EXAMEN EN COMMISSION
MARDI 26 NOVEMBRE 2024
M. Laurent Lafon, président. - Nous commençons par l'examen du rapport pour avis de Jean-Jacques Lozach sur les crédits du sport.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs au sport. - Après une année 2024 exceptionnelle, marquée par le succès des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP), le budget du sport pour 2025 est décevant et très éloigné des attentes du mouvement sportif.
Le sport est reconnu par tous comme une composante essentielle des politiques d'éducation, d'insertion et de santé publique. Cet été, il s'est révélé être aussi un facteur de cohésion nationale et de rayonnement international. Nombre d'annonces ont été faites depuis deux ans, jusqu'au plus haut niveau de l'État. Le sport a même été décrété grande cause nationale en 2024. Hélas, avec ce projet de loi de finances (PLF), tout se passe comme si rien n'avait changé. Hors JOP, le budget du sport baisse de 188 millions d'euros, soit de 20 %. L'idée d'une grande loi d'héritage olympique d'orientation et de programmation en faveur du sport paraît abandonnée. La réduction des moyens des collectivités territoriales est une source supplémentaire d'inquiétude alors que celles-ci sont en première ligne pour financer l'investissement et le fonctionnement des équipements sportifs.
Premièrement, ce budget acte la fin de ce que beaucoup ont appelé la « parenthèse enchantée ».
La non-reconduction de mesures spécifiques aux JOP permet, logiquement, de faire des économies. Cependant, des restrictions budgétaires affectent plusieurs politiques clés pour le développement de la pratique sportive.
La concrétisation des objectifs du plan Génération 2024 est tout d'abord reportée : aucun crédit de paiement (CP) n'est inscrit à ce titre dans le PLF. Le dispositif doit être financé uniquement par des reports de crédits. Pour rappel, ce plan de 300 millions d'euros prévoit la réalisation de 5 000 équipements en trois ans, dont 500 équipements structurants, 3 000 équipements de proximité et 1 500 cours d'école actives. Ce report est regrettable, d'autant que le plan est insuffisant compte tenu du vieillissement des infrastructures. La France compte environ 270 000 équipements sportifs, dont 61 % ont été mis en service avant 1995. Deux tiers d'entre eux n'ont jamais été rénovés. En particulier, la moitié des équipements aquatiques publics a été construite avant 1977. Les piscines qui l'ont été dans le cadre du plan 1 000 piscines des années 1970 doivent être modernisées.
Deuxièmement, les crédits des dispositifs destinés aux jeunes sont revus à la baisse. Les annonces ont pourtant été nombreuses dans ce domaine : 30 minutes d'activité physique quotidienne à l'école - mais nous avons vu, avec notre mission flash, que seulement 42 % des établissements étaient concernés et, encore, pour certains d'entre eux, avec une unique classe - ; deux heures de sport supplémentaires au collège - leur généralisation vient d'être abandonnée - ; des tests de capacité physique à l'entrée en classe de sixième annoncés par le Président de la République pour la rentrée de septembre 2024 - leur expérimentation se déroule dans quatre académies seulement - ; une feuille de route en faveur du sport universitaire - nous l'attendons toujours -, etc. Dans les faits, les réalisations sont donc très partielles, voire inexistantes. Je n'insisterai pas sur les déclarations enflammées au plus haut sommet de l'État pendant et immédiatement après les JOP, y compris de la part du Premier ministre actuel lors de sa déclaration de politique générale.
Les dispositifs Pass'Sport et « 2 heures de sport supplémentaires au collège » sont fusionnés ; 14 millions d'euros d'économies sont réalisés sur ces deux composantes, soit plus que le coût du second dispositif seul. Avec des crédits diminuant de 100 à 75 millions d'euros, le Pass'Sport sera encore recentré sur certains publics cibles, alors qu'il est déjà sous condition de ressources.
L'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) voit sa subvention en légère diminution et son plafond d'emplois est réduit de deux équivalents temps plein (ETP). Or le surcroît d'activité que les JOP ont entraîné pour l'AFLD n'a pas été pris en charge par ce plafond d'emplois, mais dans le cadre d'un contrat avec Paris 2024, lequel a permis le recrutement de préleveurs vacataires. La baisse du plafond d'emplois risque de remettre en cause la capacité de l'AFLD à exercer les nouvelles compétences que le législateur lui a attribuées en 2021 en matière d'enquêtes, de renseignement, d'éducation et de prévention.
Aucune enveloppe n'est prévue pour la pérennisation des emplois socio-sportifs. L'an dernier, à la suite d'une annonce du Président de la République, une enveloppe de 10 millions d'euros était consacrée à un plan d'aide au recrutement et à la formation de 1 000 éducateurs socio-sportifs. L'Agence nationale du sport (ANS) a réduit cet objectif à 750, en l'absence de visibilité sur le financement. Sans enveloppe réservée au financement de ce dispositif en 2025, ces emplois risquent d'être financés au détriment d'autres emplois. Je rappelle que la filière des sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps) compte au nombre des plus sollicitées sur la plateforme Parcoursup.
J'en viens aux taxes affectées. L'ANS bénéficiait jusqu'alors de trois taxes de cette nature. Ce nombre sera réduit à deux l'an prochain. En application de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), le prélèvement sur les jeux exploités par la Française des jeux (FDJ), hors paris sportifs, n'est plus affecté à l'ANS. Le plafond du prélèvement sur les paris sportifs en ligne est rehaussé en conséquence. Toutefois, la compensation n'est que partielle : il manque en effet 6 millions d'euros par rapport à l'an dernier. Quant à la contribution sur la cession des droits audiovisuels, dite « taxe Buffet », son évolution est incertaine compte tenu de la baisse des droits télévisuels du football. En 2023, le football avait contribué à hauteur de 77 % au produit de cette taxe.
Comment, dans ce contexte, maintenir l'élan et réussir la transition des Jeux de 2024 vers ceux de 2030 ?
Tout d'abord, les objectifs sportifs et d'organisation des Jeux de Paris ont été pleinement atteints. Ces Jeux ont même été exceptionnels. En particulier, les politiques de l'ANS en faveur du sport de haut niveau ont été probantes. L'ANS doit faire l'objet d'une évaluation en 2025. Si la gouvernance territoriale de ses crédits peut être mise en question, en raison de sa complexité, l'Agence ne devrait pas être remise en cause en ce qui concerne la gestion du haut niveau.
Cependant, plusieurs questions restent ouvertes : outre un éventuel projet de loi d'héritage, qui se fait attendre, ces questions portent, d'une part, sur le coût des Jeux, et, d'autre part, sur leurs retombées économiques.
Le coût de l'investissement pour la police et la gendarmerie dans le cadre des JOP est évalué à 1,1 milliard d'euros. Pour l'État et les collectivités, le premier président de la Cour des comptes a estimé le coût total des JOP entre 3 et 5 milliards d'euros. Conformément à la loi du 19 mai 2023, un rapport de la Cour des comptes doit nous éclairer à ce sujet d'ici à octobre 2025. Toutefois, la garantie de l'État au Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) ne devrait pas être sollicitée.
Les retombées économiques sont évaluées par le Centre de droit et d'économie du sport (CDES) entre 6,7 milliards et 11,1 milliards d'euros pour Paris et la région d'Île-de-France - la fourchette est large. Un programme de quatorze études, lancé par le ministère, doit mesurer l'impact de l'événement sur de nombreuses thématiques. France Stratégie réalisera une analyse des coûts et des bénéfices globaux des Jeux d'ici à la mi-2025.
Ensuite, la question du financement des JOP d'hiver, qui seront organisés dans les Alpes françaises en 2030, reste posée. Le PLF ne prévoit aucun crédit à ce sujet, alors qu'un comité d'organisation doit être mis en place. L'article 54 du PLF institue une garantie de l'État en cas d'annulation de l'événement ainsi qu'une garantie sur les crédits de trésorerie du futur comité d'organisation. La garantie relative au déficit éventuel de ce comité d'organisation sera présentée ultérieurement.
En conclusion, le PLF pour 2025 ne permettra pas de pérenniser l'effet des JOP, alors que l'augmentation du nombre de licenciés sportifs à la rentrée 2024 est réelle - elle est estimée à environ 15 %, les chiffres définitifs restant en attente. La Fédération française de triathlon connaît, par exemple, un surcroît d'inscriptions de 32 %, la Fédération française d'escrime de 25 %, la Fédération française handisport de 20 %. Le président de la Fédération française de handball estime que, par manque d'équipements et d'encadrement, nous perdrions 1,5 million de licenciés que l'engouement pour les JOP a pourtant suscités. L'évolution budgétaire compromet ainsi la possibilité d'un véritable héritage olympique.
Je vous propose quelques pistes de réflexion.
D'une part, pour desserrer la contrainte budgétaire, je suis favorable au déplafonnement de la taxe sur les paris sportifs en ligne, qui permettrait de dégager immédiatement 113 millions d'euros. Pour rappel, avec l'Euro de football et les JOP, les mises atteignent en 2024 un montant inégalé de plus de 1 milliard d'euros.
D'autre part, je vous propose un amendement visant à réallouer au programme 219 « Sport » 50 millions d'euros issus d'économies réalisées sur le service national universel (SNU), dont 40 millions d'euros seraient consacrés aux équipements structurants et 10 millions d'euros à la pérennisation des emplois socio-sportifs Il est important de lier ainsi la question des équipements et celle de l'encadrement, qui vont de pair.
Enfin, maintenir l'élan impulsé par les JOP impliquerait aussi de revoir en profondeur la place du sport dans les politiques publiques, notamment à l'égard des jeunes et des personnes en situation de handicap, ou bien encore dans le domaine du sport-santé.
Pour toutes ces raisons, je vous propose d'émettre un avis défavorable à ce budget.
M. Michel Savin. - Après le succès des JOP, avec des athlètes qui ont donné beaucoup de bonheur et d'émotions aux spectateurs et téléspectateurs, et surtout l'envie à des milliers de jeunes de venir découvrir au sein des clubs et d'associations telle ou telle discipline sportive, les perspectives du budget pour 2025 s'annoncent difficiles pour les acteurs du sport français.
L'ambition de faire du sport un enjeu national paraît bien remise en cause. Si une partie de la baisse importante des crédits du sport pour 2025 s'explique par la fin des JOP, une autre partie tient à la demande du Gouvernement de consentir des efforts face à la situation catastrophique de nos finances publiques. Néanmoins, en comparaison d'autres budgets, le sport est mis à forte contribution, preuve qu'il n'est toujours pas reconnu à sa juste valeur et que notre pays n'est pas encore une véritable nation sportive.
En effet, la dotation globale du programme 219 diminue de plus de 23 % en crédits de paiement, pour s'établir à 593 millions d'euros, soit une perte de 182 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) de 2024. Par ailleurs, le système des taxes affectées à l'ANS est modifié à la suite de la suppression de l'affectation de celle qui a trait aux jeux exploités par la FDJ, hors paris sportifs, ce qui entraîne une perte de 6 millions d'euros. Les crédits de l'Agence nationale du sport sont prévus à hauteur de 159 millions d'euros en CP, en diminution de 111 millions d'euros par rapport à 2024, avec 100 millions d'euros de moins pour le plan Génération 2024, qui concerne surtout les équipements structurants, et 10 millions d'euros de moins pour le Pass'Sport.
Au sujet du plan Génération 2024, il nous a été rapporté que, en 2024, sur les 100 millions d'euros de crédits qui lui étaient consacrés, uniquement 4 millions ont été utilisés et que 96 millions feraient l'objet d'un report en 2025. Cependant, le Gouvernement avait pris la décision de geler ces crédits en 2024 et des dossiers ont d'ores et déjà été validés par l'ANS. Il est par conséquent à craindre qu'aucune collectivité ne puisse obtenir de nouvelle décision de l'Agence sur le budget de 2025.
Enfin, d'autres mesures d'économies tiennent à l'optimisation du dispositif Pass'Sport, à la remise en cause de celui des deux heures de sport supplémentaires au collège, à l'ajustement des crédits liés à l'insertion, ou encore aux cotisations retraite des sportifs de haut niveau.
Nous avons déposé un amendement qui tend à déplafonner l'affectation de la taxe sur les paris sportifs en ligne, ce qui devrait permettre de récupérer 113 millions d'euros. D'autres groupes ont également déposé un amendement en ce sens. Nous déposerons plusieurs autres amendements afin d'augmenter le budget des sports par des crédits qui pourraient être pris sur le SNU et par l'encadrement de l'augmentation des crédits relatifs au service civique.
En l'état, notre groupe suivra l'avis du rapporteur pour avis.
M. Claude Kern. - Je reconnais que ce projet de budget est décevant.
Certes, le contexte budgétaire est contraint et nous mesurons l'importance de l'actuel PLF. Toutefois, si des revalorisations des dotations s'avèrent difficilement envisageables, ce constat ne nous empêche nullement d'appréhender certains sujets différemment et de corriger certaines lignes budgétaires de manière plus rationnelle.
Indépendamment de l'organisation des JOP et de ses retombées, que nous espérions peut-être encore plus favorables, nous ne pouvons suivre l'explication du ministre chargé des sports sur l'érosion des crédits du sport pour 2025, avec un budget en diminution de 23 %. Nous nous interrogeons sur les objectifs de long terme de la politique sportive de notre pays. Plusieurs questions retiennent notre attention.
Quid de la grande nation sportive, au vu du gel des 100 millions d'euros du plan de 5 000 équipements sportifs destinés aux collectivités, des 10 millions d'euros de moins pour le Pass'Sport, des mesures concernant les finances locales annoncées pour 2025, qui vont contraindre fortement les collectivités et leur capacité d'investissement dans le sport, ou, plus généralement, de la baisse des crédits de l'action no 01 « Promotion du sport pour le plus grand nombre » ?
De même, la stratégie nationale sport-santé souffre encore de nombreux paradoxes : à titre d'exemples, le dispositif 30 minutes d'activités physiques et sportives par jour dans les écoles est loin d'être effectif, ce qu'un rapport de notre commission a souligné, et le soutien aux maisons sport-santé nécessiterait, pour que leur déploiement se poursuive, d'être plus appuyé.
En ce qui concerne l'ANS et son financement, nous serons favorables, comme le rapporteur pour avis et Michel Savin, à tout relèvement du plafond de la taxe sur les paris sportifs en ligne. Pour l'heure, notre groupe suivra l'avis du rapporteur, tout en se ménageant la possibilité de modifier son vote en séance publique en fonction du sort qui sera réservé aux différents amendements.
M. Patrick Kanner. - Nous suivrons également l'avis du rapporteur. La situation est en effet incroyable : nous sommes sélectionnés pour l'organisation des JOP en 2017, suivent des annonces fracassantes du Président de la République qui déclare que, avec lui, le sport deviendra une priorité nationale, et immédiatement après les Jeux, le gouvernement nous propose un budget catastrophique. Jamais nous n'avions vu un tel retournement sur le plan politique. Diminuer de 23,4 % le budget des sports, pour le ramener à 0,15 % du budget de l'État, est une forme de déni : le Président de la République a menti !
Ont été évoqués les 5 000 équipements sportifs du plan Génération 2024 et le Pass'Sport, qui sont sacrifiés, ainsi que les deux heures de sport supplémentaires au collège. Le rapporteur a également eu raison d'évoquer la situation des nouveaux licenciés potentiels que nous allons perdre faute de moyens pour les accueillir. La seule Fédération française de basket-ball (FFBB) a dû rejeter 80 000 demandes de licences. L'ANS subit aussi de plein fouet ce revers financier. Le PLF pour 2025 est assurément un rendez-vous manqué avec l'héritage des Jeux. Nous ne savons d'ailleurs pas si le projet de loi qui devait transcrire cet héritage sera un jour présenté.
À la proposition du rapporteur de déplafonner les taxes affectées au sport, j'ajouterai celles de la relance du plan 5 000 terrains, d'un renforcement des moyens alloués au Pass'Sport, de la création d'un fonds réservé aux clubs sportifs qui leur permette de répondre à l'afflux de licenciés, de la valorisation des maisons sport-santé et de la relance du sport universitaire. Je participerai dans quelques jours à un colloque organisé par l'université de Lille en vue de promouvoir le sport universitaire. Il sera précédé de la visite d'équipements sportifs. Pour la moitié d'entre eux, ils sont dans un état qui justifierait qu'on les démolisse...
Nous pouvons certainement tous être d'accord sur la nécessité de ne pas renoncer à l'objectif de consacrer, à moyen ou à long terme, 1 % du budget de l'État au sport et de ne pas sacrifier cet objectif sur l'autel de l'austérité.
Mme Mathilde Ollivier. - À mon tour de partager les constats exprimés par le rapporteur pour avis. Ce projet de budget est décevant, avec cette forte baisse de 23 % et les coupes sur le Pass'Sport. Certes, ce dernier aurait mérité d'être redéployé : certes, tous les crédits n'ont pas été utilisés, mais il aurait fallu revoir la communication. En l'état, nous n'obtiendrons qu'une réduction de son champ d'application.
Il a également été question du programme de deux heures de sport supplémentaires au collège et des équipements sportifs. Du point de vue de la pratique sportive, l'héritage des JOP se fait dès à présent. À cet égard, des crédits insuffisants pour 2025 s'avèrent problématiques.
Je soulignerai deux points d'attention. D'une part, quand les collectivités locales financent les deux tiers de la pratique du sport, on peut s'inquiéter de leur capacité à poursuivre cet effort. D'autre part, l'organisation des Jeux de 2030 pourrait peser sur les budgets du sport lors des prochaines années. Il ne s'agit pas qu'elle absorbe de nouveau l'intégralité des futurs crédits, aux dépens de la nécessaire démocratisation de la pratique sportive.
Nous suivrons également l'avis du rapporteur.
Mme Laure Darcos. - Nous ne ferons pas entendre de note discordante, et il est d'ailleurs remarquable que nous suivions tous les préconisations du rapporteur. Au lendemain des JOP, le PLF nous fait l'effet d'une douche froide ! La Fédération française de badminton m'apprenait ainsi récemment que ce sport avait suscité nombre d'émules, mais qu'elle avait dû renoncer à inscrire plus de la moitié des jeunes qui la sollicitaient.
La situation de l'ANS soulève également beaucoup d'inquiétude parce que des élus s'habituaient à solliciter auprès d'elle des fonds, lesquels permettaient de financer tant des complexes sportifs que des cours de récréation Oasis. Ces élus, qui manquent déjà de moyens, ne pourront plus compter sur ce soutien.
Quant au collège, lorsque Béatrice Gosselin et moi-même avons rédigé notre rapport sur les 30 minutes d'activité physique quotidienne à l'école, les instituteurs que nous avons rencontrés, et qui se faisaient les porte-voix des professeurs de sport du second degré, ont souligné l'importance de généraliser ces heures supplémentaires pour l'hygiène de vie des enfants et pour lutter contre le problème de l'obésité infantile. L'enseignement scolaire va également payer le prix fort de ce PLF, tout comme nos étudiants en Staps.
M. Jérémy Bacchi. - Nous partageons en tous points l'avis du rapporteur. L'accessibilité du sport et de ses équipements repose en grande partie en France sur les collectivités, qui constituent le premier financeur du sport avec 12,5 milliards d'euros chaque année. Les coupes budgétaires programmées à leur encontre donnent évidemment matière à s'inquiéter. Des départements et des communes nous alertent d'ailleurs ces derniers jours sur le report de certains de leurs projets, en raison de leur obligation d'opérer des choix dans la réduction de leurs dépenses et investissements. En outre, la baisse de la dotation du fonds vert pour la rénovation thermique, qui devrait passer de 2,5 milliards à 1 milliard d'euros, affectera de même la rénovation d'équipements sportifs, en particulier les piscines.
Alors que les JOP ont été une véritable réussite, sur le plan tant organisationnel que sportif, avec un engouement populaire qui a dépassé les espérances, nous constatons les difficultés actuelles de certaines fédérations devant l'afflux des nouvelles demandes d'inscription. En guise d'héritage, c'est malheureusement plutôt d'un non-héritage que ces crédits alloués au sport témoignent. Ils ne sont pas à la hauteur de l'ambition que nous portons pour notre nation et notre jeunesse.
Mme Catherine Belrhiti. - Ma prise de parole est à la fois celle d'une sénatrice soucieuse de l'équilibre budgétaire et celle d'une ancienne sportive de haut niveau qui, avant d'embrasser une carrière politique, a consacré une grande partie de sa vie à la pratique et à la promotion du sport, en représentant notre pays sur les tatamis du monde entier. Cette expérience a forgé ma conviction que le sport n'est pas simplement un loisir : il est aussi un formidable outil d'émancipation, de dépassement de soi et de construction de la personnalité. Il joue un rôle essentiel dans notre société : il contribue à la santé publique, favorise l'intégration et la cohésion sociale, véhicule des valeurs fondamentales dans notre République, comme le goût de l'effort, le respect et la solidarité. Au-delà des individus, il est un moteur de rayonnement international, comme en témoignent les retombées des JOP de Paris 2024. C'est pourquoi, à mon sens, toute réduction des moyens consacrés au sport doit être examinée avec une attention particulière.
Le projet qui nous est présenté révèle une réduction importante des crédits du programme « Sport » pour 2025. Les autorisations d'engagement (AE) diminuent ainsi de 10,38 %, les CP chutent de 23,47 %. Si cette contraction est compréhensible dans le contexte budgétaire actuel, elle n'en est pas moins plus que préoccupante.
Quelques points s'avèrent certes positifs. Je salue, par exemple, le maintien du plan Génération 2024, crucial pour le développement d'équipements sportifs de proximité, en particulier dans les territoires les moins favorisés. En permettant à des milliers de jeunes de découvrir et de pratiquer une activité sportive, ces infrastructures contribuent à réduire les inégalités et à démocratiser la pratique sportive.
En revanche, je ne peux cacher mon inquiétude quant à la réduction des moyens affectés à l'ANS, dont les crédits sont en baisse de 26,7 millions d'euros en CP. Il est essentiel que cet opérateur, qui est un pilier de nos politiques sportives, conserve la capacité de soutenir efficacement le mouvement sportif et les clubs amateurs qui forment la colonne vertébrale du sport français. Il en est de même pour la diminution des crédits du Pass'Sport. Ce programme destiné à démocratiser l'accès des jeunes au sport est un outil précieux. Alors que la pratique sportive recule dans certaines tranches d'âge, il est crucial de maintenir des dispositifs incitatifs et accessibles.
En conclusion, si je suis consciente des efforts nécessaires à la maîtrise de nos finances publiques, j'estime que le sport ne doit pas être vu comme une simple ligne budgétaire. Il représente un investissement pour notre jeunesse, notre santé et notre avenir collectif. Dans cette période de transition, il est de notre responsabilité de préserver ce qui fait la richesse de nos politiques sportives, tout en nous assurant que les ajustements budgétaires soient réalisés avec mesure.
M. Jean-Gérard Paumier. - Une remarque sur le soutien de l'État aux investissements sportifs des communes, sur le rôle en la matière de l'ANS et des appels à projets. En Indre-et-Loire par exemple, un maire a engagé la rénovation d'un gymnase pour un montant de 1,3 million d'euros. Il a sollicité le préfet, dont il a obtenu 200 000 euros, et a répondu à un appel à projets de l'ANS, dont il a reçu 700 000 euros : le total ainsi réuni de 900 000 euros paraît élevé, surtout quand on connaît le plafond des aides de l'État pour les piscines qui, de mémoire, est fixé à 450 000 euros. Il me semblerait souhaitable de reconcentrer les crédits vers le ministère ou vers les préfets. On pourrait peut-être faire mieux à budget constant.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis. - Je vous remercie pour cette rare unanimité.
Il me semble que l'élément le plus regrettable dans la situation actuelle tient à l'abandon de la grande loi d'héritage olympique, dont on nous parlait depuis près de sept ans et avec insistance au cours des trois dernières années. Devant notre commission, le ministre chargé des sports n'évoque désormais plus une loi, mais un plan d'animation jeunesse dans lequel, sans doute, le sport sera complètement noyé.
Par ailleurs, les répercussions seront dès 2025 redoutables au sein des collectivités territoriales. Le fonds vert, par exemple, chute de 2,5 milliards à 1 milliard d'euros et son règlement d'intervention voit disparaître sa partie spécifique aux équipements sportifs.
Enfin, nous avions placé beaucoup d'espoir dans le Pass'Sport, mais cela faisait plusieurs années que nous en demandions un réexamen car il ne consistait guère qu'en une aide à la prise de licence. Ce réexamen n'est pas intervenu et nous en sommes arrivés à la situation que nous redoutions.
Je vous propose un amendement qui s'inscrit à la suite de la décision de la commission des finances de supprimer le SNU. Sur les 100 millions d'euros ainsi rendus disponibles, je vous propose d'en flécher 50 millions vers le programme « Sport », dont 40 millions afin de poursuivre l'investissement dans les équipements structurants traditionnels - essentiellement les piscines, les gymnases et les stades - et 10 millions en vue de poursuivre l'effort engagé l'an dernier en faveur des emplois socio-sportifs et la formation des bénévoles et éducateurs sportifs, dont nous avons tant besoin pour développer l'activité physique quotidienne (APQ) et l'activité physique adaptée (APA).
M. Michel Savin. - Notre groupe politique a déposé un amendement sur la première partie du PLF, relatif au déplafonnement de la taxe sur les paris sportifs. Il nous semble préférable de nous mobiliser d'abord pour mener collectivement ce combat. Si notre amendement n'est pas adopté, nous envisagerons d'autres affectations budgétaires, notamment au sein de la mission Sport, jeunesse et vie associative. À ce stade, notre avis est défavorable à l'amendement du rapporteur.
L'amendement CULT.1 n'est pas adopté.
La commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs au sport de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » du projet de loi de finances pour 2025.