IV. LA MONTÉE EN PUISSANCE DU SECRÉTARIAT GÉNÉRAL POUR LA MODERNISATION DE L'ACTION PUBLIQUE
Créé par le décret n° 2012-1198 du 30 octobre 2012, le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP) est sous l'autorité du Premier ministre et rattaché au secrétariat général du Gouvernement . Il a pour mission principale de coordonner au niveau interministériel les travaux des administrations « en vue d'évaluer et de moderniser l'action publique, afin d'améliorer le service rendu aux citoyens et aux usagers et de contribuer à la bonne gestion des deniers publics ». En application du décret n° 2012-1199 du 30 octobre 2012, il assure le secrétariat du comité interministériel pour la modernisation de l'action publique (CIMAP) 33 ( * ) , présidé par le Premier ministre.
Lors de sa création, le SGMAP a regroupé, pour l'essentiel, l'ancienne direction générale de la modernisation de l'État (DGME), rattachée au ministère du budget et chargée de piloter la révision générale des politiques publiques (RGPP), devenue direction interministérielle pour la modernisation de l'action publique (DIMAP), la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication de l'État (DISIC) et la mission « Etalab », chargée de la création d'un portail unique interministériel des données publiques. D'autres services interviennent en appui des missions de ces trois structures.
Le SGMAP dispose à ce jour de 176 emplois, dont l'essentiel à la DISIC.
Décret n° 2012-1198 du 30 octobre 2012
Article 1 er Il est créé un secrétariat général pour la modernisation de l'action publique placé sous l'autorité du Premier ministre et rattaché au secrétaire général du Gouvernement. Le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique comprend : - la direction interministérielle pour la modernisation de l'action publique ; - la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication de l'État. Sont directement rattachés au secrétaire général les services chargés de faciliter et de coordonner : - la mise à disposition des données publiques en vue de développer leur réutilisation ; - les travaux relatifs au fonctionnement des services déconcentrés de l'État. Le secrétaire général pour la modernisation de l'action publique est assisté d'un adjoint qui a rang de directeur. Article 2 I. Le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique coordonne, favorise et soutient, au niveau interministériel, les travaux conduits par les administrations en vue d'évaluer et de moderniser l'action publique, afin d'améliorer le service rendu aux citoyens et aux usagers et de contribuer à la bonne gestion des deniers publics. II. Il veille à ce que les systèmes d'information et de communication concourent à améliorer la qualité, l'efficacité, l'efficience et la fiabilité du service rendu et à simplifier les relations entre les usagers et les administrations de l'État, et entre celles-ci et les autres autorités administratives. III. Il coordonne l'action des services de l'État et de ses établissements publics pour faciliter la réutilisation la plus large possible de leurs informations publiques. Il administre le portail unique interministériel destiné à rassembler et à mettre à disposition librement l'ensemble des informations publiques de l'État, de ses établissements publics et, si elles le souhaitent, des collectivités territoriales et des personnes de droit public ou de droit privé chargées d'une mission de service public. Il coordonne les travaux interministériels relatifs à l'amélioration du fonctionnement des services déconcentrés de l'État. IV. Il veille à l'association des agents publics, des usagers et des partenaires de l'administration à l'ensemble de ces démarches. Article 4 Pour l'animation des travaux interministériels de modernisation de l'action publique, le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique travaille notamment avec les secrétaires généraux de ministères et les corps d'inspection et de contrôle des ministères. |
Le rattachement du SGMAP au Premier ministre - et non au ministère des finances comme l'était la DGME - lui donne une autorité interministérielle plus importante et une plus grande légitimité, de nature à conforter l'efficacité de son action. Un tel rattachement témoigne également du fait que son objectif premier n'est pas la recherche d'économies - reproche fréquemment adressé à la RGPP -, mais la simplification et la modernisation des procédures publiques, au profit des collectivités territoriales, des entreprises et des citoyens. La recherche d'économies est une conséquence de la politique de modernisation, mais elle n'est plus sa finalité , illustrant ainsi la différence de méthode entre la modernisation de l'action publique (MAP) et la RGPP.
Entendue par votre rapporteur, Mme Laure de la Bretèche, nommée secrétaire générale pour la modernisation de l'action publique en juillet 2014, a estimé, au vu des évaluations qui en ont été faites en 2012, que la méthode de la RGPP avait montré ses limites, en raison d'une focalisation excessive sur la recherche d'économies budgétaires au détriment d'une vision d'ensemble et de la cohérence de l'action administrative, sans recherche de l'adhésion des agents concernés. Si les résultats budgétaires de la RGPP ont été inférieurs à ce qui avait été envisagé, son bilan comporte toutefois des aspects positifs en termes d'organisation de l'administration de l'État, par exemple le renforcement de l'interministérialité, le suivi de l'encadrement supérieur ou l'évolution des services déconcentrés.
Les difficultés rencontrées par la RGPP ont été prises en compte pour l'organisation de l'exercice actuel de revue des missions de l'État , avec une méthodologie renouvelée associant les parties prenantes dans une logique plus partenariales, y compris les collectivités territoriales et les syndicats. La revue doit s'achever par un séminaire gouvernemental conclusif en février 2015.
En outre, Mme Laure de la Bretèche a indiqué à votre rapporteur que, par rapport à l'expérience de la DGME, le SGMAP a beaucoup réduit le recours aux consultants extérieurs, en l'encadrant de façon assez strict. Il représenterait environ 10 % de l'ensemble des dépenses de l'État en prestations de conseil.
Votre rapporteur ajoute que la désignation en juin 2014 d'un secrétaire d'État dédié aux questions de modernisation et de simplification, rattaché au Premier ministre, M. Thierry Mandon, permet à ces questions de bénéficier d'une incarnation politique utile pour leur avancement.
A. UNE CENTRALISATION COMPLÈTE AUPRÈS DU PREMIER MINISTRE DE LA RESPONSABILITÉ DE LA MODERNISATION DE L'ÉTAT
Au travers des différentes missions et structures ainsi regroupées, la création du SGMAP est l'aboutissement d'une structuration administrative progressive et cohérente des missions de simplification et de modernisation de l'État , centralisée sous la responsabilité du Premier ministre.
Outre le rattachement au Premier ministre, cette organisation présente la caractéristique d'inclure la mission de superviser l'ensemble des systèmes d'information de l'État , mission engagée par la création en 2011 de la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication de l'État (DISIC). Ce processus a été parachevé par le décret n° 2014-879 du 1 er août 2014, qui a placé sous la responsabilité du Premier ministre le « système d'information et de communication de l'État (...) composé de l'ensemble des infrastructures et services logiciels informatiques permettant de collecter, traiter, transmettre et stocker les données sous forme numérique qui concourent aux missions des services de l'État ». Désormais, compte tenu de l'enjeu stratégique que représentent aujourd'hui les outils informatiques et numériques pour l'action publique, l'ensemble des systèmes d'information de l'État est perçu comme un ensemble dont il faut assurer la cohérence et la coordination. Chaque ministère perd l'indépendance qui prévalait largement jusque-là en matière de développement et de maîtrise de ses propres systèmes d'information 34 ( * ) . Selon Mme Laure de la Bretèche, la DISIC pilote les missions les plus prometteuses en matière de réforme de l'État.
Une telle évolution concrétise les décisions du comité interministériel pour la modernisation de l'action publique (CIMAP) du 18 décembre 2013 sur la modernisation et le pilotage des infrastructures informatiques de l'État. Le SGMAP est ainsi chargé de se prononcer sur les projets des ministères dont le budget dépasse 9 millions d'euros, par avis conforme, à l'issue en pratique d'un dialogue collaboratif suivi avec les services compétents des ministères, afin d'apprécier la pertinence des projets et leur mise en oeuvre.
Cette mission de supervision de l'ensemble du système d'information et de communication de l'État s'appuie sur un conseil du système d'information et de communication de l'État, qui permet d'assurer une coordination avec, notamment, les secrétaires généraux des ministères, responsables des systèmes d'information et de communication au sein de chaque ministère. À cet égard, il convient de rappeler que le décret n° 2014-834 du 24 juillet 2014 a fixé le socle minimal des attributions communes à l'ensemble de ces secrétaires généraux, parmi lesquelles figure le développement des systèmes d'information.
Décret n° 2014-879 du 1
er
août 2014
Article 1 er Le système d'information et de communication de l'État est composé de l'ensemble des infrastructures et services logiciels informatiques permettant de collecter, traiter, transmettre et stocker les données sous forme numérique qui concourent aux missions des services de l'État. Il est placé sous la responsabilité du Premier ministre. Cette responsabilité est déléguée de plein droit aux ministres dans la mesure requise pour l'exercice de leurs attributions. N'est toutefois pas déléguée, sauf décision du Premier ministre, la responsabilité des services suivants : 1° Infrastructures informatiques ; 2° Réseaux de communication ; 3° Services numériques d'usage partagé ; 4° Systèmes d'informations relatifs à des fonctions transversales des administrations de l'État. Sont exclus du champ d'application du présent décret les systèmes d'information opérationnels et les systèmes de communication mentionnés à l'article 11 du décret du 2 mai 2006 susvisé ainsi que les systèmes qui font intervenir, nécessitent ou comportent des supports ou informations classifiés. Ces systèmes restent sous la responsabilité des ministres concernés. Article 2 I. - Un conseil du système d'information et de communication de l'État, placé auprès du Premier ministre, se réunit au moins deux fois par an. Outre le directeur interministériel des systèmes d'information et de communication de l'État, qui le préside, il comprend : 1° Les secrétaires généraux des ministères ou leur adjoint ainsi que le directeur des services administratifs et financiers du Premier ministre ; 2° Le directeur général des systèmes d'information et de communication du ministère de la défense ; 3° Le directeur général de l'administration et de la fonction publique ; 4° Le directeur général de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information ; 5° Le directeur du budget ; 6° Le directeur du service des achats de l'État. Chacun des membres désigne un représentant pour siéger au sein d'une formation technique, réunie mensuellement. II. - Le conseil du système d'information et de communication de l'État est consulté sur : 1° La définition et la mise en oeuvre du cadre stratégique commun mentionné au 1° de l'article 3 et à l'article 4 du décret du 21 février 2011 susvisé ; 2° La définition et la mise en oeuvre du cadre commun de gestion de la performance mentionné au 2° de l'article 3 et à l'article 5 du même décret ; 3° Les modalités de mutualisation et de gouvernance résultant des dispositions mentionnées au 3° de l'article 3 et à l'article 6 du même décret. Il peut être consulté sur la mise en oeuvre des dispositions mentionnées au 4° de l'article 3 et à l'article 8 du décret du 21 février 2011 susvisé, ainsi que sur toute question relevant des attributions de la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication de l'État. Article 3 Chaque ministre établit un plan d'investissement couvrant les projets et activités du ministère et des organismes placés sous sa tutelle en matière de systèmes d'information et de communication. Le plan et ses mises à jour sont transmis pour information au directeur interministériel des systèmes d'information et de communication de l'État. Les projets répondant à des caractéristiques, notamment de coût prévisionnel, fixées par arrêté du Premier ministre et du ministre chargé du budget, sont soumis pour avis conforme au directeur interministériel des systèmes d'information et de communication de l'État. L'avis est réputé conforme en l'absence de réponse dans un délai d'un mois après réception du dossier de présentation. Le directeur interministériel des systèmes d'information et de communication de l'État peut, dans ce délai, demander aux administrations concernées tout complément d'information nécessaire à la formation de son avis. Cette demande suspend le délai. Les avis du directeur interministériel des systèmes d'information et de communication de l'État sont adressés au Premier ministre, aux ministres concernés et au ministre chargé du budget. |
Par ailleurs, la DISIC a la responsabilité du réseau interministériel de l'État (RIE), réseau sécurisé qui doit permettre d'assurer la continuité de l'action de l'État en cas de défaillance d'internet. Le RIE doit relier d'ici 2017 les 17 000 sites des services de l'État, en remplacement des réseaux ministériels existants. Il s'agit d'un projet de sécurité des systèmes d'information, décidé en mai 2011 et confirmé en décembre 2012, qui doit également permettre une rationalisation de l'exploitation et des coûts. La maîtrise de ses systèmes informatiques par l'État est un enjeu de souveraineté.
* 33 Selon l'article 1 er du décret n° 2012-1199 du 30 octobre 2012 :
« Le comité interministériel de la modernisation de l'action publique fixe les orientations de la politique gouvernementale tendant à :
« 1° Améliorer l'organisation et le fonctionnement des services et des établissements publics de l'État, et veiller à l'articulation de leurs missions avec celles des autres administrations publiques ; à cette fin il décide et coordonne les évaluations de politiques publiques, notamment partenariales ;
« 2° Améliorer le service rendu par les administrations publiques en prenant mieux en compte les attentes des usagers et partenaires de l'administration, développer la simplification des normes et des procédures et évaluer la qualité du service ;
« 3° Mieux associer les agents publics à la modernisation de l'action publique et à la qualité du service rendu. »
* 34 Les difficultés du système de paie « Louvois », développé par le ministère de la défense, en sont une illustration récente.