C. L'AUGMENTATION DU NOMBRE DE DIPLÔMÉS DE L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE NE POURRA ÊTRE ASSURÉE SANS REMÉDIER AU DÉCLIN D'ATTRACTIVITÉ DU MÉTIER D'ENSEIGNANT

Pour former davantage de jeunes dans ses filières qui perdent en attractivité, l'enseignement agricole doit impérativement maintenir de petits effectifs, ouvrir davantage de classes et élargir l'éventail d'options proposées dans les établissements. Pour cela, il est essentiel de bénéficier d'un vivier d'enseignants à la hauteur.

Or, si les difficultés de recrutement ont eu un impact limité sur la rentrée dans l'enseignement agricole dans la mesure où 98,7 % des postes étaient pourvus au 1er octobre 2023, le métier d'enseignant traverse aujourd'hui une crise d'attractivité sans précédent, à laquelle n'échappera pas l'enseignement technique agricole dans le cas d'une montée en charge du nombre de postes offerts. Pour tenter de répondre à cette crise structurelle, le Gouvernement a mis en place depuis la rentrée 2023/2024 un « pacte enseignant » à destination des enseignants et conseillers principaux d'éducation pour revaloriser leurs rémunérations.

1. Un transfert de 76,8 millions d'euros depuis le programme 141 pour mettre en oeuvre le « pacte enseignant » dans l'enseignement agricole

Le « pacte enseignant », annoncé en avril 2023 par le Président de la République, vise à revaloriser la rémunération de l'ensemble des professeurs et conseillers principaux d'éducation agricole par une augmentation de certaines indemnités, une fluidification du déroulement de carrière et l'exercice de missions complémentaires pour améliorer l'accompagnement des élèves, le fonctionnement des établissements et renforcer la capacité de l'enseignement agricole à accomplir ses missions.

Ces personnels volontaires s'engagent dans la réalisation de missions complémentaires sur la base du volontariat. Ces missions sont rémunérées à hauteur de 1 250 euros annuels. Chaque agent peut percevoir jusqu'à 3 parts (soit 3 750 euros) voire 6 parts lorsque les missions bénéficient à la voie professionnelle (soit 7 500 euros).

Le financement du « pacte enseignant » dans l'enseignement agricole

Un transfert de 76,8 millions d'euros additionnel au projet de loi de finances pour 2024 sera opéré depuis le programme 141 « Enseignement scolaire public du second degré » pour financer la mise en oeuvre du « pacte enseignant » dans l'enseignement agricole. Ce transfert portera la hausse réelle du programme 143 à 176,8 millions d'euros, soit une augmentation de 10 % des crédits.

Dans les détails, un transfert à hauteur de 34 millions d'euros permettra de financer la partie « socle » du « pacte enseignant », soit l'augmentation inconditionnelle des enseignants et CPE et les mesures d'amélioration de leurs carrières. Ceci correspond à une augmentation en fonction de l'ancienneté, entre 100 et 230 euros nets de plus par mois pour les enseignants bénéficiant de l'ISOE (indemnité de suivi et d'orientation des élèves), sans condition, effective depuis la rentrée 2023.

Un autre transfert de 42,8 millions sera opéré pour la partie « briques de pacte » pour les enseignants volontaires.

Les enseignants de l'enseignement agricole ont globalement adhéré au pacte, aussi bien dans l'enseignement public que privé : 58 % des agents éligibles y ont souscrit et 65 % des briques disponibles ont été attribuées, représentant en moyenne 2,6 briques par enseignant volontaire (soit environ 240 euros mensuels supplémentaires pour les personnels engagés).

Au 30 septembre 2023, les briques distribuées se répartissent entre les différentes missions de la manière suivante :

La mise en oeuvre des mesures comme le « pacte enseignant » et l'allocation à destination des élèves au cours de périodes de formation en milieu professionnel viennent cependant alourdir les charges de nombreux établissements qui alertent d'ores et déjà sur des situations particulièrement sensibles.

2. Un recrutement à bac+ 5 en décalage avec les spécificités de l'enseignement agricole

Depuis 2010, la réforme du recrutement et de la formation des personnels enseignants des premier et second degrés et des personnels d'éducation a élevé au master (bac+ 5) le niveau de recrutement par concours.

Or, l'enseignement agricole se distingue de l'enseignement dispensé par l'Éducation nationale de par l'existence de spécialités techniques et professionnelles comme l'agroéquipement, pour lesquelles le recrutement est particulièrement coûteux et difficile. Dans ces conditions, l'obligation de recrutement à un niveau de master 2 peut s'avérer particulièrement bloquante pour certains établissements.

Pour pallier ces difficultés et permettre à l'ensemble des apprenants de l'enseignement agricole de bénéficier d'un ensemble varié de spécialisations, le rapporteur invite le Gouvernement à réfléchir à la possibilité de mettre en place, pour certaines disciplines techniques et professionnelles, un recrutement au niveau licence. Pour éviter que les enseignements ne perdent en qualité, les enseignants nouvellement recrutés pourraient bénéficier d'une formation adaptée aux besoins au sein de l'École nationale supérieure de formation de l'enseignement agricole (ENSFEA). Ce type de dérogations pourrait également constituer une réponse intéressante à la crise d'attractivité du métier d'enseignant.

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La commission de la culture, de l'éducation et de la communication a émis, lors de sa réunion plénière du 29 novembre 2023, un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 143 « Enseignement technique agricole » du projet de loi de finances pour 2024.

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