B. SI UNE ACTION RÉSOLUE SUR LE SUJET SE FAISAIT ATTENDRE, LE PLAN DE RÉSORPTION DES NUITÉES HÔTELIÈRES N'APPARAÎT PAS À LA HAUTEUR DE L'ENJEU

1. Bien que ses limites soient identifiées, le recours à l'hôtel continue de progresser
a) Les limites du recours à l'hôtel sont connues

Le recours à l'hôtel illustre bien la manière dont la réponse à l'urgence obère tout effort en faveur d'une prise en charge plus durable et plus globale des personnes sans abri.

L'hôtel est une solution plus économique, au moins à court terme 6 ( * ) , et immédiatement mobilisable. C'est pourquoi les acteurs de l'hébergement y ont fréquemment recours, faute de mieux, notamment pour mettre à l'abri des familles avec enfants. Toutefois, l'hébergement à l'hôtel ne permet pas un accompagnement social des personnes concernées, qui ne bénéficient souvent en outre d'aucune aide alimentaire. Par ailleurs, la nécessité de parer à l'urgence oblige les opérateurs à avoir recours à des établissements dont la qualité est souvent loin d'être optimale. L'ensemble des acteurs s'accordent donc pour considérer que le recours à l'hôtel n'est pas une solution satisfaisante.

b) Le recours à l'hôtel continue de progresser

Pourtant, le nombre de nuitées hôtelières a augmenté de plus de 130 % entre 2010 et 2014, alors que le nombre de places en centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) restait stable. En Ile-de-France, on estime que 15 % du parc hôtelier est consacré à l'accueil de sans-abris. Alors que ce mode d'hébergement doit être temporaire, le manque de solutions alternatives conduit de nombreuses familles à être hébergées à l'hôtel dans la durée, avec souvent des changements fréquents d'établissement, ce qui a des conséquences néfastes documentées sur la scolarisation des enfants ou l'accès à l'emploi.

Source : Projet annuel de performance annexé au PLF et réponses de la DGCS au questionnaire du rapporteur

2. Le plan de résorption annoncé par le Gouvernement va dans le bon sens mais semble largement insuffisant.
a) Un plan qui marque une volonté bienvenue de s'attaquer au problème de l'hébergement à l'hôtel

Le Gouvernement a annoncé, le 3 février 2015, un plan trisannuel de réduction des nuitées hôtelières. Votre rapporteur se réjouit que ce problème soit enfin pris à bras le corps.

Ce plan, qui a fait l'objet d'une circulaire interministérielle du 20 février 2015 7 ( * ) , prévoit le redéploiement en trois ans des crédits correspondant au financement de 10 000 nuitées hôtelières, soit 66 millions d'euros, afin de créer 13 000 places alternatives, dont 9 000 en intermédiation locative, 1 500 en logement adapté (pensions de famille, maisons-relais) et 2 500 dans des centres d'hébergements dédiés aux familles. En parallèle, l'accompagnement proposé aux personnes hébergées à l'hôtel, notamment en matière d'aide alimentaire, doit être renforcé.

Par ailleurs, 38,7 millions d'euros doivent être consacrés à la prise en charge de 6 000 demandeurs d'asile actuellement hébergés à l'hôtel.

b) Un plan qui n'apparaît néanmoins pas à la hauteur des enjeux

Toutefois, votre rapporteur a de sérieux doutes quant au caractère réaliste du plan proposé, et peu sur son caractère insuffisant.

Premièrement, le plan annoncé par le Gouvernement semble d'avantage de nature à ralentir la progression du recours à l'hôtel que de permettre d'amorcer un recul. En effet, alors qu'on a constaté une progression de 130 %, soit près de 20 000 nuitées supplémentaires, en quatre ans, l'objectif d'une réduction de 10 000 nuitées annuelles en trois ans semble largement insuffisant.

Ce plan semble en outre peu réaliste dans la mesure où il est prévu de réduire le nombre de nuitées hôtelières en augmentant le nombre de logements adaptés. Or, le recours à l'hôtel explose précisément en raison de l'insuffisance des crédits consacrés au logement adapté et de l'impossibilité de mobiliser ces solutions rapidement. Au demeurant, une partie des crédits destinés au logement adapté est réaffectée chaque année vers l'urgence et notamment l'hôtel pour faire face aux besoins immédiats (voir supra ). Enfin, les publics les plus fragiles, et notamment les familles en situation irrégulière, qui représentent une part importante du public accueilli à l'hôtel, ne peuvent être éligibles au logement adapté.

L'effort doit donc être accentué, et l'objectif de faire de l'hôtel un mode de prise en charge réellement subsidiaire et exceptionnel prendra du temps.


* 6 Le coût moyen par jour d'une place à l'hôtel est de 17,08 euros, contre 24 euros pour une place en CHU, 42,65 euros et pour une place en CHRS.

* 7 Circulaire interministérielle n° DGCS/SD1/BUSH/DHIP/DIHAL/DGEF/2015/51 du 20 février 2015 relative à la substitution de dispositifs alternatifs aux nuitées hôtelières et à l'amélioration de la prise en charge à l'hôtel.

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