Avis n° 70 (2022-2023) de Mme Laurence GARNIER , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 25 octobre 2022

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N° 70

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 25 octobre 2022

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur le projet de loi relatif à l' accélération de la production d' énergies renouvelables (procédure accélérée),

Par Mme Laurence GARNIER,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Laurent Lafon , président ; M. Max Brisson, Mme Laure Darcos, MM. Stéphane Piednoir, Michel Savin, Mme Sylvie Robert, MM. David Assouline, Julien Bargeton, Pierre Ouzoulias, Bernard Fialaire, Jean-Pierre Decool, Mme Monique de Marco , vice-présidents ; Mmes Céline Boulay-Espéronnier, Else Joseph, Marie-Pierre Monier, Sonia de La Provôté , secrétaires ; MM. Maurice Antiste, Jérémy Bacchi, Mmes Annick Billon, Alexandra Borchio Fontimp, Toine Bourrat, Céline Brulin, Samantha Cazebonne, M. Yan Chantrel, Mme Nathalie Delattre, M. Thomas Dossus, Mmes Sabine Drexler, Laurence Garnier, Béatrice Gosselin, MM. Jacques Grosperrin, Jean Hingray, Jean-Raymond Hugonet, Claude Kern, Mikaele Kulimoetoke, Michel Laugier, Pierre-Antoine Levi, Jean-Jacques Lozach, Jacques-Bernard Magner, Jean Louis Masson, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Philippe Nachbar, Olivier Paccaud, Damien Regnard, Bruno Retailleau, Mme Elsa Schalck, M. Lucien Stanzione, Mmes Sabine Van Heghe, Anne Ventalon, M. Cédric Vial .

Voir le numéro :

Sénat :

889 (2021-2022)

AVANT-PROPOS

Compétente en matière de protection du patrimoine, la commission de la culture s'est saisie pour avis de ce projet de loi afin de s'assurer que ses dispositions ne mettent pas en péril le patrimoine culturel en France.

Sur le rapport de Laurence Garnier, elle s'est félicitée que le texte n'introduise aucune dérogation aux dispositifs de protection patrimoniale existants dans le but de développer les énergies renouvelables (EnR).

Inquiète de l'impact de plus en plus significatif des projets d'EnR sur le patrimoine et les paysages et des fractures territoriales qui pourraient en découler, elle a souhaité déposer trois amendements visant à garantir une meilleure prise en compte des problématiques patrimoniales et de l'avis des communes concernées pour le déploiement des projets de grande dimension, dans un souci d'en améliorer l'acceptabilité.

La commission de la culture a acquis la conviction que patrimoine et EnR doivent être conjugués et non opposés . Elle considère que la concertation des habitants et des élus locaux à l'élaboration des projets est essentielle afin de rassembler les Français sur les enjeux environnementaux, au risque sinon de voir s'accroître les motifs de division.

I. LA LÉGISLATION ACTUELLE ASSURE UNE PRISE EN COMPTE DES ENJEUX PATRIMONIAUX AVANT L'INSTALLATION DE DISPOSITIFS DE PRODUCTION D'ÉNERGIES RENOUVELABLES

Les projets d'EnR sont soumis, au même titre que les autres projets de construction, d'aménagement ou de travaux, à des dispositions visant à garantir qu'ils ne portent pas atteinte à la préservation du patrimoine .

A. EN MATIÈRE ARCHITECTURALE ET PAYSAGÈRE

Plusieurs dispositions permettent de concilier le développement des EnR avec la protection du patrimoine.

Les projets d'EnR sont soumis, dans les espaces protégés, bâtis ou naturels, à l'avis de l'architecte des Bâtiments de France (ABF) . Celui-ci peut, à cette occasion, assortir son avis de prescriptions ou de recommandations motivées permettant d'assurer la compatibilité du projet avec la conservation et la mise en valeur de ces espaces.

AVIS CONFORME

= projets nécessitant l'accord de l'ABF

AVIS SIMPLE

= projets faisant l'objet d'un avis de l'ABF sans portée contraignante

Concerne les projets situés dans :

• le périmètre délimité des abords, ou à défaut d'un tel périmètre, ceux qui entrent dans le champ de visibilité d'un monument historique dans un rayon de 500 mètres autour de celui-ci (art. L. 621-32 du code du patrimoine) ;

• le périmètre d'un site patrimonial remarquable (art. L. 632-1 du code du patrimoine).

Concerne les projets situés dans :

• le périmètre des 500 mètres, lorsqu'ils n'entrent pas dans le champ de visibilité du monument historique ;

• les sites inscrits au titre du code de l'environnement.

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Ce contrôle s'opère aussi sur les demandes visant la pose de panneaux photovoltaïques sur la toiture des immeubles . Si le code de l'urbanisme interdit, en principe, que l'installation de panneaux destinés à un usage domestique puisse être refusée sur le fondement des règles relatives à l'aspect extérieur des constructions inscrites dans le plan local d'urbanisme (PLU) (art. L. 111-16), il préserve la possibilité de la refuser lorsque des intérêts patrimoniaux sont en jeu (art. L. 111-17) : les monuments historiques, les abords, les sites patrimoniaux remarquables, les parcs nationaux, les sites inscrits ou classés et les immeubles protégés pour motif patrimonial dans le PLU ne sont pas assujettis à l'interdiction définie à l'article L. 111-16. Le refus doit être justifié au regard des caractéristiques du bâtiment ou de considérations architecturales ou paysagères.

Les projets d'EnR les plus importants (éoliennes en mer, parcs éoliens terrestres, parcs solaires) sont par ailleurs soumis à une obligation d' évaluation environnementale avant leur éventuelle autorisation. Celle-ci comprend la réalisation d'une étude d'impact qui comporte un volet consacré à l'analyse des effets du projet sur le patrimoine et le paysage environnants . L'objectif de cette étude est à la fois d'inciter le porteur de projet à intégrer correctement son projet dans son environnement, d'éclairer l'autorité administrative dans sa prise de décision et d'informer le public autour du projet.

400 000

3%

environ de leurs avis concernent des projets d'installation d'EnR

L'essentiel des avis des ABF en matière d'EnR concerne la pose d'installations photovoltaïques . Les porteurs de projets éoliens semblent avoir bien intégré le fait que l'installation d'éoliennes est fortement déconseillée dans l'environnement d'un monument historique, dans les sites patrimoniaux remarquables et dans les limites d'un bien inscrit sur la liste du patrimoine mondial et de sa zone tampon.

B. EN MATIÈRE D'ARCHÉOLOGIE PRÉVENTIVE

La prise en compte du patrimoine archéologique est également assurée . Les piliers d'éolienne, les champs solaires, ainsi que les câbles de raccordement au réseau de distribution d'électricité qui leur sont liés, sont des aménagements susceptibles de toucher des vestiges archéologiques.

Le service régional de l'archéologie (SRA) a la possibilité de prescrire des opérations de diagnostic archéologique afin de déterminer si le terrain recèle un potentiel archéologique. Il peut également prescrire des fouilles afin de recueillir les éventuelles données archéologiques présentes sur le site. Selon la sensibilité archéologique du site ou le résultat du diagnostic, le SRA peut demander la modification de la consistance du projet afin d'en réduire l'impact sur les vestiges.

L' étude d'impact doit intégrer et traiter l'enjeu archéologique pour les projets soumis à l'obligation de réalisation d'une telle étude.

Les diagnostics en lien avec les projets d'EnR représentent une part modeste de l'activité de l'INRAP - de l'ordre de 1 à 3 % selon les années -, mais en nette augmentation . Ces opérations, généralement situées en zones rurales, ont permis d'explorer des zones qui n'étaient jusqu'ici pas ou peu fouillées et documentées.

Diagnostics liés à un projet éolien

Diagnostics liés à un projet solaire

2020

46

dont 15 dans les Hauts-de-France
et 17 en Nouvelle-Aquitaine

11

2021

23

dont 13 dans les Hauts-de-France

17

Source : Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP)

II. LE PROJET DE LOI DÉPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT NE REMET PAS EN CAUSE LES DISPOSITIFS EXISTANTS DE PROTECTION DU PATRIMOINE CULTUREL

Le projet de loi a pour but d'accélérer :

- les projets d'EnR et les projets industriels nécessaires à la transition énergétique par la mise en place de mesures d'urgence temporaires ;

- le développement de l'énergie solaire ;

- le développement de l'éolien en mer.

Il comprend également des dispositions liées au financement des EnR et au partage de la valeur.

S'il ne comporte aucune disposition spécifique relative au déploiement de l'éolien terrestre, cette forme d'EnR est concernée par de nombreuses dispositions du projet de loi.

A. LA PRÉSERVATION DE L'AVIS CONFORME DE L'ABF POUR LES PROJETS D'ÉNERGIE RENOUVELABLE EN ESPACES PROTÉGÉS

Dans l'objectif de lever les freins pesant sur le déploiement des moyens de production d'EnR, on aurait pu craindre que le Gouvernement propose de déroger aux procédures visant à garantir la protection du patrimoine . C'est lui qui avait été à l'initiative des dérogations au principe de l'avis conforme de l'ABF mises en place par la loi « ELAN » du 23 novembre 2018 dans le but de faciliter l'implantation d'antennes de téléphonie mobile et de lutter contre l'habitat indigne, insalubre et en péril.

Le rapport de la mission conduite par Damien Botteghi relative à l'accélération et à la simplification des procédures pour renforcer l'indépendance industrielle, énergétique et agricole en France, qui a constitué une source d'inspiration pour la rédaction du projet de loi par le Gouvernement, recommandait ainsi de réduire la portée de l'avis de l'ABF en transformant son avis conforme en avis simple pour faciliter l'installation de panneaux solaires dans les sites patrimoniaux remarquables.

Le Gouvernement n'a heureusement pas retenu cette proposition.

D'une part, aucun article visant à étendre les exceptions à l'avis conforme ne figure dans le projet de loi .

D'autre part, les enjeux patrimoniaux ont été pris en compte pour l'instauration, par l'article 11, d'une obligation d'équipement des parkings extérieurs de plus de 2 500 m² en ombrières photovoltaïques sur au moins la moitié de leur surface. Ne sont pas soumis à cette obligation les gestionnaires de parkings qui feraient face à des contraintes patrimoniales. Par ailleurs, l'obligation ne dispensera pas les gestionnaires de parking de déposer une demande d'autorisation d'urbanisme préalablement à cette installation : l'ABF conservera donc la possibilité, en espaces protégés, de refuser l'installation ou d'émettre des prescriptions pour garantir son intégration harmonieuse dans le paysage architectural et patrimonial.

B. UNE VIGILANCE NÉCESSAIRE DE LA COMMISSION LORS DE LA DISCUSSION PARLEMENTAIRE

La commission de la culture restera attentive à ce qu'aucune dérogation aux règles en matière de protection du patrimoine ne soit introduite au cours de la discussion parlementaire.

La mise en place de dérogations aux règles existantes en matière de protection du patrimoine ne serait pas justifiée : elle aurait un impact marginal sur l'accélération des projets d'EnR, tout en ayant des effets désastreux à long terme sur la conservation et la mise en valeur de notre patrimoine, dégradant ainsi la qualité du cadre de vie de nos concitoyens et portant atteinte à l'attractivité touristique de la France.

Les statistiques démontrent que les ABF ne constituent pas un réel frein , ni aux projets d'EnR, ni à leur déploiement rapide.

du territoire national couvert par un espace protégé

environ de projets d'EnR refusés par l'ABF

d'instruction des dossiers en moyenne par l'ABF (sur 2 mois impartis)

Lors de leurs auditions, ni la direction générale des patrimoines du ministère de la culture, ni les ABF n'ont manifesté d'opposition de principe au développement des EnR . Les refus opposés à la pose de panneaux photovoltaïques en espaces protégés s'expliquent principalement par le caractère standardisé des installations projetées, souvent peu adaptées au bâti ancien et difficilement intégrables dans le paysage architectural.

Une instruction de la ministre de la culture est en cours d'élaboration sur la question du photovoltaïque en espaces protégés . Destinée aux ABF, elle devrait permettre d'homogénéiser leurs pratiques dans l'instruction de ce type de demandes et de donner aux collectivités territoriales et aux particuliers davantage de visibilité sur les attendus.

En matière d'archéologie préventive, les prescriptions de diagnostics et de fouilles restent modestes . Tous projets d'aménagement confondus, seuls 8 % d'entre eux font l'objet chaque année d'une demande de diagnostic archéologique et moins de 2 % donnent lieu à une fouille. Selon l'INRAP, moins de 10 % des projets d'EnR ayant donné lieu à un diagnostic conduisent à des fouilles . En matière de projets éoliens, le sous-sol n'étant affecté que sur la superficie du pilier, le SRA limite au maximum les prescriptions de fouilles pour ne pas ralentir le lancement des projets, dans la mesure où le diagnostic suffit souvent à identifier les éléments archéologiques à l'endroit où le pilier sera implanté. Des demandes de modification du projet peuvent également intervenir pour éviter la prescription de fouilles.

Le ministère de la culture s'est montré rassurant sur la capacité des ABF et de l'INRAP à absorber le surcroît d'activité généré par une multiplication des projets d'EnR du fait de ce texte. Une vigilance sera de rigueur dans les prochaines années pour s'assurer que les effectifs restent suffisants pour répondre au niveau de l'activité sans allongement des délais . Il y aurait sinon un risque de fragilisation des dispositifs de sauvegarde du patrimoine qui ne manqueraient pas d'être contestés.

III. DES PROGRÈS RESTENT À ACCOMPLIR DANS LA PRISE EN COMPTE DES ENJEUX PATRIMONIAUX ET DES ATTENTES LOCALES POUR RENDRE LES PROJETS PLUS ACCEPTABLES

A. MIEUX INTÉGRER LES CONSIDÉRATIONS PATRIMONIALES LORS DE L'ÉLABORATION DES PROJETS D'ÉNERGIE RENOUVELABLE

Sans être forcément le signe d'un changement d'approche du Gouvernement en matière de patrimoine, son choix de ne pas abaisser le niveau des protections patrimoniales démontre qu'il est conscient de l'enjeu que peuvent revêtir l es problématiques patrimoniales pour emporter l'adhésion des populations locales à un projet d'EnR .

À l'heure actuelle, les problèmes d'acceptabilité et d'attractivité
des projets d'EnR constituent des obstacles à leur déploiement au moins aussi grands que la complexité des procédures administratives.

Compte tenu de l'attachement des populations à leur patrimoine et à leur cadre de vie, déroger aux règles de protection du patrimoine serait un élément susceptible d'accroître les résistances à l'encontre des projets au niveau local.

Le développement des EnR, en particulier des éoliennes, est un sujet porteur de fractures territoriales . Il peut faire naître des oppositions entre les zones rurales, où ces projets sont majoritairement installés, et les zones urbaines, où une large part de l'énergie produite y est consommée. Afin de limiter ce risque de fracture, il est essentiel d'améliorer la prise en compte de l'impact des projets d'EnR sur le cadre de vie en amont de la décision .

des Français estiment que les éoliennes dégradent la beauté des campagnes

des Français considèrent qu'elles font perdre aux campagnes leur attractivité

Source : Sondage Opinion Way pour la SPPEF consacré aux Français et aux éoliennes, mars 2022

Les personnes auditionnées se sont accordées sur le fait que la qualité du diagnostic architectural et paysager contenu dans les études d'impact était souvent décevante et ne permettait pas d'appréhender correctement les effets réels des projets. Il n'est pas rare que plusieurs projets soient déployés de manière concomitante sur une même zone sans que leurs effets conjugués ne soient évalués.

Il est regrettable que les services du patrimoine et de l'archéologie soient rarement associés à l'élaboration du projet, c'est-à-dire en amont du dépôt de la demande d'autorisation d'urbanisme . Leur expertise serait pourtant utile dès ce stade pour disposer d'un premier diagnostic et orienter ou adapter la localisation ou l'emprise du projet vers une zone dans laquelle l'impact sur le patrimoine et le cadre de vie serait moindre. Les ABF comme les services régionaux de l'archéologie sont investis d'une mission de conseil qui les rend aptes à répondre, le cas échéant, aux sollicitations des porteurs de projet. L'ABF peut les accompagner même lorsque le lieu d'implantation envisagé est situé hors des espaces protégés au titre du code du patrimoine.

Même s'il rallonge la durée de la phase amont, le renforcement du dialogue à cette étape constitue un gain sur le temps total de la procédure . La phase initiale de diagnostic ne doit donc pas être négligée lors de l'élaboration des projets. Elle est un facteur contribuant à raccourcir ensuite les délais d'instruction de la demande d'autorisation d'urbanisme, à réduire le risque d'un refus ou d'une demande de modification et à limiter les contestations ultérieures.

Sous l'effet des progrès technologiques, les éoliennes ont considérablement évolué au cours de la dernière décennie. Si ces évolutions ont permis d'accroitre significativement la puissance des éoliennes, et donc la quantité d'énergie qu'elles produisent, elles ont aussi des impacts de plus en plus importants sur le patrimoine et les paysages , sans véritable évolution du cadre législatif. Avec l'augmentation de la hauteur des mâts, les éoliennes sont visibles depuis des zones de plus en plus éloignées. Le repowering (remplacement partiel ou total d'une installation par une autre de plus grande puissance pour en augmenter le rendement) peut avoir des effets désastreux sur les paysages, dans la mesure où des projets qui avaient été élaborés intelligemment à une certaine échelle ont un impact tout autre lorsque celle-ci s'accroît.

Pour répondre à ces problématiques, la commission de la culture a souhaité déposer un amendement ( COM-426 ) visant à étendre l'avis conforme de l'ABF aux projets de parcs éoliens terrestres de grande dimension entrant dans le champ de visibilité d'un monument historique ou d'un site patrimonial remarquable dans un périmètre de 10 kilomètres autour de celui-ci . Cet amendement poursuit trois objectifs :

- améliorer le contrôle sur les projets éoliens terrestres ;

- inciter les porteurs de projets à soigner davantage leurs études d'impact ;

- impliquer l'ABF dans l'examen des projets de repowering concernant des installations situées dans l'environnement proche des espaces protégés au titre du code du patrimoine.

Face au développement récent de l'éolien en mer, la commission a également souhaité déposer un amendement ( COM-427 ) pour interdire, à compter des prochains appels d'offres, les projets situés à moins de 40 kilomètres des côtes afin d'en limiter l'impact visuel , conformément aux préconisations de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages dans son avis du 16 juin 2021.

B. ASSOCIER DAVANTAGE L'ÉCHELON LOCAL À LA PRISE DE DÉCISION

Les projets d'EnR font aujourd'hui l'objet d'une participation du public, dont les modalités varient en fonction de la nature du projet : consultations publiques, consultations par voie électronique. Il apparaît difficile d'apprécier dans quelle mesure la dématérialisation des procédures de consultation du public constitue un progrès ou une régression d'un point de vue démocratique. Le taux de couverture numérique reste encore partiel et les contributions aux consultations en ligne sont généralement de moins bonne qualité. L'article 2 du projet de loi prévoit ainsi d'étendre le régime de participation du public par voie électronique aux projets sous déclaration préalable de travaux et aux permis de démolir. Dans les faits, ces dispositions devraient principalement concerner les projets photovoltaïques au sol de petite taille.

Quoi qu'il en soit, l'association des populations et des élus locaux à la prise de décision en matière d'EnR est un élément indispensable pour réduire l'impact des installations sur le cadre de vie et faciliter leur déploiement sur le territoire .

L'exemple de la commune de Vay en Loire-Atlantique illustre le manque de considération accordée aujourd'hui à l'avis des communes et de leurs habitants. Cette commune, qui n'est pas hostile par principe aux parcs éoliens puisqu'elle en compte déjà un sur son périmètre, se voit aujourd'hui imposer par la cour administrative d'appel de Nantes un nouveau projet éolien, qui a pourtant fait l'objet d'un avis défavorable de l'architecte des bâtiments de France, du conseil municipal, du commissaire enquêteur et du préfet en raison des atteintes à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages qu'il pourrait générer.

Forte de cet exemple, la commission a souhaité déposer un amendement ( COM-425 ) destiné à renforcer les pouvoirs des élus locaux sur l'implantation des installations de production d'EnR. Il vise à donner la possibilité aux conseils municipaux de s'opposer au dépôt de la demande d'autorisation des projets qui n'auraient pas tenu compte de leurs observations initiales. Il accorde le même pouvoir aux communes qui entreraient dans le champ de visibilité d'un parc éolien.

*

* *

La commission a émis un avis favorable à l'adoption de ce projet de loi dont elle s'est saisie pour avis, sous réserve de l'adoption des amendements qu'elle a ainsi adoptés .

EXAMEN EN COMMISSION

MARDI 25 OCTOBRE 2022

___________

M. Laurent Lafon , président . - Nous examinons ce matin le rapport pour avis de notre collègue Laurence Garnier sur le projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables. Ce texte, renvoyé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, sera discuté en séance publique à compter du mercredi 2 novembre prochain.

Nous allons prendre connaissance avec beaucoup d'intérêt, ma chère collègue, de votre analyse et de vos propositions sur ce texte, la question des modalités d'installation des éoliennes sur nos territoires, qu'elles soient terrestres ou marines, constituant désormais un sujet de préoccupation majeur pour de nombreux élus locaux, en particulier ruraux.

Mme Laurence Garnier , rapporteure pour avis . - Notre commission a été saisie pour avis, il y a un peu plus de quinze jours, du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables (EnR). Dans ce délai, j'ai procédé à une série d'auditions afin de déterminer si ce texte était susceptible de mettre en péril notre patrimoine culturel. J'ai entendu la direction générale des patrimoines et de l'architecture du ministère de la culture, l'Association nationale des architectes des Bâtiments de France (ANABF), l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), ainsi que plusieurs associations de sauvegarde du patrimoine, à savoir Maisons paysannes de France, Patrimoine-Environnement, Sites et monuments et Vieilles Maisons françaises.

Je me suis évidemment aussi appuyée sur l'expérience de la Loire-Atlantique, dont je suis élue, où l'éolien terrestre est déjà bien développé et où le premier parc éolien en mer a été mis en place au large du Croisic. J'ai également été profondément marquée par l'expérience récente de la commune de Vay. Cette commune, qui n'est pas hostile par principe aux parcs éoliens - elle en compte déjà un sur son périmètre - se voit aujourd'hui imposer par la cour administrative d'appel de Nantes un nouveau projet éolien, lequel a pourtant fait l'objet d'un avis défavorable de l'architecte des bâtiments de France (ABF), du conseil municipal, du commissaire enquêteur et du préfet en raison des atteintes à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages qu'il pourrait générer.

Ces différents exemples m'ont convaincue que la transition énergétique ne pourrait pas se faire en opposant patrimoine et énergies renouvelables. Il faut au contraire parvenir à les conjuguer, sinon les atteintes portées au cadre de vie des habitants des communes impactées par des projets éoliens feront naître des mécontentements et des oppositions qui freineront systématiquement le déploiement des énergies renouvelables, sans compter qu'elles menaceront aussi notre cohésion. En effet, il est clair que le développement des éoliennes est un sujet d'oppositions entre les zones rurales, où ces projets sont majoritairement installés, et les zones urbaines, où une large part de l'énergie y est consommée.

L'objet du projet de loi est d'accélérer la production d'énergies renouvelables pour renforcer notre souveraineté énergétique. À cette fin, le texte met en place un certain nombre de dérogations pour faciliter les projets d'énergies renouvelables et les projets industriels nécessaires à cette transition énergétique : le Gouvernement les décrit comme des mesures d'urgence temporaires. Il comporte aussi des dispositions spécifiques pour contribuer au développement de l'énergie solaire et de l'éolien en mer. En outre, il fixe des règles en matière de financement des énergies renouvelables et de partage de la valeur. Même s'il ne prévoit aucune disposition spécifique relative à l'éolien terrestre, cette forme d'énergie renouvelable est bel et bien concernée par tous les dispositifs prévus dans le projet de loi.

Quel est l'impact de ce projet de loi sur le patrimoine culturel ?

À la lecture de l'exposé des motifs, on aurait pu craindre le pire. Celui-ci pointe en effet clairement la multiplicité et la complexité des procédures administratives comme l'une des principales causes du retard français en matière de développement des énergies renouvelables.

Le rapport de la mission, conduite par Damien Botteghi, relative à l'accélération et à la simplification des procédures pour renforcer l'indépendance industrielle, énergétique et agricole en France, qui a constitué une source d'inspiration pour la rédaction du projet de loi, recommandait de réduire la portée de l'avis de l'ABF, en transformant son avis conforme en avis simple pour faciliter l'installation de panneaux solaires dans les sites patrimoniaux remarquables (SPR). Mais le Gouvernement n'a heureusement pas retenu cette option.

Le projet de loi ne comprend aucun article dérogeant aux dispositifs de protection patrimoniale existants dans le but de développer les énergies renouvelables. Il ne comporte pas non plus d'éléments susceptibles d'améliorer ces dispositifs et de répondre à certaines préoccupations de la population dans le cadre du déploiement de ces projets au cours des dernières années. Cela signifie donc que les projets d'EnR, quel que soit le type d'énergie concerné, resteront soumis, en l'état actuel du texte, à l'avis de l'ABF dans les espaces protégés, au même titre que les autres projets de construction, d'aménagement ou de travaux, à savoir un avis conforme dans les abords des monuments historiques et dans les SPR et un avis simple dans les sites inscrits au titre du code de l'environnement, ainsi que dans les abords des monuments historiques lorsque le projet n'entre pas dans le champ de visibilité du monument.

Par ailleurs, les services régionaux d'archéologie préventive conserveront la possibilité de prescrire des diagnostics et des fouilles et pourront, le cas échéant, demander que la consistance du projet soit modifiée afin d'en réduire l'impact sur les vestiges.

Les enjeux patrimoniaux ont été clairement pris en compte dans le cadre de l'instauration, par l'article 11, d'une obligation d'équipement des parkings extérieurs de plus de 2 500 mètres carrés en ombrières photovoltaïques sur au moins la moitié de leur surface. Les gestionnaires de parkings qui feraient face à des contraintes patrimoniales ne seront pas soumis à cette obligation. En outre, l'obligation ne dispensant pas du dépôt d'une demande d'autorisation d'urbanisme, l'ABF pourra contrôler, avec son avis conforme, la bonne intégration de ces dispositifs dans les espaces protégés.

Je ne vous cache pas que plusieurs autres dispositions inquiètent les associations de sauvegarde du patrimoine, mais elles n'entrent pas dans le champ de compétence de notre commission. Deux articles sont ici visés.

Premièrement, l'article 3 autorise à recourir à la procédure de modification simplifiée du plan local d'urbanisme (PLU) au lieu de la procédure de révision actuellement nécessaire afin de réduire un espace boisé classé dans le but de permettre l'installation de projets d'EnR. Cette question relève de la commission des affaires économiques, chargée à la fois des questions liées aux forêts et à l'urbanisme.

Deuxièmement, l'article 4 reconnaît aux projets d'EnR le caractère de « raison impérieuse d'intérêt public majeur ». À cet égard, je souhaite vous rassurer sur le fait que cette notion, tirée du droit de l'Union européenne, n'emporte aucune conséquence sur la protection du patrimoine culturel. Elle permet exclusivement de déroger aux règles en matière de protection des espèces protégées et de leur habitat. Elle n'est employée dans aucun autre code pour fonder d'éventuelles dérogations. J'ai bien évidemment alerté le rapporteur de la commission saisie au fond, Didier Mandelli, sur ces différents points.

Au final, nous pouvons être rassurés par la préservation de l'équilibre existant entre développement des EnR et protection du patrimoine. La loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan) avait prévu des dérogations à l'avis conforme, mais le Gouvernement n'a pas réitéré ici cette démarche.

Cela dit, il faudra nous montrer vigilants pendant la discussion parlementaire, car certains amendements pourraient viser à transformer en avis simple l'avis conforme des ABF ou à revenir sur certains dispositifs de protection patrimoniale, vécus comme des freins au développement des énergies renouvelables.

À mon sens, la mise en place de telles dérogations ne serait pas justifiée : elle aurait un impact marginal sur l'accélération des projets d'EnR, tout en ayant des effets désastreux à long terme sur la qualité de vie de nos concitoyens et sur notre attractivité touristique en ce qu'elle porterait atteinte à la mise en valeur de notre patrimoine. J'en veux pour preuve les effets du passage à l'avis simple concernant la dégradation des sites inscrits au titre du code de l'environnement. En effet, cet avis ne permet pas de faire face à des situations dans lesquelles s'exerce une certaine pression.

J'ai longuement échangé avec les représentants de l'ABF et de l'Inrap, leurs interventions ne constituent pas un réel frein aux projets d'EnR, ni à leur déploiement rapide. Les ABF délivrent leurs autorisations en moyenne en 34 jours et seuls 10 % des demandes font l'objet d'un refus. En matière d'archéologie préventive, les prescriptions de diagnostics et de fouilles restent modestes, les services régionaux d'archéologie préventive limitent au maximum les prescriptions de fouilles à la suite de diagnostics pour ne pas ralentir le lancement des projets.

Ni la direction générale des patrimoines ni les ABF n'ont manifesté d'opposition de principe au développement des EnR. Les refus opposés à la pose de panneaux photovoltaïques dans les espaces protégés s'expliquent principalement par le caractère standardisé des installations projetées, souvent peu adaptées au bâti ancien et difficilement intégrables dans le paysage architectural. Une instruction de la ministre de la culture est en cours d'élaboration sur la question du photovoltaïque dans les espaces protégés. Destinée aux ABF, elle devrait permettre d'homogénéiser leurs pratiques dans l'instruction de ce type de demandes et de donner aux collectivités territoriales et aux particuliers davantage de visibilité sur les attendus.

Dans ces conditions, il serait particulièrement regrettable que de telles dérogations soient mises en place : si les projets d'EnR souffrent aujourd'hui d'un déficit d'acceptabilité, c'est précisément parce qu'ils ne prennent pas suffisamment en compte le cadre de vie et l'opinion de l'échelon local. Le retard français en matière d'énergies renouvelables tient autant au manque d'adhésion des populations locales qu'à certaines procédures administratives jugées contraignantes. Compte tenu de l'attachement des populations à leur patrimoine et à leur cadre de vie, déroger aux règles de protection du patrimoine serait au contraire un élément susceptible d'accroître les résistances à l'encontre de ces projets. Il serait plus opportun de faire en sorte d'améliorer la prise en compte de l'impact des projets d'EnR sur le cadre de vie en amont de la décision. Or, aujourd'hui, le diagnostic architectural et paysager des études d'impact est souvent bâclé et ne permet pas d'appréhender correctement les effets réels des projets. Les services du patrimoine et de l'archéologie m'ont dit n'être pratiquement jamais associés à l'élaboration des projets en amont du dépôt de la demande d'autorisation d'urbanisme, alors qu'ils sont investis d'une mission de conseil qui les rend aptes à répondre, le cas échéant, aux sollicitations des porteurs de projets. Leur expertise serait pourtant utile dès ce stade pour disposer d'un premier diagnostic et pour orienter ou adapter la localisation ou l'emprise du projet vers une zone dans laquelle l'impact serait moindre.

Le renforcement du dialogue en amont pourrait constituer un réel gain sur le temps total de la procédure, en raccourcissant ensuite les délais d'instruction de la demande d'autorisation d'urbanisme, en réduisant le risque de refus et en limitant les contestations ultérieures.

Ne l'oublions pas, sous l'effet des progrès technologiques, les éoliennes ont considérablement évolué au cours de la dernière décennie. Si ces évolutions ont permis d'accroître significativement leur puissance, elles ont aussi des impacts de plus en plus importants sur les paysages. Avec l'augmentation de la hauteur des mâts, elles sont visibles depuis des zones de plus en plus éloignées. Le repowering , c'est-à-dire l'opération qui consiste à remplacer une installation par une autre de plus grande puissance, a souvent des effets désastreux sur les paysages, dans la mesure où des projets qui avaient été élaborés intelligemment à une certaine échelle auront un tout autre impact.

C'est la raison pour laquelle je vous proposerai deux amendements visant à répondre à ces problématiques : le premier vise à étendre l'avis conforme de l'ABF aux projets de parcs éoliens terrestres de grande dimension entrant dans le champ de visibilité d'un monument historique ou d'un site patrimonial remarquable dans un périmètre de 10 kilomètres autour de celui-ci, et le second tend à interdire, à compter des prochains appels d'offres, les projets éoliens maritimes situés à moins de 40 kilomètres des côtes afin d'en limiter l'impact visuel.

Au demeurant, il faut faire en sorte de mieux associer l'échelon local à la prise de décision pour réduire l'impact des installations sur le cadre de vie et faciliter leur déploiement sur le territoire. De ce point de vue, on peut s'interroger sur l'opportunité des dispositions de l'article 2 visant à étendre la participation du public par voie électronique, dans la mesure où il est difficile d'apprécier dans quelle mesure la dématérialisation des procédures de consultation du public constitue un progrès ou une régression d'un point de vue démocratique. Ces évolutions devraient principalement concerner les projets photovoltaïques au sol de petite taille et non les autres types de projets en matière d'EnR.

Le rapporteur au fond Didier Mandelli, qui est attaché à l'idée de redonner du pouvoir aux maires dans le déploiement des EnR, proposera de renforcer la planification des projets d'énergies renouvelables, celle-ci s'étant faite jusqu'ici de manière assez désordonnée et sans consultation de l'échelon local. Pour ma part, je vous soumettrai un troisième amendement visant à renforcer le pouvoir des exécutifs locaux en ce qui concerne l'implantation des projets d'EnR.

Je crois vraiment que ces différentes évolutions sont de nature à rassembler les Français sur les enjeux environnementaux, au risque, dans le cas contraire, de voir s'accroître les motifs de division.

Mme Marie-Pierre Monier . - Un peu plus d'un an après l'adoption de la loi Climat et résilience, ce texte franchit un cap dans la décarbonation de notre pays. S'il nous faut agir vite, nous devons cependant être vigilants sur l'équilibre à maintenir, y compris dans une logique d'acceptabilité de la part de la population. Ne négligeons pas la préservation de notre patrimoine. Je sais pouvoir compter sur la vigilance de notre assemblée sur ce sujet.

Nous pourrons également tirer profit des apports des nombreuses auditions qui ont été organisées lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2023.

Les ABF nous ont alertés sur les effectifs dont ils ont besoin pour traiter dans de bonnes conditions l'ensemble des dossiers, ceux qui sont relatifs aux EnR étant appelés à augmenter de façon exponentielle. Ils ont également pointé la nécessité de renforcer l'ingénierie, particulièrement dans les zones rurales, afin d'améliorer en amont la qualité des projets. En matière d'énergies renouvelables, nous pouvons saluer la façon dont ils assurent, avec les services de l'archéologie préventive, le traitement des dossiers, car leur approche combine pragmatisme et prise en compte de la spécificité de chaque site. Ne rognons pas davantage leurs prérogatives au prétexte d'une accélération des dossiers. Ils ont encore en mémoire la loi Élan, qui a opéré un glissement de l'avis conforme vers l'avis simple dans plusieurs cas de figure. À cet égard, ils souhaitent disposer d'un bilan de la mise en oeuvre de ces dérogations. Même si le texte qui nous est proposé ne prévoit pas une extension de ces dérogations, restons très attentifs sur ce point.

L'article 11 impose l'équipement des parkings extérieurs de plus de 2 500 mètres carrés en ombrières photovoltaïques, mais cette mesure peut aussi bien concerner des parkings de supermarché que ceux du centre-ville à proximité de monuments. Il serait pertinent de préciser ce dispositif, afin de veiller à l'intérêt patrimonial. La préservation de notre patrimoine doit s'inscrire dans une approche globale au-delà des seuls sites patrimoniaux remarquables.

Pour conclure, j'évoquerai la mauvaise prise en compte du bâti ancien dans la politique de rénovation thermique. Les diagnostics de performance énergétique doivent être réalisés par des spécialistes ; les solutions techniques proposées doivent tenir compte des particularités des bâtiments construits avant le milieu du XX e siècle, elles ne doivent pas se focaliser sur les fenêtres et l'isolation extérieure. Il conviendrait de réfléchir à une évolution du mode de calcul de la performance énergétique à l'heure des objectifs ambitieux en matière de lutte contre l'artificialisation. Mieux valoriser notre bâti ancien apparaît comme une évidence.

Mme Céline Brulin . - Nous devons examiner au cours des prochains mois plusieurs textes relatifs à la politique énergétique. Or je déplore le manque de cohérence et de vision globale. Notre mix énergétique est plutôt efficace et performant, chaque production énergétique ne répondant pas aux mêmes besoins. Les dispositions visant à une accélération de l'implantation de projets d'énergies renouvelables tiennent pour partie au fait que la France a manqué durant ces quinze dernières années d'une vision globale en matière énergétique. J'estime qu'une politique énergétique se bâtit à une échéance de cinquante ans minimum.

Nous partageons votre position concernant le patrimoine. Restons très vigilants sur les lignes qui ont été définies dans le texte.

Assouplir les règles risque de cristalliser des oppositions. Le dialogue permet de dépasser les a priori .

Je rejoins le rapporteur au fond concernant le développement anarchique des éoliennes : nous avons besoin d'une vision plus globale de cet aménagement. Je peux comprendre que vous souhaitiez étendre l'avis conforme de l'ABF aux projets de parcs éoliens terrestres entrant dans le champ de visibilité d'un monument historique ou d'un site patrimonial remarquable dans un périmètre de 10 kilomètres. Vous souhaitez également interdire les projets d'éoliens maritimes situés à moins de 40 kilomètres des côtes. Toutefois, il ne suffit pas de prendre en compte la distance des côtes pour implanter les parcs. Le parc au large de Fécamp ne suscite pas de véritable opposition, contrairement à celui du Tréport, alors qu'ils sont quasiment à égale distance des côtes. Cependant, celui du Tréport est situé dans une zone de reproduction des poissons. Ne nous en tenons pas à des normes kilométriques, c'est trop administratif ! Prenons en compte la navigation, la réalité des fonds marins, notamment.

M. Thomas Dossus . - Gouverné à près de 80 % par le nucléaire, notre mix énergétique est tellement efficace que nous devons accélérer l'implantation des énergies renouvelables. La crise actuelle est aussi liée à cette impasse. Nous faisons face à court terme à l'urgence énergétique - nous avons dû rouvrir une centrale à charbon l'été dernier, et à plus long terme à la crise climatique. Certes, il faut préserver nos paysages et les 40 kilomètres au-delà des côtes, mais dans quelques années celles-ci seront profondément transformées. Nos tergiversations actuelles, par exemple sur la valeur patrimoniale d'un parking en centre-ville, paraîtront dérisoires si nous n'agissons pas rapidement en implantant des sources d'énergie décarbonée. Ce n'est pas forcément l'impact paysager qui suscite des résistances : le parc éolien du Beaujolais Vert avait été présenté comme un atout pour le territoire ; et c'est parce que nous y avons associé la population qu'il est devenu une attraction. L'argent des millionnaires sera insuffisant pour restaurer le patrimoine lorsque la crise climatique sévira.

M. Max Brisson . - Je remercie M. le président d'avoir obtenu la saisine pour avis de notre commission. Nous sommes peut-être le poil à gratter du Parlement et de l'exécutif, et c'est une bonne chose. Nous devrons d'ailleurs faire preuve de constance au cours du parcours législatif de ce texte. Je partage les remarques pertinentes de Céline Brulin concernant le morcellement de l'approche législative et le mix énergétique, mais j'ai une position divergente de celle de Thomas Dossus.

Je remercie la rapporteure pour avis de ses travaux dans des délais très brefs. Son rapport est équilibré, juste, rassurant, sans exclure les points de vigilance. L'objectif de développement des EnR est partagé, mais il se combine avec la nécessité de protéger notre patrimoine, des paysages magnifiques, ce qui fait la beauté de notre pays. À l'heure du développement durable, nous devons transmettre aux générations futures des paysages dans lesquels l'homme s'est inscrit. Le générique de l'émission télévisée La France défigurée mettait en avant un petit village - ma famille en est originaire - dont l'église était défigurée par un immense château d'eau. Il serait dommage qu'au XXI e siècle on ne soit pas capable d'éviter, pour les EnR, les erreurs passées dans le déploiement d'autres réseaux.

Le rapport de Laurence Garnier montre bien que notre pays a développé une forte expertise au travers des ABF. Leur rôle n'est pas remis en cause, mais la vigilance sera nécessaire sur les moyens développés pour garantir le développement des EnR et la protection de nos patrimoines. Il conviendra également de faire attention aux dérives quant au rôle plus restreint des ABF et ses conséquences depuis la mise en place de la loi Elan.

Nous soutiendrons les trois amendements de la rapporteure pour avis : l'extension de l'avis conforme de l'ABF aux projets de parcs éoliens terrestres situés dans un périmètre de 10 kilomètres autour d'un site patrimonial remarquable ; le déploiement des éoliennes en mer à 40 kilomètres minimum des côtes ; enfin, l'extension aux communes voisines des votes des conseils municipaux concernés. Ces mesures équilibrées visent à renforcer l'acceptabilité des projets par les élus et les populations. Ne passons pas en force, sinon les levées de boucliers seraient de plus en plus nombreuses. À forcer d'imposer, nous indisposerions !

M. Claude Kern . - À mon tour de féliciter notre rapporteure pour avis de son excellent travail réalisé dans un temps très contraint. Nous sommes tout à fait d'accord sur les aspects patrimoniaux : il y a des lignes à ne pas franchir, et les ABF doivent toujours être consultés. En revanche, une harmonisation des positions serait souhaitable pour l'installation de panneaux photovoltaïques intégrés au bâti neuf et à la limite des 500 mètres. Marie-Pierre Monier a raison, certains bâtis anciens ne permettront pas d'atteindre les performances énergétiques requises. La remarque de Céline Brulin sur les 40 kilomètres est pertinente pour éviter des refus systématiques. Enfin, pour ce qui est de la transmission aux générations futures, comme le disait Antoine de Saint-Exupéry : « Nous n'héritons pas de la terre de nos parents, nous l'empruntons à nos enfants. » Pour ces raisons, nous soutiendrons les trois amendements de notre rapporteure pour avis.

M. Olivier Paccaud . - Je suis ici le seul élu des Hauts-de-France, région particulièrement affectée par l'installation de l'éolien - surtout la Somme et le nord de l'Oise, où le taux de saturation est atteint. Je souscris totalement aux propos introductifs de Laurence Garnier à propos des zones rurales. J'ajoute que ce sont principalement les zones rurales « pauvres » qui sont touchées. Les éoliennes poussent là où les richesses et les entreprises font défaut. C'est le moyen pour de nombreuses municipalités d'obtenir un peu d'argent. Dans plusieurs communes de mon département, comme en Loire-Atlantique, des projets ont même été imposés contre la volonté des conseils municipaux et des populations. C'est un déni de démocratie ! Ce texte doit être l'occasion de rendre la souveraineté aux territoires. Accélérer la production d'énergies renouvelables, oui, mais pas à n'importe quel prix. Nous sommes évidemment tous attachés à la protection du patrimoine. Mais il ne faut jamais oublier l'acceptabilité par les populations concernées. Or, dans le texte initial, la population et les élus locaux n'existent pas.

De plus, on a oublié la méthanisation, qui a pourtant son importance et se développe de façon importante dans l'Oise. Les règles d'acceptabilité qui seront mises en place pour l'éolien devront aussi concerner les autres modes de production énergétique. Pour y parvenir, il faut engager un dialogue constant et rendre le pouvoir aux territoires.

M. Laurent Lafon , président . - « C'est de l'enfer des pauvres qu'est fait le paradis des riches », disait Victor Hugo.

M. Pierre Ouzoulias . - Je remercie beaucoup la rapporteure pour avis d'avoir porté des points importants, en particulier concernant l'archéologie préventive. Les zones choisies pour l'implantation d'éoliennes l'ont été par le passé pour des fortifications et des moulins.

J'aimerais me mettre dans la peau des élus du plateau de Millevaches, qui sont tout à fait opposés aux éoliennes : depuis deux à trois décennies, ils aménagent le paysage sans aucune aide de l'État ; ils ne supportent donc pas qu'un préfet veuille remettre en question leur travail au nom de l'intérêt collectif. Ce plateau, qui vit essentiellement du tourisme, ne doit pas être défiguré par des éoliennes. Aujourd'hui, l'opposition vient de gauche, de droite, mais aussi des zadistes de Tarnac. Ils veulent que soit entendue leur volonté de restaurer un environnement jusqu'alors préservé. Ils n'acceptent pas non plus que leurs propositions concernant d'autres énergies renouvelables, telles que la petite hydraulique, soient refusées. Les dix moulins médiévaux de la Triouzoune pourraient parfaitement fonctionner. Or la préfecture a opposé un refus absolu au projet, sans doute beaucoup plus compatible avec le respect des paysages. Cet autoritarisme est insupportable, car il met à mal la démocratie locale.

Dans certaines régions - le Puy-de-Dôme, la Corrèze, la Haute-Savoie, les Pyrénées-Atlantiques, entre autres -, les installations sont très souvent construites sur des sections de communes qui sont soumises à des règles d'usage particulières. Des conflits majeurs perdurent entre les « sectionnaux » et les communes sur l'installation des éoliennes. On est en train de saborder des institutions fondamentales pour redynamiser ces territoires. N'utilisons pas les éoliennes pour détruire un cadre tricentenaire !

Mme Laure Darcos . - Je remercie également la rapporteure pour avis et souligne que les ABF ne prennent pas en compte les nouveaux matériaux. D'après les remontées des maires ou des fédérations de collectivités, nombre de bâtiments classés pourraient être rénovés de façon plus respectueuse du développement durable. Je regrette que cette question ne puisse être traitée dans le cadre du projet de loi, faute de relever de son périmètre, mais notre commission pourrait s'y pencher à l'avenir. La rigidité des ABF ne contribue pas à l'apaisement des tensions qui se sont déjà fait jour il y a quelques années. Il est essentiel que ces derniers fassent évoluer leur doctrine pour répondre à l'urgence énergétique.

Mme Sabine Drexler . - La rapporteure déplorait la faible association des ABF à l'élaboration des projets d'énergies renouvelables. Mais quand bien même seraient-ils consultés en amont par les porteurs de projets, pourraient-ils répondre à ces demandes compte tenu du problème d'effectif qu'ils rencontrent ? La faiblesse des effectifs nous est signalée lors de chacune des auditions menées dans le cadre du projet de loi de finances.

Olivier Paccaud a parlé de l'installation d'éoliennes sur les territoires pauvres. J'évoquerai pour ma part l'isolation extérieure des maisons anciennes : en Alsace, des maisons à pans de bois sont actuellement recouvertes de polystyrène. Des aides financières sont attribuées pour ces travaux, mais l'ingénierie fait actuellement défaut pour accompagner les particuliers ou les collectivités.

Mme Sylvie Robert . - Nous voterons les amendements de la commission, à l'exception de celui qui interdit l'implantation des éoliennes en mer à moins de 40 kilomètres des côtes. L'application pratique en Bretagne, notamment dans la baie de Saint-Brieuc et au cap Fréhel, est impossible eu égard aux enjeux économiques. Déjà à 33 kilomètres, il faut plus d'une heure trente pour poser une éolienne ! Une distance à quinze ou vingt kilomètres me paraîtrait plus raisonnable.

Mme Monique de Marco . - Je suis, comme Max Brisson, élue de la région Nouvelle-Aquitaine, qui ne compte pas une seule éolienne. Pourquoi ? Parce que les contraintes à l'implantation sont trop fortes : météo, armée, opposants, tels que les chasseurs. Je suis très impatiente que nous en implantions pour développer les énergies renouvelables. Mais interdire l'implantation à moins de 40 kilomètres, c'est impossible chez nous en raison des nombreux hauts fonds.

Les avis et les refus systématiques des ABF sont trop contraignants, notamment pour le photovoltaïque sur des toitures. Il en est de même pour l'isolation en façade, avec l'interdiction de nouveaux matériaux. Quant au rapport au paysage, nous sommes tous habitués aux châteaux d'eau et aux 100 000 kilomètres de lignes à très haute tension ! Il faut juste aller au-delà de nos perceptions visuelles et alléger la réglementation.

M. Stéphane Piednoir . - Je sais le travail réalisé par Laurence Garnier. J'insisterai sur l'écoute des élus locaux, qui est essentielle. Ne mettons pas sous cloche le chantage à l'intéressement pour certaines communes. L'achat du silence des riverains est désormais monnaie courante, ce qui me scandalise.

Sur les ABF, je comprends qu'il faille aller très loin dans la protection du patrimoine, mais une harmonisation des critères d'appréciation s'impose sur l'ensemble du territoire, surtout si l'on s'oriente vers un avis conforme.

Mme Laurence Garnier , rapporteure pour avis . - Madame Monier, il faut effectivement aller vite tout en étant vigilant, y compris au cours de la navette parlementaire. Cette ligne de crête entre protection de notre patrimoine, notamment de ses paysages, et développement des énergies doit être tenue. La charge de travail des ABF est importante, puisque 180 architectes rendent chaque année 400 000 avis. Nous en sommes d'autant plus conscients qu'une charge de travail supérieure pourrait leur incomber en cas d'avis conforme.

Plusieurs d'entre vous ont évoqué la rénovation du bâti ancien. Ce sujet est d'une grande importance, a fortiori du fait des contraintes liées au « zéro artificialisation nette ». Il faudra travailler à la réhabilitation et à la valorisation de notre patrimoine ancien, tout en luttant contre le réchauffement climatique. Une nouvelle réglementation environnementale RE2020 impose à cet égard de prendre en compte les émissions de gaz à effet de serre dès la construction des immeubles. Nous n'en mesurons pas encore les effets, mais cela ne saurait tarder. La réflexion sur ce sujet mériterait d'être approfondie.

Madame Brulin, la règle des 40 kilomètres provient de la ligne d'horizon, qui serait de l'ordre de 33 kilomètres. Vous avez raison, il convient de préserver la faune marine. Pour autant, celle-ci se reconstitue différemment et s'adapte. La distance vise à protéger des effets visuels, et uniquement sur les projets dont les appels d'offres n'ont pas encore été attribués. C'est le progrès technologique de l'éolien flottant qui nous permet aujourd'hui de poser cette exigence.

Monsieur Dossus, 85 % des Français décrivent leur cadre de vie idéal comme étant rural. Il est de notre responsabilité de préserver ces paysages et de ne pas commettre les erreurs du passé.

Monsieur Brisson, la question est celle de l'équilibre, avec cette ligne de crête et des lignes rouges à ne pas franchir.

La question des ABF vous a tous beaucoup fait réagir. Une instruction du ministère de la culture en cours d'élaboration vise à homogénéiser ces pratiques parfois déconcertantes.

Monsieur Paccaud, vous avez raison, les enjeux sont aussi financiers pour les communes, les habitants et les agriculteurs aux revenus fragiles. Il est primordial de ne pas imposer les projets contre les élus et la population. Tel est le sens de mon amendement, identique à celui de Didier Mandelli. Il concerne également la méthanisation, même si je n'en ai pas parlé explicitement.

Monsieur Ouzoulias, l'archéologie préventive est un sujet extrêmement important, les vestiges pouvant être affectés par les opérations successives de repowering des éoliennes existantes. Dans le cadre d'un repowering , les nouvelles éoliennes ne sont pas implantées à l'emplacement des anciennes. Il faut réfléchir aux conséquences à l'horizon de 100 ans du parc d'éoliennes, lesquelles ont une durée de vie de quinze ans. Dans cette réflexion, la démocratie locale est primordiale. En effet, les habitants et les élus locaux, qui aiment leur territoire, sont les mieux placés pour le défendre. Et l'éloignement nourrit la défiance...

EXAMEN DES ARTICLES

Avant l'article 1 er

Mme Laurence Garnier , rapporteure pour avis . - L'amendement CULT.1 vise à permettre aux conseils municipaux de s'opposer à la demande d'autorisation d'urbanisme qui n'aurait pas tenu compte en amont de leurs observations initiales.

L'amendement CULT.1 portant article additionnel est adopté.

Après l'article 6

Mme Laurence Garnier , rapporteure pour avis . - L'amendement CULT.2 prévoit d'étendre l'avis conforme de l'ABF aux projets de parcs éoliens de grande dimension entrant dans le champ de visibilité, soit d'un monument historique, soit d'un site patrimonial remarquable, et situé dans un périmètre de 10 kilomètres autour de celui-ci.

L'amendement CULT.2 portant article additionnel est adopté.

Après l'article 12

Mme Laurence Garnier , rapporteure pour avis . - L'amendement CULT.3 prévoit de retenir un seuil de 40 kilomètres pour l'implantation des parcs éoliens en mer. Ce seuil tient compte des progrès technologiques de l'éolien flottant et ne s'appliquera qu'aux appels d'offres lancés à compter de l'entrée en vigueur de la loi.

L'amendement CULT.3 portant article additionnel est adopté.

M. Laurent Lafon , président . - Les amendements que nous venons d'adopter seront présentés demain matin à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Je vous propose d'autoriser Mme la rapporteure pour avis à procéder aux ajustements qui se révéleraient nécessaires lors de cette réunion et à redéposer en vue de la séance publique les amendements que la commission saisie au fond ne souhaiterait pas retenir.

Il en est ainsi décidé.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

sur proposition de Mme Laurence Garnier, rapporteure pour avis

Amendement COM-425
Avant l'article 1 er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - La sous-section 4 de la section 6 du chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l'environnement est ainsi rédigée :

« Sous-section 4

« Installations de production d'électricité renouvelable à partir de l'énergie mécanique du vent et installations de production de biogaz

« Art. L. 181-28-2 . - Sans préjudice des dispositions de l'article L. 181-5, le porteur d'un projet concernant une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent relevant du 2° de l'article L. 181-1 ou d'une installation de biogaz ou de ses ouvrages connexes définis par un décret en Conseil d'État, adresse au maire de la commune concernée, un mois au moins avant le dépôt de la demande d'autorisation environnementale, un résumé non technique de l'étude d'impact prévu au e du 2° du II de l'article L. 122-3.

« Dans un délai d'un mois à compter de l'envoi du document mentionné au premier alinéa du présent article par le porteur de projet et selon des modalités précisées par voie réglementaire, le maire de la commune dans le ressort territorial duquel il est envisagé d'implanter une installation mentionnée au même premier alinéa, ou l'un de ses adjoints dûment habilité, adresse au porteur de projet ses observations sur le projet.

« En l'absence de réaction passé ce délai, le conseil municipal est réputé avoir renoncé à adresser ses observations.

« Le porteur de projet adresse sous un mois une réponse aux observations formulées, en indiquant les évolutions du projet qui sont proposées pour en tenir compte.

« Le conseil municipal peut alors se prononcer par délibération motivée, soit en rendant un avis favorable, qui autorise le dépôt de la demande d'autorisation environnementale, soit en rendant un avis défavorable qui en interdit le dépôt.

« En l'absence de délibération dans un délai d'un mois, l'avis est réputé favorable.

« Art. L. 181-28-3 . - Sans préjudice des dispositions des articles L. 181-5 et L. 181-28-2, le porteur d'un projet concernant une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent relevant du 2° de l'article L. 181-1 adresse à tout maire d'une commune directement impactée en termes de visibilité par le projet d'implantation d'une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent sur le ressort territorial d'une commune limitrophe, un mois au moins avant le dépôt de la demande d'autorisation environnementale, un résumé non technique de l'étude d'impact prévu au e du 2° du II de l'article L. 122-3.

« Dans un délai d'un mois à compter de l'envoi du document mentionné au premier alinéa du présent article par le porteur de projet et selon des modalités précisées par voie réglementaire, le maire d'une commune mentionnée au même premier alinéa, ou l'un de ses adjoints dûment habilité, adresse au porteur de projet ses observations sur le projet.

« En l'absence de transmission d'observations passé ce délai, le conseil municipal d'une commune mentionnée au même premier alinéa est réputé avoir renoncé à adresser ses observations.

« Le porteur de projet adresse sous un mois une réponse aux observations formulées, en indiquant les évolutions du projet qui sont proposées pour en tenir compte.

« Le conseil municipal d'une commune mentionnée au même premier alinéa peut alors se prononcer par délibération motivée, soit en rendant un avis favorable, qui autorise le dépôt de la demande d'autorisation environnementale, soit en rendant un avis défavorable qui en interdit le dépôt.

« En l'absence de délibération dans un délai d'un mois, l'avis est réputé favorable. »

II. - La section 11 du chapitre VI du titre IV du livre IV du code de l'énergie est abrogée.

III. - Après l'article L. 422-2 du code de l'urbanisme, il est inséré un article L. 422-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 422-2-1 . - Par dérogation à l'article L. 422-2 du présent code et sans préjudice des dispositions de l'article L. 181-28-2 du code de l'environnement, l'autorité administrative de l'État, lorsqu'elle doit se prononcer sur l'implantation d'un ouvrage de production d'énergie solaire photovoltaïque répondant à certaines conditions de puissance et d'emprise au sol fixées par voie réglementaire, recueille l'avis conforme du maire concerné ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent, dans un délai de deux mois à compter du dépôt de la demande de déclaration préalable ou du permis de construire.

« Cet avis conforme est exprimé après délibération motivée de l'organe délibérant de la commune concernée ou de l'établissement public de coopération intercommunal compétent. Un avis favorable autorise le dépôt de la demande d'autorisation ou de la déclaration préalable. Un avis défavorable en interdit le dépôt. En l'absence de délibération dans un délai d'un mois à compter de la saisine de la commune concernée ou de l'établissement public de coopération intercommunal compétent par l'autorité administrative de l'État, l'avis est réputé favorable. »

IV.- Les dispositions du présent article s'appliquent aux projets qui font l'objet d'une demande d'autorisation, d'une part, ou d'une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'autre part, déposé à compter de la publication de la présente loi.

Objet

Cet amendement vise à renforcer les pouvoirs des élus locaux dans la prise de décision en matière d'implantation des projets d'EnR afin d'en améliorer l'intégration paysagère.

Il vise à donner la possibilité aux conseils municipaux de s'opposer au dépôt de la demande d'autorisation des projets qui n'auraient pas tenu compte de leurs observations initiales. Il accorde le même pouvoir aux communes qui entreraient dans le champ de visibilité d'un parc éolien.

Cette évolution apparait indispensable pour éviter que les projets d'EnR ne deviennent des sujets de divisions sociale et territoriale. Seule l'association des habitants et des élus locaux à l'élaboration des projets peut permettre de rassembler les Français sur les enjeux environnementaux en garantissant que le cadre de vie des habitants des communes accueillant les projets ne soit pas dégradé.

Amendement COM-426

I. Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La sous-section 2 de la section 6 du chapitre unique du titre VIII du livre I er du code de l'environnement est complétée par un article L. 181-28-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 181-28-1 A . - Les installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumises à évaluation environnementale systématique en application du II de l'article L. 122-1 du présent code ne peuvent être implantées que sur avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France, dans les conditions prévues à l'article L. 632-2 du code du patrimoine lorsque :

« 1° Elles sont visibles depuis un immeuble protégé au titre des monuments historiques en application des articles L. 621-1 et L. 621-25 du même code ou visibles en même temps que lui et situées dans un périmètre de 10 kilomètres autour de ce monument ;

« 2° Elles sont visibles depuis un site patrimonial remarquable mentionné à l'article L. 631-1 dudit code ou visibles en même temps que lui et situées dans un périmètre de 10 kilomètres autour de ce site. »

II. En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

TITRE I ER BIS

MESURES RELATIVES A L'EOLIEN TERRESTRE

Objet

Cet amendement vise à garantir une meilleure prise en compte des problématiques patrimoniales dans le développement des principaux projets éoliens terrestres.

Il prévoit d'étendre l'avis conforme de l'architecte des bâtiments de France (ABF) aux projets de parcs éoliens terrestres de grande dimension entrant dans le champ de visibilité, soit d'un monument historique (1°), soit d'un site patrimonial remarquable (2°), et situés dans un périmètre de 10 kilomètres autour de celui-ci.

Auditionnée par la commission des affaires économiques le 18 février 2020 sur la programmation pluriannuelle de l'énergie, la Première ministre, Élisabeth Borne, alors ministre de la transition écologique et solidaire, reconnaissait elle-même « le développement anarchique de l'éolien » terrestre et s'étonnait qu'on ait pu autoriser l'implantation de parcs éoliens en covisibilité avec des monuments historiques.

Au-delà d'assurer un meilleur contrôle des projets éoliens terrestres sur le plan patrimonial, les dispositions prévues par le présent amendement pourraient inciter les porteurs de projets à soigner davantage leurs études d'impact. Elles pourraient également permettre d'impliquer l'ABF dans l'examen des projets de repowering d'installations situées à proximité d'espaces protégés au titre du code du patrimoine.

Amendement COM-427

Article 12

Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

.... - La sous-section 3 de la section 6 du chapitre unique du titre VIII du livre I er du code de l'environnement est complété par un article L. 181-28-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 181-28-1-1 . - Les installations de production d'énergie renouvelable en mer sont installées à une distance minimale de 40 kilomètres des côtes. »

... . - Le ... s'applique aux appels d'offres lancés en application de l'article L. 311-10 du code de l'énergie à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

Objet

Cet amendement vise à concilier le développement des éoliennes offshore avec la préservation du littoral français .

Son I prévoit que les éoliennes en mer ne pourront pas être implantées à moins de 40 kilomètres des côtes de manière à en limiter l'impact visuel, particulièrement significatif compte tenu de l'absence d'écrans végétaux ou de reliefs contrairement aux paysages terrestres.

Ce seuil se fonde sur les recommandations formulées par le Conseil supérieur des sites, perspectives et paysages dans son avis du 16 juin 2021, et par le Conseil national de protection de la nature, dans son avis du 6 juillet 2021.

Le II prévoit une application à compter des prochains appels d'offres, afin de ne pas remettre en cause les appels d'offres en cours.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Lundi 10 octobre 2022

- Association nationale des architectes des bâtiments de France : MM. Fabien SÉNÉCHAL , président, Jean-Lucien GUENOUN , architecte des bâtiments de France et vice-président, et Marc LOUAIL , en charge des sujets liés à la rénovation énergétique du bâti.

- Institut national de recherches archéologiques préventives : M. Dominique GARCIA , président.

Mardi 11 octobre 2022

Table ronde des associations de sauvegarde du patrimoine :

- M. Christophe BLANCHARD-DIGNAC , président délégué de Patrimoine-Environnement,

- M. Julien LACAZE , président de Sites et monuments,

- M. Guy SALLAVUARD , vice-président de Maisons paysannes de France,

- M. Philippe TOUSSAINT , président de Vieilles maisons françaises.

Mercredi 19 octobre 2022

- Ministère de la culture - direction générale des patrimoines : MM. Jean-François HÉBERT , directeur général, Emmanuel ÉTIENNE , chef de service du patrimoine, adjoint au directeur général des patrimoines, et Godefroy LISSANDRE , adjoint au sous-directeur des monuments historiques et des espaces protégés.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl21-889.html

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