EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 8 Octroi de la personnalité morale et de l'autonomie financière à la Commission de régulation de l'énergie

Commentaire : le présent article additionnel propose d'octroyer la personnalité morale et l'autonomie financière à la Commission de régulation de l'énergie (CRE).

I. L'IMPORTANCE CRUCIALE DU RÉGULATEUR DANS LE CADRE DE LA NOME

Comme votre rapporteur pour avis l'a souligné dans l'exposé général du présent rapport, le régulateur aura un rôle encore plus déterminant qu'aujourd'hui dans le cadre de la nouvelle organisation du marché de l'électricité.

Ainsi, après une période de transition, il lui reviendra d'émettre des propositions qui auront vocation à devenir des décisions 9 ( * ) pour fixer :

- d'une part, le prix de l'électricité cédée par EDF à ses concurrents dans le cadre de l'Arenh ;

- d'autre part, le montant des tarifs réglementés de vente (en particulier, à compter de 2016, celui des tarifs « bleus » dont les consommateurs domestiques pourront encore bénéficier).

C'est également au régulateur qu'il reviendra de déterminer la part de l'électricité « Arenh » qui reviendra à chaque fournisseur.

Il s'agit donc d'enjeux industriels et économiques considérables, qui nécessitent que chaque acteur ait confiance dans l'arbitre .

Or, dans ce cas précis, l'Etat ne suscite pas spontanément une telle confiance, au vu de l'ambiguïté de sa position, à la fois responsable ultime de l'intérêt des consommateurs, mais aussi premier actionnaire de l'opérateur historique (ainsi que de son principal concurrent actuel).

En outre, au vu de la grande sensibilité communautaire de l'ensemble du dossier du marché de l'électricité, il pourrait être précieux de disposer d'un arbitre fort et réellement indépendant de l'Etat, garant de la rigueur technique des décisions prises.

C'est pourquoi votre rapporteur pour avis estime nécessaire de renforcer concrètement la position et l'indépendance de la CRE dans le cadre du présent projet de loi .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. L'OCTROI DE LA PERSONNALITÉ MORALE À LA CRE

A cette fin, le présent article additionnel propose, en premier lieu, d'apporter une modification à l'article 28 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée afin d'octroyer la personnalité morale à la CRE .

Un tel octroi permettrait de couper le lien organique entre l'Etat et le régulateur. Il s'inscrit également dans le droit fil du droit communautaire , en particulier de l'article 35 de la directive 2009/72/CE et de l'article 39 de la directive 2009/73/CE (« troisième paquet énergie ») aux termes desquels l'autorité de régulation doit être « juridiquement distincte et fonctionnellement indépendante de toute autre entité publique ou privée ».

Il apporterait, en outre, une véritable autonomie au régulateur français, notamment pour ester en justice.

B. L'AUTONOMIE FINANCIÈRE DU RÉGULATEUR

Le présent article propose également de doter la CRE de ressources propres , ce mode de financement devant remplacer l'octroi annuel de crédits budgétaire au sein de la mission « Economie » (de l'ordre de 20 millions d'euros).

En pratique, il est proposé d'insérer un article 1609 quatertricies au sein du code général des impôts, aux termes duquel, à compter du 1 er janvier 2011, les gestionnaires de réseaux de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel , à l'exception des distributeurs non nationalisés 10 ( * ) , seraient assujettis à une contribution acquittée chaque année au profit de la CRE . En effet, le régulateur joue un rôle de « prestataire de service » pour ces opérateurs, qui se trouvent en situation de monopole de fait.

L'assiette de la contribution serait constituée par le chiffre d'affaires comptable lié à l'accès des tiers aux réseaux de transport et de distribution de gaz et d'électricité de l'année civile précédente.

Le taux de la contribution serait fixé par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'énergie et de l'économie, pris après l'avis du collège de la CRE. Il devrait être compris dans une fourchette allant de 0,11 % à 0,14 % , ce qui permettrait au régulateur de retrouver des financements correspondant à ses actuels crédits budgétaires.

La contribution serait déclarée par les redevables sur une déclaration dont le modèle serait fixé par l'administration. Elle serait déposée dans les délais prévus en matière de taxe sur le chiffre d'affaires. Elle serait liquidée annuellement par les redevables, en accompagnement du dépôt de la déclaration relative au dernier mois de l'année civile. Ce paiement annuel, qui correspond à la réalité de la gestion du régulateur, nécessiterait d'inscrire, une dernière fois, en 2011, des crédits budgétaires pour financer la CRE au sein du projet de loi de finances.

La contribution serait contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d'affaires. Les réclamations seraient présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes.

*

* *

La commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire n'ayant pas intégré cette proposition dans le texte issu de ses travaux, celle-ci sera présentée au Sénat, sous forme d'amendement au présent projet de loi lors de son examen en séance publique.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.


* 9 Sauf en cas d'opposition formelle, dans les trois mois, du ministre chargé de l'économie ou du ministre chargé de l'énergie.

* 10 Ces distributeurs sont visés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page