B. LA NÉCESSAIRE AMÉLIORATION DE LA SITUATION DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES
1. Une surpopulation carcérale persistante
D'après les informations fournies par le Gouvernement, le ministère de la Justice dispose de 3 023 places dans les huit établissements pénitentiaires répartis dans les cinq départements d'outre-mer. Au 1 er août 2012, 3 719 personnes étaient détenues. Le programme immobilier du ministère de la justice a permis d'améliorer la situation pénitentiaire, en faisant passer le nombre de places opérationnelles de 2 674 au 1 er août 2008 à 3 023 au 1 er août 2012, soit une augmentation de 13,1 % en quatre ans. Dans le même temps, le taux d'occupation global a diminué, passant de 139 % à 123 %, en raison de la stagnation de la population détenue (+ 0,3 % entre 2008 et 2012).
Toutefois, comme le présente le tableau récapitulatif suivant, la surpopulation carcérale couvre en réalité de profondes disparités entre les cinq départements d'outre-mer. Par exemple, le centre pénitentiaire de Majicavo se distingue des autres établissements pénitentiaires par un taux de surpopulation élevé, égal à 229 %. Le taux de surpopulation est également élevé, dans une moindre proportion, dans les établissements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Guyane, s'échelonnant entre 120 % pour le centre pénitentiaire de Remire-Montjoly en Guyane et 167 % pour le centre pénitentiaire Ducos en Martinique. En revanche, les trois centres pénitentiaires de La Réunion ont un taux d'occupation inférieur à 100 % et ne sont donc pas en surpopulation.
Bilan de la situation des établissements pénitentiaires dans les DOM
DOM |
Établissement |
Places opérationnelles |
Effectifs réels |
Taux d'occupation |
Guadeloupe |
CP Baie-Mahault |
504 |
616 |
122% |
MA Basse-Terre |
130 |
186 |
143% |
|
Martinique |
CP Ducos |
569 |
949 |
167% |
Guyane |
CP Remire-Montjoly |
536 |
645 |
120% |
La Réunion |
CP Saint-Denis |
575 |
524 |
91% |
CP Le Port |
516 |
475 |
92% |
|
MA Saint-Pierre |
88 |
84 |
95% |
|
Mayotte |
MA Majicavo |
105 |
240 |
229% |
Source : Statistique mensuelle DAP/PMJ5
2. Une lente amélioration de la politique immobilière
Les établissements pénitentiaires des départements d'outre-mer font l'objet, selon leur état de vétusté et leur situation de surpopulation, de projets de réhabilitations ou de nouvelles constructions, voire d'extensions.
Toutefois, compte-tenu des contraintes budgétaires pesant sur le budget triennal 2013-2015, plusieurs opérations immobilières prévues ont été abandonnées. Le Gouvernement a en effet décidé d'affecter en priorité les crédits d'investissement disponibles à la poursuite des opérations immobilières déjà engagées en mai 2012 et aux mises en conformité les plus urgentes. Ainsi, les opérations immobilières envisagées à Basse-Terre (reconstruction), à Baie-Mahault (extension), à Remire-Montjoly (deuxième extension) et à Saint-Pierre-de-La-Réunion ont été abandonnées.
En Martinique , le centre pénitentiaire Ducos, qui connaît le taux d'occupation le plus élevé de tous les établissements des départements d'outre-mer, après celui de Majicavo, fait l'objet d'une extension de 160 places supplémentaires, qui s'ajouteront aux 569 aujourd'hui existantes, dont la livraison est prévue pour 2014. Le projet s'élève à 36,5 millions d'euros. Les travaux ont commencé fin 2011.
Le centre pénitentiaire de Remire-Montjoly en Guyane , qui fait également face à une situation récurrente de surpopulation, a fait l'objet, en 2008, d'une première extension de 78 places, qui n'a cependant pas permis de diminuer le taux de surpopulation carcérale. C'est pourquoi une seconde extension de 75 places devait être livrée, selon le Gouvernement, en octobre 2012, pour un coût de 5,6 millions d'euros. En revanche, le projet de réaliser 145 places supplémentaires, dont l'appel d'offres était prévu en 2012, a été, pour le moment, abandonné.
S'agissant des établissements pénitentiaires de La Réunion , le remplacement de la maison d'arrêt de Saint-Pierre, dont la livraison était prévue en 2017 pour un coût estimé à 44 millions d'euros, ayant été abandonné, seul le centre de détention du Port fait aujourd'hui l'objet d'une rénovation des quatre ailes de détention. D'après les informations fournies à votre rapporteur, les travaux de la première aile sont en cours d'achèvement et les travaux des deuxième, troisième et quatrième ailes se dérouleront entre 2012 et 2013. La mission de votre commission, qui s'est rendue à La Réunion et à laquelle a participé votre rapporteur, a salué le modèle d'humanisation et de modernisation du centre pénitentiaire de Saint-Denis, doté d'une capacité de 573 places et dont le taux d'occupation est de 91 % en moyenne.
Enfin, la maison d'arrêt de Majicavo à Mayotte fait l'objet d'importants travaux d'extension, afin de porter la capacité d'accueil, aujourd'hui de 105 places, à 267 places. La livraison de ce projet, dont le coût est estimé à 60,4 millions d'euros, est prévue pour le second semestre 2014 et la mise en service au premier semestre 2015. Le rapport de Jean-Pierre Sueur, Christian Cointat et de votre rapporteur a dénoncé le phénomène de surpopulation chronique de cette maison d'arrêt, qui s'élève à 229 %. Cet établissement, dont la capacité théorique est de 105 places, a fait l'objet de deux agrandissements (le premier en 2004 avec vingt-cinq places supplémentaires et le second en 2010 avec quinze places supplémentaires), afin d'endiguer la surpopulation. Pourtant, la persistance de ce phénomène a imposé la mise en oeuvre d'un programme immobilier destiné à réhabiliter la prison et à réaliser une nouvelle extension portant le nombre théorique de places à 261.
Votre rapporteur regrette, comme il l'avait rappelé dans le cadre de son dernier avis budgétaire, que la livraison des projets d'extension, de reconstruction ou de réhabilitation des établissements pénitentiaires des départements d'outre-mer interviennent trop tardivement, alors que les conditions de détention ont atteint un seuil inacceptable dans certains établissements. Par ailleurs, comme en témoigne le projet d'agrandissement de la maison d'arrêt de Majicavo, les extensions programmées suivent avec retard la hausse des peines d'emprisonnement ce qui pose le problème de l'exécution des peines de prison prononcées par les tribunaux. Face à cette difficulté, le transfèrement de certains détenus vers d'autres établissements pénitentiaires ultramarins ou hexagonaux est organisé, notamment du centre pénitentiaire de Ducos vers la métropole ou de la maison d'arrêt de Majicavo vers le centre pénitentiaire de Saint-Denis-de-La-Réunion.