AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Au moment d'examiner les crédits pour 2019 de la mission Travail et emploi, nous constations l'année dernière une forte baisse de ces crédits, qui était en fait essentiellement le résultat de l'extinction de dispositifs supprimés au cours des exercices précédents et d'effets de périmètres.
En 2020, le périmètre de la mission étant stabilisé, les crédits progresseraient de plus de 530 millions d'euros, soit 4,3 % en crédits de paiement, la progression des autorisations d'engagement étant moins marquée (321 millions d'euros ; + 2,4 %). La mission serait dotée de 13,73 milliards d'euros en AE et 12,98 milliards d'euros en CP.
Cette augmentation globale est le résultat d'évolutions contrastées des différents programmes qui composent la mission.
Le programme 102 regroupe les crédits dédiés à l'accompagnement des personnes éloignées de l'emploi. Alors que les dépenses liées à l'indemnisation des demandeurs d'emploi relevant des dispositifs de solidarité baisseraient, essentiellement du fait de l'amélioration de la conjoncture économique, l'État se désengagerait du financement de Pôle emploi une participation accrue étant demandée à l'Unedic.
Le politique menée depuis 2018 par la Gouvernement en matière de contrats aidés se poursuivrait en 2020. Cette politique repose sur un recours moins massif mais plus ciblé aux contrats aidés, qui s'inscrivent désormais dans le cadre de « parcours emploi compétences » PEC, associant emploi et formation. Une partie des économies permises par ce recentrage est mobilisé pour accorder un soutien accru au secteur de l'insertion par l'activité économique.
Votre rapporteur approuve cette approche qui rompt avec les pratiques anciennes de subventions publiques à l'emploi qui n'ont pas permis d'agir sur les causes profondes du chômage. Il s'étonne donc d'autant plus de l'empressement avec lequel le Gouvernement a décidé de prolonger et d'élargir le dispositif des emplois francs, alors même que ce dispositif, qui n'a pas fait l'objet de l'évaluation pourtant prévue par le législateur, semble donner des résultats très éloignés des objectifs fixés.
Une évaluation plus rigoureuse devrait être menée à propos de l'expérimentation visant à résorber le chômage de longue durée. Si ce dispositif donne certainement satisfaction à ses bénéficiaires et aux élus des territoires qui en bénéficient, la possibilité d'un changement d'échelle semble incertaine en raison du coût pour l'État de ce dispositif.
Comme en 2019, le programme 102 finance enfin des dispositifs présentés comme faisant partie d'un effort exceptionnel en faveur de l'emploi des jeunes dans le cadre du plan d'investissement dans les compétences (PIC) alors qu'il s'agit de dispositifs de droit commun.
Au total, les crédits du programme 102 baisseraient d'un peu plus de 127 millions d'euros (- 1,9 %).
Le programme 103 correspond au financement des dispositifs visant à soutenir l'emploi et à accompagner les mutations économiques. Au sein de ce programme, les crédits dédiés aux aides directes aux entreprises baisseraient, essentiellement sous l'effet de l'extinction de certains dispositifs. A l'inverse, les crédits dédiés au soutien des formations par alternance progresseraient du fait de la montée en charge de la réforme du financement de l'apprentissage prévue par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel 1 ( * ) .
Les dispositifs de baisse du coût du travail seraient maintenus et votre rapporteur salue la suppression à l'Assemblée nationale de l'article 79 du projet de loi initial, qui restreignait le bénéfice des exonérations en faveur des publics fragiles ayant recours à des prestataires de services à la personne.
Le resserrement de l'aide aux créateurs et repreneurs d'entreprise (Acre) un an après son élargissement témoigne d'un manque d'anticipation du Gouvernement qui ne peut qu'interpeller dans un domaine des politiques publiques où la stabilité des dispositifs est un facteur de leur efficacité. S'il peut être justifié de remettre en question une partie des avantages attachés au statut de micro-entrepreneur pour éviter les effets d'aubaine, il convient de ne pas fragiliser les activités existantes en écourtant la durée de l'exonération sur laquelle certains entrepreneurs pouvaient légitimement compter.
Votre rapporteur regrette le manque de détails fournis au Parlement quant à l'utilisation des crédits regroupés dans l'action consacrée au PIC. Il note au demeurant que ces crédits, qui ont été nettement sous-consommés en 2018, ont été minorés par un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale et seront inférieurs aux crédits votés pour 2019. Votre rapporteur s'interroge donc sur l'ampleur réelle de l'effort présenté comme exceptionnel par le Gouvernement.
Les crédits du programme 103 progresseraient ainsi de 670 millions d'euros, soit 12,8 %.
La mission comprend également, au sein du programme 111, des crédits dédiés aux actions en faveur de la santé et de la sécurité au travail, qui baisseraient légèrement, alors que la baisse des crédits dédiés à la formation des conseillers prud'hommes et des défenseurs syndicaux baisserait plus fortement, pour des raisons essentiellement cycliques.
À l'inverse, la mesure de l'audience des organisations syndicales et patronales en préparation du nouveau cycle d'évaluation de la représentativité nécessite une progression des crédits alloués aux projets informatiques dédiés.
Les crédits du programme 111 progresseraient dans l'ensemble de plus de 11 millions d'euros (+ 13 %).
Enfin, les fonctions supports des politiques du ministère du travail verraient leurs crédits baisser en raison d'effets de périmètre et de la réduction globale des effectifs. Les crédits du programme 155 baisseraient ainsi d'environ 20,6 millions d'euros, soit 3 %.
L'Assemblée nationale a adopté deux articles additionnels. L'article 81 corrige une incohérence juridique conduisant certains chefs d'entreprise à se voir imposer une double cotisation au titre de la contribution à la formation professionnelle. L'article 82 constitue une demande de rapport au Parlement sur les conséquences pour les employeurs publics locaux de la réforme du financement de l'apprentissage. Si certaines des lignes budgétaires peuvent être discutées, les crédits de la mission Travail et emploi vont globalement, selon votre rapporteur, dans le sens d'une plus grande efficacité de la politique de l'emploi. * * * Suivant la proposition de son rapporteur, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » du projet de loi de finances pour 2020 ainsi que des articles rattachés. |
La situation de l'emploi Au troisième trimestre 2019, le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) s'élevait selon l'Insee à 8,5 % de la population active, soit un demi-point en dessous du niveau observé un an avant. Toutefois, la tendance à la baisse du taux de chômage demeure fragile, ainsi que le suggère la légère augmentation (+ 0,1 point) observée entre le deuxième et le troisième trimestre. Ce taux correspond à 2,5 millions de chômeurs, auxquels il convient d'ajouter les 1,64 million d'inactifs dans le « halo du chômage » au sens du BIT. Le taux de chômage de longue durée baisse moins vite que le taux global et s'établit à 3,4 % de la population active. Source : Insee La dynamique de baisse du taux de chômage s'observe également au sein de l'Union européenne. Le taux de chômage français demeure toutefois nettement supérieur à la moyenne européenne, qui s'établit, selon les données d'Eurostat, à 6,3 % et très éloigné des pays les plus performants en la matière, notamment des pays comparables comme l'Allemagne (3,1 %) ou le Royaume-Uni (3,6 % 2 ( * ) ). Seuls trois de nos voisins connaissent un taux de chômage supérieur au nôtre. Toutefois, la Grèce (17,3 % 3 ( * ) ), l'Espagne (14,2 %) et dans une moindre mesure l'Italie (10,3 % 4 ( * ) ) ont connu au cours de la première moitié des années 2010 une progression extrêmement forte du chômage et le taux qu'ils connaissent aujourd'hui résulte d'une forte baisse sur la période récente. A l'inverse, le taux de chômage ne s'est réduit en France que de 1,9 point depuis début 2015, soit une évolution comparable à celle de pays qui étaient alors déjà proches du plein emploi. Notre pays se distingue donc en Europe comme ayant à la fois un des taux de chômage les plus élevés et une baisse de ce taux relativement plus lente. Source : Eurostat |
* 1 Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
* 2 Au deuxième trimestre 2019.
* 3 Idem.
* 4 Idem.