II. POUR UNE POLITIQUE EUROPÉENNE DE DÉVELOPPEMENT RÉNOVÉE

Parce qu'elle est convaincue de l'opportunité et de la valeur ajoutée d'une action européenne en matière de développement, la France a fait le choix d'inscrire sa politique d'aide au développement dans un cadre européen et a toujours oeuvré pour l'affirmation de cette compétence de l'Union.

Le quart de son aide publique au développement transite par le canal européen et la Commission européenne met aujourd'hui en oeuvre près de la moitié de ses dons programmables.

L'importance de cet engagement financier suscite toutefois aujourd'hui certaines interrogations.

Vos rapporteurs constatent qu'à Paris nombre d'interlocuteurs se plaignent de la rigidité des opérateurs européens dont les programmations semblent nous échapper.

Ils ont pu constater que, dans les pays partenaires, la représentation de la commission se comporte parfois comme un 28 e bailleur de fonds sans lien avec les Etats membres qui forment l'Union.

La situation est inégale selon les pays et les organismes. Vos rapporteurs ont constaté au Mali qu'une programmation conjointe entre les principaux Etats européens et la Commission se mettait en place.

Votre commission a la conviction que l'action de l'Union doit permettre de catalyser les actions bilatérales des Etats membres.

A. L'UNION DOIT ÊTRE LE CADRE D'UNE COMPLÉMENTARITÉ ET D'UNE SYNERGIE DES POLITIQUES DE COOPÉRATION

La politique européenne de développement est une compétence partagée entre la Commission et les Etats membres. Cela signifie que les Etats membres continuent d'intervenir à titre bilatéral parallèlement à leur action commune mise en oeuvre par la Commission européenne.

Si l'Europe, entendue comme l'addition des Etats membres et de l'Union européenne, est le premier bailleur au monde, représentant près de 60% de l'aide publique au développement, son aide est loin de former un tout cohérent.

Le défi est aujourd'hui, dans une période où les budgets sont comptés,, de conjuguer les actions bilatérales des 27 Etats membres avec celle de l'Union afin de répondre aux défis du développement le plus efficacement possible.

Vos rapporteurs souhaitent que le gouvernement saisisse l'opportunité offerte par la mise en oeuvre du traité de Lisbonne et de la négociation des prochaines perspectives financières pour convaincre ses partenaires européens de revoir l'organisation et la stratégie européenne de développement dans le sens d'une plus grande synergie.

Ils soulignent que le traité consacre pour la première fois l'objectif de réduire la pauvreté et inscrit cet objectif au coeur de l'action étrangère de l'Union.

Le traité précise que l'Union et ses Etats membres « coordonnent leurs politiques en matière de coopération au développement et se concertent sur leurs programmes d'aide, y compris dans les organisations internationales et lors des conférences internationales ». Il confie enfin à la Commission le soin de prendre toute initiative utile pour promouvoir cette coordination.

Le traité de Lisbonne doit permettre un pilotage plus stratégique de la politique européenne de développement tout en préservant le rôle du Commissaire au développement.

La France, qui est particulièrement impliquée à titre bilatéral en Afrique subsaharienne, doit être attentive à ce que le dialogue politique mené par l'UE couvre aussi les questions de développement, dans une approche plus incitative et plus différenciée.

La nouvelle ambition portée par le traité de Lisbonne en matière de relations extérieures implique d'actualiser le Consensus européen sur le développement, au service d'une action commune efficace et visible sur la scène internationale.

Les cinq dernières années ont permis de progresser dans la constitution d'une politique européenne de développement plus intégrée. Deux textes fondamentaux ont été adoptés : le Consensus européen (2005) et le Code de conduite sur la complémentarité et la division du travail (2007). Le Consensus constitue une avancée majeure dans l'affirmation d'une stratégie européenne en s'adressant pour la première fois aux politiques bilatérales et à la politique de l'Union en matière de coopération au développement.

Ce texte fondateur ne fixe toutefois que des principes généraux peu opérationnels et ne comporte pas de véritable dispositif de suivi.

Le Consensus européen demande à être précisé et élargi dans son contenu. De portée très générale, il ne définit pas réellement de secteurs de concentration pour l'aide de l'Union et ne prend pas en compte un certain nombre de défis globaux tels que le climat.

Le nouveau Consensus pourrait se décliner en stratégies sectorielles et régionales partagées pour répondre aux défis qui peuvent dépasser l'échelle des politiques bilatérales et nécessitent une action consolidée et coordonnée.

Pour être efficaces, ces stratégies devraient pouvoir faire l'objet d'un suivi et d'une évaluation régulière.

Dans le Consensus européen pour le développement, les Etats membres ont fait le choix de spécialiser l'action de l'Union dans six secteurs. Pourtant, la programmation du 10 e FED a largement démontré que l'aide de l'UE était encore trop dispersée.

Il est essentiel que les Etats membres identifient plus clairement les secteurs dans lesquels la Commission possède de véritables avantages comparatifs ainsi que des instruments et de l'expertise dont elle dispose. Des spécialisations fortes existent s'agissant de l'aide budgétaire, de la gouvernance ou des infrastructures.

Des domaines d'avantages comparatifs comme le soutien à l'intégration régionale ne demandent qu'à être exploités. Mais la Commission intervient dans bien d'autres secteurs. Une plus grande spécialisation et une identification plus claire de ses « métiers d'excellence » permettront une division plus optimale des tâches, adaptée aux besoins identifiés par les partenaires dans le cadre de leurs stratégies nationales de lutte contre la pauvreté.

Plus généralement, cette réflexion sur les avantages comparatifs devrait être engagée, de manière systématique dans le cadre d'une programmation conjointe, et de manière systématique, par tous les bailleurs européens comme gage de pertinence des efforts en matière de division du travail.

Le processus actuel de division sectorielle du travail, mené notamment dans le cadre de l'Initiative Fast-Track, devrait être systématisé pour aboutir à des stratégies communes des bailleurs européens et s'acheminer vers une programmation conjointe dans les pays en développement .

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