C. UNE RÉPONSE NATIONALE EN ATTENTE DE DISPOSITIONS LÉGISLATIVES
Les débats ne sont pas clos sur les procédures les plus efficaces pour prévenir ou faire cesser les atteintes au droit d'auteur, notamment pour aboutir au blocage, au déréférencement et à la fermeture des sites contrefaisants , dans le respect de la protection des données personnelles et sans coût disproportionné pour les intermédiaires techniques. L'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle (CPI) permet au juge, saisi par les ayants droit, de faire ordonner de telles mesures, notamment aux FAI et aux moteurs de recherche.
De manière récente, la jurisprudence a mis le coût des mesures techniques prononcées à la charge des intermédiaires . Depuis un jugement du TGI de Paris du 15 décembre 2017, afin de prévenir de nouvelles atteintes aux droits de la propriété intellectuelle, les mesures ordonnées aux moteurs de recherches en vue d'empêcher le référencement de sites contrefaisants portent sur l'intégralité de ces sites pris en tant que tels , indépendamment des chemins d'accès ou des pages spécifiques visés dans la demande (cf. également jugement du TGI de Paris du 25 mai 2018 et du 29 mai 2019). S'agissant des mesures concernant les FAI, depuis une ordonnance du TGI de Paris du 13 juillet 2018, l'actualisation des mesures de blocage déjà prononcées par jugement dans le cadre de l'article L. 336-2 du CPI peut être ordonnée en référé afin d'empêcher l'accès aux mêmes sites via de nouveaux chemins. Ces évolutions ouvrent la voie à un renforcement et à une plus grande efficacité de l'action des ayants droit sur le terrain judiciaire.
La loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine (loi « LCAP ») a modifié l'article L. 336-2 du CPI, afin de permettre au CNC d'engager des actions en cessation devant le tribunal de grande instance, ou soutenir à titre principal les actions engagées par les organisations professionnelles, en cas d'atteinte au droit d'auteur ou à un droit voisin occasionnée par le contenu d'un service de communication au public en ligne. Depuis la fin de l'année 2017, le CNC s'associe ainsi systématiquement aux actions initiées par les ayants droit , ce que son directeur général a tenu à souligner devant le rapporteur pour avis , permettant, à la suite d'un arrêt de la Cour de cassation daté du 5 juillet 2017 dans l'affaire « Allostreaming », de faire ordonner le blocage de sites pirates par les fournisseurs d'accès à Internet, ainsi que leur déréférencement par les moteurs de recherche, aux frais de ces intermédiaires techniques.
Enfin, la lutte contre le piratage se porte également contre la présence d'oeuvres protégées sur des plateformes de partage de vidéos en ligne par les internautes, telles YouTube ou Dailymotion . Dans ce cas, l'accent est mis sur l'utilisation, par les ayants droit et les plateformes, de technologies de marquage et de reconnaissance de contenus, permettant d'identifier les contenus protégés avant leur mise en ligne, et d'empêcher celle-ci.
Une étude conjointe a été confiée par le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, la Hadopi et le CNC à Jean-Philippe Mochon. Ce rapport, publié en janvier 2020, procède, sur la base de tests techniques détaillés, à une évaluation approfondie des technologies pertinentes et des outils de reconnaissance existants (principalement basés sur une technique de reconnaissance par empreintes numériques). Il conclut à leur réelle efficacité .
Le projet de loi audiovisuel comportait un ensemble de mesures, allant de la fusion du CSA et de la Hadopi à des dispositions techniques relatives aux sites « miroir ». La ministre de la culture, lors de son audition devant la commission le 10 novembre dernier, a souhaité pouvoir inscrire le plus rapidement possible une nouvelle version de ce texte, centrée sur cette problématique.
Le rapporteur pour avis ne peut qu'abonder dans ce sens, en rappelant que le niveau de piratage estimé en France représente l'équivalent de deux ans de soutien du CNC .
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Votre commission de la culture, de l'éducation et de la communication a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés au cinéma de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2021 .