N° 142

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2016

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2017 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME II

ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT :
DIPLOMATIE CULTURELLE ET D'INFLUENCE

Par MM. Jacques LEGENDRE et Gaëtan GORCE,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Pierre Raffarin , président ; MM. Christian Cambon, Daniel Reiner, Jacques Gautier, Mmes Nathalie Goulet, Josette Durrieu, Michelle Demessine, MM. Xavier Pintat, Gilbert Roger, Robert Hue, Mme Leila Aïchi , vice-présidents ; M. André Trillard, Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Joël Guerriau, Alain Néri , secrétaires ; MM. Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Pierre Charon, Robert del Picchia, Jean-Paul Émorine, Philippe Esnol, Hubert Falco, Bernard Fournier, Jean-Paul Fournier, Jacques Gillot, Mme Éliane Giraud, MM. Gaëtan Gorce, Alain Gournac, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Pierre Grand, Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, M. Alain Joyandet, Mme Christiane Kammermann, M. Antoine Karam, Mme Bariza Khiari, MM. Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Jeanny Lorgeoux, Claude Malhuret, Jean-Pierre Masseret, Rachel Mazuir, Christian Namy, Claude Nougein, Philippe Paul, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, MM. Cédric Perrin, Yves Pozzo di Borgo, Henri de Raincourt, Alex Türk, Raymond Vall, Bernard Vera .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 4061, 4125 à 4132 et T.A. 833

Sénat : 139 et 140 à 146 (2016-2017)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS POUR AVIS

Les crédits du programme 185, « diplomatie culturelle et d'influence » s'élèvent à 713 millions d'euros , au sein d'une mission « action extérieure de l'État » qui représente, au total, un peu plus de trois milliards d'euros.

Ce budget diminue de 1,2 % en 2017 , après un recul de 3,7 % l'an dernier. La baisse est de - 1,6 % hors titre 2 (crédits de personnel).

Hors mesures de sécurisation des réseaux, qui représentent 14,7 millions d'euros, la baisse est du même ordre que l'an dernier, soit 3,5 %.

1- S'agissant de l'AEFE , dont la subvention représente 55 % du programme, les crédits sont en légère hausse (+0,43 %) pour la première fois depuis 2013. Hors sécurisation, toutefois, le budget de l'AEFE diminue de 13 millions d'euros. Tandis que le réseau demeure attractif, l'État se désengage progressivement, au risque de remettre en cause un modèle fondé sur l'excellence, l'accessibilité aux familles, et qui est l'un des vecteurs majeurs de l'influence française dans le monde. Dans ce contexte, l'AEFE tente de diversifier ses sources de financement, ce qui, aux yeux de vos rapporteurs, ne devrait pas passer par une augmentation supplémentaire des frais de scolarité . L'AEFE reconsidère, par ailleurs, l'équilibre en son sein entre agents expatriés, résidents, et recrutés locaux. Vos rapporteurs estiment qu'une concertation plus étroite avec le ministère de l'éducation nationale est urgente , afin de remédier à la pénurie d'agents détachés , de nombreux postes demeurant non pourvus. Enfin, l'AEFE développe des dispositifs de labélisation , afin d'apporter une reconnaissance à des établissements étrangers ayant fait le choix de la langue française. Cette démarche est intéressante si elle vient compléter et non se substituer au réseau AEFE .

2- S'agissant de l'attractivité de l'enseignement supérieur et de la recherche , la subvention à Campus France est stable, tandis que les crédits des bourses continuent de baisser (-4,4 %) . Les ambitions sont grandes (doubler le nombre d'étudiants étrangers en France d'ici à 2020), au regard des moyens mis en oeuvre, alors que les crédits des bourses ont déjà diminué de 40 % de 2004 à 2014 et que le nombre de boursiers du gouvernement français est passé de 15 400 en 2010 à 12 900 en 2015. Même là où l'enseignement supérieur français est traditionnellement attractif (en Afrique), l'influence de la France est soumise à une forte concurrence régionale. Certains pays du Moyen-Orient proposent désormais des bourses d'études vers des universités islamiques. En Europe, les moyens déployés par l'Allemagne pour attirer des étudiants étrangers sont sans commune mesure avec ceux mis en oeuvre par la France.

3- Les crédits de l'Institut français poursuivent leur baisse (- 3 %). Entre 2011 et 2017, les crédits totaux de l'Institut français ont diminué de 25 % et ses crédits d'intervention de 34 %. L'Institut français pourra-t-il, dans ces conditions, continuer à mener des actions dans la plupart des secteurs culturels, ou devra-t-il procéder à des choix ? Vos rapporteurs estiment que la double tutelle de l'Institut français justifierait désormais une contribution accrue au titre de la Mission « Culture » . Par ailleurs, les dotations pour opérations aux établissements à autonomie financière diminuent de près de 5 %. Enfin, la politique immobilière du ministère a conduit à céder plusieurs bâtiments symboliques de l'influence française. Vos rapporteurs souhaiteraient que puissent être évalués l'intérêt et la faisabilité d'accroître les pratiques commerciales au sein du réseau culturel (boutiques, restaurants, stratégies offensives de vente de cours de langue...), susceptibles de drainer non seulement des financements mais aussi de nouveaux publics .

4- Enfin, vos rapporteurs approuvent l'orientation dynamique de la politique de promotion du tourisme , dans un contexte économique préoccupant. Les financements devraient toutefois en être clarifiés , s'agissant notamment des annonces les plus récentes. Pour des raisons de sincérité budgétaire, il conviendrait que les financements supplémentaires alloués au tourisme apparaissent en projet de loi de finances.

La France a inventé la diplomatie culturelle au cours du dix-neuvième siècle. Toutes les grandes puissances ont aujourd'hui compris l'importance du champ de l'influence culturelle , dans un monde marqué par une compétition économique intense, et une concurrence entre valeurs non moins aiguë. Dans ce contexte, vos rapporteurs estiment que la diplomatie culturelle doit demeurer une priorité forte et qu'elle doit conserver sa spécificité , au-delà de ses synergies utiles avec la diplomatie économique.

Sous le bénéfice de ces observations, vos rapporteurs pour avis ont souhaité émettre un avis défavorable sur les crédits inscrits dans le PLF 2017 pour le programme 185.

À l'issue de sa réunion du mercredi 16 novembre 2016, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat », M. Jacques Legendre ainsi que les membres du groupe communiste, républicain et citoyen votant contre et M. Gaëtan Gorce s'abstenant.

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