B. LES IMPAYÉS DE LOYER : UN CONTENTIEUX DE MASSE, UNE PROCÉDURE LONGUE ET COMPLEXE
Selon les données du récent rapport de la Cour des comptes 2 ( * ) se fondant sur les chiffres des années 2018 et 2019, soit avant la crise sanitaire, il y a environ 500 000 impayés constatés par commandements de payer par an (environ 140 000 dans le parc social, soit 3,1 % des locataires, et 350 000 dans le parc privé, soit 4,9 % des locataires). Ces impayés se traduisent par environ 130 000 assignations devant le juge et 120 000 décisions, soit plus d'une division par trois, ce qui signifie que la dette a été acquittée ou qu'une solution amiable a été trouvée. Sur les 120 000 décisions, il y a 70 000 expulsions fermes et 50 000 conditionnelles, c'est-à-dire assorties d'un échéancier strict de paiement .
Ces décisions d'expulsion se traduisent par 66 000 commandements de quitter les lieux, 33 000 demandes de concours de la force publique, dont seulement 15 000 sont effectivement mis en oeuvre .
Cette énumération montre que beaucoup de situations se résolvent sans recourir, au final, à la force publique, que la procédure est complexe et nécessite de nombreux actes du propriétaire comme des juges et, enfin, qu'elle peut être particulièrement longue.
Des procédures pouvant durer deux à trois ans
De fait, si la longueur réelle de la procédure fait débat, on évoque souvent 24 à 36 mois - mais ce n'est pas toujours le cas -, il faut bien distinguer et comprendre les deux parties de la procédure.
Il y a tout d'abord celle où le locataire peut bénéficier d'un délai pour apurer la dette locative, qui est de trois ans maximum. C'est un délai suspensif, qui s'arrête au premier incident de paiement. Il est de l'intérêt réciproque des parties puisque le locataire se met en règle et garde son logement tandis que le propriétaire retrouve l'intégralité de ses fonds.
Mais il y a un second volet, après la décision d'expulsion, au cours duquel le juge peut de nouveau accorder des délais jusqu'à trois ans et le préfet refuser le concours de la force publique. Là, en général, la situation est bloquée : le locataire n'a plus vraiment intérêt à payer et c'est le propriétaire qui supporte indûment l'incapacité de l'État à reloger le ménage en difficulté ou à faire respecter la loi.
* 2 https://www.ccomptes.fr/fr/publications/la-prevention-des-expulsions-locatives