AVANT-PROPOS
Dans un contexte de maîtrise des finances publiques, marqué par des mesures d'économies portant sur de nombreux pans de l'économie et de la société, le secteur de la recherche est préservé. Après quatre années d'augmentation significative, rendue possible par la mise en oeuvre de la loi de programmation de la recherche (LPR), son budget continuera de progresser en 2025. Le socle de la LPR, constitué des mesures de revalorisation des carrières scientifiques et de l'augmentation des financements dédiés à l'Agence nationale de la recherche (ANR), est consolidé. Néanmoins, compte tenu de la nécessité de contribuer à l'effort collectivement demandé, la cinquième « marche » de la programmation ne pourra être intégralement gravie.
Tout en saluant la poursuite de la dynamique de réinvestissement public dans la recherche, la rapporteure entend aussi les inquiétudes qui s'expriment chez les acteurs de la recherche face à cette inflexion du rythme de déploiement de la LPR. Convaincue que la recherche est un investissement fondamental pour l'avenir de l'économie et de la société, elle rappelle que la France ne peut se permettre de prendre à nouveau du retard par rapport à la concurrence internationale. Elle souhaite que la clause de revoyure, initialement prévue pour 2023, soit enfin activée pour faire un point d'étape complet sur la LPR et réfléchir collectivement aux conditions nécessaires à l'atteinte des objectifs qu'elle a fixés à l'horizon 2030.
À l'occasion de cet exercice budgétaire, la rapporteure a également tenu à dresser un premier état des lieux de deux chantiers structurels en cours dans le secteur de la recherche, celui de la gouvernance, à travers la mise en place des agences de programmes, et celui de la simplification de la gestion de la recherche, avec les expérimentations menées dans les territoires.
Enfin, en vue des travaux préparatoires au « pacte public-privé pour la recherche » que le nouveau ministre a appelé de ses voeux, la rapporteure s'est intéressée aux leviers permettant de rapprocher recherche publique et secteur privé.
I. UN BUDGET « RECHERCHE » EN AUGMENTATION, MAIS DANS UNE PROPORTION NE PERMETTANT PAS D'ASSURER LE PLEIN DÉPLOIEMENT DE LA CINQUIÈME « MARCHE » DE LA LOI DE PROGRAMMATION
A. UNE INFLEXION DE LA DYNAMIQUE ENCLENCHÉE PAR LA LOI DE PROGRAMMATION QUI SUSCITE L'INQUIÉTUDE DES ACTEURS DE LA RECHERCHE
Depuis 2021, le financement de la recherche publique française est marqué par le déploiement de la loi de programmation de la recherche (LPR) du 24 décembre 20201(*), qui a enclenché le réarmement budgétaire tant attendu après des années de sous-investissement public. L'objectif de cette programmation pluriannuelle est d'investir 25 milliards d'euros supplémentaires dans la recherche sur dix ans (2021-2030), afin que celle-ci voie son budget annuel atteindre 20 milliards d'euros en 2030, soit 5 milliards de plus qu'en 2020.
Pour ce faire, l'article 2 de la LPR fixe une trajectoire pluriannuelle des augmentations des crédits budgétaires pour les programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques », 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » et 193 « Recherche spatiale »2(*), lesquels font partie de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur ».
Trajectoire pluriannuelle de variation des
crédits de paiement
inscrite dans la LPR (article 2)
(en M€)
La hausse programmée par la LPR pour l'exercice 2025, qui correspond à la cinquième « marche » de la trajectoire, s'élève à 500 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2024. Pour les crédits relevant du périmètre du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, cette hausse se répartit comme suit :
· une augmentation de 346 millions d'euros sur le programme 172 ;
· une augmentation de 124 millions d'euros sur le programme 150.
Or les moyens nouveaux ouverts par le PLF pour 2025, par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, se chiffrent respectivement à :
· 59 millions d'euros pour le programme 172, soit un différentiel de 287 millions d'euros par rapport à la programmation ;
· 95 millions d'euros pour le programme 150, soit un différentiel de 29 millions d'euros par rapport à la programmation.
Au total, le PLF pour 2025 concrétise une cinquième « marche » de 154 millions d'euros, soit près d'un tiers du montant de celle programmée par la LPR.
En 2025, la LPR va donc continuer à produire ses effets, mais avec une intensité moindre que celle programmée. Après quatre années de respect de la trajectoire, cette première baisse de dynamique inquiète fortement les acteurs de la recherche, qui redoutent un « retour en arrière ».
Si la rapporteure estime cette inquiétude légitime, elle rappelle que, dans un contexte de consolidation des finances publiques qui impose de procéder, en responsabilité, à des mesures d'économies, le budget de la recherche est préservé. Même si certaines mesures de la LPR ne pourront être pleinement déployées, l'économie générale de la dynamique de réinvestissement dans la recherche publique n'est pas remise en cause et les priorités de la LPR sont maintenues, au premier rang desquelles la revalorisation des carrières scientifiques et la montée en charge de l'Agence nationale de la recherche (ANR).
La rapporteure souhaite que la clause de revoyure, qui aurait dû être activée en 2023, le soit rapidement par le nouveau ministre. Celle-ci doit être l'occasion de dresser un bilan exhaustif de la LPR, de faire le point sur la programmation budgétaire compte tenu des aléas conjoncturels qui l'affectent, et de rassurer les acteurs de la recherche de l'engagement commun du Gouvernement et du Parlement à poursuivre la dynamique de réinvestissement public dans un secteur crucial pour l'avenir de l'économie et de la société.
* 1 Loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur.
* 2 Ce programme relève du ministère de l'économie et des finances.