AVANT-PROPOS

Après une hausse continue depuis plusieurs années, les crédits de paiement du programme 175 seront stabilisés en 2025 sur le niveau historique atteint en 2024. Si la priorité ainsi donnée au patrimoine dans le contexte de maîtrise des finances publiques est saluée, cette préservation masque une décorrélation récurrente entre les crédits du programme et les besoins d'investissement nécessaires à sa préservation sur l'ensemble du territoire. La présentation annoncée d'un amendement gouvernemental portant abondement du programme est dès lors accueillie avec satisfaction, en dépit des difficultés posées par cette méthode au regard de l'exigence d'information du Parlement.

L'absence de marges de manoeuvre budgétaires a conduit au développement de nouveaux circuits de financement des patrimoines, notamment sous une forme partenariale et participative. La faible mobilisation suscitée par la collecte en faveur du patrimoine religieux appelle cependant à mieux calibrer les contours de ces opérations.

Le reste du programme étant marqué par un statu quo budgétaire, la rapporteure a souhaité mettre l'accent sur deux lignes budgétaires aux montants modestes mais aux effets cruciaux, et qui bénéficieront à la marge des mesures du plan « Culture et ruralité » : les crédits dédiés à l'ingénierie architecturale dans les secteurs protégés d'une part, et ceux destinés à l'enrichissement des collections muséales d'autre part. Sur les difficultés rencontrées par les opérateurs de l'archéologie préventive, l'absence de diagnostic partagé entre le ministère, l'Inrap et les collectivités territoriales appelle à une évaluation.

Enfin, en dépit de plusieurs évolutions encourageantes au cours des derniers mois, la transition énergétique du bâti patrimonial continue de constituer un impensé du budget de l'État.

I. UNE STABILISATION BUDGÉTAIRE EN TROMPE-L'oeIL

Avec des crédits de paiement (CP) atteignant 1,2 milliard d'euros (+ 0,61 % par rapport à la LFI pour 2024), le programme « Patrimoines » est stabilisé à son plus haut niveau budgétaire, et reste en 2025 le plus fortement doté des programmes relevant du ministère de la Culture.

Ses différentes actions connaissent cependant des évolutions contrastées. Surtout, ce programme est le seul à enregistrer une baisse de ses autorisations d'engagement (AE), qui plus est dans des proportions considérables (-23 %).

 

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI2024

PLF2025

Évolution

LFI2024

PLF2025

Évolution

1 - Monuments historiques

523,1

487,7

-7,3 %

507,7

492,8

-3,5 %

2 - Architecture et espaces protégés

37,8

37,9

+ 0,2 %

37,8

37,9

+ 0,2 %

3 - Musées

655,4

406

-38 %

431,1

441,9

+ 2,5 %

4 - Archives

82,3

29

-64,7 %

36,5

51

+ 39,8 %

8 - Enrichissement des collections

9,8

9,7

-0,7 %

9,8

9,7

-0,7 %

9 - Archéologie préventive

167,9

168

-

167,7

168

-

Cette apparente stabilisation des crédits appelle en conséquence plusieurs observations.

· Un niveau de crédits historique, qui ne permettra cependant pas de répondre aux immenses besoins d'investissement pour le patrimoine monumental

Dans le contexte de maîtrise des finances publiques, la stabilisation du budget des patrimoines est accueillie avec soulagement par les acteurs du secteur. Cette première approche doit cependant être nuancée :

- selon l'expression consacrée, la sauvegarde et l'entretien du patrimoine monumental se heurteront au cours des prochaines années à un « mur d'investissements » indispensables, dans un contexte de renchérissement des opérations. Face à cette situation, les crédits de paiement du programme ne sont pas à la hauteur des enjeux ;

- l'évolution tracée pour les prochaines années est plus défavorable encore, avec des crédits d'investissement en baisse de 341 millions d'euros.

· Une correction budgétaire bienvenue, au détriment de l'information du Parlement

Faisant part des mêmes inquiétudes, la ministre de la Culture a annoncé, lors de son audition devant la commission le 5 novembre, la présentation d'un amendement gouvernemental portant abondement du programme à hauteur de 200 millions d'euros en CP (soit une augmentation de 17 % par rapport au PLF) et de 300 millions d'euros en AE (soit une augmentation de 26 %).

Indiquant qu'aucun fléchage de ces crédits supplémentaires n'avait encore été décidé, la ministre a néanmoins annoncé qu'ils permettront « un effort supplémentaire de 55 millions d'euros pour les monuments historiques en région », auquel s'ajoutera « une enveloppe de 23 millions d'euros pour les musées dans les territoires ». Elle a également estimé qu'ils permettront « d'être à la hauteur de la situation » sur plusieurs grands projets, parmi lesquels les châteaux et domaines de Versailles, de Fontainebleau et de Chambord, le Mobilier national ainsi que le Palais de la Porte Dorée. Elle a enfin évoqué des financements supplémentaires pour les centres de conservation et d'études archéologiques (CCEA).

L'appréciation de la commission ne peut bien entendu porter que sur les crédits présentés dans le PLF ; il faut cependant souligner que l'importance de l'abondement annoncé conduira à une reconfiguration majeure du programme, bienvenue et même indispensable. Si la rapporteure se félicite de la priorité ainsi donnée aux patrimoines, elle regrette que l'annonce tardive de ces financements additionnels, qui résulte du contexte exceptionnel de préparation du PLF, ne permette pas au Parlement de se prononcer sur leur répartition.

La commission soutiendra l'adoption de l'amendement gouvernemental d'abondement de crédits et, le cas échéant, se montrera attentive à leur répartition au sein du programme.

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