N° 150
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013
Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 novembre 2012 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2013 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME IV
AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT
Par MM. Jean-Claude PEYRONNET et Christian CAMBON,
Sénateurs.
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Louis Carrère , président ; MM. Christian Cambon, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Mme Josette Durrieu, MM. Jacques Gautier, Robert Hue, Jean-Claude Peyronnet, Xavier Pintat , Yves Pozzo di Borgo, Daniel Reiner, vice-présidents ; Mmes Leila Aïchi, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Gilbert Roger , André Trillard, secrétaires ; M. Pierre André, Mme Kalliopi Ango Ela, MM. Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Pierre Bernard-Reymond, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Pierre Charon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Jean-Pierre Demerliat, Mme Michelle Demessine, MM. André Dulait, Hubert Falco, Jean-Paul Fournier, Pierre Frogier, Jacques Gillot, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Gournac, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Gérard Larcher, Robert Laufoaulu, Jeanny Lorgeoux, Rachel Mazuir, Christian Namy, Alain Néri, Jean-Marc Pastor, Philippe Paul, Bernard Piras, Christian Poncelet, Roland Povinelli, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Claude Requier, Richard Tuheiava, André Vallini. |
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 235 , 251 à 258 et T.A. 38
Sénat : 147 et 148 (annexe n° 4 ) (2012-2013)
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
L'actualité internationale nous donne tous les jours des raisons de penser que la problématique du développement, d'un développement harmonieux et durable sur l'ensemble de la planète, est aujourd'hui au coeur des enjeux internationaux.
Regardons ce qui se passe sur la rive sud de l'Europe. L'issue des Printemps arabes dépendra en grande partie du développement de l'emploi dans les pays du Maghreb.
Plus au sud, comment ne pas voir que le sous-développement du Sahel est à l'origine des déboires que l'on connaît.
Ailleurs, dans les pays émergents, se joueront, selon les caractéristiques de leur modèle de développement dans dix ans, non seulement une grande partie de la lutte contre le réchauffement climatique, mais aussi, sans doute, l'avenir de notre modèle social européen.
Dans un monde interdépendant, la question sociale, comme on disait au 19 ème siècle, les enjeux environnementaux ou les risques sanitaires ont une dimension planétaire. On assiste aujourd'hui à une convergence entre les questions de développement et les questions de préservation des équilibres sociaux et environnementaux de la planète. C'est une des conclusions fortes du sommet de RIO + 20 qui a lancé le débat sur les objectifs du développement durable.
Dans ce contexte, notre politique de coopération au développement prend tout son sens, mais un sens renouvelé.
Notre politique de développement doit en effet s'adapter à un monde en mouvement, aux équilibres politiques changeants.
Sur le long terme, le cadre dans lequel on a, pendant les décennies qui ont suivi la décolonisation, pensé la coopération a volé en éclats.
La notion de « pays en développement » recouvre aujourd'hui des réalités, sans commune mesure, que vous vous trouviez à Bamako ou à Shanghai, à Nouakchott ou à Brasilia. Le développement des pays émergents bouleverse la donne. Mais même en Afrique, l'extrême pauvreté côtoie une classe moyenne en plein développement, qui porte l'avenir de ce continent.
La notion même de développement est également en train de changer avec la prise en compte des biens publics mondiaux.
A plus court terme, la politique de coopération au développement fait l'objet de nombreuses interrogations.
Dans un contexte de dégradation sans précédent des finances publiques, certains de nos concitoyens considèrent que nous n'avons plus les moyens de cette solidarité et que nous devons nous concentrer sur le territoire national en difficulté. Le niveau des déficits publics donne ainsi une actualité à un débat ancien, qu'en son temps Raymond Cartier avait résumé dans la formule connue : « la Corrèze avant le Zambèze ? »
D'autres, ici ou là, jugent qu'il s'agit d'un instrument utile et finalement bon marché de prévention pour contribuer à sécuriser l'environnement international de notre pays, estimant qu'il faut sans doute mieux « prévenir que guérir » ou être contraint d'intervenir militairement.
D'autres y voient un outil d'influence et de rayonnement de la France, puissance moyenne, certes, mais à vocation planétaire. Et ce fut longtemps l'honneur de la France que d'être à la tête de la lutte contre le sous-développement, d'agir sans relâche pour l'égalité d'accès aux droits fondamentaux, à la vie, à la santé, à l'éducation, qu'on soit né à Paris, à Sidi Bouzid ou à Mopti.
Certains, enfin, pensent qu'il est essentiel de jeter les bases de politiques publiques à l'échelle mondiale, si l'on veut maîtriser les effets de la mondialisation, aussi bien dans le domaine de la santé, de la biodiversité que de l'environnement.
Si on laisse de côté les objectifs, pour analyser concrètement les moyens mis en oeuvre, force est de constater que les évaluations dont nous disposons, tant celles de la Cour des comptes, que celles du Cabinet Ernst and Young, dressent un tableau assez sévère de notre outil de coopération.
Ces évaluations dont notre commission a débattu lors d'une Table ronde le 3 octobre dernier nous décrivent en creux une politique marquée par des effets d'annonce et des promesses sans lendemain, un éclatement administratif qui semble nuire à son efficience, une évaluation de son impact assez incertaine. Cette situation semble empêcher le déploiement d'une stratégie cohérente, de long terme, permettant la synergie des ambitions, des moyens, et d'une structure de pilotage politique et administratif adaptée.
Ce tableau sombre mérite d'être nuancé, à bien des égards, nous pouvons être fiers de ce que font les services de coopération et les agences de l'AFD sur le terrain.
Mais, avec les moyens financiers qui sont les nôtres, c'est-à-dire en diminution, il semble que nous pouvons faire mieux. Plus que jamais l'augmentation des déficits publics et la diminution des marges de manoeuvre budgétaire de la France imposent à la politique de coopération de faire preuve d'efficacité.
C'est à l'aune de ce critère, qui commande de rechercher à chaque fois des réponses adaptées, avec des modalités d'intervention variables selon les secteurs et selon les pays, que vos rapporteurs ont souhaité examiner ce budget.
Ils sont bien conscients que ce dernier doit contribuer à sa manière à la réduction du déficit public. Ce n'est donc pas au regard du montant des financements alloués, mais à celui de la cohérence entre les objectifs fixés et les moyens alloués et du souci d'améliorer l'efficacité, l'efficience et la transparence de cette politique que vos rapporteurs ont abordé ce budget.