V. LA BONNE TRAJECTOIRE DE L'AFP
Conformément aux engagements pris dans le contrat d'objectif et de moyens 2019-2023, la subvention versée par l'État à l'AFP demeure stable en 2023 , avec 134,9 millions d'euros, soit 36,3 % de l'ensemble des crédits du programme « Presse et Médias » et 42 % des recettes.
Avec l'AFP, la France dispose d'une des trois agences de presse de taille mondiale, avec AP et Reuters .
A. DES RÉSULTATS PLUS QU'ENCOURAGEANTS
Dans son rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2020 4 ( * ) , le rapporteur évoquait en détail les trois défis auxquels devait répondre l'Agence : une situation financière fragile, une stratégie éditoriale à affiner et la concurrence des grands acteurs de l'Internet.
Force est de constater que l'Agence a su s'adapter et atteindre une situation plus favorable, en dépit d'un contexte qui, depuis 2019, a profondément évolué.
Tout d'abord , la situation financière a connu une forte amélioration ces quatre dernières années. Pour la première fois depuis plus de 10 ans, l'AFP affiche ainsi des résultats nets positifs quatre années de suite.
RÉSULTAT NET DE L'AFP
(en millions d'euros)
Il convient cependant de noter que le résultat net de l'année 2021 est positivement impacté par des événements non récurrents, comme le règlement d'un litige financier.
L'AFP a mené un plan d'économie de 12,4 millions d'euros , tout en embauchant 70 journalistes sur la période 2018-2021. En particulier, les travaux au siège historique de la place de la Bourse à Paris dégagent 2,5 millions d'euros d'économie par an.
Ensuite , l'AFP a su adapter sa production aux attentes de ses clients, en axant son développement sur la vidéo et surtout l'investigation numérique ou « vérification des faits », avec des recettes supplémentaires combinées qui ont plus que compensé la baisse du texte et de la photographie.
Enfin , l'AFP s'est pleinement insérée dans le combat sur les droits voisins des éditeurs et des agences de presse, suite au vote de la loi du 24 juillet 2019. L'Agence a conclu un accord avec Google pour un montant demeuré confidentiel, mais jugé satisfaisant . Des négociations sont actuellement toujours en cours avec les autres plateformes concernées. L'AFP a pu mettre en place les dispositions de la loi sur l'intéressement des journalistes, qui toucheront un montant minimum de 275 euros en 2023.
B. ET POURTANT, DE NOUVEAUX DÉFIS...
Si elle semble aujourd'hui sur une trajectoire de nouveau positive, l'AFP va cependant entrer dans une zone de fortes turbulences . La négociation du prochain contrat d'objectif et de moyens, qui doit avoir lieu en 2023 pour les cinq années suivantes , doit être l'occasion d'adapter les objectifs et les moyens de l'Agence à une nouvelle donne.
Comme la plupart des activités économiques, l'Agence va en effet subir les conséquences de l'inflation, et ce via deux canaux.
D'une part, si elle est moins concernée par la hausse des prix du papier que la presse écrite, la situation extrêmement défavorable de cette dernière devrait la pousser à conduire des mesures d'économie au détriment de l'ensemble de ses fournisseurs, dont l'AFP.
D'autre part, l'inflation est un phénomène mondial, qui frappe de nombreux pays plus lourdement que la France. Afin de conserver ses agents en poste en France et à l'étranger, l'AFP va devoir mener une politique salariale se traduisant par des hausses de rémunération des personnels, que ce soit en France ou à l'étranger , pour un montant estimé à plus de 5 millions d'euros en 2023.
Le prochain contrat d'objectif et de moyens devra donc impérativement tenir compte de cette situation qui pénalise fortement l'AFP, en tenant compte de la capacité qu'a eu l'Agence à assurer une transformation complexe dans de bonnes conditions et sans recourir à des dotations publiques au-delà de ce qui était prévu .
Le refus du gouvernement de prendre en compte les recommandations exprimées par la commission en juillet sur les conséquences de la hausse des prix du papier justifie des réserves sur les crédits présentés.
*
* *
En conséquence, la commission de la culture, de l'éducation et de la communication a décidé, lors de sa réunion plénière du 2 novembre 2022, de s'abstenir sur l'adoption des crédits du programme 180 « Presse et médias » de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2023 et s'en remettra, dans ces conditions, à la sagesse du Sénat .
* 4 https://www.senat.fr/rap/a19-145-42/a19-145-429.html#toc160