III. À REIMS, LA MISE EN SYNERGIE DES OUTILS DE LA POLITIQUE DE LA VILLE AU SERVICE D'UNE STRATÉGIE DE TERRITOIRE
Reims est un exemple de la mise en oeuvre d'une stratégie de territoire à travers la mise en synergie des outils de la politique de la ville et du renouvellement urbain.
Reims est la plus grande ville de France concentrant plus de 40 % de logements sociaux , ceux-ci étant d'ailleurs situés pour un tiers d'entre eux en QPV. La concentration est encore plus forte si on regarde plus spécifiquement les PLAI, les logements sociaux les moins chers, qui sont à 59 % dans les QPV ou à la frontière de ceux-ci. Le taux de logements sociaux a même progressé à Reims entre 2016 et 2019, passant de 44,8 % à 48,9 %.
A. LE NPNRU : UN PROJET URBAIN ET UNE POLITIQUE DE PEUPLEMENT
Le NPNRU représente un enjeu stratégique pour la ville afin de faire régresser la ségrégation et de développer plus de mixité . Dans cette perspective, le NPNRU permettra la destruction de 1 768 logements sociaux, dont seulement 50 % seront reconstruits et pour une large part en dehors de l'unité urbaine de Reims, dans le territoire plus large du Grand Reims afin d'assurer un rééquilibrage géographique.
Cette politique volontariste autour du bâti prendra tout son sens via une politique de peuplement tout aussi déterminée de « mixité inversée ». Le but est de maintenir le taux de relogement en QPV en dessous de 50 %. Par ailleurs, la convention intercommunale d'attribution (CIA) a retenu le principe d'une attribution en QPV, hors 1 er quartile, de 70 % au lieu de 50 %.
B. LA SYNERGIE ENTRE ÉDUCATION, EMPLOI ET TRANQUILLITÉ
Concernant les outils propres à la politique de la ville, ce qui caractérise le Grand Reims, c'est le déploiement d'une stratégie globale coordonnant les instruments touchant l'éducation, l'emploi et la tranquillité résidentielle.
En matière de tranquillité résidentielle , tout d'abord, le Grand Reims a décidé en 2018 avec l'aide de l'État d'exiger, dans le cadre de la convention d'abattement de la TFPB avec les bailleurs sociaux , un véritable effort de transparence sur l'usage des fonds et une action renforcée en matière de tranquillité. En effet, l'abattement représente 3,5 millions d'euros par an. Il est aujourd'hui employé à 60 % pour développer le gardiennage et mettre en place un centre de surveillance inter-bailleurs permettant de centraliser le suivi de la vidéo surveillance. Des réunions tripartites, bailleurs-collectivité-préfecture, sont organisées toutes les six semaines. D'abord contraints, les bailleurs perçoivent désormais comme gagnant-gagnant ces évolutions car elles facilitent la bonne tenue de leur patrimoine et la maîtrise des situations difficiles avec les locataires.
Par ailleurs, depuis 2021, Reims a obtenu d'entrer dans l'expérimentation « bataillon de la prévention » sur le quartier Croix-Rouge . Une équipe de 13 personnes, six éducateurs, six médiateurs (adultes relais) et un coordinateur a été validée. Mais seulement neuf recrutements ont été réalisés, faute d'attractivité suffisante des postes car il ne s'agit pas de CDI, et les postes d'éducateurs souffrent de la concurrence de la hausse des salaires consentis dans le domaine médico-social après le covid. Le différentiel est de 182 € par mois. La commission a donc adopté un amendement 11 ( * ) pour compenser cette différence. Aujourd'hui, le bataillon représente un budget d'un million d'euros porté pour deux tiers par l'État et un tiers par le Grand Reims.
Dans le travail quotidien, l'équipe du bataillon fait le lien sur le terrain à l'occasion de l'arpentage du quartier avec deux autres outils : la cité éducative pour les plus jeunes et la cité de l'emploi pour les plus âgés .
Les coordinateurs des cités de l'emploi et du bataillon sont localisés dans les mêmes bureaux, à la limite du QPV, facilitant le travail en commun. L'animation de la cité de l'emploi est assurée par une association partenaire qui a pour objectif de développer un « collectif emploi ». Il s'est notamment traduit par la mise en place d'une initiative originale pour « aller vers » les publics éloignés de l'emploi et lever tous les freins au retour au travail. Elle est intitulée « caravane de l'emploi » et consiste à démarcher les demandeurs et proposer directement des postes au pied des immeubles. Cette opération organisée en 2021 et 2022 est encourageante mais les difficultés sont souvent profondément enracinées. L'impossibilité de recruter dix maîtres-nageurs pour le centre aqua-ludique de la métropole géré par l'UCPA montre toute l'ampleur de la tâche.
Les cités éducatives, l'autre maillon de l'action dans les quartiers, sont labellisées sur le quartier Croix-Rouge depuis 2020 et depuis 2022 sur le quartier d'Orgeval-Walbaum . Ces deux cités sont conçues comme des « soeurs » et ont le même coordinateur pour maximiser les effets positifs. Le budget de chaque cité est de 255 000 euros par an, auquel s'ajoute le poste de coordinateur pris en charge par la collectivité. Sur Croix-Rouge, les effets de la cité sur le taux de réussite au brevet est déjà sensible.
* 11 http://www.senat.fr/amendements/2022-2023/114/Amdt_II-95.html