B. LA POLITIQUE SPATIALE FRANÇAISE A PLUS QUE JAMAIS BESOIN DE S'ASSURER D'UN JUSTE RETOUR SUR INVESTISSEMENT
1. Après un effort budgétaire soutenu en gestion, les crédits dédiés à la recherche spatiale se stabilisent pour atteindre la cible prévue par la LPR
Alors que la loi de programmation prévoyait une cible de 1,907 Md€ pour le programme 193 « Recherche spatiale » (P193) pour l'exercice 2025, le PLF atteint cette cible avec un budget de 1,916 Md€ en AE et en CP, en très légère hausse par rapport à l'an dernier. Cette stabilisation des crédits dédiés à la recherche spatiale s'inscrit dans la continuité des décisions prises les années précédentes en faveur d'un renouveau du soutien public accordé à la politique spatiale, une mobilisation de 9 Mds€ sur la période 2023-2025 ayant été annoncée lors de l'ouverture du Congrès Astronautique International à Paris en septembre 2022.
Le rapporteur salue cette continuité, tout en constatant qu'il existe un risque de sous-exécution de la LPR pour le P193 sur l'exercice 2024 dans la mesure où le décret du 21 février 2024 a annulé 192,9 M€ de crédits tandis que le projet de loi de finances de fin de gestion prévoit une annulation supplémentaire de 100 M€ de crédits sur ce programme.
2. La contribution française au budget triennal de l'Agence spatiale européenne pourrait toutefois être durablement affectée par les décisions budgétaires prises en 2024
Le rapporteur relève toutefois que l'effort de gestion porte sur un décalage du versement de la contribution française au budget triennal de l'Agence spatiale européenne (ESA), à hauteur de 200 M€, ce qui est sans conséquence opérationnelle sur la conduite des programmes spatiaux du Cnes. Alors que la contribution annuelle prévisionnelle de la France était de l'ordre d'1,1 Md€, elle a été abaissée à 864 M€ pour 2024.
La France est désormais le deuxième contributeur national après l'Allemagne, avec des engagements budgétaires qui s'élèvent respectivement à 3,2 et à 3,5 Md€ sur la période 2023-2025. Le rapporteur s'interroge quant à la capacité de souscription de la France pour les années à venir, cette capacité devant être déterminée d'ici la prochaine Conférence ministérielle de 2025 qui fixera le budget de l'ESA pour la période 2026-2028.
Source : commission des affaires économiques, à partir des données budgétaires
Aujourd'hui, l'enjeu pour la France est surtout d'améliorer son « retour sur investissement » vis-à-vis de la politique spatiale européenne en fonction de ses priorités politiques, économiques, industrielles, scientifiques et technologiques, notamment :
· l'impérative nécessité d'assurer les prochains lancements d'Ariane 6 après le succès du vol inaugural du 9 juillet dernier pour maintenir l'autonomie d'accès à l'espace de la France et de l'Europe ;
· l'exploitation des nouvelles opportunités et des nouveaux besoins grâce à Ariane 6, en particulier pour la mise en orbite des constellations commerciales de connectivité, en parallèle des commandes institutionnelles ;
· l'engagement des entreprises françaises dans le déploiement de la constellation européenne de connectivité sécurisée, indispensable pour soutenir la filière satellitaire française qui connaît un déficit de compétitivité et souffre de difficultés conjoncturelles en 2024 ;
· le besoin d'intensifier le niveau de concurrence au sein du secteur industriel spatial, en accompagnant le développement des jeunes entreprises innovantes et des acteurs émergents, en particulier dans le domaine des lanceurs et des micro-lanceurs ;
· le développement des technologies réutilisables et moins consommatrices d'énergie pour préparer l'avenir de l'exploration spatiale.
Dans ce contexte, le rapporteur estime que la fixation du futur niveau de souscription de la France devrait s'accompagner d'une réflexion plus globale sur la gouvernance spatiale européenne et sur l'articulation des rôles, des programmes et des financements entre l'ESA et la Commission européenne, afin de mieux définir nos priorités.