrats de travail à durée déterminée puissent être établis pour une durée totale excédant dix-huit mois.

Cette durée est manifestement trop courte pour permettre à la trentaine de scientifiques de haut niveau travaillant à l'institut de se former au fonctionnement du réacteur neutronique à haut flux puis de contribuer à l'adaptation continuelle de cet instrument de premier plan, tout en continuant de consacrer un tiers de leur temps environ à leurs travaux de recherche.

C'est la raison pour laquelle il convient de prévoir, au bénéfice des organismes de recherche créés en application de conventions internationales sur le territoire français, une dérogation, au demeurant limitée, au droit commun du travail afin de porter à cinq ans la durée maximale pour laquelle peuvent être conclus des contrats à durée déterminée pour le recrutement de scientifiques de haut niveau.

A défaut, les contraintes du droit du travail français risquent d'inciter les partenaires étrangers de la France à délocaliser les organismes internationaux implantés sur son territoire.

Votre commission des affaires culturelles a donc adopté un amendement poursuivant cet objectif.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné, au cours d'une séance tenue le mercredi 22 novembre 1995, le rapport pour avis de M. Pierre Laffïtte sur les crédits de la recherche scientifique et technique inscrits dans le projet de loi de finances pour 1996.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Jean-Louis Carrère a estimé que les propositions du rapporteur pour avis relatives à la participation des agrégés et des chercheurs au plan d'urgence universitaire devraient être examinées avec prudence : les sureffectifs observés aujourd'hui dans le secondaire devraient être résorbés avant l'an 2000 par le départ d'un grand nombre d'agrégés en retraite ; il n'est pas évident par ailleurs que les chercheurs, qui ont spontanément choisi de s'orienter vers la recherche plutôt que vers l'enseignement, disposent des qualités pédagogiques requises pour enseigner dans le premier cycle de l'enseignement supérieur ;

M. Ivan Renar a dit ne pas percevoir de véritable stratégie dans les orientations actuelles et prospectives définies par le ministère de la recherche, et s'est inquiété de la régression en francs constants des crédits qui lui étaient affectés. Il a souligné que la contribution éventuelle des chercheurs au plan d'urgence universitaire ne pourrait être que marginale, compte tenu de l'importance des départs en retraite qui n'avaient pas été compensés par des recrutements au cours des dernières années. Il a par ailleurs craint que les agrégés de l'enseignement secondaire ne soient pas préparés à l'articulation des fonctions d'enseignement et de recherche qui caractérise l'intervention des professeurs de l'enseignement supérieur.

Il a également souligné les difficultés que pouvaient rencontrer certaines régions comme celle du Nord-Pas-de-Calais à attirer des chercheurs, observant que celle-ci ne bénéficiait toujours que de 1 % des chercheurs français alors qu'elle ressemblait 8 % de la population totale et contribuait à hauteur de 6 % à la formation du produit intérieur brut.

Puis il a demandé au rapporteur pour avis de lui indiquer si les incidences, en termes notamment économiques, des délocalisations des laboratoires de recherche en province étaient d'ores et déjà perceptibles. Il a souhaité obtenir des précisions sur la situation financière du centre national de la recherche scientifique, et des éléments d'appréciation sur l'efficacité réelle du crédit d'impôt-recherche. Il a enfin regretté la diminution en francs constants des crédits affectés au commissariat à l'énergie atomique, la régression des moyens affectés à la recherche sur le Sida et a appelé de ses voeux à une meilleure articulation entre la recherche en sciences fondamentales et la recherche en sciences humaines et littéraires.

M. Franck Sérusclat, soulignant l'intérêt des travaux conduits par l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, a regretté que son nouveau président n'ait toujours pas été désigné depuis le renouvellement partiel du Sénat. Il s'est inquiété des dérives qu'étaient susceptibles d'engendrer les découvertes effectuées dans la connaissance du génome humain, soulignant que les employeurs ou les assureurs pourraient être tentés d'exiger des informations sur les pathologies susceptibles d'affecter leurs salariés ou assurés au cours de leur vie future. Rejoignant le rapporteur pour avis pour juger capitales les évolutions induites par l'entrée dans la société de l'information, il a souhaité que la commission puisse examiner l'incidence des autoroutes de l'information et de leur contenu sur les modes de vie.

M. Robert Castaing, soulignant le rôle déterminant joué par les Centres régionaux d'information technique et technologique (CRITT) dans l'implantation d'entreprises technologiques dans les zones rurales, s'est interrogé sur la capacité de villes telles qu'Auch, Agen ou Montauban à attirer des chercheurs susceptibles d'animer ces structures, qui contribuent à lutter contre le dépeuplement accéléré dont continuent de souffrir plusieurs départements français.

M. Alain Gérard a souligné les difficultés rencontrées à l'échelon administratif dans le traitement des dossiers portant sur la délocalisation d'unités de chercheurs en région, et qui peuvent aboutir à compromettre la réalisation de certains projets.

Répondant aux différents intervenants, M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :

- le recours aux chercheurs des organismes publics pour améliorer le taux d'encadrement des étudiants ne pourrait constituer qu'un élément de réponse aux problèmes actuels, mais il mérite d'être examiné ;

- le Sénat paraît être plus sensibilisé que l'Assemblée nationale aux défis posés par les autoroutes de l'information et leur contenu. Il reste cependant beaucoup à faire dans ce domaine. Il serait en particulier souhaitable de contribuer à éveiller l'attention des collectivités territoriales en ce domaine ;

- le crédit d'impôt-recherche contribue depuis 1995 à encourager les entreprises à s'installer dans les zones rurales, où les dépenses de fonctionnement prises en considération dans le calcul de l'avantage fiscal sont équivalentes aux salaires versés, par l'entreprise, aux personnels de recherche qu'elle emploie, alors qu'elles sont évaluées à 65 % de ces salaires pour les entreprises implantées dans la région parisienne, et à 75 % de ceux-ci pour les autres entreprises. Les nouvelles technologies de l'information devraient par ailleurs contribuer à favoriser l'installation des entreprises en zone rurale, grâce en particulier à la mise en réseau de l'ensemble des compétences scientifiques et technologiques disponibles dans les centres de ressources technologiques et auprès des conseillers technologiques.

Puis, la commission a adopté, sur la proposition de son rapporteur pour avis, un amendement qui tend à autoriser les organismes scientifiques créés sur le territoire français en application d'une convention internationale à accueillir des chercheurs de haut niveau sur des contrats à durée déterminée de cinq ans.

Suivant la proposition de son rapporteur pour avis, elle a enfin donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la recherche scientifique et technique inscrits dans le projet de loi de finances pour 1996.

AMENDEMENT PRÉSENTÉ AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES

Article additionnel après l'article 59 decies

Après l'article 59 decies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 122-2 du code du travail est complété par un 3° ainsi rédigé :

« 3° Lorsqu'il est conclu, dans la limite de cinq années, pour exercer une activité de recherche ou d'encadrement au sein d'un organisme à caractère scientifique créé en exécution d'engagements internationaux.

« Les dispositions du précédent alinéa sont applicables aux contrats en cours d'exécution à la date de publication de la présente loi. ».

* 1 Pour être sensible, la baisse des autorisations de programme affectées au FRT est moins importante qu'elle n'apparaît à première vue par rapport aux dotations moyennes dont il bénéficiait entre 1990 et 1993 (1.400 millions de francs). Ont en effet été « sortis » du FRT les crédits destinés à financer les conventions industrielles de formation par la recherche (C1FRE) (200 millions de francs), la recherche sur les génomes (80 millions de francs), les bourses doctorales attribuées aux anciens élèves des grandes écoles (20 millions de francs), la recherche sur les sciences du vivant (50 millions de francs). A périmètre constant, la dotation du FRT aurait donc atteint 750 millions de francs en 1995.

* 1 Soit près de 90 % des PME-PMI françaises.

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